« Ce livre est une contribution à l’histoire de la nuit vécue de l’intérieur (sinon intérieure), sourdement bruissante des soupirs de l’amour, des pages tournées du livre de chevet, du crissement des plumes, des tapotis de l’ordinateur, du murmure des rêveurs, du miaulement des chats, des pleurs des enfants, des cris des femmes battues, des victimes réelles ou supposées, des crimes de minuit, des gémissements et de la toux des malades, du râle des mourants. Les bruits de la chambre composent une étrange musique. »
La chambre, entre privé et public, n’a ni la même fonction, ni la même géographie, dans le temps et l’espace, la chambre n’est pas un lieu neutre, elle est aussi socialement sexuée.
Cet ouvrage contribue à jeter un peu de lumière sur ces lieux si souvent obscurs, pour essayer de comprendre les mutations et probablement la non unicité de ce que nous appelons aujourd’hui une chambre. « Les retrouver, c’est parcourir à rebours, remonter les voies multiples qui confluaient vers la chambre. Ses fondements familiaux et sociétaux, spirituels et matériels, se sont effrités ou effondrés. »
L’auteure puise largement dans la littérature du XIXème et du début du XXème siècle. Et quelque soit l’admiration que je maintiens pour La recherche du temps perdu de Marcel Proust, je trouve dommageable de ne pas prioriser la littérature la plus contemporaine. Les regards nostalgiques forment une manière de romantisme, de survalorisation culturelle d’un temps passé, qui n’aide pas à se projeter en avant, dans le futur à construire.
« Il y a bien d’autres portes à ouvrir, d’autres chambres à inventorier, dont chacune aurait pu faire l’objet d’un livre. Celui-ci est une invitation au voyage. »
Michelle Perrot : Histoire de chambres
La librairie du XXIe, Seuil, Paris 2009, 446 pages, 22 euros
Didier Epsztajn