Le premier livre qui tourne à gauche
Les modes d’emploi mal traduits ont une vraie force poétique, qui déconnecte les usages et les buts et rend leur mystère aux objets les plus simples. Ce petit recueil est une compilation de mode d’emplois imaginaires destinés à des objets improbables et inutilisables, mélangeant une ascendance vaguement soviétique à des technologies plus récentes, le tout sur horizon politique. Ce livre se veut lui-même un tel objet, étrange et peu praticable, à la fois si simple et très complexe, puisqu’il ne se feuillette qu’en le tournant à chaque page d’un quart de tour vers la gauche.
Ni canular, ni poésie désincarnée, il s’agit de parler du communisme en confrontant quelques-uns de ses vestiges, de ses échecs et de ses ambitions à nos propres interrogations et à l’envie persistante de construire, d’organiser et de rêver.
À mi-chemin entre les Shadocks et El Lissitsky, le travail graphique d’Elena Vieillard, bien plus qu’une illustration, est indissociable du texte tant il incarne et donne sa force à ce petit livre-objet à manipuler et à rêvasser, en mouvement perpétuel.
Vers la gauche.
Plusieurs fois, en tout sens, en tous sens, déplier, tourner à gauche, replier.
« Prendre les mesures exactes du problème.
Reporter ce contour sur la carte d’état-major à l’aide
d’un marqueur fin à encre de Chine.
Décrire l’ensemble aussi exactement que possible et publier
cette description (ou son résumé) dans une revue critique.
On peut alors traiter le problème avec les moyens conceptuels
appropriés. »
Rouge, blanc, noir.
Graphismes et textes
« En cas d’urgence, saisir la poignée et tirer sèchement vers le bas. En principe, tout vient. »
Un « contrepoint » graphique et poétique au livre d’Isabelle Garo : Marx et l’invention historique (Editions Syllepse, Paris 2012) Des formes collectives d’innovation et d’invention au cœur du processus historique
Isabelle Garo et Elena Vieillard http://www.elenavieillard.fr/)
Consignes pour un communisme du XXIe siècle. manuel rotatif http://www.elenavieillard.fr/illustrations_villebrule.html
La ville brûle, Paris 2011, 22 pages et 11 illustrations, 10 euros
Didier Epsztajn