Le plus grand bordel de Berlin est soupçonné de trafic d’êtres humains

Les patrons de la maison close Artemis ne sont apparemment pas les « honnêtes gens du commerce du sexe » qu’ils disaient être.

Depuis mercredi 13 avril au soir, les deux patrons de l’Artemis, le plus grand bordel de la capitale allemande, dorment en prison. Ils sont soupçonnés de fraude fiscale, de travail au noir et de traite d’êtres humains. Plusieurs centaines de policiers ont perquisitionné l’établissement, accompagnés d’une équipe d’inspecteurs des impôts, rapporte le quotidien berlinois Der Tagesspiegel.

Ouvert en 2005, quelques mois avant que l’Allemagne n’accueille la Coupe du monde de football et, avec elle, des milliers de touristes masculins amateurs de ballon rond, de bière et de sexe tarifé, cet établissement de 3.000 mètres carrés situé à la périphérie de la ville est rapidement devenu une sorte de bordel-modèle parmi les centaines que compte la capitale allemande, avec ses chambres propres et sécurisées, ses prostituées payées sur facture et régulièrement soumises à des dépistages. L’Artemis est d’ailleurs fréquemment brandi comme un exemple par les défenseurs de la prostitution en Allemagne, légale depuis 2001, et ses publicités s’étalent en grandes lettres roses sur les bus de la compagnie de transports en commun berlinoise.

Les deux patrons de l’établissement, qui aimaient à se présenter comme «les honnêtes gens du commerce du sexe», écrit Der Tagesspiegel, sont soupçonnés d’avoir fait travailler plusieurs prostituées contre leur gré avec la complicité des Hells Angels, un des grands gangs de motards impliqués dans les réseaux de prostitution et de trafic de drogue en Allemagne:

«Plusieurs Hells Angels auraient envoyé leurs prostituées travailler à l’Artemis, ce que savaient les patrons du lieu, en échange de quoi les Hells Angels pouvaient s’y rendre gratuitement et bénéficier de conditions préférentielles en ce qui concerne les services proposés.»

Réseaux criminels

C’est la plainte déposée en 2015 par une prostituée contre son ex-compagnon, un membre des Hells Angels, qui a mis les enquêteurs sur la piste de l’Artemis. Celle-ci avait déclaré qu’il l’avait forcée à se prostituer dans le bordel berlinois à plusieurs reprises.

La perquisition a également permis aux enquêteurs de constater que les prostituées qui travaillaient sur les lieux y effectuaient un faux travail indépendant. Elles étaient tenues de facturer leurs prestations aux patrons de l’établissement mais étaient soumises aux mêmes obligations que si elles avaient été employées –horaires de présence, tarifs des prestations fixés à l’avance, tenue obligatoire– mais sans pouvoir bénéficier des avantages liés au statut de salarié. Le préjudice vis-à-vis des caisses d’assurance maladie et des caisses de retraites allemandes, auprès desquels les patrons de l’Artemis auraient dû verser des cotisations, est estimé à plus de 17,5 millions d’euros. L’établissement a rouvert ses portes depuis jeudi 14 avril mais pourrait prochainement écoper d’une fermeture administrative.

La revue féministe Emma, dont la rédactrice en chef, Alice Schwarzer, mène depuis des années un combat pour l’interdiction de la prostitution en Allemagne, rappelle que le fait que la prostitution soit légale en Allemagne n’empêche pas les réseaux criminels de régenter la plupart des bordels du pays :

«Le fait que les Hells Angels livrent des femmes aux bordels dans de nombreuses villes et contrôlent le marché n’est pas nouveau. Dans le quartier de prostitution de Stuttgart, ils dirigent un “bureau”, assurent la sécurité du “Paradise” situé non loin, dont le propriétaire Jürgen Rudloff était un habitué des plateaux télé avant que son bordel ne fasse l’objet d’une enquête pour trafic d’êtres humains. À Cologne, les Hells Angels encaissaient 100 euros de “loyer de caravane” par nuit aux femmes qui faisaient le trottoir. À Duisbourg, par exemple, les bandes de rockeurs, parmi lesquelles les Hells Angels, se sont réparties les bordels entre elles, sans parler d’Hanovre, le bastion des Hells Angels.»

Repéré par Annabelle Georgen

Slate.fr

http://www.slate.fr/story/116833/maison-close-berlin-trafic-etres-humains

Auteur : entreleslignesentrelesmots

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