- Isabelle Leblic : Moi, française anticolonialiste, je ne suis pas fière ce soir
- Kanaky : et maintenant ?
- CGT : Le colonialisme triomphe, la liberté en berne !
- Kanaky : Sur les résultats de la 3e consultation du 12.12.2021
- Daniel Guerrier : Nouvelle-Calédonie : les colons veulent rester colons. Quel scoop !
- Déclaration des poètes considérant la Kanaky
- Quatre experts électoraux des Nations Unies ont rencontré l’exécutif du Bureau confédéral de l’USTKE
- Vaimu’a Muliav’a : lettre ouverte à Emmanuel Macron
Moi, citoyenne française anticolonialiste, je ne suis pas fière ce soir
L’allocution du président de la république française ce soir, à propos du référendum « tronqué* » qui vient de se dérouler, me remplit de honte.
(* dixit un jeune issu d’une union mixte caldoche-kanak qui expliquait sur NC1e pourquoi il n’irait pas voter)
Le non l’a emporté ! quelle surprise !!! Même les sondages pour une fois ne se seraient pas trompés. Mais il n’y en a pas eus. Pas la peine, le résultat était connu…
En effet, la victoire du non quand seuls les partisans du non ont participé, quelle victoire ! Plus de 56% d’abstention, moins de 44% de participation dans les résultats encore provisoires… 80 938 votants se sont exprimés, 78 517 pour le non et quelques 2 755 oui.
Il n’y a vraiment pas de quoi crier victoire comme le font les Loyalistes et Macron ce soir. C’est un résultat digne d’une république bananière.
Comme si le résultat n’était pas connu d’avance. La seule inconnue était le taux de participation/abstention. Et il est de taille : 56% des électeurs n’ont pas voté (et cela notre président n’en parle pas, cela ne concorde pas avec le ton de son discours !)
Et dans ce discours d’autosatisfaction, Macron, sans honte, surfe sur le vocabulaire kanak, pas n’importe lequel, celui d’Ouvéa… Respect et humilité !
« J’accueille la réponse de la Nouvelle-Calédonie avec respect et humilité. »
Et ces termes scandent son discours… Un véritable mépris pour les Kanak.
Il se fout de nous ! Il se fout des Kanak…
Il est « fier de ce cheminement inédit et pacificateur » avec « trois fois non à l’indépendance » ?
C’est faire fi du fait que les indépendantistes n’ont pas participé et que plus de la moitié des électeurs n’ont pas voté et une petite minorité est quand même allée « oui ».
Il parle d’une période de transition qui « s’ouvre qui est libérée de l’alternative binaire entre le oui et le non », comme si c’en était fini de la revendication d‘indépendance…
Il va consulter pour une « organisation politique conforme aux résultats des 3 consultations »…« mais les discussions à venir ne pourront se limiter aux institutions ». Et donc ?
« les Calédoniennes et Calédoniens ont décidé de rester français, ils l’ont choisi librement », mais pas 56% de l’électorat…qui s’est volontairement abstenu en très grande majorité.
« ce soir, la France est plus belle car la Nouvelle-Calédonie a décidé d’y rester ! »
« La France est fière d’être votre patrie. Elle renouvelle pour vous ce soir son engagement à vous protéger »…
Et le peuple premier, les Kanak, sont-ils fiers ce soir ? Et tous les indépendantistes, quel que soit leur origine, sont-ils fiers ?
Ils ont fait preuve d’un calme sans commune mesure durant le déroulement de ce scrutin honteux, malgré le non-respect du deuil en maintenant ce jour de vote.
Moi, je me sens bafouée, niée. J’ai honte d’appartenir à cette république qui nous ramène tant de temps en arrière, au bon temps du docteur Pons et de son référendum de l’époque. Et il nous parle de cheminement inédit et pacificateur ? Mais tout est en KNC un éternel recommencement.
Il n’y a que la météo qui semble tenir compte de l’état d’esprit qui doit régner dans plus de 50% de l’électorat : « Avis de dépression demain, ça ne s’invente pas » me disait par mail un de mes interlocuteurs indépendantiste en KNC.
Salutations anticoloniales
Isabelle Leblic, 12 décembre, 15h (heure de métropole)
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Kanaky : et maintenant ?
Le troisième referendum prévu par les Accords de Nouméa s’est tenu ce 12 décembre. Tout le monde savait depuis des semaines que la population Kanak, la première concernée, n’y participerait pas. C’est ce qui s’est passé : globalement, le taux de participation a chuté de moitié, passant de 85,69% à 43,9% ; dans la province des Îles, il est de 4,5%, dans celle du Nord de 16,6%. Dans ces conditions, les 96,5% de Non à l’indépendance n’ont guère de sens. Cela n’a pas empêché Macron, dans son discours d’après referendum, de présenter cela comme le « choix de la population de Nouvelle-Calédonie » !
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L’Etat colonial français a renié sa parole : le Premier ministre E. Philippe s’était engagé sur une organisation vers septembre 2022.
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L’Etat colonial français a méprisé les forces associatives, syndicales, politiques et coutumières Kanak qui, depuis des semaines, avaient signalé qu’il n’était pas possible de tenir ce referendum dans des conditions normales. Le peuple Kanak est en période de deuil suite aux nombreux décès dus au Covid et les conditions sanitaires ne permettaient pas l’organisation d’une campagne électorale.
- L’Etat colonial français soutient les partisans de la Kanaky française qui veulent tirer un trait sur les Accords Matignon-Oudinot et de Nouméa. De fait, il provoque le peuple Kanak et va à l’encontre des processus de paix et de décolonisation qui sont liés. Dans son discours d’après referendum, Macron a confirmé.
Le Collectif Solidarité Kanaky, agit en France, au sein de l’Etat colonial. Nous ne parlons pas et ne décidons pas à la place du peuple Kanak. Nous faisons connaître la réalité coloniale, les combats menés en Kanaky et organisons la solidarité internationale. La Lettre ouverte du peuple Kanak au peuple de France, cosignée par le Front de Libération National Kanak et Socialiste (FLNKS), le Comité Stratégique indépendantiste de non-participation (CSINP), le groupe UC-FLNKS et Nationalistes, le groupe, l’Union Nationale pour l’indépendance (UNI), le Parti travailliste (PT), la Dynamique Unitaire Sud (DUS), la Dynamique Autochtone (DA), les Nationalistes, le Sénat coutumier, l’Union Syndicale des Travailleurs Kanak Exploités (UST- KE), est un document particulièrement éclairant.
En maintenant le referendum alors que le contexte ne le permettait pas, l’Etat colonial français n’a rien réglé. Le droit à l’autodétermination du peuple Kanak, colonisé depuis 168 ans, demeure !
Télécharger le bulletin Solidarité Kanaky au format PdF : 2021 – 12 – 12 – Kanaky et maintenant
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Referendum du 12 décembre 2021
43,90% de participation à ce 3ème référendum d’autodétermination.
C’est moins d’un Calédonien sur deux qui s’est rendu aux urnes
C’est un échec pour l’État et les Loyalistes
Par Raphaël Mapou, docteur en droit public
https://ustke.org/actualites/actualite-politique/Analyse-du-3a%EF%BF%BDme-ra%EF%BF%BDfa%EF%BF%BDrendum-dautoda%EF%BF%BDtermination-par-Raphaa%EF%BF%BDl-Mapou-at_1254.html
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Le colonialisme triomphe, la liberté en berne !
Le 12 décembre 2021, en pleine pandémie de Covid-19, alors que les forces indépendantistes avaient demandé le report du troisième référendum fixé dans les accords de Nouméa au second semestre 2022, le gouvernement français, sous la pression des forces anti-indépendantistes, a fait le forcing pour priver la majorité du peuple de Kanaky de son droit à choisir librement son avenir.
Les chiffres sont clairs, seuls 43,88% des électeurs se sont rendus aux urnes, plus de 56% des habitants de la Nouvelle-Calédonie ont fait le choix de ne pas voter. C’est donc plus de la moitié de la population qui, avec les forces indépendantistes, a considéré que ce troisième référendum était un simulacre.
Parmi les votants, 96,49% se sont prononcés contre l’indépendance. Là encore, cela montre bien que seuls les opposants à la fin du colonialisme se sont déplacés dans les bureaux de votes.
Alors que dans les accords de Matignon, signés en 1988, la France s’est engagée à être impartiale et équitable, le résultat est bien la preuve que le Président Macron a déchiré les accords de Matignon et de Nouméa, ramenant la Kanaky 33 ans en arrière.
Le gouvernement s’est clairement placé du côté des non indépendantistes pour des raisons de géostratégie et d’exploitation minière et capitaliste, sans aucune prise en compte des droits humains et de la nécessité de supprimer les discriminations sur le territoire.
Contrairement au discours du 12 décembre du Président, contrairement à la liesse des partisans de droite et d’extrême droite locale comme nationale, les Calédoniens ne se sont pas prononcés pour rester dans la France et pour rejeter l’indépendance. Seuls 4 électeurs sur dix se sont exprimés, la large majorité des calédoniens sont restés sidérés par le manque de respect dont fait preuve la France à leur égard.
Une analyse plus précise des résultats montre que les bureaux de vote situés à Nouméa, peuplés majoritairement de non-kanaks, ou dans les zones huppées de la Kanaky, ont massivement voté, alors que les bureaux de vote du « grand Nouméa », zone périurbaine autour de Nouméa, mélange de cités dégradées et de bidonvilles ainsi que dans les villes et villages où n’habitent que très peu de non-kanaks sont restés vides, la plupart n’atteignant pas 5% de participation.
Ceci est bien la preuve concrète de l’échec de la politique de rééquilibrage prévue dans les accords de Matignon et de Nouméa et du racisme, des discriminations, des ségrégations dont sont victimes les peuples premiers. La fréquentation des bureaux de votes correspond, en tout point, à la répartition ethnique de l’habitat sur le territoire et à la ventilation des classes sociales.
Les rancœurs du peuple kanak sont fortes, et le gouvernement français a choisi, il y a déjà plusieurs mois, de se préparer à réprimer toute contestation en envoyant dans le territoire, non des médecins malgré le sous-équipement sanitaire flagrant, mais 2000 gendarmes, membres du GIGN, policiers du RAID, blindés et hélicoptères en renforts des troupes déjà sur place. Si la situation créée par le gouvernement français devait déboucher sur des violences, le président de la République et son gouvernement en porteraient seuls la responsabilité.
Oui la Kanaky, reste un des 17 territoires dans le monde à décoloniser au sens du Comité spécial de la décolonisation de l’ONU. Non, « la France n’est pas plus belle avec la Nouvelle-Calédonie », comme le déclare Macron. Elle est, au contraire, salie par son refus de mettre un terme, enfin, à son attitude coloniale envers la Kanaky.
La CGT demande que des négociations débutent, au plus tôt, pour sortir de cette voie sans issue dans laquelle s’est engagé le gouvernement français actuel.
La CGT rappelle son engagement constant contre la colonisation.
La CGT soutient les revendications de l’Union Syndicale des Travailleurs Kanaks et des Exploités (USTKE) qui a refusé de participer à la mascarade du troisième référendum et lui renouvelle ses salutations fraternelles.
Montreuil, le 13 décembre 2021
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Kanaky : Sur les résultats de la 3e consultation du 12.12.2021
Les résultats de la 3e consultation de la fin de l’Accord de Nouméa, même si couru d’avance, en raison de notre non-participation, donnent des enseignements politiques que l’Etat Français et ses acolytes qui portent sa VOIX du NON devront assumer.
Tout d’abord, le NON a reculé dans tous les bureaux de vote et justifier cela sur de quelconques pressions est une légende urbaine qui ne tient plus la route aujourd’hui en raison de la présence militaire française surdimensionnée Français à chaque coin de rue. Les images d’urnes vides dans les bureaux de vote de certaines tribus font déjà le tour du monde.
Le comportement de notre jeunesse a été exemplaire, à la hauteur de l’enjeu et démontre qu’elle est digne de confiance face à la provocation. Les consignes ont été respectées même si tout a été fait pour qu’un incident se produise.
Les indépendantistes, regroupés sous la bannière du Comité Stratégique Indépendantiste de Non-Participation – CSI-NP – remercient l’ensemble de l’électorat en faveur de l’indépendance qui n’a pas participé à ce scrutin. La participation a fortement chuté et le taux est passé de 85,6% en 2020 à 43,9% en 2021, soit 41,7 points de moins. Plus de la moitié de l’électorat n’a pas voté. L’électorat anti-indépendantiste s’est vu érodé de 7397 voix par rapport au scrutin du 4 octobre 2020 et ce malgré que :
* les Voix du NON, seuls sur le terrain médiatique, ont mené une campagne fade et n’ont eu cesse de dénigrer notre positionnement en faveur d’une véritable décolonisation ;
* qu’ils ont profité, sous couvert du CSA, pour introduire des clips de campagne à caractère raciste dans la campagne officielle ;
* qu’ils avaient le soutien du gouvernement français ;
* le corps électoral ait augmenté.
Les indépendantistes regroupés sous la bannière du CSI-NP ne reconnaissent pas la légitimité et la validité de ce scrutin qui leur a été confisqué. Ce référendum n’est pas conforme à l’esprit et à la lettre de l’accord de Nouméa, processus de décolonisation et pas conforme également aux résolutions de l’ONU qui a inscrit la NC sur la liste des pays à décoloniser.
Le calendrier Lecornu est dorénavant chamboulé. Le CSI-NP n’y est plus engagé. Les 18 mois annoncés ne sauraient commencer avec un gouvernement Français en fin de mandat. La présence du Ministre des Outremers chez nous, relève plus de la campagne présidentielle que porteuse de solutions d’avenir. Nous ne souhaitons pas nous engager dans cette combine et nous attendons le renouvellement du gouvernement français pour engager de véritables discussions sur l’accession du pays à sa pleine souveraineté.
La voie du dialogue a donc été rompue par l’entêtement d’un gouvernement français incapable de concilier ses intérêts géostratégiques dans le Pacifique et son obligation à décoloniser notre pays.
Le FLNKS, représentant officiel des intérêts du peuple colonisé, porte fièrement sur la scène internationale avec tous les nationalistes, coutumiers, églises et associations le résultat d’un peuple fièrement mobilisé et qui s’est ouvert aux autres, pour partager ensemble nos cultures et le « faire pays ».
Pour rappel enfin, le CSI-NP confirme qu’aucune de nos structures ne rencontrera le Ministre des Outremers actuellement en visite en Kanaky-Nouvelle-Calédonie. Les chiffres des résultats parlent d’eux-mêmes ; nul n’a besoin de les commenter avec le Ministre qui non seulement a désavoué nos réalités culturelles et n’a jamais entendu notre argumentaire afin de maintenir nos liens de discussions et de paix. Le discours d’Emmanuel Macron pour « valider » les résultats ne fait pas honneur à la France. Chacun doit en tirer désormais les conséquences.
Le Comité Stratégique Indépendantiste de Non- Participation (CSI-NP)
http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article60448
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Nouvelle-Calédonie : « Pour nous, ce n’est pas le troisième référendum », réagit Roch Wamytan, président du Congrès
« Nous allons poursuivre le travail et l’indépendance va se faire dans les années qui viennent », assure Roch Wamytan, président (FLNKS) du Congrès de Nouvelle-Calédonie, après la victoire du non.
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Nouvelle-Calédonie :
les colons veulent rester colons. Quel scoop !
Le Non à la souveraineté et à l’indépendance avec 96,5% des suffrages exprimés semble, de prime abord, avoir remporté une victoire aussi écrasante qu’évidente. Devant cette réalité, le peuple kanak se retrouve avec pour partenaires, dans la construction du « destin commun », des individus, tout à leurs affaires et leur train de vie, qui montrent qu’ils n’en ont rien à faire de cet avenir qu’ils disent vouloir construire ensemble. Qui manifestent leur volonté que rien ne change, qui n’ont rien compris, rien appris. Pourtant, fait quasi unique dans le monde de la part d’un peuple colonisé, le peuple kanak et ses représentants peuvent être fiers d’avoir laissé une place dans le processus de décolonisation aux populations implantées de force et de gré, rassemblées sous l’appellation de « victimes de l’Histoire », et ce, dès 1983, lors de la rencontre de Nainville-les-Roches. Par reconnaissance et au nom du partenariat dans le « destin commun » en construction, les « victimes de l’Histoire » partisanes du maintien dans la République française se seraient grandies en refusant de participer à une consultation dont leur principal partenaire allait être absent, ne serait-ce que pour continuer à avancer ensemble.
Malgré les vents mauvais de la « victoire » écrasante des pro-France, le camp indépendantiste à son complet – que je ne réduis pas au seul peuple kanak – n’a peut-être non seulement pas été vaincu, mais a curieusement encore gagné des points avec son mot d’ordre de non-participation quasi suivi à 100% (une abstention de 56,1%, soit multipliée par quatre depuis le référendum de l’an passé, avec, pour mémoire, une population kanak ne représentant environ que 40% de la population totale du Territoire) et dans un calme serein, malgré les nuées du cyclone annoncé sur le Territoire !
Il suffit d’examiner les résultats : Avec 75 720 électeurs ayant choisi le vote du Non à la souveraineté et à l’indépendance (bien que représentant 96,5% des suffrages exprimés), c’est un recul de 5 783 voix du Non par rapport au 2e référendum de 2020 ! En comparant les résultats des 3 référendums, le camp du Non a reculé d’un total cumulé de 3 000 voix en trois ans alors qu’entre les 2 premiers référendums le camp du Oui avait déjà gagné plus de 11 000 voix (ce 3e référendum rendant caduc les résultats du Oui du fait de sa non-participation). On peut raisonnablement en déduire que, si le camp indépendantiste avait choisi la participation dans de bonnes conditions de campagne électorale et de vote il aurait très certainement dépassé les 50% de plusieurs points. Certes un tel résultat aurait eu ses limites – une indépendance « sèche » resterait impensable dans un rapport du type 50/50% à quelques points près ! Mais il aurait eu une dimension symbolique énorme tout en rendant sa dignité au peuple kanak ; d’où, dans un premier réflexe, une évidente tristesse mais qui doit rester froide et déterminée.
Bien sûr le discours de Macron est insupportable dans sa volonté de faire comme si rien n’était et que tout le « peuple calédonien » s’était valablement exprimé, mais nous, anticolonialistes de la métropole, nous nous attendions à autre chose ? Ce gouvernement a renié le « pacte de Matignon » rappelé par Jean-François Merle, ancien conseiller de Michel Rocard, et l’engagement d’Edouard Philippe en 2019 de ne pas laisser interférer les votes du Territoire avec les échéances électorales hexagonales au nom des événements dramatiques qui s’en sont ensuivis par le passé, dont le drame d’Ouvéa dans l’entre-deux tours Mitterrand – Chirac. Certes le président a un jour à Alger déclaré que « le colonialisme est un crime contre l’humanité »,mais peut-être était-ce dû à un coup de soleil momentané ? Tout prouve qu’effectivement la France est déjà entrée en campagne électorale présidentielle, et que c’est à cette aune que le président, en bon racoleur de voix, croit bon de ne pas décevoir électeurs de droite et extrême-droite et de ne surtout pas passer pour le bradeur de « nos colonies ». Les réactions politiques à ce résultat inique (Mélenchon et Poutou mis à part, à ce jour) considérant que le « peuple calédonien » s’est exprimé (de Zemmour, Le Pen, Pécresse, Retailleau, Larcher jusqu’au porte-parole des sénateurs socialistes !), bien qu’attendues, n’en sont pas moins insupportables.
Au premier référendum de 2018, les indépendantistes avaient gagné avec leur score inattendu (du plus du double) quand bien même ils avaient officiellement perdu.
Au deuxième référendum de 2020, les indépendantistes avaient une nouvelle fois gagné en augmentant leur score de plusieurs points prouvant en cela leur capacité d’agréger d’autres populations quand bien même ils avaient officiellement perdu.
A celui-ci, juridiquement légal, mais éthiquement et politiquement nul (comme l’était en son temps le Code de l’indigénat !), c’est-à-dire totalement bidon y compris aux yeux de l’étranger, les indépendantistes ont encore gagné des points en creux (votes du Non en diminution) par leur unité non-violente totale, leur sérénité en prouvant que quoi qu’il arrive ils seront toujours là et qu’aucune issue ne sera trouvée sans eux.
De par leur Coutume, véritable Loi fondamentale de leur société, les Kanak ont la maitrise du temps, y compris du temps long et ils nous apprennent à ne pas trop réagir à l’émotion immédiate, bien compréhensible dans un premier temps mais qu’il faut dépasser. Le camp indépendantiste a choisi de ne plus participer à de quelconques négociations concernant le futur statut jusqu’au résultat de l’élection présidentielle du 24 avril 2022 afin d’être sûr de négocier avec le bon interlocuteur ou la bonne interlocutrice sur une question à ce point de leur avenir. La confiance a été une nouvelle foi piétinée, il faudra du temps mais aussi des gestes forts pour la réinstaurer.
Les « loyalistes » pensent qu’il en est enfin fini des Accords de Matignon et de Nouméa – enfin « purgés » -. Totalement faux ! Il reste la période de transition jusqu’en juin 2023, officiellement prévue par consensus du dernier Comité des signataires en 2019. Ce Comité que le gouvernement Castex n’a plus réuni est légitime dans la réalisation des dits Accords. Ces prochains 18 mois sont une période durant laquelle les Accords, gravés dans le marbre de la Loi organique relevant de la Constitution française – comme l’a rappelé, sur la chaîne Calédonia, Mathias Chauchat, professeur de droit public à l’Université de Nouvelle-Calédoni -, et leur esprit s’appliquent toujours y compris en termes de corps électoral spécial et autres contraintes. Et évidemment les plus ultras – comme on disait à l’époque de la guerre d’Algérie – du camp du Non vont tenter de dénoncer ces aspects sur le plan juridique !)
Alors félicitons le peuple kanak, sa jeunesse, restée calme en dépit du déploiement quasi guerrier de forces de l’ordre, et leurs alliés de toute communauté pour cette nouvelle victoire en dépit du résultat officiel qui ne trompe que ceux et celles qui veulent faire croire le contraire ; disons au gouvernement français : Vous avez l’air malin avec un Caillou dans la chaussure de plus en plus gros qui vous empêche de marcher, d’autant qu’à l’autre pied vous avez aussi les cailloux de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Guyane, de la Polynésie, de Mayotte et autres confettis de l’empire colonial, bien durcis avec le temps. Et puisque que vous l’avez bien cherché, voire provoqué, débrouillez-vous avec la nouvelle situation !
Comme quoi de réelles victoires peuvent se cacher derrière des défaites affichées. Rien n’est joué, une nouvelle page s’ouvre dans un récit commencé en 1853 et ce ne sont pas les plus fanfarons qui y auront les meilleurs rôles. Certains « loyalistes » ont déjà annoncé qu’en cas de victoire de leur camp, ils allaient, pour soit disant donner des gages à leurs amis kanak, proposer une autonomie accrues aux 3 Provinces, tout en peinant à cacher leur véritable projet d’éventuelle partition en pis-aller au cas où (ce qui, pour les anciens, n’est pas sans rappeler la proposition du ministre Alain Peyrefitte d’une partition de l’Algérie en 1961 autour d’un réduit français à Oran, avec toutes les horreurs que cela a fait perdurer, y compris après le cessez-le-feu) ! Seule, parmi les anti-indépendantistes, l’organisation centriste Calédonie Ensemble a clairement déclaré être contre toute idée de partition.
Ami.e.s kanak vous serez toujours là, et nous aussi ! A chaque échéance vous prouvez que rien ne peut se faire sans vous !
Et en mémoire d’Eloi Machoro, « La revendication demeure », ainsi que de Jean-Marie Tjibaou « Le sang des morts demeure vivant ».
Vive la Kanaky – Nouvelle-Calédonie souveraine, dans un éventuel partenariat ou pas, mais librement choisi, demain ou après-demain !
Daniel Guerrier, ancien co-président
de l’Association information et soutien aux droits du peuple kanak
(AISDPK) dans les années 80-90
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Déclaration des poètes considérant la Kanaky
1 – Il existe des inaliénables qu’un référendum, ou qu’une mécanique électorale, ne saurait annuler.
2 – Aucun acte démocratique ne saurait, sans sortir de la Démocratie, légitimer l’annulation des droits fondamentaux concernant les peuples, les individus, ou toutes les formes connues et inconnues du vivant.
3 – Le droit de vote des femmes, le droit à l’avortement ou l’abolition de la peine de mort en France, et bien d’autres fondamentaux, ont été décidés par ordonnances et lois. Autrement, ces avancées majeures auraient été rejetées. Le Droit éclaire la voie par ce qui s’impose à lui.
4 – Dans les pays où ces droits sont encore offusqués démocratiquement, ils n’ont rien perdu de leur légitimité. Ils hurlent toujours.
5 – Un référendum ou une mécanique électorale, encore plus quand ils sont frappés d’aberrations, ne sauraient donc annuler le droit des Peuples premiers à disposer de leurs terres.
6 – La démocratie est fondée sur le respect de ces droits fondamentaux. Elle ne saurait ruiner ces fondations sans se ruiner elle-même. Ils s’imposent à elle comme chant inaugural, vertébrale de maintien.
7 – Les droits fondamentaux forment une Constitution grandiose, valable pour tous. A chacun d’en prendre soin dans ses élévations, sans universel généralisant.
8 – Une situation anthropologique inextricable s’est constituée en terre calédonienne en raison des frappes de la colonisation. Elle s’impose aux droits fondamentaux du Peuple premier mais elle ne saurait lui ordonner. Tout doit s’accorder autour de lui. Et par lui-même.
9 – Alors que le capitalisme n’a plus besoin de ces dominations brutales et archaïques pour asservir les peuples, le gouvernement français n’a pas réussi à dépasser son atavisme colonial. Il a enlaidi la France.
10 – Mais le peuple de France garde sa pleine capacité à regarder le monde, et à laisser le monde vivre en lui. A exister en haute mondialité selon sa plus belle tradition.
11 – La Kanaky est encore à venir.
Que nos salutations l’acclament et que nos vœux l’escortent.
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Quatre experts électoraux des Nations Unies ont rencontré l’exécutif du Bureau confédéral de l’USTKE
A l’invitation des autorités de la République française, la secrétaire générale adjointe de l’ONU, chef du département du Maintien de la paix et des Affaires politiques, et les Affaires électorales, a approuvé le déploiement, du 19 novembre au 15 décembre 2021, d’un groupe d’experts dans le cadre du référendum sur l’accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté prévu le 12 décembre 2021.
L’objectif de cette mission est de suivre le déroulement du processus, puis de faire un rapport au secrétaire général des Nations Unies sur le contexte et les aspects techniques de la consultation. A la différence d’une mission d’observation électorale, le panel d’experts de l’ONU ne fera aucune déclaration publique, ni sur le processus, ni sur les résultats de cette consultation référendaire.
Dirigée par monsieur Tadjoudine Ali-Diabacté, ancien directeur adjoint de la division de l’assistance électorale des Nations Unies, la mission est composée de 15 experts électoraux qui seront déployés dans les trois provinces du pays afin de suivre le déroulement du processus, depuis la campagne électorale jusqu’à l’annonce des résultats. Dans le cadre de leur mandat, les experts de l’ONU vont tenir des rencontres avec les principaux acteurs du processus, notamment : les autorités politiques, administratives et coutumières du pays, ainsi que les forces politiques, les membres des organisations de la société civile, les membres du comité des sages et ceux de la Commission de contrôle des opérations.
C’est dans ce cadre que quatre experts dont le chef du groupe, Tajoudine Ali-Diabacté ont rencontré mercredi après-midi le bureau exécutif de l’USTKE et deux membres du collège honoraire. Les responsables syndicaux de la confédération syndicale ont pu exposer les problématiques liées à la dernière consultation référendaire et leur opposition face au maintien de la date au 12 décembre. Alors que les indépendantistes, à savoir le FLNKS et les diverses mouvances (syndicats, associations, églises) avaient demandé expressément à l’Etat français le report de la 3ème consultation référendaire au second semestre 2023, notamment après les élections présidentielles et législatives françaises. Dans le but de mieux préparer, en tous les cas pour le peuple premier de Kanaky, le peuple Kanak et les communautés océaniennes, le deuil des nombreux décès (280 morts liés au Covid-19/variant Delta en septembre-octobre 2021 dont 80% sont issus de la population Kanak et Océanienne). Et notamment de pratiquer le deuil kanak, un temps est nécessaire pour parfaire le chemin coutumier envers les oncles utérins et les clans alliés aux défunts.
Le déploiement de ce panel d’experts complète l’accompagnement des Nations Unies pour la préparation et la tenue du référendum, prévu par l’Accord de Nouméa de 1998, sur l’accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté. Cette coopération, initiée suite à la requête du gouvernement français adressée au secrétaire général de l’ONU en 2016, s’est notamment matérialisée par le déploiement d’experts de l’ONU de 2016 à 2021 dans les Commissions administratives spéciales pour accompagner le processus de révision des listes électorales.
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Vaimu’a Muliav’a : lettre ouverte à Emmanuel Macron
LETTRE OUVERTE À MONSIEUR EMMANUEL MACRON
PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Le 3e Référendum « gâché » de la Nouvelle-Calédonie
Pourquoi avoir confondu vitesse et précipitation ?
Monsieur le Président,
Ce troisième référendum restera dans les annales de l’histoire de notre pays et de notre région comme un immense gâchis. Un gâchis politique, un gâchis financier, un gâchis en termes d’engagement humain. En somme, un gâchis cyclopéen au regard de l’histoire de notre pays et des hommes et des femmes, d’ici et d’ailleurs, qui ont œuvré pour façonner le visage de cette Nouvelle-Calédonie aujourd’hui balafrée par des considérations qui vont au-delà de notre si beau lagon. Si hier, certains pensaient encore que l’État ne faisait pas de notre pays un enjeu des élections présidentielles et de ses velléités d’influences dans notre continent insulaire, aujourd’hui, au lendemain du 12 décembre 2021 et après la grande ablution du passage de Ruby, seuls ceux qui se complaisent dans la borgnitude ou la cécité volontaire peuvent encore le croire. Et croyez-moi, nos dieux de la Terre et de l’Océan nous garderont bien de la cécité ou de l’amblyopie pour nous préserver du royaume des aveugles où les borgnes règnent seuls.
Ce référendum qui devait clore l’Accord de Nouméa et par conséquent nous amener à tourner une page de notre histoire pour envisager sereinement un avenir partagé avec la France, vient d’être gâché par le gouvernement remanié que vous présidez. En effet, vous avez décidé, contrairement aux gouvernements précédents, de traiter la question binaire de notre archipel à la vitesse des intérêts de l’Etat et non de ceux de notre écosystème, comme si nos intérêts ne pouvaient pas se conjuguer selon une autre temporalité que celle juridique ou politique, celle de la raison ou celle de la dignité humaine. Le gouvernement central vient de mettre en péril un processus de paix, de dialogue, de co-construction et d’altérité, initié il y a des décennies par ses prédécesseurs et la poignée de mains de nos vieux.
Et pourtant, le « Oui mais en même temps », le « Ni ni » incarné par votre mouvement me convenait bien, car il donnait chair à une vision qui me correspondait. Celle qui admettait enfin qu’une bonne idée pouvait être exploitée et ce d’où qu’elle vienne, de la droite, de la gauche ou du centre, y compris des extrêmes, pourvu qu’elle contribue à l’amélioration de la société et à donner corps à une ambition structurante pour tout un peuple. Vos premières interventions à l’international en tant que candidat à la présidentielle, en particulier en Algérie où vous osiez dire une vérité, celle qu’aucun homme politique ou chef d’Etat français n’avait osé formuler clairement « La colonisation est un crime contre l’humanité ! », avait alors conquis le citoyen océanien, calédonien, français et européen que je suis, car il faisait écho au préambule de l’Accord de Nouméa ! Certainement pas, parce que je suis une personne qui cultive la repentance, mais tout simplement parce qu’il est juste et bon qu’à cet étage du pouvoir, un homme exprime un fait. Et puis, quand on a la volonté véritable de solutionner un problème, il faut bien commencer par admettre qu’il y en a un.
La manière avec laquelle votre gouvernement et votre ministre traitent la question de l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie a fini par interroger mon soutien à votre vision. Force est de constater que vous êtes très mal conseillé sur les affaires de notre pays.
Comment croire qu’en ignorant le peuple autochtone et sa demande de report du référendum, que vous alliez positionner notre pays sur un chemin qui nous permettrait de sortir de l’Accord de Nouméa par le haut ?
Comment croire qu’après avoir précipité ce référendum alors qu’il devait être celui de toutes les promesses d’un avenir partagé quel qu’en soit le résultat, que les discussions et les négociations allaient reprendre leur cours normalement ?
En réalité, vous venez de rajouter de la fracture à la fracture du pays. Le grand gagnant de ce dernier et troisième référendum est bel et bien la fracture !
Aujourd’hui, au lendemain de « ce référendum censé stopper la course du soleil du Oui » – pour paraphraser notre vieux, Monsieur Louis-José Barbançon – celui-ci brille plus que jamais au firmament dominant les anciens absolus. Car il faut savoir interpréter le sens du silence plus assourdissant que les joies évanescentes d’une victoire de l’entre soi, l’ennemi même de l’entreprise des Accords de Matignon-Oudinot et de Nouméa qui matérialisent – que cela plaise ou pas – le fondement même de notre société calédonienne et que beaucoup appellent, aujourd’hui, notre prison politique. Mais l’unique manière de sortir de cette prison, était d’en sortir ensemble, pour que les barreaux laissent place à un nouvel horizon. Là était le pari sur l’intelligence que nos vieux – y compris les vôtres – nous avaient assigné : sortir ensemble de ce processus avec le soutien de l’Etat et sa capacité à innover et à reformuler sa relation avec la Nouvelle-Calédonie.
Le troisième référendum n’était pas une urgence. L’urgence, depuis au moins trois ou quatre mandatures locales, était et demeure le quotidien des Calédoniens (loyalistes, indépendantistes, autonomistes, nationalistes, progressistes et apolitiques) toujours français, hier comme aujourd’hui ! La sagesse et la grandeur de la France auraient voulu que vous vous concentriez d’abord sur cet aspect et qu’à l’instar d’un « grand-frère » véritable pour paraphraser notre vieux, Monsieur Elie Poigoune, vous apportiez votre appui technique et financier au gouvernement local pour traiter les problèmes de fond de trente années de gouvernance locale qui s’imposent, désormais, à nous, les citoyens : la qualité du service rendu aux populations, la performance des finances publiques, l’efficience des réformes fiscales, la lutte contre les inégalités sociales et économiques etc… Vous me répondrez que cela relève de la responsabilité des élus locaux qui n’ont pas su gérer au mieux le pays. Je vous rétorquerai que vous avez malheureusement raison et que les responsables de ce pays ont toujours marginalisé sa jeunesse compétente, qualifiée, et ses intellectuels locaux. Mais j’ajouterai aussi que l’Etat partage cette responsabilité. Si tel avait été le cap de votre gouvernement, le chemin aurait été tout autre. Et vous auriez certainement été beaucoup plus digne et efficace dans votre volonté d’éclairer tous les Calédoniens – quelle que soient leurs obédiences politiques – sur l’avenir institutionnel de notre pays, car vous l’auriez fait par des actes. C’est ce dont notre vieux Monsieur Jean-Marie Tjibaou disait « Partager le présent, c’est partager l’avenir ! » et que notre vieux Monsieur Jacques Lafleur avait finalement compris en lui tendant la main, et en initiant l’Accord de Nouméa bien avant 1998, qu’il sanctionnera lors de sa signature par cette formule « Il faut savoir donner, il faut savoir pardonner ! »
Au lieu de s’inscrire dans une continuité d’approche qui fait la grandeur de la France, votre Ministère des Outre-mer a décidé d’adopter une méthode disruptive, véloce et agile. J’avoue l’avoir appréciée au début, car je trouvais intéressante et structurante l’attention particulière et grandissante que vous accordiez aux collectifs que vous avez créé ou renforcé au sein de la société civile calédonienne. J’en ai pourtant rapidement constaté les limites. Tout d’abord, la disruption politique employée était partielle et parcellaire écartant de facto les notions d’inclusion et de transparence pourtant essentielles pour fédérer, et ensuite, cette méthode disruptive ainsi formalisée et mise en œuvre ne pouvait que générer des clivages et de la fracture. En l’espèce, sur ce dossier, votre gouvernement remanié n’a fait que nourrir les clivages existants et en a, en définitive, créé d’autres : Indépendantistes / Loyalistes, Riches / Pauvres, Pro-vax / Anti-vax, Pro-pass / Anti-pass, Jeunes / Anciens, Société Civile / Monde Politique, Bon loyalistes / Mauvais loyalistes…
Finalement, le seul bastion qui a échappé aux effets clivants de cette méthode et qui, bien au contraire, s’en est trouvé renforcé en cette fin de mandature de l’Accord de Nouméa, est bien celui des indépendantistes qui, en réponse et malgré ses divisions internes, a montré son unité à travers l’abstention massive et silencieuse de ses militants Semper Fidelis. A ceux-ci, se sont joints dans l’abstention et le vote nul ou blanc un nombre significatif d’autres calédoniens, qui se sont sentis comme eux floués par le non-respect de la parole de l’Etat sur la date du référendum, et humiliés par ces dessins animés caricaturaux de campagne pour un Non qui a, en vérité, reculé une fois de plus. Le contenu discriminatoire, disgracieux de ces clips montre bien qu’il y a, encore, des gens ici, qui n’ont pas compris qu’ils résidaient d’abord sur une terre kanak océanienne métissée appelée communément la Nouvelle-Calédonie, avant d’être un territoire français et européen.
Pourquoi ne pas avoir reporté ce troisième et dernier référendum, écartant ainsi d’un revers de la main le peuple autochtone de ce pays, celui-là même qui est à l’origine de la volonté d’indépendance, et par conséquent à l’origine des Accords de Matignon-Oudinot et de Nouméa qui ont permis, avec l’appui de l’Etat, à bon nombre de jeunes kanak, océaniens, calédoniens de toutes origines, de classes défavorisées et modestes de se former, de transcender leur condition sociale… qui ont permis de développer les industries locales, le « Made In le Pays » pour paraphraser le vieux, Monsieur Tjibaou et bien d’autres avancées…
La Calédonité – affirmée au grand jour par l’acte de raison et, il faut l’avouer, de foi du vieux, Monsieur Lafleur – et l’Océanité – née de la vision de mon vieux, Monsieur Kalepo Muliava, l’éveilleur des consciences de sa communauté et véritable artisan du réveil des liens océaniens entre les kanak et les Uvea mo Futunadans les années 1980 – auraient dû dicter aux dirigeants et cadres loyalistes calédoniens de toutes communautés confondues, une main tendue à leurs adversaires et également concitoyens calédoniens. Car c’est avec eux qu’ils partagent leur quotidien, et non avec l’Etat.
Nous aurions dû, nous, l’autre moitié du peuple calédonien qui vivons parmi et avec eux « marquer notre respect collectif » face au deuil des familles kanak et océaniennes qui est « un élément essentiel de l’équilibre civilisationnel océanien » pour reprendre les termes de mon grand-frère, Monsieur Christophe Sand. Le constat est amer et montre bien que nous avons encore du chemin à faire pour que toutes les cultures apprennent à mieux se connaître, à déconstruire les résidus de ce que notre héritage asymétrique produit encore, pour mieux se respecter, se réparer.
C’est, je crois, ce que Monsieur Michel Rocard avait compris et su éveiller chez nos anciens, puis Monsieur Lionel Jospin en son temps, à des moments cruciaux de notre histoire. Cet esprit politique original a permis de poser les fondations d’un peuple calédonien. C’est assurément ce que j’aurai souhaité que votre gouvernement éveille chez les partis politique en responsabilité de notre pays : car le dialogue et la paix sont la seule issue. Malheureusement, force est de constater que l’esprit politique des élus locaux et nationaux en responsabilité, celui du don de soi pour l’intérêt commun n’est plus, du moins chez la plupart. Au lieu de cela, vos équipes, jeunes et intrépides et résolument tournées vers l’avenir, nous ramènent, finalement, aux heures les plus sombres de notre passé commun en convoquant la vision anachronique de Monsieur Bernard Pons. La suite, on la connait tous, j’avais 12 ans !
A mon sens, la Nouvelle-Calédonie représente pour la France – celle des droits de l’homme, celle libératrice de ses vieux démons, celle progressiste et innovante, celle qui a permis à des citoyens de seconde voire de troisième zone comme moi d’accéder à un enseignement de qualité, celle de Voltaire, du général de Gaulle, de Camus, de Veil, de Sartre, de Césaire… en définitive, la France dans ce qu’elle a de meilleur et de superbe – une opportunité d’écrire une nouvelle page de son roman national, une opportunité d’innover et de réussir une décolonisation en son sein, tout en renforçant plus que jamais sa position en Océanie. La situation de division actuelle de la Nouvelle-Calédonie doit ainsi interroger l’Etat sur la politique de la France en Océanie.
Pourquoi en sommes-nous arrivés là, après trente années d’audace et d’innovation politique ? Parce que nos politiques en responsabilité ont de tout temps cultivé la culture de la dépendance vis-à-vis de l’Etat. Comme si se prendre en main et assumer des responsabilités au niveau local et régional, étaient incompatibles avec le maintien de notre pays dans la France. Et il faut bien se rendre à l’évidence, l’Etat y voyait aussi son intérêt.
Plus en substance, l’Etat a failli au développement d’un régionalisme appuyé au sein de ses collectivités océaniennes, en ne favorisant pas les échanges, les synergies culturelles, économiques, sanitaires pour renforcer sa position. Il ne s’est pas appuyé sur ses collectivités pour déployer sa stratégie géopolitique dans une région où nous, Océaniens, sommes ancrés depuis plus de 3 000 ans.
L’appel au « partage des responsabilités » lancé à l’endroit des grandes familles calédoniennes dans les années 1980 par Monsieur Jean-Marie Tjibaou pour faire pays – et auquel avait répondu courageusement Monsieur Jacques Lafleur « Je ressentais que toute une partie de la société calédonienne était séparée de l’autre et que mon rôle, c’était d’essayer de faire bouger les choses. Et de ces populations, faire une population calédonienne » – est toujours d’actualité.
Cet appel est, désormais, adressé à l’endroit de l’Etat. Celui-ci doit absolument comprendre que nous, les Océaniens, les Calédoniens, comme ceux des trois autres Océans, nous faisons partie de l’avenir de la France. Nous pourrions le demeurer encore longtemps, pourvu que l’Etat cesse de nous considérer comme les passagers d’un destin qu’il dessinerait seul, sans prendre en compte nos intérêts. Celui de notre développement local, de nos aspirations légitimes à décider pour nous-même, nos cultures, nos réalités, nos dignités, celui de notre vision de notre intégration dans nos régions, où nous sommes ancrés depuis des générations pour certains et des millénaires pour la majorité d’entre nous.
Là est le défi du siècle pour la République française au cours des décennies qui s’annoncent, dans nos contrées ou le concept d’assimilation est totalement absurde. La République doit plus que jamais être inclusive et transparente sur tous les sujets – y compris sur les relations internationales – car ce qui se joue localement après trois référendum en trois années, n’est que la vague qui cache l’Océan. L’exemple de la Nouvelle-Calédonie et l’affaire « avortée » des sous-marins est là pour le rappeler et inspirer l’Etat dans la reformulation de sa relation aux DROM-COM avant qu’il ne soit trop tard. Et ce chantier d’envergure pourrait commencer par la Nouvelle-Calédonie.
Être français aujourd’hui ne peut plus être une injonction, car l’époque ne s’y prête plus. Le temps des Tarzan et des Jane est révolu, tout simplement parce qu’il n’y a plus de Cheetah pour justifier et porter seuls les parts d’ombres de notre histoire commune. Et en écho à la question référendaire posée aux Calédoniens de notre époque et qui peine à trouver une véritable réponse massive et légitime, je vous adresse la mienne qui trotte dans l’esprit de beaucoup d’entre nous : « Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie demeure au sein de la France ? » Si oui, il vous appartient de créer les conditions pour que tout un chacun veuille renouveler ce pacte avec l’Etat de manière durable et pérenne. Mais pour cela, comme le martèle notre grand-frère Christophe Sand, depuis une bonne décennie, « La Nouvelle-Calédonie a besoin de plusieurs gestes forts, dont celui de solder symboliquement, entre l’Etat français et les Kanaks, la période coloniale ». Et en parallèle, il faut que les « non clients » soient votre cible : les laissés pour compte, les marginalisés kanak et non kanak, les 50 000 personnes qui se noient en dessous du seuil de pauvreté, et les milliers d’autres qui surnagent à la limite du seuil de pauvreté, les sans voix… Il est essentiel qu’ils soient la priorité de toute votre attention afin de guérir cette schizophrénie sociétale qui tétanise, paralyse, et qui handicape toutes projections.
Les récents travaux innovants menés au niveau national qui ont abouti à la création du Grand Paris, devraient amener l’Etat à les étendre hors du territoire métropolitain, et à s’inspirer du concept du Tout-Monde de notre vieux, Monsieur Edouard Glissant, qui rappelle que « La conjonction des histoires des peuples propose aux poètes d’aujourd’hui une façon nouvelle. La mondialité, si elle se vérifie dans les oppressions et les exploitations des faibles par les puissants, se devine aussi et se vit par les poétiques, loin de toute généralisation. » L’Etat doit appréhender, dès lors qu’on se trouve hors du sol hexagonal, la France comme un pays-Monde, où comme le soulignait notre vieux, Monsieur Patrick Chamoiseau, expliquant la pensée glissantienne, « nous avons depuis fort longtemps quitté les anciens absolus », car nous devons assumer et vivre pleinement les multiples identités qui habitent tout un chacun dans un monde globalisé et globalisant qui est devenu, en réalité, un village.
Je voudrais marquer un temps pour saluer la dignité de mes compatriotes, ceux qui ont opté pour une non-participation pacifique dans le respect des autres qui ont décidé de se rendre aux urnes dans la confidentialité de ce devoir citoyen. Je salue également ma communauté de Uvea mo Futuna qui a su, encore une fois, exprimer son vote ou s’abstenir dans le calme et l’humilité de l’instant. Et ce, malgré la blessure toujours ouverte de l’Ave Maria au Mont-Dore, où les loyalistes et l’Etat ont abandonné à leur sort leurs fidèles soutiens expulsés après des mois de conflit ouvert avec la tribu kanak de Saint-Louis.
Dans le fond, je suis certain que ceux qui ont décidé d’aller voter l’ont fait avec une pensée pour ceux qui se sont abstenus, peut-être un ami d’enfance, un collègue de travail, un membre de sa propre famille, et réciproquement. Je sais que les gens du pays, dont les intérêts moraux sont véritablement ancrés dans cette terre, comprennent le sens de mes mots.
J’ai foi en mes anciens et en mes contemporains, aux vieux indépendantistes et kanak dont les ancêtres ont subi des spoliations de terres, des déplacements permanents de population, des décapitations et des déportations de leurs grands chefs, des expositions de leurs clans dans des zoos vendus à d’autres zoos en Europe… aux vieux loyalistes y compris kanak, ouvriers océaniens, travailleurs asiatiques sous contrat, descendants d’aventuriers, de bagnards, de déportés kabyles, politiques, qui ont été chassés de leurs propriétés par la revendication indépendantiste kanak, laissant derrière eux lieux de vie, lieux d’inhumation, mémoires et souvenirs. Beaucoup d’entre eux vivent toujours dans le Nord avec et parmi les indépendantistes. Malgré toutes ces blessures non cicatrisées, ces meurtrissures de l’âme, ils ont ensemble déjà fait le choix – comme par le passé – de partager leur présent et leur avenir.
J’entends déjà des voix s’élever pour crier leur exaspération, pour dire que « tout ça est derrière nous », que « nous les jeunes, la génération des accords, nous n’avons pas connu tout ça », qu’il « faut renouveler la classe politique, les vieux, nos vieux sont dépassés », et qu’il « faut nous tourner vers l’avenir ». Oui, je l’entends et je souscris mais comme pour tout, il y a un chemin et une temporalité en Océanie comme partout dans le monde où les sociétés dites « traditionnelles » côtoient la modernité. Mais dans cette partie du monde, nos vieux, notre passé font partie de notre avenir. Et donc, nécessairement pour envisager un avenir serein, il faut impérativement guérir les meurtrissures du passé. Et là où certains manient la montre, d’autres détiennent le temps.
Monsieur le Président de la République, vous devez certainement vous interroger sur la raison d’une telle démarche et d’une si longue lettre ouverte, alors que je suis un homme politique calédonien ?
Tout simplement parce que je suis un des membres des 16° et 17° gouvernements de la Nouvelle-Calédonie, secrétaire général du parti L’Eveil Océanien présidé par mon frère Monsieur Milakulo Tukumuli, qui fait et défait les majorités, et que vos équipes ont réduit à un parti communautaire et négligeable.
Le Ministère des Outre-mer semble plus enclin à interagir avec les partis calédoniens historiques et les recompositions d’agrégats de partis dit majoritaires ainsi qu’avec la société civile, en minimisant L’Eveil Océanien. L’unique mouvement fondé par des jeunes calédoniens d’origine wallisienne et futunienne issus de la société civile à avoir percé lors des élections provinciales de 2019, et à bousculer l’échiquier politique calédonien.
J’ai donc décidé, en ce 18 décembre 2021, de m’adresser directement à vous, en tant que simple citoyen.
À vous qui avez montré à toute une génération de jeunes qu’il est possible de s’imposer en politique, je voulais livrer mon sentiment sur ce qu’il vient de se passer dans mon pays. À vous qui m’avez inspiré, je souhaitais vous délivrer ma vision de ce qui aurait pu être fait, et de ce qui pourrait être entrepris dans les années à venir si les Français décidaient de vous confier à nouveau les rênes de la nation, et par conséquent la possibilité de reformuler le roman national français.
En attendant, je porte l’espoir que l’année nouvelle que nous nous apprêtons à accueillir, remplisse nos poumons et nos esprits d’un souffle de vie libérateur de toute tentative d’entre soi, ennemi de l’édification d’un Nous inclusif et englobant, frappé de gestes et d’actes déterminés et déterminants pour sortir de cette impasse.
Un souffle nouveau qui doit faire émerger un statut innovant et générer un modèle de société s’appuyant sur le développement humain, la relance économique soutenable, la justice sociale et équitable. Mais pour faire sens, ce modèle calédonien devra nécessairement s’inscrire dans le temps long, et impérativement germer sur un terreau culturel partagé dans lequel l’interculturalité doit être la source qui l’élève. Car comme le dit si justement, mon grand-frère, Monsieur Emmanuel Kasarherou, « On ne peut pas construire de communauté humaine simplement sur l’économie. L’humanité c’est d’abord la culture ». C’est bien de communauté humaine dont il s’agit, mais surtout de décolonisation des esprits et des relations à une terre kanak océanienne blessée par les affres d’une histoire à regarder en face, les yeux bien ouverts ! À assumer in fine à la face d’une époque nouvelle, de glissement générationnel qu’il nous faut tous observer avec humilité et respect.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, mes salutations océaniennes et calédoniennes
distinguées.
Vaimu’a Muliava
En complément possible :
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Alain Castan : Pourquoi ne veulent-ils pas lâcher la Kanaky – Nouvelle Calédonie ?
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https://entreleslignesentrelesmots.blog/2021/11/16/des-colonise-es-en-lutte-pour-leur-independance/
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CGT : Laisser la Kanaky choisir librement et démocratiquement son avenir !
Kanaky-Nouvelle Calédonie : Le gouvernement français organise une consultation d’autodétermination sans le peuple colonisé
Kanaky : Motion adoptée à l’unanimité au congrès populaire des indépendantistes
La Kanaky-Nouvelle Calédonie, dernier bastion de la colonisation en acte.
Alors que les accords de 1988 et 1998 prévoyaient une évolution progressive et pacifique vers la souveraineté pleine et entière des Kanaks sur leur terres ancestrales, l’Etat Français, en ne respectant aucunement l’engagement d’Edouard Philippe, alors premier Ministre d’organiser le référendum en septembre 2022, contre toute logique du droit, s’engage dans un processus de reniement des promesses de ses prédécesseurs.
Le référendum aura lieu, malgré l’avis parfaitement argumenté de la communauté Kanak et de l’ensemble des forces indépendantistes, dans l’irrespect des coutumes et des rites du deuil nécessaires après les nombreux décès dus à la pandémie qui comme ailleurs sévit sur l’archipel.
Comment un tel déni des réalités est-il encore possible ? Si ce n’est le besoin de suivre la tendance actuelle du retour au mythe de la France éternelle, patrie des droits de l’homme. Laquelle, dès le premier Empire, s’est donnée pour objectif de devenir une puissance coloniale avec l’appropriation des terres d’autrui. La résurgence de ce mythe pernicieux est une véritable calamité moderne à laquelle nombre de contemporains s’accrochent en vouant un culte sans limite à Napoléon Bonaparte, à l’origine, on le sait, du rétablissement de l’esclavage.
Or, de toute évidence, en fonction du droit des peuples premiers, les Kanaks pourraient déclarer de manière unilatérale l’indépendance ; ils ont, au contraire, accepté de participer aux négociations, par le dialogue avec ceux mal nommés « loyalistes » afin d’acheminer lentement l’archipel vers la souveraineté. En vain. La volonté de ceux qui se sont installés sur les terres Kanaks, comme la candidate LR l’a explicitement proclamé, se résume en un mot toujours le même : la Kanaky doit rester française.
Il n’est pas possible de laisser, sans protester, se dérouler le scrutin de dimanche qui fait croire à la réalité de la démocratie.
De quelle démocratie s’agit-il ? En démocratie réelle, et avant le vote, il serait nécessaire de préparer le débat vers un langage commun, avec les mêmes références, le même sens donné aux mots dans le respect du processus lent de la réflexion collective. Or, il n’en est rien. La culture, les coutumes, de l’autre dominé, sont bafouées par l’Etat français qui impose ses pratiques de démocratie dite représentative dans le déni de la parole donnée.
Tout autre devrait être l’attitude du gouvernement français s’il voulait se libérer de l’esprit colonial.
Plus que jamais aujourd’hui, en contexte de crise écologique grave, il est question de revenir au dialogue entre nature et culture que les spécialistes disent depuis longtemps indissociables. C’est la leçon que nous donne précisément le peuple Kanak qui n’a cessé de vouloir protéger la terre de ses ancêtres en luttant contre l’exploitation éhontée des richesses naturelles.
Se tourner vers un dialogue des cultures différentes, apprendre de l’autre afin de renouer le fil défait entre nature et culture, est et devrait être notre objectif premier.
Ce n’est pas la radicalité des positions des Kanaks qui fait peur. Mais plutôt leur différence et leur singularité que l’on craint contagieuse.
Michèle Riot-Sarcey, historienne, membre du CA de Copernic
https://www.fondation-copernic.org/la-kanaky-nouvelle-caledonie-dernier-bastion-de-la-colonisation-en-acte/
Le colonialisme, c’est fini. On n’a pas à demander aux Canaques s’ils veulent l’indépendance, ils sont chez eux depuis toujours. Ils sont prêts à gérer leur pays. Ensuite, les Canaques indépendants pourront avec les autres Calédoniens régler, avec ceux qui voudront rester, l’avenir de leur pays. Ensemble, ils pouront alors décider démocratiquement quels liens, pour le profit de tous, ils voudront ou non maintenir avec la France, avec leurs voisins ou tout autre Etat. C’est cela la décolonisation et non des entourloupettes « démocratiques » pour que tout soit comme avant.