La fête grandissante prendra tout le monde à son bord

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Bleue. Une ville de l’exil et du tourisme, les chemins invisibles d’hier et d’aujourd’hui empruntés par des citoyen·nes – exilé·es ou réfugié·es entre autres – de divers pays. Un train, « Le train qui fait Paris-Nice m’emporte dans une fiction dont je ne connais pas la trame. Je vais la découvrir de l’intérieur ».

Les pages de Pinar Selek se sont mêlées à mes propres souvenirs de ballades dans cette citée. De la promenade de bord de mer aux hauteurs de Cimiez, de la colline du Chateau au vieux port, des traces architecturales d’hier aux musées d’aujourd’hui…

Bleue, « J’ai fini par regarder ses yeux. Ils étaient noirs. Tout noirs », une ville et des histoires cocasses, des chemins « empruntés par les Italiens, les Russes et les Anglais, suivi par les Arméniens, les Arabes, les Juifs, les peuples des Balkans et l’Afrique », des zinzin·es (Gouel, Alex, Manu, Azucena), un amour mouvant et clandestin, « Un amour qui chemine secrètement. L’amour qui fait vriller les recoins cachés du corps », le parc de la Coulée verte et la couverture du Paillon, les immigré·es et le passé gravé dans la vie de tous les jours, la gare toujours mal-nommée Adolphe Thiers, le vent et les fleurs de l’autre coté de la frontière, la mémoire des catastrophes et des génocides, les chansons silencieuses, les souvenirs de luttes et de pays en rébellion, le sourire de la coquelicotte, les bancs d’où l’on fixe les vagues…

L’autrice tisse un paysage plein de lucioles et un vent plein de tendresse permet au cerf-volant de l’espérance de dessiner des arabesques pleinement humaines.

Des souvenirs des « disparitions, grèves et aubergines braisées », des insurgés libertaires, des trains et les gares de Paris et de Nice – il convient de ne pas oublier la gare Riquier -, des chiens, une ville transformée en prison, des expressions du vrai, des souvenirs familiaux et d’un père aux innombrables ennemis, « C’est-à-dire, lui et ses potes étaient les ennemis de tout le monde : des femmes qui parlent ouvertement de sexualité, des athées, des Juifs, des Gitans, des migrants, mais encore plus des Noirs et des musulmans, puis… des communistes, de ceux qui n’aiment pas l’argent, l’autorité et Dieu », les fureurs de la haine…

Mais aussi l’écume, les sourires, les routes et l’amour, les frontières traversées, les clins d’oeil, le soleil, les caresses, l’agora et cette fois avec « une autre formule qui ne marque pas de frontière », les mosaïques et les rendez-vous au bord de la mer…

Dans cette première partie, Pinar Selek nous a invité sur « des routes, des galeries, des contes ». Elle interroge, en seconde partie, la « fin de l’histoire ? ».

Et cela commence cette fois par une plage – La Réserve – un lieu de rencontres, des rencarts clandestins, de beaux sourires, le souvenir du port lorsqu’il y avait encore « les poissons, les langoustines et les crevettes », les chaussures rouges, des larmes et les yeux rouges comme les chaussures, le rouge et « bleue », l’« héroïne de mon conte de fée », les étoiles filantes, la route tracée « après tant de nuits sans sommeil, de matin égarés », contre l’enfermement dans un voyage permanent…

L’histoire n’est pas sans fin, elle ne peut se figer au désespoir des réactionnaires de tous poils, il y a toujours un demain. Les anciennes gares, le départ de Nice, les espoirs crus, la vie en pause, « Je ne me rendais pas compte du temps qui passe une fois noyée dans le fil des nouvelles. Réussir à vendre ton papier en réunion ou en face du chef. Concevoir des articles sans saveur, comme des œufs de poule en batterie. Ne pouvoir écouter personne trop longtemps. Se fondre parmi les monstres qui jouent des coudes pour décider de quoi les gens parleront demain », les nouvelles chansons, les airs d’illégalité, « Je suis entouré de Paranos, depuis que je suis à Nice, je vis avec des Zinzins qui jouent à cache-cache alors que personne ne les cherche », les vents politiques et les lieux de « notre utopie », la mort dans un miroir, l’arrosage de nos racines, les retrouvailles…

« Le monde s’était bien assombri ces dernières années…

Mais la poésie trouvait tout de même sa voie et les fourmis zinzines se multipliaient. Elles étaient aussi les abeilles laissant partout du miel, les chiens rebelles, les cigales malignes, les poissons peintres et les belles personnes ».

Le titre de cette note est emprunté à la dernière page du livre.

Pinar Selek : Azucena ou Les fourmis zinzines

Des femmes – Antoinette Fouque, Paris 2022, 216 pages, 14 euros

https://www.desfemmes.fr/litterature/azucena-ou-les-fourmis-zinzines/

Didier Epsztajn

***

Pinar Selek, politique et poétique, rencontres et dédicaces

Pinar Selek présente et dédicace Azucena ou Les fourmis zinzines. Une fiction tonique, drôle, politique et poétique, sur les enjeux de notre société, publiée aux Éditions des femmes-Antoinette Fouque, le 7 avril 2022.

« Nice, comme les autres villes, ne fait pas entendre sa voix tant qu’on ne s’est pas blotti contre sa poitrine pour pleurer au moins une fois, tant qu’on ne s’est pas couché dans ses bras. Par bonheur, les Zinzins avaient été nombreux à l’entendre : Gouel le Chanteur des rues, Alex le Prince des poubelles, Manu la fondatrice des Paranos et Azucena la Zinzine aux chaussures rouges, celle qui vient de se présenter comme “Bleue”. » P. S

Née en 1971 à Istanbul, Pinar Selek est sociologue, militante féministe et antimilitariste. Elle est victime de la répression que subissent les intellectuels en Turquie et est emprisonnée en 1998. Elle vit désormais en exil en France où elle a publié plusieurs livres, fictions, contes, essais et articles.

Jeudi 28 avril 2022 19h

La maison des Passages à Lyon

44 Rue Saint-Georges, 69005 Lyon, avec la Librairie Terre des livres

Vendredi 13 mai à 18h

Festival poésie Les enchanteurs à Saint-Étienne

Rencontre à la librairie Lune et l’Autre 19 rue Pierre Bérard

Vendredi 20 et samedi 21 mai 2022

à Narbonne informations à venir

Vendredi 3 au dimanche 5 juin

Festival du livre à Nice

Jardin Albert 1er et autres lieux dans la ville

de 10h à 19h entrée libre

Jeudi 9 juin

Librairie Massena à Nice

55 Rue Gioffredo

https://www.desfemmes.fr/pinar-selek-politique-et-poetique-rencontres-et-dedicaces/

***

Interview avec la féministe Pinar Selek, symbole de la Turquie qui résiste !, interview-avec-la-feministe-pinar-selek-symbole-de-la-turquie-qui-resiste/

Ce n’était qu’un super début !ce-netait-quun-super-debut/

Je suis une Cerf-volant à Niceje-suis-une-cerf-volant-a-nice/

Lettre à Frédérique Vidal, lettre-a-frederique-vidal/

20 ans après ma libérationpinar-selek-20-ans-apres-ma-liberation/

Le cri des prisons en Turquiele-cri-des-prisons-en-turquie/

Affaire d’esclavage ordinaire en Franceaffaire-desclavage-ordinaire-en-france/

La poésie gagnerala-poesie-gagnera/

La manifestation des Lucioles à Briançonla-manifestation-des-lucioles-a-briancon/

L’insolente. Dialogues avec Pinar Selekje-sais-quil-ne-faut-pas-eteindre-le-feu/

8 mars à Tunis : continuer la révolution !8-mars-a-tunis-continuer-la-revolution/

Ce 8 mars 2019… Grève internationale des femmes ?ce-8-mars-2019-greve-internationale-des-femmes/

Pinar Selek : Loin de chez moi… mais jusqu’où ? Récit sur l’exil de Pinar Selekmon-regard-porte-desormais-plus-loin/

Lettre de Pinar Seleklettre-de-pinar-selek/

Les possibilités et les effets de convergences des mouvements contestataires, sous la répression. Les mobilisations au nom de groupes sociaux opprimés sur la base du genre, de l’orientation sexuelle ou de l’appartenance ethnique, en Turquie, innovations-contestatrices-changement-dechelle-et-un-reve-qui-continue/

Parce qu’ils sont arménienssur-les-routes-que-vous-avez-traversees-nous-existions-autrefois/

Loin de chez moi… mais jusqu’où ? : analyser-les-blessures-de-la-societe-pour-etre-capable-de-les-guerir/

Sur l’autrice : Jules Falquet : Préface au livre de Pinar SELEK : Devenir homme en rampant jules-falquet-2013-preface-au-livre-de-pinar-selek-devenir-homme-en-rampant-paris-lharmattan/

Un blog à consulter : http://www.pinarselek.fr/

 

Auteur : entreleslignesentrelesmots

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