Victime récurrente d’attaques antisémites en France de la part de l’extrême droite et des nostalgiques de l’OAS, qui ne lui pardonnent pas son travail intellectuel de compréhension du combat de libération des Algériennes et des Algériens, Benjamin Stora vient de subir, comme en écho, une charge méprisable sur le média électronique Algérie patriotique – une charge qui, débordant sa personne, vise explicitement toute la communauté algérienne de confession juive dans sa longue histoire.
Oublieux de la part prise dans le combat libérateur du peuple algérien par certain.e.s compatriotes appartenant à cette communauté, ce texte abject cultive l’ignorance historique pour leur dénier tant leur engagement patriotique que leur algérianité, et, dans le plus pur style antisémite, use d’amalgames pour jeter l’opprobre sur toute une communauté au motif de sa confession.
On ne peut que s’interroger sur le silence des autorités politiques et judiciaires, pourtant toujours promptes à exercer leur contrôle tatillon sur la moindre des expressions des médias.
Au-delà de la personne de Benjamin Stora et de la diversité d’appréciations sur ses différents positionnements politiques, nous ne pouvons tolérer qu’un tel discours puisse être tenu et avalisé en Algérie.
Un discours qui trahit tous ceux qui ont permis que l’Algérie soit une nation indépendante, dans la diversité de leurs confessions qui, toutes, ont offert des noms illustres à ce combat.
Mais on ne peut occulter que ces propos ont été tenus dans un contexte de promotion d’un nationalisme haineux, stigmatisant la diversité et l’ouverture au monde, et qui voudrait isoler l’Algérie pour mieux enfermer les Algériennes et les Algériens.
Premiers signataires :
Lahouari Addi, sociologue
Hamid Arab, directeur du site lematindalgerie.com
Arezki Aït-Larbi, journaliste free lance, éditeur
Sanhadja Akhrouf, féministe, militante associative
Tewfik Allal, correcteur, militant associatif de l’émigration
Malika Bakhti, ingénieure d’études
Anouar Benmalek, écrivain
Malek Bensmaïl, réalisateur
Ali Bensaad, professeur des universités
Alice Cherki, psychanalyste
Marie Colonna, réalisatrice
Ahmed Dahmani, universitaire, défenseur des droits de l’Homme
Karima Dirèche, historienne
Louisa Fernane, avocate
Ali Guenoun, historien
Myriam Kendsi, artiste peintre
Tahar Khalfoune, universitaire
Jaffar Lakhdari, consultant
Faris Lounis, journaliste
Latifa Madani, journaliste
Ahmed Mahiou, ancien doyen de la Faculté de droit d’Alger
Samia Messaoudi, journaliste, cofondatrice de l’association « Au nom de la mémoire »
Hacen Ouali, jounaliste
Tassadit Yacine, anthropologue
Youcef Zirem, écrivain
Pour tout contact : nouvelleposition@gmail.com
Le régime algérien réprime de nouveau
La Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH) dissoute
Le régime algérien persiste et signe. Il a dissout la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH), en violation de toutes les règles d’un procès équitable.
Le tribunal administratif d’Alger, sur requête du ministère de l’Intérieur, avait prononcé cette dissolution le 29 juin 2022, lors d’un procès tenu en l’absence de la LADDH et sans qu’elle soit informée ni des accusations à son encontre, ni de l’énoncé du jugement, la privant de son droit à la défense. En effet, ce n’est que par les réseaux sociaux que la LADDH a appris sa dissolution vendredi 20 janvier 2023.
La dissolution de la LADDH, qui s’ajoute à celle de l’association RAJ (Rassemblement Actions jeunesse) le 13 octobre 2021 –toutes deux membres du Comité du Forum Social Maghreb –, s’inscrit dans la suite de la répression que subissent des défenseurs des droits de l’Homme, celles et ceux qui bravent, par leurs multiples expressions, les interdits et l’arbitraire du pouvoir autoritaire algérien.
La LADDH, tout comme RAJ, sont réprimés pour leur engagement auprès des millions de citoyens et citoyennes qui manifestent pour la démocratie, la liberté, la dignité et pour l’unité des peuples du Maghreb.
Le Comité de suivi du Forum Social Maghreb
– condamne avec vigueur la dissolution de la LADDH, ainsi que les procédés répressifs qu’elle a subis, en totale violation des dispositions réglementaires et des traités internationaux ratifiés par l’Etat algérien ;
– dénonce cette décision qui dévoile la volonté manifeste du pouvoir de mettre au pas la société civile et d’asphyxier toute voix discordante ;
– réclame l’annulation pure et simple de cette décision arbitraire, et la remise en liberté inconditionnelle de l’ensemble des détenus politiques et d’opinion ;
– appelle à une large mobilisation de solidarité pour l’annulation de la dissolution de la LADDH et de RAJ ainsi que pour la libération de tous les prisonniers politiques et d’opinion, des journalistes, des blogueurs, des activistes du Hirak…
– réaffirme sa solidarité avec la LADDH et ses militants injustement emprisonnés, avec toute la société civile algérienne, ses militants des droits de l’Homme, pour les droits des femmes, pour la démocratie, la liberté, la dignité, et pour un Maghreb des peuples uni et démocratique.
Le Forum social Maghreb,
23 janvier 2023.
Il y a quelques semaines, un site internet dénommé « Algérie patriotique » tenait des propos antisémites d’une particulière virulence à l’endroit de Benjamin Stora et plus généralement à l’endroit de l’ensemble des Juifs. En effet, voici ce qu’écrivait notamment ce site: « le peuple algérien refuse d’emprunter ce même chemin tracé par Benjamin Stora, ses semblables et ses aïeux. Ceux-là mêmes qui furent à l’origine de la prise d’Alger, les Bacri et les Busnach – commerçants véreux convoitant l’immense trésor de la régence pour leurs maîtres, les Rothschild, les Seillière et les Schneider. »
Evidemment, ces phrases sont une bouillie. Elles semblent ainsi judéiser la très catholique famille Sellière (parce qu’elle est une famille de banquiers?) ainsi que la famille Schneider. Quant à l’évocation des “Bacri” et des “Busnach”, elle dénote une méconnaissance crasse des relations entre ces familles et la Régence d’Alger.
Mais, au-delà de cette bouillie, une chose est sûre: les propos sont inacceptables, d’autant plus sur un support en relation avec des cercles proches d’un pouvoir algérien dont on a pu apprécier ces derniers mois la capacité à contrôler et à faire taire les expressions qu’il ne souhaitait pas entendre.
Face à cette sortie antisémite, SOS Racisme exprime à Benjamin Stora toute sa sympathie et son soutien indéfectible. Eminent spécialiste de l’Histoire de l’Algérie, promoteur infatigable du rapprochement entre nos deux pays, militant contre le racisme et compagnon de route de l’association, Benjamin Stora a manifestement le tort, pour les rédacteurs de cette diatribe antisémite, d’être un Juif. Lesdits rédacteurs n’auront pas de mal à trouver quelques appuis à leur entreprise antisémite: l’extrême-droite française regorge de tels spécimens, eux qui brocardent avec virulence Benjamin Stora qui a le double inconvénient à leurs yeux d’être un Juif de Constantine et un artisan du dialogue entre les sociétés française et algérienne. Si bien que s’il n’existe pas d’“Internationale juive”, nous avons une fois de plus la démonstration qu’il semble bien exister une « Internationale antisémite ».
Je salue la pétition publiée ce jour par des intellectuels et militants algériens et franco-algériens.
Dominique Sopo, Président SOS Racisme.
19 janvier 2023.