Faussement présenté par le gouvernement comme « équilibré », ce projet de loi est marqué par la volonté de continuer à freiner à tout prix les migrations des personnes exilées, par un renforcement continu des mesures sécuritaires et répressives.
Au mépris de la réalité de notre monde dans lequel les migrations vont continuer à occuper une place croissante. Au risque de nouveaux drames sur les routes de l’exil. A rebours d’une vision fondée sur la solidarité et l’hospitalité, qui ferait pourtant honneur à notre humanité commune.
Très centré sur les mesures d’expulsion du territoire, il vise à criminaliser et à chasser celles qui, parmi les personnes étrangères, sont considérées comme indésirables par le gouvernement. La notion de menace à l’ordre public y est instrumentalisée pour faire tomber les maigres protections contre le prononcé d’une mesure d’expulsion.
Et lorsqu’elles ne sont pas expulsées, les personnes sont placées dans des situations de précarité administrative, avec l’ajout de conditions supplémentaires pour accéder à un titre de séjour plus stable ou pour le faire renouveler.
Sous couvert de simplification des règles du contentieux, les délais de recours sont raccourcis, les garanties procédurales amoindries. Et pour réduire la durée de la procédure d’asile, le fonctionnement de l’OFPRA et de la CNDA sont profondément modifiés, avec un risque d’affaiblissement de ces instances de protection.
Quelques mesures sont présentées comme étant protectrices pour les personnes migrantes. Mais la régularisation, limitée à des besoins de main d’œuvre, ne répond pas aux enjeux d’accueil des personnes migrantes. Tout comme l’interdiction partielle de l’enfermement des enfants en centre de rétention est insuffisante, car elle n’assure pas la protection de l’ensemble des enfants. Quant à l’exigence d’un diplôme de français pour l’obtention d’un titre de séjour pluriannuel, annoncée comme une disposition visant à renforcer l’intégration des personnes migrants, elle est contre-productive.
Pire, au-delà des mesures évoquées ci-dessus, les débats préparatoires à l’examen en commission et les premiers amendements déposés vont dans le sens d’une fuite en avant encore plus répressive et stigmatisante à l’encontre des personnes exilées : durcissement du regroupement familial, atteinte aux droits du sol, affaiblissement des protections des jeunes majeurs, démantèlement du droit au séjour des personnes étrangères malades…
Il y a urgence à faire cesser cette fuite en avant répressive et stigmatisante.
Une autre politique migratoire est possible, fondée sur l’accueil et la solidarité, le respect des droits et de la dignité des personnes. C’est au nom de ces valeurs que La Cimade appelle les sénatrices et sénateurs à s’opposer à ce texte et à proposer des mesures protectrices pour les personnes étrangères.
Pour en savoir plus
Consulter notre décryptage du Projet de loi asile et immigration, dans sa version du 1er février 2023, après sa présentation au Conseil des ministres.
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Les très sales projets de Darmanin
Mais où s’arrêteront Macron et Darmanin ? Jusqu’où iront-ils dans l’ignominie ?
C’est Le Canard enchaîné du 22 février qui a sorti l’info. Gérald Darmanin prépare une opération d’expulsions massives et de destructions de bidonvilles à Mayotte. Et la date de démarrage de cette opération a été « choisie » pour correspondre au début de l’examen du projet de loi immigration à l’Assemblée nationale. Le plan a été validé fin janvier par Emmanuel Macron.
Dans un article d’une page publié le 13 mars Le Monde indique : « L’objectif reste de marquer les esprits, dans un contexte d’examen de la loi sur l’immigration et de surenchère du Rassemblement national sur ce sujet à Mayotte. »
Qu’est-ce qui est le pire ? La nature de cette opération ou le fait de penser qu’une opération colonialiste et raciste soit une vitrine pour la loi immigration ? A moins que ça ne soit ce que ça dit de la logique de cette loi.
De quoi s’agit-il ?
L’opération prévue pour durer deux mois a comme objectif l’arrestation de 250 à 280 Comorrien·ne·s par jour (!) et leur expulsion vers les autres îles de l’archipel des Comorres. Mais aussi la destruction de 1000 bangas, ciblant au moins 5000 personnes, soit 10% des cases de tôle couvrant les collines de Mayotte. Le Monde indique que la moitié des résident·e·s de l’île vivent dans ces habitations illégales.
Pour cette opération, environ 500 gendarmes et 120 policiers supplémentaires vont être envoyés sur place.
Rappelons que 20 000 migrants venant des autres îles sont mort·e·s depuis 1995 en tentant la traversée dans des embarcations traditionnelles de pêche appelées kwassa kwassa.
Rappelons que des liens et des échanges, notamment familiaux, existent depuis toujours entre les habitant·e·s des différentes îles de l’archipel.
Rappelons que ces mort·e·s, transformant l’archipel en immense cimetière marin, sont le produit de la décision, prise par l’État français, d’interdire Mayotte aux habitant·e·s des autres îles avec l’instauration d’un visa, dit « visa Balladur », depuis 1995.
Une politique coloniale et raciste
Mayotte est un enjeu géostratégique pour la France dans l’océan indien qui y poursuit une logique purement coloniale exacerbant les inégalités et les tensions et qui est en train de plonger l’île dans le chaos. Une des premières sorties officielles de Macron, à peine élu en 2017, avait donné lieu à sa réflexion raciste sur les kwassa kwassa qui « pêchent peu mais amènent du Comorien ».
Lorsque les Comores, colonie française, sont devenues indépendantes en 1975 suite à un référendum, la France a conservé Mayotte au mépris du processus engagé et en violation du droit international. En 2016 encore une résolution de l’ONU « condamne énergiquement la présence de la France à Mayotte, qui constitue une violation de l’unité nationale, de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de la République indépendante des Comores. »
Pour légitimer son emprise sur les habitant·e·s de l’île le pouvoir colonial n’a cessé de déstabiliser pendant des années le nouvel État comorien, les réseaux de la Françafrique et le sinistre Bob Denard allant jusqu’à organiser plusieurs coups d’état.
Résultat : même si plus de 80% des habitant·e·s de l’île vivent au-dessous du seuil de pauvreté et que les aides sociales y sont en-dessous de celles en vigueur en métropole, Mayotte est « un îlot de pauvreté dans un océan de misère ». Ce qui explique à la fois les migrations en provenance des autres îles de l’archipel et les tensions communautaires attisées par le pouvoir.
Alors ?
Tout est sale dans la politique de Macron et Darmanin. C’est à nous de les arrêter.
Ce vendredi nous appelons à nous rassembler
devant le Ministère des Outre-mer.
27 rue Oudinot (Métro Duroc – Ligne 10 ou Ligne 13) – 17H00
Rassemblement pour départ collectif à partir de 15H30
avec la CSP 75 Place de la République
Manifestations dans toute la France le 25 mars
contre le racisme et contre la loi Darmanin
https://antiracisme-solidarite.org