Quand l’aérien se réjouit des investissements dans le train

Le Collectif Pensons l’aéronautique pour demain (PAD), né à Toulouse et fédérant des salarié-es, syndicalistes, économistes, citoyens et citoyennes, se félicite des annonces d’investissements pour le développement du rail. Le PAD a pris l’initiative de débats sur l’avenir de l’aéronautique en intégrant la transition écologique et climatique. Cet article vise à montrer « l’impossible décarbonation du trafic aérien sans plafonnement du trafic », et non par des techniques miraculeuses.

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100 milliards d’euros pour le rail : une bonne nouvelle pour l’aérien !

Selon SCARA, le Syndicat des Compagnies AéRiennes Autonomes, l’aérien ne voudrait pas payer pour le train. Nous, salarié.es, indépendant.es, économistes, scientifiques, citoyen.nes nous inscrivons en faux et saluons la position du gouvernement d’investir 100 milliards d’ici 2040 dans le train du quotidien. Nous, salarié.es du secteur aérien, ajoutons que nous sommes prêts à contribuer à cet effort ! Comme nous le proposions en 2021 dans notre rapport Moins d’avions, plus d’emplois, il est nécessaire de favoriser les transports moins polluants et préparer la transition des emplois dans les transports très carbonés comme l’automobile, l’aérien ou le maritime.

Des solutions technologiques ?
SCARA monte au créneau en disant que ces taxes vont plomber le plan de décarbonation du secteur aérien. Nous répliquons que le plan de décarbonation est de toute façon voué à l’échec car il ne prend en compte ni la réalité économique, ni la réalité scientifique. En effet les plans de décarbonation présentés par l’ATAG sont évalués à 10 000 milliards de dollars sur 30 ans, de 2020 à 2050. Cela représente un réinvestissement total des bénéfices de l’ensemble du secteur aérien sur les 30 prochaines années. Il n’est pas nécessaire d’avoir fait de grandes études économiques pour comprendre que c’est, au mieux un vœux pieux, au pire un mensonge international du même type que les mensonges et manœuvres de Total qui, pendant 50 ans a caché ou minimisé les rapports scientifiquesprouvant l’incontestable nocivité de l’utilisation du pétrole. Il y a des similitudes à trouver sur le plan scientifique également, car les rapports s’accumulent et montrent l’impossible décarbonation du trafic aérien sans plafonnement du trafic. Citons nos précédents articles sourcés : 300 millions de tonnes de SAF, des turbulences dans les plans de vols du trafic aérienla compensation carbone ou l’écoblanchiment du trafic aérien ou d’autres articles et publications scientifiques qui montrent la supercherie : le référentiel aviation et climat de l’ISAE Supaero, pouvoir voler en 2050 du Shift Project, le travail de l’Atecopol sur l’hydrogène et les besoins en énergie, le rapport de l’ADEME publié en septembre dernier ou encore les fabuleux travaux réalisés par le réseau international Stay Grounded qui informe, sources à l’appui, sur le greenwashing de l’industrie aéronautique et propose des alternatives.

Une taxe européenne à minima
Nous rejoignons le syndicat SCARA sur l’idée que cette taxe ne pourra pas rester franco-française et devra être a minima européenne. Ceci pour ne pas créer une nouvelle distorsion de compétitivité au sein de l’Europe comme nous l’avions déjà proposé dans notre rapport cité plus haut. Nous suggérons même d’aller plus loin en instaurant une taxe aux frontières afin de faire contribuer l’ensemble des bénéficiaires de notre espace aérien à la transformation de notre mobilité.

Tous les secteurs du transport main dans la main ?
Comme cela a été dit plusieurs fois lors de tables rondes ou de conférences comme les états de l’air organisés chaque année par l’association ENAC Alumni (voir l’édition 2021 sur l’intermodalité), il serait bon que tous les secteurs du transport se soutiennent mutuellement dans le grand défi qui s’impose à nous pour ce siècle. En effet, il va être quasi-impossible de réduire de 55% nos émissions globales d’ici 2030 puis de 80% d’ici 2050; nous sommes d’ailleurs loin des objectifs annuels pour le moment. L’aérien doit donc prendre sa juste part dans cette réduction des émissions. Sans une coopération étroite intersectorielle et sans un soutien mutuel entre nous tous et toutes nous échouerons de nouveau. Le monde aéronautique est un vivier de compétences, d’équipes prêtes à retrousser leurs manches pour travailler ensemble au respect des limites planétaires via notamment la réduction des émissions globales. Les générations précédentes, qui rêvaient de visiter le monde et de rencontrer les autres cultures, se sont employées à développer un monde industriel et technologique, elles sont remplacées par leurs enfants qui auront l’obligation de rendre à la planète sa beauté et son habitabilité d’antan.

Ne nous leurrons pas ! Cette transition passera notamment par une réduction du trafic routier et aérien et, dans une certaine mesure, par la réduction du nombre d’emplois dans l’automobile et l’aéronautique (voir notamment le rapport du Shift Project). Si l’on s’y prépare et que l’on accompagne correctement cette transition, d’une part en partageant le travail par la semaine de 32 heures (expérimentée avec succès en Angleterre et ailleurs), ou, d’autre part, via la diversification de l’industrie vers le ferroviaire, l’efficacité énergétique ou la production d’énergie bas carbone, nous pouvons faire en sorte que cette transition soit une chance tout en maintenant un niveau de service de transports parmi les plus performants du monde !

Relevons le défi ensemble !
Bien entendu cela va être difficile, personne ne prétend l’inverse. Mais ce sera d’autant plus rude et catastrophique si nous continuons avec des modèles économiques préhistoriques. Tout comme la révolution numérique a chamboulé le monde du travail, nous devons prendre le virage écologique et social qui vient, sinon il est probable que l’industrie aéronautique « mourra avec le pétrole » comme l’a illustré Jean-Marc Jancovici.

En conclusion le SCARA a tort de s’offusquer car l’accompagnement, notamment financier, et l’anticipation sont les conditions nécessaires d’une transition réussie.

Le Collectif PAD
https://syndicollectif.fr/quand-laerien-se-rejouit-des-investissements-dans-le-train/

En complément possible
Vers une crise économique majeure dans Toulouse et sa région. Toulouse, le syndrome Détroit ?
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2020/04/27/vers-une-crise-economique-majeure-dans-toulouse-et-sa-region-toulouse-le-syndrome-detroit/
Interroger l’utilité sociale de l’aviation
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2021/12/01/interroger-lutilite-sociale-de-laviation/

*********
[Pétition] Pour interdire les vols en jet privé, interpellez les député·es !

Le 6 avril prochain, les députés auront à se prononcer sur l’interdiction des vols en jet privé [1] : demandons-leur de voter pour cette interdiction, dans l’intérêt du plus grand nombre !

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Choqués par les émissions délirantes des jets privés et la forte croissance du secteur, les Françaises et les Français souhaitent que les efforts en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre soient proportionnés : plus on pollue, plus on doit réduire son empreinte carbone !

En particulier, les jets privés représentent une injustice climatique inacceptable lorsqu’il n’y a pas d’urgence vitale. Un passager de jet privé émet de 5 à 14 fois plus qu’un passager de vol commercial et le trajet moyen est de 500 km, facilement substituable par un autre moyen de transport. Ainsi, chaque tonne de CO2 émise par un jet privé est une aberration à laquelle il faut remédier.

Le 6 avril prochain, nos députés auront à se prononcer sur l’interdiction des vols en jet privé [2] : demandons leur de voter pour cette interdiction, dans l’intérêt du plus grand nombre !

*-*

Mesdames et Messieurs les députés, ´

Le 6 avril prochain, vous aurez à vous prononcer sur l’interdiction des vols en jet privé : il est grand temps de les empêcher de nuire.

Les conclusions des scientifiques du climat sont sans appel : nous allons vers une catastrophe civilisationnelle si nous ne réduisons pas, dès maintenant et très rapidement, nos émissions de gaz à effet de serre. Pour de nombreux usages, ce n’est pas chose aisée : ces émissions sont intrinsèquement liées à notre vie de tous les jours : nous nourrir, nous chauffer, aller au travail. Ce n’est pas le cas des vols en jet privé. Hormis pour les usages répondant à une réelle utilité sociale comme les urgences médicales, nous pouvons largement nous passer de ce moyen de transport qui pollue sans commune mesure !

Aujourd’hui, 1 avion sur 10 décollant sur le sol français est un jet privé [3], alors que leurs passagers émettent de 5 à 14 fois plus de gaz à effet de serre qu’en avion de ligne et que cette industrie est en plein essor [4]. Pire, ils ne sont pas concernés par l’interdiction par la loi Climat et Résilience des vols courts réalisables en train en moins de 2h30, alors que des TGV existent sur 70 à 80% des itinéraires les plus empruntés en jet privé [5]. Est-ce cela, « l’esprit de justice sociale » promis par cette loi ?

Dans cette course contre la montre pour notre survie, chaque dixième de degré gagné, chaque tonne de CO2 non émise compte : commençons par les mesures dont l’acceptabilité sociale est forte ! Choqués par les allers-retours d’hommes et de femmes politiques [6] et autres personnalités [7], les Françaises et les Français en ont assez de voir le budget carbone national grevé par le comportement inconséquent d’une poignée de privilégiés, dont 1 vol équivaut à plusieurs mois d’émissions d’un Français moyen ! [8]

Cette mesure est un premier pas indispensable pour que l’ensemble des Françaises et des Français se sente concerné par les réductions d’émissions indispensables pour respecter l’Accord de Paris. De nombreuses études [9] le montrent : sans sentiment de justice, sans réduction des inégalités, il n’est pas possible d’exiger de l’ensemble de la population qu’elle fasse des efforts !

En outre, il faut réduire fortement les émissions sonores et atmosphériques de l’aviation commerciale qui sont le fait d’une toute petite minorité de privilégiés (seulement 1% de la population mondiale est responsable de 50% des émissions de ce secteur). En l’absence de solutions technologiques suffisantes à court ou moyen terme, cela ne peut être fait qu’en réduisant l’offre et la demande, par exemple en stoppant toute extension d’aéroport et en instituant une taxe progressive sur les grands voyageurs [10].

Mesdames et Messieurs les députés, en tant que représentants de la Nation, le 6 avril prochain, prenez une décision historique et de bon sens : interdisez les vols en jets privés !

Premiers signataires 
Charlène Fleury (Rester sur Terre), Lou Chesné (porte-parole d’Attac France), Romain Morizot(Ingénieur Aéronautique), Capucine Saulpic (Non à l’agrandissement de l’aéroport de Lille), Stuart Page(Atterrissons d’urgence, Montpellier), Thierry Bitouzé et Airy Chrétien (Collectif citoyen 06, Nice), Yves Tuffet (Rester sur Terre), Erwan SammierBernard Schéou (enseignant-chercheur), Jean Sireyjol(Association TaCa agir pour le Climat), Jean-Baptiste Dusson et François-Joseph Grimault (Résistance climatique), Florence Joly (Stop Extension Aéroport Marseille Provence, Marseille), Cannelle Dos Reis(Alternatiba Lille, Amis de la Terre Lille), Jean-François Julliard (Greenpeace France), Vincent Querre et Sabrina Marsant (Les Braises, lutte contre l’aéroport de Libourne/Saint Émilion), Gilliane Le Gallic(Alofa Tuvalu), Véronique Sinou (Les Amis de la Terre Bouches-du-Rhône), Kaïna Privet (Scientifiques en rébellion), Dominique Bonnet (Attac Aix-en-Provence), Zoé Pélegry (Action non-violente COP 21), Rémi Donaint (Alternatiba), Alexandre Gondran (Ingénieur des Études et de l’Exploitation de l’Aviation Civile, ENAC Toulouse), Chantal Beer-Demander (UFCNA), Pascal Gassiot (Collectif PAD – Pensons l’Aéronautique pour Demain – Toulouse), Lucie Chhieng (parole-parole d’Alternatiba Paris), Jérôme Favrel (CCNAAT), Dominique Lazarski (présidente de l’UECNA – Union européenne contre les nuisances aériennes et de l’ADERA pour la protection des riverains de l’aéroport de Beauvais-Tillé).

Notes
[1] https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b0885_proposition-loi.pdf
[2] https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b0885_proposition-loi.pdf
[3] 
https://www.transportenvironment.org/discover/private-jets-can-the-super-rich-supercharge-zero-emission-aviation/
[4] 
https://www.mediapart.fr/journal/france/280822/le-leader-francais-du-jet-prive-brule-la-planete-en-toute-impunite
[5] 
https://france.attac.org/se-mobiliser/criminels-climatiques/article/pourquoi-bloquer-les-jets-prives
[6] 
https://agir.greenvoice.fr/petitions/castex-procuration
[7] 
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2022/09/06/jets-prives-visualisez-les-trajets-les-plus-frequents-ou-les-plus-courts-en-france_6140407_4355770.html
[8]
https://www.transportenvironment.org/discover/private-jets-can-the-super-rich-supercharge-zero-emission-aviation/
[9]
https://theconversation.com/pourquoi-crier-au-scandale-a-chaque-fois-quune-personnalite-utilise-un-jet-prive-181456
[10]
https://rester-sur-terre.org/making-excessive-flyers-pay/

https://france.attac.org/se-mobiliser/criminels-climatiques/article/petition-pour-interdire-les-vols-en-jet-prive-interpellez-les-depute-es

Auteur : entreleslignesentrelesmots

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