
Ernesto Che Guevara et Abdellah Ibrahim, chef du gouvernement marocain.
Ambassade du Maroc au Caire. Janvier 1959.
© Photo remastérisée pas Mustapha Saha
Che Guevara fait deux séjours au Maroc en 1959. Il est envoyé spécial de la révolution cubaine en quête d’alliés dans les pays nouvellement indépendants. Le Maroc est, à cette époque, un acteur majeur du mouvement des non-alignés. Che Guevara rencontre au Caire, en juin 1959, Abdellah Ibrahim, président du conseil du gouvernement marocain, qui lui présente Abdelkrim Khattabi, concepteur, avec son prédécesseur Mohamed Améziane, de la guerre de guérilla contre le colonialisme franco-espagnol. Che Guevara et Abdelkrim Khattabi discutent pendant plusieurs heures en espagnol. En survolant le Rif en avion, Che Guevara aurait dit d’après le témoignage d’Abdellah Ibrahim : « J’ai regardé par le hublot. La région est une zone idéale pour la guérilla. C’est tout un symbole ». Demeure une énigme, l’absence totale de traces iconographiques de cette rencontre légendaire. Fidel et Raul Castro, lui-même et leurs compagnons avaient été initiés à la guérilla par Alberto Bayo, un officier espagnol vétéran de la guerre du Rif, qui s’était ensuite enrôlé dans l’armée républicaine avant de se réfugier au Mexique, où il était devenu instructeur à l’Académie militaire de Guadalajara. Alberto Bayo publie un opuscule culte, « Cent leçons de la guérilla ». En janvier 2003, Fidel Castro confie à Ignacio Ramonet, directeur du Monde Diplomatique : « Bayo nous enseignait comment mettre en place une guérilla pour briser une défense à la manière des Marocains d’Abdelkrim face aux Espagnols ». Abdelkrim Khattabi était ainsi considéré comme un maître-stratège et un théoricien militaire par Hô Chi Minh, Mao Tsé-toung qui le reconnaissaient comme un précurseur, et d’autres encore comme le Mahatma Gandhi et Josip Broz Tito. Dans les années vingt, le mouvement surréaliste en France prend fait et cause pour le combat d’Abdelkrim Khattabi. Il organise à l’Odéon des manifestations en solidarité avec les Rifains aux cris de « Vive Abdelkrim ». Louis Aragon déclare : « Abdelkrim fut l’idéal qui berça notre jeunesse ». Continuer à lire … « Che Guevara au Maroc »