Avec l’aimable autorisation des Editions Syllepse
Le projet de ce livre est né de rencontres lors d’une recherche de socio-histoire consacrée à la place des travailleurs immigrés dans les grèves de l’automobile des années 1980 [1]. Ces grèves se situent à un moment charnière de l’histoire de l’immigration de la seconde moitié du 20e siècle. En effet, de nombreuses usines automobiles, particulièrement en région parisienne, ont, à partir des années 1960, voire avant pour certaines, fait massivement appel à une immigration issue en grande partie des anciennes colonies françaises [2]. Ce sont les travailleurs issus de ces migrations qui ont largement assuré le développement et la croissance des entreprises automobiles pendant de nombreuses années. La fin des Trente Glorieuses, l’entrée en crise économique et surtout les plans de restructurations de l’industrie automobile modifient cette situation à la fin des années 1970. Désormais, les embauches stagnent puis diminuent, les plans de réduction d’effectifs se multiplient et le travail se transforme. Outre les travailleurs âgés, les ouvriers immigrés sont les premiers touchés par ces restructurations. Cantonnés aux postes les plus durs et les moins bien rémunérés, leurs carrières sont celles d’« OS à vie [3] » à qui l’on propose très peu de formations et d’évolutions professionnelles. Dès lors qu’il faut restructurer les entreprises, diminuer la masse salariale et se débarrasser du travail non qualifié, le verdict tombe : les ouvriers immigrés doivent quitter les usines. Les licenciements et les aides au retour dans leurs pays d’origine sont là pour les y inciter. Bien sûr, tous ne sont pas concernés par ces mesures, et bon nombre d’immigrés font leurs carrières entières là où ils ont commencé à travailler dès leur arrivée en France. C’est le cas des ouvriers qui livrent ici leurs témoignages. Continuer à lire … « Pourquoi ce livre ? – Abdellah Fraygui, Abdallah Moubine, Vincent Gay : Des vies pour l’égalité. Mémoires d’ouvriers immigrés »