Quand l’Occident qualifie de « succès » le massacre de 270 Palestiniens (et autres textes)

  • Gideon Levy : « Il tue un adolescent palestinien et reçoit un Doctorat Honorifique pour Héroïsme Israélien »
  • Jonathan Cook : Quand l’Occident qualifie de « succès » le massacre de 270 Palestiniens
  • Fareed Taamallah : Alors que Gaza est victime d’un génocide physique, la Cisjordanie est confrontée à un génocide économique
  • Les raids israéliens à Gaza ont probablement violé à plusieurs reprises les lois de la guerre – Bureau des droits de l’homme de l’ONU
  • Journée internationale de solidarité avec les réfugiés
  • Accès des entreprises israéliennes d’armement au salon Eurosatory : après le jugement de la Cour d’Appel, l’attitude de l’État revient en première ligne
  • Des chefs syndicaux internationaux affirment leur appui aux syndicats et au peuple palestiniens
  • Anshel Pfeffer : « Le Liban, une partie de la terre promise » : la droite messianique d’Israël cible de nouveaux territoires pour les colonies
  • Gilbert Achcar : Qu’y a-t-il derrière le conflit en cours entre Biden et Netanyahu ?

« Il tue un adolescent palestinien et
reçoit un Doctorat Honorifique pour Héroïsme Israélien »

Les bottes de l’armée apparaissent sous la robe noire, chaque tête porte un chapeau noir de remise de diplôme. Voici les récipiendaires d’un doctorat honorifique de l’université Reichman en 2024, décerné cette année « en reconnaissance de l’héroïsme israélien » : un propagandiste à la petite semaine (Noa Tishby) ; le commandant d’une compagnie de chars (le capitaine Karni Gez) ; un fondateur de Frères et Sœurs d’armes (Eyal Naveh) ; un leader des communautés de la frontière de Gaza (Haim Jelin) et le général de brigade Yisrael Shomer, commandant de la 146e division.

Shomer a été récompensé pour avoir « consacré de nombreuses années à la force et à la sécurité de l’État d’Israël ». Selon le site web de l’université, « cet honneur est décerné à des personnes dont les actions illustrent les valeurs du sionisme, de l’esprit d’entreprise, de la responsabilité sociale et de l’intégrité académique, et en reconnaissance de leurs contributions importantes à l’État d’Israël, au peuple juif et à l’université Reichman ».

Retour en arrière : Vendredi 3 juillet 2015 au matin, point de contrôle de Qalandiyah en Cisjordanie. La circulation se fait lentement. Un adolescent palestinien s’approche de la voiture du commandant de la brigade Binyamin, le colonel Yisrael Shomer, lance une grosse pierre dans le pare-brise et s’enfuit. Personne n’est blessé. Le sang de celui qui deviendra un médecin honoraire se met à bouillir ; il sort de sa voiture et se lance à sa poursuite.

Le commandant de la brigade tire trois balles à une distance de six à sept mètres dans le dos du garçon en fuite, qui tombe en sang et meurt peu après à l’hôpital. La peine de mort pour avoir jeté une pierre. Avant de partir à toute vitesse, le chef de brigade a pris le temps de retourner le corps de sa victime avec son pied pour vérifier son état, comme on retourne un animal mort, sans appeler d’aide médicale.

Mohammed Kosba avait 17 ans, il était enfant de réfugiés. Il était le troisième fils que ses parents, Fatma et Sami, ont perdu. Ses frères Yasser, 10 ans, et Samer, 15 ans, ont également été abattus par l’armée pour avoir jeté des pierres. Ils ont été tués à 40 jours d’intervalle au cours de l’hiver 2002. La première fois que je suis venu chez eux, dans le camp de réfugiés, après la mort de ses frères, Mohammed avait 4 ans.

Il a été enterré à côté de ses frères 13 ans plus tard, et le sang sur l’îlot de circulation où il est tombé n’avait pas encore séché lorsque je suis arrivé. Les Forces de Défense Israéliennes ont promis d’enquêter. L’adolescent ne représentait aucune menace pour lui lorsque le commandant de la brigade a décidé de le punir pour avoir osé jeter une pierre sur la voiture d’un officier israélien. Si cela s’était produit sur l’autoroute Ayalon, dans le centre d’Israël, le tireur aurait probablement été arrêté et jugé pour homicide par imprudence. Mais Shomer était un officier des FDI et sa victime était un adolescent palestinien qui avait perdu deux de ses frères et ne voulait pas voir une armée d’occupation près de son camp de réfugiés.

Un an plus tard, l’armée a clos l’enquête, comme il est d’usage. Deux ans plus tard, Gadi Eisenkot, le dernier chef d’état-major de l’armée de défense israélienne à disposer d’un minimum de principes, a retardé la promotion de l’officier qui avait tué l’enfant alors qu’il s’enfuyait. Mais la carrière de Shomer a repris son cours après ce petit déraillement. Il est sur le point de devenir le chef de la division des opérations de l’armée israélienne et d’obtenir un doctorat honorifique.

L’honneur lui est attribué, la disgrâce à l’université Reichman. Alors qu’à Harvard, à laquelle Reichman aimerait beaucoup ressembler, on se bat contre la guerre à Gaza et pour les droits du peuple palestinien, à Reichman, un doctorat honorifique est décerné à un tueur d’enfant. Une université qui porte le nom de son fondateur de son vivant, peu ordinaire en soi, qui excelle dans les liens étroits avec le secteur de la défense – comme s’il s’agissait du Collège de la Défense nationale d’Israël, plutôt que d’une université privée – qui a depuis longtemps dépassé les limites du monde universitaire, décerne des médailles à des officiers dont même le chef d’état-major s’est offusqué de la mauvaise conduite.

Mais une guerre est en cours en Israël, et tout le monde est mobilisé pour la cause. Shomer vit dans le kibboutz Kfar Azza, à la frontière de Gaza, et à Reichman, au service de l’armée depuis sa création, on veut lui rendre hommage et occulter sa faute. Mais à Qalandiyah, on n’oublie pas le lâche officier qui a poursuivi un adolescent réfugié pauvre qui avait perdu deux de ses frères et lui a tiré trois balles dans le dos à bout portant. Un commandant de brigade de l’armée israélienne au comportement de criminel à la tête brûlée. Les habitants de Qalandiyah n’oublieront jamais, même si le général de brigade Shomer continue de recevoir des diplômes honorifiques d’universités sans honneur.

Gideon Levy, 16 juin 2024
Source : Haaretz
Traduction : JB pour l’Agence Media Palestine
https://agencemediapalestine.fr/blog/2024/06/17/opinion-il-tue-un-adolescent-palestinien-et-recoit-un-doctorat-honorifique-pour-heroisme-israelien/

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Quand l’Occident qualifie de « succès »
le massacre de 270 Palestiniens

Les Israéliens dansent dans les rues, la Maison Blanche salue une opération « audacieuse », Sunak se dit « soulagé ». Il est clair que le carnage à Gaza est devenu la nouvelle normalité.

Israël a fait plus que traverser les prétendues « lignes rouges » de l’administration Biden en massacrant les habitants du camp de réfugiés de Nuseirat à Gaza le week-end dernier, il les a défoncées au bulldozer.

Samedi, une opération militaire israélienne, visant à libérer quatre Israéliens détenus par le Hamas depuis qu’il a attaqué Israël le 7 octobre, s’est soldée par la mort de plus de 270 Palestiniens, dont beaucoup de femmes et d’enfants.

Le véritable bilan ne sera peut-être jamais connu. Un nombre incalculable d’hommes, de femmes et d’enfants sont encore sous les décombres des bombardements, écrasés vifs ou voués à une mort lente par asphyxie ou déshydratation.

Des centaines d’autres souffrent de blessures atroces, quand ils ne meurent pas de leurs blessures du fait qu’il n’y a pratiquement plus d’installations médicales, après qu’Israël a détruit les hôpitaux et arrêté massivement le personnel médical palestinien. En outre, à cause du blocus imposé par Israël depuis des mois il n’y a pas de médicaments pour traiter les victimes.

Les Israéliens et les organisations juives américaines – si promptes à condamner les Palestiniens qui acclament les attaques contre Israël – ont célébré le carnage causé par la libération des captifs israéliens, qui auraient pu rentrer chez eux il y a plusieurs mois si Israël avait été prêt à accepter un cessez-le-feu.

Des vidéos montrent même des Israéliens dansant dans la rue.

Selon certaines informations, l’opération israélienne meurtrière menée dans le centre de Gaza pourrait avoir tué trois autres captifs, dont un citoyen américain.

Dans des commentaires au journal Haaretz publiés dimanche, Louis Har, un captif libéré en février, a parlé de sa captivité : « Notre plus grande peur, c’était les avions de Tsahal et la crainte qu’ils ne bombardent le bâtiment dans lequel nous nous trouvions ».

Il a ajouté : « Nous n’étions pas inquiets qu’ils [le Hamas] nous fassent quoi que ce soit. Nous n’avons jamais résisté. Je n’avais donc pas peur qu’ils me tuent ».

Les médias israéliens ont rapporté que le ministre israélien de la défense, Yoav Gallant, avait décrit l’opération de samedi comme « l’une des opérations les plus héroïques et les plus extraordinaires dont j’ai été témoin au cours de mes 47 années de service au sein de l’establishment de la défense israélienne ».

Le procureur général de la Cour pénale internationale cherche actuellement à obtenir un mandat d’arrêt à l’encontre de Gallant, ainsi que du Premier ministre Benjamin Netanyahu, pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Les accusations portent notamment sur les efforts déployés pour exterminer la population de Gaza par une famine planifiée.

Terrorisme d’État
Depuis plus de huit mois, Israël bafoue les lois établies de la guerre.

On sait qu’au moins 37 000 Palestiniens ont été tués à ce jour à Gaza, bien que les responsables palestiniens aient perdu depuis longtemps la capacité de compter les morts avec précision, à cause de la destruction incessante des institutions et des infrastructures de l’enclave par Israël.

Israël a en outre provoqué une famine pour faire mourir de faim la population de Gaza, sans que cela se voit trop.

En janvier dernier, la Cour internationale de justice a jugé Israël pour génocide. Le mois dernier, elle a ordonné l’arrêt immédiat de l’attaque israélienne contre la ville de Rafah, au sud de Gaza. Israël a réagi à ces deux jugements en intensifiant sa folie meurtrière.

Autre preuve de l’impunité dont jouit Israël, l’opération de sauvetage de samedi a donné lieu à un nouveau crime de guerre flagrant.

Israël a utilisé un camion d’aide humanitaire – censé porter secours à la population désespérée de Gaza – comme couverture pour son opération militaire. En droit international, c’est ce que l’on appelle un crime de perfidie.

Depuis des mois, Israël bloque l’aide à Gaza, dans le cadre de ses efforts pour affamer la population. Il a également pris pour cible les travailleurs humanitaires, tuant plus de 250 d’entre eux depuis octobre.

Mais plus spécifiquement, Israël mène une guerre contre l’UNRWA, affirmant sans preuve que la principale agence d’aide de l’ONU à Gaza est impliquée dans les opérations « terroristes » du Hamas. Il veut que l’ONU, le seul instrument qui reste à la communauté internationale pour mettre fin à la sauvagerie gratuite d’Israël, à Gaza disparaisse définitivement.

En cachant ses propres soldats dans un camion d’aide humanitaire, et donc en faisant exactement ce dont il accuse le Hamas, Israël a rendu grotesques ses prétendues « préoccupations en matière de terrorisme ».

Mais l’action militaire d’Israël a également remis l’aide humanitaire – le seul moyen de mettre fin à la famine à Gaza – au centre du champ de bataille. Le Hamas a désormais toutes les raisons de craindre que ceux qui prétendent être des travailleurs humanitaires soient en réalité des instruments du terrorisme d’État israélien.

Des motivations secrètement hostiles
Dans ces circonstances, on aurait pu espérer que l’administration Biden s’empresserait de condamner les actions d’Israël et de prendre ses distances par rapport au massacre.

Au lieu de cela, Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale du président Joe Biden, a tenu à s’attribuer le mérite de ce carnage, qu’il a qualifié d’« opération audacieuse ».

Il a admis dans une interview dimanche que les États-Unis avaient offert leur aide pour l’opération de sauvetage, mais il a refusé de dire sous quelle forme. D’autres rapports font état d’un rôle de soutien de la part de la Grande-Bretagne.

« Les États-Unis soutiennent Israël depuis plusieurs mois en l’aidant à identifier les lieux où se trouvent les otages à Gaza ainsi qu’à les récupérer », a déclaré Sullivan à CNN.

Les commentaires de Sullivan ont alimenté les soupçons que cette assistance aille bien au-delà de la fourniture des renseignements et des bombes qu’Israël a larguées sur la minuscule enclave de Gaza au cours des derniers mois – plus que le total des bombes qui ont frappé Londres, Dresde et Hambourg réunies au cours de la Seconde Guerre mondiale.

Un représentant de Joe Biden a révélé au site web Axios que des soldats américains appartenant à une soi-disant unité d’otages américains avaient participé à l’opération de récupération qui a massacré les civils palestiniens.

En outre, des images montrent que la jetée flottante de Washington a servi de base aux hélicoptères impliqués dans l’attaque.

La jetée a été ostensiblement construite au large de la côte de Gaza à un coût énorme – quelque 320 millions de dollars – et en deux mois, soi-disant pour contourner le blocage israélien de l’aide humanitaire.

Des observateurs ont fait valoir à l’époque que cette jetée était non seulement un moyen extraordinairement malcommode et inefficace d’acheminer l’aide, mais qu’il y avait probablement des motivations secrètement malveillantes derrière sa construction.

Son emplacement, au milieu de la côte de Gaza, a renforcé la division israélienne de l’enclave en deux parties, créant un corridor terrestre qui est effectivement devenu une nouvelle frontière à partir de laquelle Israël peut lancer des raids dans le centre de Gaza, comme le raid de samedi.

Ces analystes semblent avoir eu raison. La jetée n’a quasiment pas servi à acheminer de l’aide depuis sa construction à la mi-mai.

La jetée s’est rapidement brisée et sa réparation et sa remise en service n’ont été annoncées que vendredi.

Le fait qu’elle semble avoir été utilisée immédiatement comme tête de pont pour une opération qui a tué au moins 27  Palestiniens entraîne Washington encore plus loin dans la complicité avec ce que la Cour mondiale a qualifié de « génocide plausible ».

Mais comme pour l’utilisation du camion d’aide, cela signifie également que l’administration Biden se joint une fois de plus à Israël – après avoir retiré son financement à l’UNRWA – pour discréditer la distribution de l’aide à Gaza, au moment où elle est la plus urgente.

C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre l’annonce que le Programme alimentaire mondial (PAM), a faite dimanche, selon laquelle il cessera d’utiliser l’embarcadère pour les livraisons d’aide, à cause de problèmes de « sécurité ».

Un massacre « réussi »
Comme toujours, la vie des Palestiniens n’a littéralement aucune valeur pour les médias et les hommes politiques occidentaux, qui se sont quasiment tous fermement opposés à un cessez-le-feu qui aurait pu soulager les souffrances des captifs israéliens et de leur famille il y a des mois.

Le chancelier allemand Olaf Scholz a jugé bon de qualifier de « signe d’espoir important » la mort de plus de 270 Palestiniens lors de la libération des quatre Israéliens, tandis que le Premier ministre britannique Rishi Sunak a fait part de son « immense soulagement ». Le nombre effroyable de morts n’a pas été mentionné.

Imaginez que l’on décrive en termes aussi positifs une opération du Hamas qui aurait tué 270 Israéliens pour libérer quelques-uns des centaines de membres du personnel médical enlevés à Gaza par Israël au cours des derniers mois et dont on sait qu’ils sont détenus dans un centre de torture.

Le London Times, quant à lui, a rayé d’un trait de plume le massacre de Palestiniens de samedi en qualifiant l’opération de « frappe chirurgicale ».

Les médias ont uniformément salué l’opération comme un « succès » et une « audace », comme si le meurtre et la mutilation d’un millier de Palestiniens – et les crimes de guerre en série commis par Israël au cours de ce processus – n’avaient aucune importance.

Le principal reportage de BBC News samedi soir s’est concentré sur les célébrations des familles des captifs libérés et n’a mentionné que brièvement le massacre des Palestiniens tout à la fin. L’émission a de plus souligné que le nombre de morts était « contesté » – sans mentionner que, comme toujours, c’était Israël qui contestait.

En réalité, l’opération barbare de « sauvetage » aurait été tout à fait inutile si Netanyahu n’avait pas refusé de négocier la libération des captifs par peur d’aller en prison pour corruption et si les États-Unis n’avaient pas toléré ses atermoiements.

Il sera également très difficile de répéter une telle opération, comme l’a noté le correspondant militaire de Haaretz, Amos Harel, ce week-end. Le Hamas en tirera des leçons et surveillera encore plus étroitement les captifs restants, très probablement sous terre dans ses tunnels.

Le retour des captifs restants « ne se fera probablement que dans le cadre d’un accord qui nécessitera d’importantes concessions », a-t-il conclu.

L’exploitation du meurtre de masse
Benny Gantz, le général-politicien qui a contribué à superviser les huit mois de massacre d’Israël à Gaza au sein du cabinet de guerre de Netanyahu et qui est largement décrit comme un « modéré » en Occident, a démissionné du gouvernement dimanche.

Bien que le différend porte ostensiblement sur la forme que prendra le retrait israélien de Gaza au cours des prochains mois, l’explication la plus probable est que Gantz veut à la fois prendre ses distances vis à vis de Netanyahu, qui risque d’être arrêté pour crimes contre l’humanité, et préparer des élections pour prendre sa place.

Le Pentagone et l’administration Biden considèrent Gantz comme leur homme. Le fait qu’il ne fasse plus partie du gouvernement pourrait leur donner un moyen de pression supplémentaire sur Netanyahu à l’approche de l’élection présidentielle américaine de novembre, au cours de laquelle Donald Trump tentera activement de se rapprocher du premier ministre israélien.

L’accent mis sur la politique politicienne israélienne détournera fort à propos l’attention de la complicité des États-Unis dans le massacre de Nuseirat, au moment où le secrétaire d’État américain Antony Blinken est en visite dans la région. Il veut qu’on le voit travailler à mettre en place, une fois de plus, un cessez-le-feu censé permettre la libération des prisonniers israéliens – un plan auquel Netanyahu s’opposera une fois de plus.

Les efforts de Blinken risquent de prendre une tournure encore plus désespérée dans le sillage immédiat de l’implication évidente de l’administration Biden dans le meurtre de centaines de Palestiniens.

La prétention de Washington à jouer le rôle d’un « honnête médiateur » semble à tout le monde – à l’exception de la classe politique et des médias occidentaux dont la soumission aux Etats-Unis est proverbiale – encore plus dérisoire qu’à l’accoutumée.

La vraie question est de savoir si les échecs diplomatiques répétés de Blinken pour mettre fin au massacre de Gaza sont dus à un dysfonctionnement ou s’ils sont voulus.

La contradiction flagrante de la position de Washington à l’égard de Gaza a été mise en évidence la semaine dernière lors d’une conférence de presse du porte-parole du département d’État, Matthew Miller.

Il a laissé entendre que l’objectif d’Israël et des États-Unis était de persuader le Hamas de se dissoudre – vraisemblablement par une forme de reddition – en échange d’un cessez-le-feu. Le groupe a intérêt à le faire, a déclaré Miller, « parce qu’il ne veut pas que le conflit se poursuive et que le peuple palestinien continue de mourir. Ils ne veulent pas de guerre à Gaza ».

Même la presse occidentale, habituellement complaisante, a été déconcertée par les propos de Miller, qui laissait entendre qu’un crime contre l’humanité – les massacres de Palestiniens, comme celui qui a eu lieu au camp de Nuseirat samedi – pouvait être utilisé par Washington comme un moyen de pression sur le Hamas.

Mais il est plus probable que cette apparente contradiction soit le reflet des tours de passe-passe que Washington multiplie pour détourner l’attention de son véritable objectif : donner plus de temps à Israël pour parachever son œuvre.

Israël doit finir de pulvériser Gaza, pour la rendre définitivement inhabitable et mettre la population devant le dilemme brutal : rester et mourir, ou partir par tous les moyens possibles.

Le « quai humanitaire » américain qui a été utilisé pour le massacre de samedi pourrait bientôt servir à nettoyer ethniquement Gaza des Palestiniens, en les transportant hors de la zone de mort dans laquelle Israël les a emprisonnés.

Jonathan Cook
Jonathan Cook a obtenu le Prix Spécial de journalisme Martha Gellhorn. Il est le seul correspondant étranger en poste permanent en Israël (Nazareth depuis 2001). Ses derniers livres sont : « Israel ad the Clash of Civilisations   Iraq, Iran and the to Remake the Middle East » (Pluto Press) et « Disappearing Palestine:  Israel’s Experiments in Human Despair » (Zed Books). Consultez son site personnel.
12 juin 2024 – Middle-East-Eye –
Traduction : 
Chronique de Palestine – Dominique Muselet
https://www.chroniquepalestine.com/quand-occident-qualifie-de-succes-massacre-270-palestiniens/

Campo profughi di nuseirat, l’Occidente definisce un « successo » il massacro di 270 palestinesi
https://andream94.wordpress.com/2024/06/20/campo-profughi-di-nuseirat/

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Alors que Gaza est victime d’un génocide physique,
la Cisjordanie est confrontée à un génocide économique

Alors que le monde est préoccupé par l’horrible génocide dans la bande de Gaza, Israël tue des centaines de Palestiniens, s’empare de plus en plus de terres et étrangle économiquement la Cisjordanie occupée.

Le 22 mai, à la suite des décisions de la Cour internationale de justice contre Israël et de la reconnaissance de la Palestine par trois pays européens, le ministre israélien des finances d’extrême droite, Bezalel Smotrich, a pris des « mesures punitives sévères » à l’encontre de l’Autorité palestinienne. Il a notamment bloqué le transfert des recettes fiscales perçues par Israël au nom de l’Autorité palestinienne, ce qui pourrait entraîner l’effondrement de cette dernière.

Depuis sa création dans le cadre des accords d’Oslo de 1993, l’Autorité palestinienne a été limitée par des accords politiques, économiques et de sécurité imposés par Israël et ses alliés. L’un des plus importants est l’accord économique de Paris de 1994, qui était censé être temporaire et durer cinq ans. Il a établi la dépendance de l’économie palestinienne à l’égard de l’économie israélienne et a donné à l’État d’occupation les moyens de rendre cet accord temporaire permanent. Pour l’essentiel, l’accord a intégré l’économie palestinienne dans celle d’Israël par le biais d’une union douanière, Israël contrôlant toutes les frontières, les siennes et celles de l’Autorité palestinienne.

Cela signifie que la Palestine reste dépourvue de portes d’entrée indépendantes dans l’économie mondiale. Selon l’accord, le gouvernement israélien est chargé de collecter les taxes sur les marchandises importées en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, qu’il transfère au trésor de l’Autorité palestinienne en échange d’une commission de 3%.

Il est supposé que cet argent sera transféré en douceur à l’Autorité palestinienne, à raison d’une moyenne de 190 à 220 millions de dollars américains par mois. L’AP compte sur ces fonds pour payer les salaires de ses employés et s’acquitter de ses obligations en matière de dépenses de fonctionnement de ses institutions.

La décision de M. Smotrich n’est pas la première que le gouvernement israélien prend à l’encontre de l’Autorité palestinienne et de l’économie palestinienne en général. Elle s’inscrit dans le prolongement d’une série de mesures déclarées et non déclarées visant à saper l’autorité. En effet, l’AP représente le gouvernement potentiel d’un futur État palestinien auquel les gouvernements israéliens successifs, qu’ils soient de droite ou de gauche, se sont toujours opposés

Israël a toujours utilisé les recettes fiscales pour faire pression sur l’Autorité palestinienne et saper l’économie palestinienne ; il ne s’agit pas d’une réponse au 7 octobre.

Les transferts ont été bloqués sous de nombreux prétextes, dont celui de punir l’AP pour toute démarche politique qu’elle entreprend, comme l’adhésion à la Cour pénale internationale en 2015, par exemple. En effet, l’État d’occupation déduit systématiquement une partie des fonds depuis 2019, sous prétexte que l’AP verse des allocations aux familles des prisonniers et martyrs palestiniens, ce qu’Israël qualifie de « soutien au terrorisme ».

Depuis le 7 octobre, le gouvernement d’occupation israélien a également déduit des recettes fiscales le montant que l’AP verse normalement à ses institutions dans la bande de Gaza, qui s’élève à environ 75 millions de dollars par mois, ce qui a entraîné une crise économique majeure. Il est clair qu’Israël veut séparer complètement la Cisjordanie de Gaza, bien que les deux soient des territoires palestiniens occupés et fassent partie de l’État palestinien indépendant envisagé.

En septembre de l’année dernière, le ministre palestinien des finances, Shukri Bishara, a annoncé qu’Israël retenait 800 millions de dollars à l’Autorité palestinienne. Selon les données du ministère des finances à Ramallah le mois dernier, le montant total des recettes fiscales retenues par Israël s’élevait à 1,6 milliard de dollars, soit l’équivalent de 25 à 30% du budget annuel total de l’Autorité palestinienne.

Cette situation a entraîné un déficit financier sans précédent dans la trésorerie de l’Autorité palestinienne, menaçant sa capacité à fournir des services de base tels que la santé, l’éducation et la sécurité, et à payer les salaires des fonctionnaires qui reçoivent des salaires partiels depuis des années. En raison de ces déductions, le gouvernement palestinien n’a pas été en mesure de payer l’intégralité des salaires de ses employés depuis novembre 2021, alors qu’il s’était engagé à en payer 80 à 85% jusqu’au déclenchement de la guerre contre les Palestiniens de Gaza. Ce pourcentage a progressivement diminué pour atteindre 50% au cours des deux derniers mois. Les fonctionnaires sont désormais dans l’incapacité de s’acquitter de leurs obligations financières mensuelles envers les banques et les écoles.

Les institutions publiques palestiniennes ont réduit les heures de travail afin d’économiser de l’argent, ce qui a entraîné une réduction des services, notamment dans les domaines de la santé et de l’éducation dans les écoles et les universités. L’enseignement se fait principalement en ligne.

Les fonctionnaires palestiniens – dont je fais partie – n’ont pas reçu de salaire complet depuis 2021, et le total des arriérés dus équivaut à six mois de salaire complet. Collectivement, cela représente environ 750 millions de dollars, auxquels s’ajoutent 800 millions de dollars de dettes envers le secteur privé, ce qui a eu un impact majeur sur les hôpitaux privés et les sociétés pharmaceutiques. Incapable de remplir ses propres obligations financières, et avec un pouvoir d’achat réduit pour les biens et les services, le secteur privé du commerce et des services a été paralysé.

Outre les dépenses du gouvernement, en particulier les salaires des 147 000 fonctionnaires, l’économie palestinienne repose sur deux autres piliers qui ont été gravement endommagés depuis le 7 octobre : le marché du travail israélien et le secteur privé. Israël a empêché les travailleurs palestiniens d’entrer dans l’État d’occupation, ce qui signifie que 200 000 d’entre eux ont perdu leur unique ou principale source de revenus et sont au chômage.

Cette situation a réduit le pouvoir d’achat des familles palestiniennes, ce qui a eu un effet d’entraînement sur les entreprises privées et a augmenté le chômage. On estime à 500 000 le nombre de Palestiniens au chômage en Cisjordanie occupée, des milliers d’emplois ayant été perdus.

Le chômage atteint un niveau sans précédent.

La diminution du soutien financier accordé à l’Autorité palestinienne par les États arabes a encore aggravé la situation. En outre, l’Autorité a atteint sa limite d’emprunt auprès des banques, ce qui a rendu encore plus difficile le paiement des salaires des employés, et le cycle des dépenses continue donc de s’effondrer.

Tout cela a conduit à la quasi-paralysie de l’économie palestinienne et à une forte pression sur les citoyens ordinaires qui ne peuvent plus trouver d’emploi et n’ont que peu ou pas d’économies pour couvrir les besoins de base. Cette situation risque de déclencher des crises sociales, politiques et économiques majeures.

À tout cela s’ajoute le fait qu’Israël a tué plus de 500 Palestiniens en Cisjordanie depuis octobre et en a arrêté 9 000, la plupart sans inculpation ni jugement. Les camps de réfugiés et les villes du territoire occupé ont vu leurs infrastructures vitales détruites dans le cadre d’actes vicieux de punition collective visant à saper les activités légitimes de lutte contre l’occupation.

Nous, Palestiniens de Cisjordanie occupée, avons honte de parler de notre situation à cause de l’horreur du génocide sans précédent qui se déroule sous nos yeux à Gaza. Nous préférons garder le silence pour ne pas détourner l’attention de ce qui se passe là-bas. Nous comprenons qu’Israël cherche à séparer Gaza de la Cisjordanie afin d’anéantir tout niveau de solidarité au sein d’une société palestinienne unie. Le fait est que nous, en Cisjordanie, préférerions mourir de faim avec nos frères de la bande de Gaza plutôt que de voir l’Autorité palestinienne cesser de remplir ses obligations à leur égard et à l’égard des familles des martyrs et des blessés.

Fareed Taamallah
Journaliste palestinien vivant à Ramallah, Fareed est agriculteur et militant politique et environnemental.
Middle East Monitor
Traduction : AFPS
https://www.france-palestine.org/Alors-que-Gaza-est-victime-d-un-genocide-physique-la-Cisjordanie-est-confrontee

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Les raids israéliens à Gaza ont probablement violé
à plusieurs reprises les lois de la guerre –
Bureau des droits de l’homme de l’ONU

Un nouveau rapport du Bureau des droits de l’homme de l’ONU a examiné six attaques israéliennes à Gaza ayant fait de nombreuses victimes et a déterminé que les lois de la guerre étaient « constamment violées », en ce qui concerne l’utilisation de bombes extrêmement puissantes et l’absence présumée de distinction entre les combattants et les civils.

« L’obligation de choisir des moyens et des méthodes de guerre qui évitent ou, à tout le moins, minimisent dans toute la mesure du possible les dommages causés aux civils semble avoir été systématiquement violée dans la campagne de bombardement d’Israël », a déclaré dans un communiqué, Volker Turk, Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme.

Selon le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH), ces six attaques sont qualifiées d’«emblématiques» des tactiques israéliennes dans cette guerre de plus de huit mois, impliquant l’utilisation présumée de bombes pesant jusqu’à 920 kg sur des bâtiments résidentiels, une école, des camps de réfugiés et un marché.

Des cibles par milliers
Ces armes mesurant plus de trois mètres ainsi que des versions plus petites ont été déployées du 9 octobre au 2 décembre 2023, causant 218 décès confirmés, a noté le HCDH, ajoutant que le nombre réel de décès était probablement beaucoup plus élevé.

Le rapport du HCDH conclut que la série de frappes israéliennes, illustrée par les six incidents, indique que les FDI pourraient avoir violé à plusieurs reprises les principes fondamentaux du droit de la guerre.

Le document cite une mise à jour des Forces de défense israéliennes du 11 novembre 2023 selon laquelle l’armée de l’air a « frappé plus de 5 000 cibles pour éliminer les menaces en temps réel » depuis qu’elle a commencé à bombarder Gaza un mois plus tôt. À cette date, les autorités sanitaires de Gaza avaient recensé 11 078 Palestiniens tués, 2 700 disparus et environ 27 490 blessés.

« Les méthodes et moyens choisis par Israël pour mener les hostilités à Gaza depuis le 7 octobre, notamment l’utilisation massive d’armes explosives à large rayon d’action dans des zones densément peuplées, n’ont pas permis de faire une distinction effective entre les civils et les combattants », , a détaillé ce rapport des équipes du Chef des droits de l’homme de l’ONU.

La protection des civils doit être une priorité 
Décrivant les frappes sur le quartier d’Ash Shuja dans la ville de Gaza, les auteurs du rapport notent que la zone de destruction mesurait environ 130 mètres de large et qu’elle a détruit 1  bâtiments. L’étendue des dommages aux bâtiments et des cratères indique qu’environ neuf bombes GBU-31 ont été utilisées, a déclaré le HCDH, ajoutant qu’au moins 60 personnes auraient été tuées.

Les GBU-31, 32 et 39 sont principalement utilisées pour traverser plusieurs étages de béton et peuvent faire s’effondrer complètement de grandes structures. Les effets de ces armes dans ces zones ne peuvent pas être limités, comme l’exige le droit international. Ce qui fait que des objets militaires, des civils et des infrastructures civiles sont frappées sans distinction, ajoute le rapport.

« Les vies et les infrastructures civiles sont protégées par le droit international humanitaire. Ce droit énonce les obligations très claires des parties aux conflits armés qui font de la protection des civils une priorité ».

Des bruits de guerre ininterrompus
Pendant ce temps, à Gaza, les habitants sont contraints de s’abriter au milieu de destructions « inimaginables », a déclaré Ajith Singhay, Chef du bureau du HCDH dans le territoire palestinien occupé.

S’adressant aux journalistes par liaison vidéo depuis Amman à son retour d’une mission d’évaluation dans plusieurs endroits de l’enclave palestinienne, M. Sunghay a décrit comment les habitants de Gaza survivent à peine après avoir été déplacés à plusieurs reprises par la violence et les ordres d’évacuation des forces de défense israéliennes. 

« Les hôpitaux sont pleins à craquer et l’odeur est insupportable… les eaux usées se déversent dans les tentes, il n’y a pas d’eau potable… Si les bombes ne tuent pas, la maladie le fera », a affirmé M. Singhay après avoir visité Khan Younis, Rafah et Deir-Al-Balah. 

« Le bruit des bombes, des fusils et des drones est constant », a-t-il ajouté. « Le bruit de la guerre est ininterrompu jour et nuit. En 22 ans de travail aux Nations unies, y compris dans de nombreuses situations de conflit et d’après-conflit, je n’ai jamais vu de tels défis pour les Nations unies, les droits de l’homme et les partenaires de l’aide humanitaire. La destruction est inimaginable ».

Poursuite des tirs de projectiles en direction d’Israël
Sur le terrain, les dégâts sont perceptibles. Le paysage de Khan Younis a maintenant « changé », a poursuivi le responsable du HCDH. « Il est rempli de bâtiments et d’infrastructures entièrement ou partiellement détruits. Les personnes que j’ai rencontrées m’ont raconté qu’elles avaient déménagé dix fois… elles survivent à peine. »

Bien que le rapport se concentre sur Israël, il souligne également que les groupes armés palestiniens ont continué à tirer des projectiles en direction d’Israël, ce qui est contraire aux obligations qui leur incombent en vertu du droit humanitaire international. 

Le rapport insiste également sur l’obligation de protéger les civils et les biens de caractère civil en évitant de placer des objectifs militaires dans des zones densément peuplées ou à proximité de celles-ci.

« Tout le monde s’inquiète non seulement du présent, mais aussi de l’avenir. Tous n’ont non seulement pas de plan B, mais pas de plan A, ils ne savent pas quoi faire. Ils vivent simplement au jour le jour. La seule question qu’ils se posent est la suivante : quand tout cela finira-t-il ? Il y a un réel sentiment de désespoir », a insisté M. Singhay.

Une Commission d’enquête de l’ONU fustige un « mépris flagrant du droit international »
En écho à ce rapport du HCDH, une Commission d’enquête par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a dénoncé « le mépris flagrant du droit international dans l’ensemble du territoire palestinien occupé », qui a eu un impact disproportionné sur les enfants palestiniens.

« À Gaza, les forces de sécurité israéliennes ont tué et mutilé des dizaines de milliers d’enfants, et des milliers d’autres restent probablement sous les décombres. Les attaques israéliennes ont également gravement affecté les infrastructures essentielles au bien-être des enfants, notamment les hôpitaux, les écoles et les services de base », a déclaré l’organe onusien basé à Genève, Navi Pillay, Présidente de la Commission d’enquête sur le territoire palestinien occupé.

L’ancienne Cheffe des droits de l’homme de l’ONU et son équipe ont réitéré les conclusions du rapport déjà publiées la semaine dernière et indiquant que les autorités israéliennes étaient responsables de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme.

Outre le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des civils, l’utilisation de la famine comme méthode de guerre, le « siège total » de l’enclave palestinienne constitue une « punition collective ». « Bien que les responsables israéliens aient déclaré à plusieurs reprises que leurs opérations à Gaza visaient à détruire le Hamas et à libérer les otages, aucun de ces objectifs n’a été largement atteint, au prix de milliers de vies », a-t-elle dit.

Le Hamas doit également respecter le droit international 
En ce qui concerne l’attaque du 7 octobre 2023 en Israël, la Commission a conclu que le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens sont responsables des crimes de guerre, notamment le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des civils, le meurtre ou l’homicide volontaire, la torture et la prise d’otages.
Des membres du Hamas, des groupes armés palestiniens et certains civils palestiniens ont délibérément tué, blessé, torturé, pris des otages – y compris des enfants – et commis des violences sexuelles et sexistes contre des civils et des membres des forces de sécurité israéliennes, dont certains étaient hors de combat. Des enfants ont été tués, blessés, maltraités physiquement et émotionnellement et instrumentalisés par les assaillants à des fins de propagande.

Plus largement, les enquêteurs indépendants onusiens notent qu’un principe fondamental du droit international, est que l’action illégale d’une partie à un conflit armé ne justifie pas l’action illégale d’une autre partie. « Israël a le droit de protéger ses citoyens de la violence des groupes armés palestiniens mais, ce faisant, il doit respecter le droit international. Le Hamas et les groupes armés palestiniens doivent également respecter le droit international ».

Dans ses conclusions, la Commission rappelle qu’elle poursuivra ses enquêtes sur tous les crimes. Elle fera en sorte que les responsables répondent de leurs actes. Nay Pillay appelle donc tous les États à soutenir les processus de la Cour internationale de justice et de la Cour pénale internationale.

https://news.un.org/fr/story/2024/06/1146471

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Journée internationale de solidarité avec les réfugiés

En 2024 partout dans le monde, des conflits toujours plus nombreux sont à l’origine de déplacements massifs de population. Des millions de personnes sont contraintes de fuir parce que leur vie est en danger. Réfugiées ou déplacées à l’intérieur de leur pays, elles ont toutes droit à une protection garantie par le droit international, assurée par le Haut-Commissariat aux Réfugiés (UNHCR) ou par l’UNRWA (Office de l’ONU pour les réfugiés de Palestine).

Depuis 1948, les Palestiniens vivent une situation singulière, qui s’aggrave et doit être dénoncée avec force à l’occasion de cette Journée internationale.

Les réfugiés palestiniens de 1948 ainsi que ceux de 1967 et leurs descendants sont aujourd’hui près de 8 millions, répartis pour l’essentiel au Liban, en Syrie, en Jordanie, en Cisjordanie et à Gaza. L’État d’Israël refuse d’appliquer la résolution 194 de l’ONU sur le droit au retour. Les réfugiés palestiniens vivent dans la précarité, sans nationalité palestinienne, sans droits civiques.

Dans la bande de Gaza soumise à un siège brutal depuis 17 ans, plus de 70% de la population est composée de réfugiés, descendants de Palestiniens dépossédés et déplacés lors de la Nakba de 1948. L’offensive israélienne qui a suivi l’attaque violente du Hamas le 7 octobre 2023 a plongé toute la population dans une crise humanitaire dramatique. Contraintes par des « ordres d’évacuation » successifs, environ 1,7 million de personnes – sur 2,2 millions d’habitants – ont dû quitter leurs domiciles, se déplacer à plusieurs reprises sans possibilité de retourner chez elles. Elles vivent dans des habitats de fortune, sous les bombes, et sont privées de nourriture, d’eau, d’électricité, de médicaments. Aucun lieu n’est sûr, la possibilité de fuir n’existe quasiment pas. L’UNRWA est la seule institution mandatée et capable d’assurer une protection et des aides d’urgence humanitaire, mais elle est elle-même victime des opérations militaires israéliennes meurtrières et destructrices.

Les Palestiniens gazaouis qui ont réussi à franchir la frontière à Rafah sont la proie de passeurs qui profitent de leur précarité absolue.

Les institutions internationales (HCR et UNRWA) doivent être confortées dans leurs missions de protection des réfugiés et déplacés internes palestiniens où qu’ils vivent, elles restent les garantes du respect de leurs droits fondamentaux.

L’UNRWA est la cible de l’État d’Israël qui œuvre activement à sa disparition, dans l’intention de liquider la question des réfugiés et donc leur droit au retour. Après les campagnes de discrédit qui ont conduit plusieurs États à cesser leur contribution financière au fonctionnement de l’UNRWA, après l’attaque et l’incendie de son QG à Jérusalem par des colons lourdement armés, un pas de plus est franchi. Le parlement israélien a adopté mercredi 29 mai en première lecture deux projets de loi, l’un visant à révoquer les immunités et les privilèges accordés à l’UNRWA, l’autre à désigner celle-ci comme organisation terroriste.

La France doit non seulement réaffirmer son engagement financier auprès de l’UNRWA, mais le rehausser afin de lui permettre d’exercer ses missions auprès des réfugiés palestiniens.

Parce que tout doit être mis en œuvre pour mettre fin à l’exil des réfugiés le plus rapidement possible, la France doit contribuer à la recherche d’une solution politique qui permettra de mettre fin à cette injustice : œuvrer pour la mise en application de la résolution 194 et promouvoir l’auto-détermination du peuple palestinien.

Dans l’immédiat, la France doit aussi accueillir dignement et sans réserve tous les Palestiniens et leurs familles venus chercher refuge sur notre territoire et leur accorder protection.

Le Bureau National de l’AFPS, le 20 juin 2024
https://www.france-palestine.org/Journee-internationale-de-solidarite-avec-les-refugies

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Accès des entreprises israéliennes d’armement au salon Eurosatory : après le jugement de la Cour d’Appel,
l’attitude de l’État revient en première ligne

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La Cour d’Appel de Paris, par une décision rendue hier (18 juin) en fin de soirée, a annulé les décisions prises en référé, le 14 juin, par le tribunal judiciaire de Bobigny.

Rappelons que les associations ASER (Action sécurité éthique républicaines), AFPS (Association France Palestine Solidarité) et Stop Fuelling War, appuyées en intervention volontaire par l’ONG palestinienne Al-Haq, avaient assigné en référé la société COGES, organisatrice du salon d’armement Eurosatory, pour qu’elle prenne des mesures efficaces visant à empêcher les sociétés d’armement israéliennes et leurs filiales de venir vendre leurs technologies alors même que l’armée israélienne commet à Gaza des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, et que la Cour Internationale de Justice pointe le caractère plausible d’un génocide en cours. Cette procédure était soutenue par plusieurs collectifs dont Stop Arming Israel France et Urgence Palestine.

Le 31 mai, le gouvernement français avait donné instruction à la société COGES de ne plus accueillir les entreprises israéliennes d’armement sur le salon Eurosatory : COGES avait annulé leurs stands, mais n’avait pris aucune mesure pour interdire aux délégations de ces entreprises d’entrer sur le site du salon Eurosatory et d’y bénéficier des capacités d’accueil de leurs filiales.

C’est cette incohérence qui avait été corrigée par le tribunal judiciaire de Bobigny, qui avait ordonné notamment à COGES d’interdire l’entrée du salon Eurosatory aux délégations des entreprises israéliennes d’armement, et à toute entreprise présente sur le stand de les accueillir. COGES avait appliqué cette décision et a indiqué avoir ainsi désactivé pas moins de 850 badges d’entrée. Cela montrait a posteriori l’ampleur du problème et la capacité d’y remédier.

La Cour d’Appel a annulé la décision du tribunal judiciaire de Bobigny, en contestant le pouvoir du juge judiciaire d’interpréter un acte de gouvernement à la lumière du droit international applicable pour prescrire les mesures susceptibles de lui donner une pleine effectivité. Cette invocation des actes de gouvernement, qui interdit de fait à la justice de s’intéresser au respect des engagements internationaux de la France en matière de respect des droits humains et des règles pour le commerce des armes, est contestée par les associations requérantes qui se réservent toutes voies de recours.

Lors de l’audience en cour d’appel, les parties adverses ont abondamment usé de l’argument de la discrimination, dont il a également été fait état dans un jugement du tribunal de commerce de Paris survenu le matin-même. Nous rappelons qu’en matière de commerce des armes, le fait de s’intéresser au comportement d’un État correspond à la pratique habituelle. Par ailleurs, les mesures prises par la COGES à la suite de la décision du tribunal de Bobigny n’étaient pas liées à la nationalité des visiteurs du salon, mais à leur fonction en relation avec des entreprises israéliennes d’armement.

La responsabilité de l’exécutif français et sa coupable ambivalence sont particulièrement engagés dans cette situation. Ainsi, le Directeur Général de l’Armement, le dimanche 16 juin, a envoyé une lettre à la COGES, précisant que le gouvernement ne lui demandait pas d’autre mesure que la suppression des stands des entreprises israéliennes d’armement.

Les associations requérantes et les collectifs qui les soutiennent interpellent le président de la République : en matière de respect des engagements internationaux de la France, devant un génocide en cours, est-il possible, « en même temps » de prendre une mesure symboliquement forte concernant les stands des entreprises israéliennes, et de les autoriser à venir massivement contourner cette mesure au salon Eurosatory pour y conclure leurs affaires ?

Plus que jamais, la mobilisation s’impose face à la présence au salon Eurosatory des entreprises d’armement qui contribuent activement au génocide en cours. Un nouveau rassemblement est appelé ce vendredi 21 juin à 12h, au parc des expositions de Villepinte (RER B).

Associations /collectifs de la coalition :
L’assignation au tribunal de Bobigny a été portée par :
– 
l’ONG ASER,
– 
AFPS (Association France Palestine Solidarité)
– 
Stop Fuelling War
Et Al Haq, en intervention volontaire à l’assignation.

Cette action est née du travail d’une coalition d’une vingtaine de collectifs, avocat.e.s, juristes, non juristes coordonnée au sein d’un espace de travail collaboratif qui donne accès à la stratégie juridique à tou.te.s, dont :
– Urgence Palestine
– 
Stop Arming Israel France
– 
La Ligue des Juristes pour la Paix
– 
TEJE (Travailler Ensemble Jeunes et Engagé·e·s)

La coalition est représentée par les avocats Dominique Cochain et Matteo Bonaglia.
Une cinquantaine d’organisations et de collectifs ont par ailleurs apporté leur soutien à cette action, dès sa première étape.

https://www.france-palestine.org/Acces-des-entreprises-israeliennes-d-armement-au-salon-Eurosatory-apres-le
Israeli arms companies access to Eurosatory: after the Court of Appeal ruling; the French State’s attitude returns to the forefront

https://www.france-palestine.org/Israeli-arms-companies-access-to-Eurosatory-after-the-Court-of-Appeal-ruling

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Des chefs syndicaux internationaux affirment leur appui
aux syndicats et au peuple palestiniens

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Cette semaine, des dirigeants de sept fédérations syndicales internationales (FSI) et de la Confédération syndicale internationale (CSI) se sont rendus à Ramallah pour manifester leur solidarité aux syndicats de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. Ces organisations représentent des personnes travaillant dans presque tous les secteurs de l’économie mondiale et ont plus de 200 millions de membres dans plus de 150 pays. De concert avec leur affiliés palestiniens et d’autres, ces FSI et tous les membres du Conseil des Syndicats mondiaux (CGU) se sont engagés à intensifier les efforts faits pour aider les syndicats locaux à traverser cette période difficile pour les travailleurs et travailleuses et à jouer leur rôle de facteurs clés de changement en Palestine.

La délégation, qui comprenait les secrétaires généraux de la CSI et des FSI ainsi que de nombreux dirigeants syndicaux principaux du monde entier, a rencontré des représentants de la Fédération générale des syndicats de Palestine (FGSP) et des dirigeants syndicaux représentant les travailleurs et travailleuses de Cisjordanie et de la bande de Gaza. Elle a aussi rencontré le président palestinien Mahmoud Abbas, le premier ministre Mohammad Mustapha et plusieurs ministres gouvernementaux pendant la mission du 28 au 30 mai 2024. Plusieurs syndicats mondiaux collaborent déjà étroitement avec leurs collègues palestiniens, tous engagés à appuyer la lutte des travailleurs et travailleuses de Palestine.

La délégation a indiqué clairement ce qui suit : « nous exprimons notre solidarité à l’égard des syndicats et des travailleurs palestiniens en ces temps difficiles. Nous nous inquiétons grandement de la grave crise humanitaire que vit la population de la bande de Gaza et nous épaulons les Palestiniens, les Israéliens et les gens du monde entier qui appellent à la paix, à l’égalité et à la justice ».

Les priorités immédiates doivent comprendre un cessez-le-feu immédiat et permanent et le plein respect du droit humanitaire international, l’accès immédiat à l’aide humanitaire, la libération de tous les otages et les autres personnes détenues sans qu’ait été suivie une procédure judiciaire appropriée et le retour chez eux en sécurité de tous les travailleurs et travailleuses piégés par le conflit.

La délégation a rappelé la politique de longue date de la CSI et d’autres syndicats mondiaux en faveur d’une solution à deux États et de l’appel à une paix juste et durable par la pleine mise en œuvre des résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité de l’ONU pour faciliter un avenir économique valable dans une Palestine indépendante. Cela comporte la fin de l’occupation de la Cisjordanie, le démantèlement de toutes les colonies illégales et la reconnaissance des frontières d’avant 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale d’un État palestinien.

La délégation a incité les gouvernements à rétablir et à accroître le financement de l’UNRWA. « Le rôle de l’UNRWA est crucial pour la prestation de services essentiels et le soutien des Palestiniens à un moment où ils en ont le plus besoin. »

« Nous sommes venus renforcer et approfondir notre engagement à l’égard des travailleurs et travailleuses palestiniens et de leurs syndicats – nous faisons tous partie de la même grande famille. Notre objectif est d’instaurer une Palestine démocratique et souveraine, vivant en paix et en sécurité justes et durables aux côtés d’Israël. Nous savons que les syndicats sont un élément essentiel de toute démocratie et que des syndicats indépendants forts et démocratiques seront un des principaux facteurs de l’atteinte de cet objectif en Palestine. »

La délégation a indiqué qu’elle avait entendu d’émouvants témoignages de Palestiniens qui avaient payé un prix terrible pendant la guerre en cours. Outre la réalité déchirante des destructions et des pertes de vies dans la bande de Gaza, nous avons entendu parler de la violence des colons et de restrictions des droits de la personne tels que la liberté de circulation ainsi que de difficultés économiques en Cisjordanie.

Néanmoins, ce qui ressort, c’est l’engagement à l’égard du syndicalisme et de son potentiel d’aider à un juste règlement dans le chaos plus large de ce conflit.

« Notre responsabilité de syndicalistes mondiaux est de nourrir ce sentiment, et nous appelons le mouvement syndical mondial à mettre en pratique ses principes de paix, d’humanité, de démocratie et de solidarité. Il peut y arriver notamment en continuant à investir dans un dialogue constructif avec les syndicats tant d’Israël que de Palestine qui reconnaissent le rôle critique qu’ils sont appelés à jouer dans leurs sociétés respectives. »

« Les organisations syndicales internationales n’oublieront ni ne délaisseront leurs consœurs et confrères de Palestine. Nous redoublerons d’efforts pour soutenir vos syndicats et vous soutenir. Les syndicats sont restés constants – démocratiques, enracinés dans leurs communautés et bien équipés pour apporter un soutien concret pendant la reconstruction, qui devrait intégrer les principes du travail décent et des services publics de qualité. »

De nombreux syndicats internationaux ont déjà apporté une aide importante aux travailleurs et travailleuses par l’intermédiaire des syndicats de la bande de Gaza et de la Cisjordanie. L’Internationale de l’éducation a fourni une aide financière à plus de 1 000 enseignants en Palestine et des abris à plus de 5 000 enfants à Rafah. La Fédération internationale des journalistes apporte un soutien direct aux reporters de la bande de Gaza et gère un centre de solidarité doté d’un espace de travail et d’équipements à Khan Younis. La Fédération internationale des ouvriers du transport et l’Internationale des services publics ont toutes deux lancé des fonds de solidarité pour apporter une aide immédiate et un soutien à plus long terme aux travailleurs et travailleuses palestiniens des transports et des services publics et à leurs familles. L’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois a fourni une aide humanitaire et des abris aux travailleurs de la construction et à leurs familles.

La délégation a conclu : « Les syndicats font partie du mouvement mondial pour la paix. Nous défendons la paix au même titre que des valeurs aussi importantes que la démocratie et l’humanité. C’est pourquoi nous sommes ici. »

https://www.pressegauche.org/Des-chefs-syndicaux-internationaux-affirment-leur-appui-aux-syndicats-et-au

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« Le Liban, une partie de la terre promise » : la droite messianique d’Israël cible de nouveaux territoires pour les colonies

Avant de rejeter les messianistes religieux qui ont tenu lundi une petite conférence en ligne avec pour objectif de récupérer la « Terre promise de Dieu », rappelez-vous que leurs projets de colonisation en Cisjordanie semblaient tout aussi farfelus il y a 50 ans.

Vers la fin de la conférence en ligne organisée lundi par Uri Tzafon (« Réveillez le Nord »), un mouvement d’extrême droite appelant à la colonisation israélienne au sud du Liban, le sentiment s’est fait sentir que cet événement n’était pas vraiment digne d’être médiatisé.

Après tout, il s’agissait d’un groupe de messianistes religieux discutant d’un sujet si apparemment détaché de la réalité qu’à son apogée, seules 280 personnes regardaient sa chaîne YouTube.

Ensuite, le modérateur, le professeur Amos Azaria, a introduit un panel sur les « Modèles réussis de peuplement du passé et les leçons pour le Sud-Liban » avec Daniella Weiss , Yehudit Katzover et le rabbin Elishama Cohen.

Contrairement aux orateurs précédents, ce panel n’avait aucune expertise ni connaissance de l’histoire ou de la topographie du Liban. Mais ce qu’ils avaient était la preuve qu’un petit groupe déterminé peut changer le cours de l’histoire d’Israël.

Dans les années 1970, Weiss et Katzover faisaient partie des dirigeants du mouvement qui a fondé les colonies juives de Samarie et d’Hébron. Cohen, un personnage moins connu, a passé les sept dernières années à grimper avec un petit groupe de jeunes étudiants jusqu’aux ruines de Homesh – la colonie de Cisjordanie expulsée en 2005 dans le cadre du plan de désengagement. Cependant, le gouvernement Netanyahu a adopté l’année dernière sa loi « annulant le désengagement » , lui permettant d’y construire une structure permanente.

Weiss se souvient de l’époque où Gush Emunim, le premier mouvement de colons, avait tenté de fonder sa première colonie en Samarie à Sebastia, il y a exactement 50 ans. Aujourd’hui, elle est à la tête d’un des groupes qui tentent de reconstruire les colonies israéliennes à Gaza et est également ouverte aux suggestions concernant le Liban. Elle a les reçus : un demi-million d’Israéliens vivent désormais en Cisjordanie.

« Il faut rêver », a déclaré Cohen, faisant écho à Weiss. « Il y a beaucoup d’obstacles, mais nous nous cognerons la tête contre le mur et le mur se brisera. Au Liban aussi. « Ils constituent l’une des réussites du dernier demi-siècle d’Israël – et s’ils rejoignent le mouvement visant à coloniser le Sud-Liban, qui sommes-nous pour les qualifier d’illusoires ? »

Ils vivent parmi nous – des Israéliens qui regardent vers le nord et rêvent d’une maison au Liban. Israel Socol, un réserviste tué au combat à Gaza au début de l’année, était l’un d’entre eux. Le mouvement Uri Zafon porte son nom, ainsi que celui de sa sœur, qui a ouvert le débat lundi en rappelant son désir de « vivre dans un endroit où il fait vert en été et blanc en hiver ». Sur sa tombe, ils ont écrit les mots « Je t’ai vu à Gaza, à l’ombre des arbres du Liban ».

Socol n’était pas seul. Une succession d’orateurs ont suivi, tous zoomant depuis leur domicile. Eliyahu ben Asher, qui n’a été présenté sous aucun titre mais qui, selon le site Srugim auquel il contribue régulièrement, est « un rabbin, un sofer [scribe des rouleaux de la Torah], un historien amateur et un réserviste », a présenté « l’aspect géopolitique » du Liban.

Apparemment, il s’agit d’une « construction colonialiste – une intervention occidentale dans l’Empire ottoman ». En d’autres termes, « tout ce qu’on dit au Moyen-Orient à propos d’Israël est en réalité vrai lorsqu’il s’agit du Liban… c’est un État en faillite depuis sa naissance ». Et puisque le Liban est une entité inventée avec une frontière illogique avec Israël – un autre vestige colonial de l’accord Sykes-Picot de 1916 divisant les terres ottomanes – Israël devrait aspirer à « une véritable frontière entre le sud et le nord de la Galilée où la guerre prendra fin, et c’est le fleuve Litani.

« Le prochain en ligne était le bibliste Prof. Yoel Elitzur, qui s’est enthousiasmé pour le « miracle évident » et le « message divin » de l’attaque du Hamas le 7 octobre . Il a exhorté les auditeurs à comprendre ce que Dieu exigeait d’eux (ce message a valu à Elitzur la suspension de l’Académie de la langue hébraïque il y a huit mois lorsqu’il en a parlé en ligne).

Elitzur a apporté une multitude de citations et de noms de lieux de l’Ancien Testament pour prouver que le Liban fait partie de la Terre promise de Dieu, que ce soit dans le cadre de la « promesse limitée » – qui atteint le golfe d’Alexandrette en Turquie et comprend tout le Liban et l’ouest de la Syrie – ou dans le cadre de la « promesse élargie », qui inclut les terres situées au sud de l’Euphrate, toute la Syrie et l’ouest de l’Irak.

L’orateur suivant était Hagi ben Artzi, mieux connu comme le frère aîné de Sara Netanyahu. « Nous ne sommes pas radicaux – nous ne voulons pas un mètre au-delà de l’Euphrate », a-t-il déclaré aux téléspectateurs. Il a également ajouté le Jeshimon biblique, l’Arabie Saoudite, à la liste.

Revenons aux temps modernes et l’orateur suivant était l’avocat Doron Nir Tzvi, dont la contribution à la conférence peut être résumée dans sa déclaration selon laquelle « tout est des conneries » : Si Israël décide d’annexer le sud du Liban, cela peut être formalisé légalement et diplomatiquement. Après lui est venu Amiad Cohen qui, fait intéressant, n’a pas été présenté par son travail quotidien – PDG de la branche israélienne du fonds ultra-conservateur Tikvah – mais comme major dans les réserves de l’armée israélienne. Il s’est montré principalement préoccupé par le fait que les généraux de Tsahal ne parlent plus de « capture de territoire » comme objectif de guerre, mais a déclaré qu’il espérait que lorsque « la troisième guerre du Liban » commencerait, la capture du territoire jusqu’au fleuve Litani serait effectivement un objectif primordial.

Vous pouvez ignorer cette conférence peu fréquentée, avec ses participants qui ont quitté la ligne, ne sachant pas comment lancer leur présentation de diapositives ou parlant d’une guerre qui n’a pas encore commencé. Après tout, ce n’est pas la première fois que la droite messianique parle de construire des colonies au sud du Liban. Gush Emunim appelait au retour à la « patrie de la tribu d’Aser » en 1982, lorsque la première guerre du Liban a éclaté. Rien n’en est alors sorti.

Mais il faut aussi regarder la réalité d’aujourd’hui, dans laquelle ce même segment politico-social-religieux d’Israël a établi une vaste entreprise de colonisation en Cisjordanie, ce qui aurait semblé illusoire il y a 50 ans. C’est la réalité à laquelle visait le ministre des Finances – et, ce qui est tout aussi important, peut-être plus, le ministre de la Défense – Bezalel Smotrich lorsqu’il a exigé il y a deux semaines qu’Israël « occupe le sud du Liban » si le Hezbollah continue de tirer des missiles sur les communautés du nord d’Israël. C’est une évolution tellement imaginaire qu’il n’existe même pas d’enquêtes demandant combien d’Israéliens soutiennent l’idée de colonies au sud du Liban (il existe des enquêtes sur la reconstruction des colonies à Gaza ). Pourtant, cela pourrait devenir très rapidement un élément central du discours public israélien si une guerre terrestre commençait avec le Hezbollah.

Ils ont déjà prouvé qu’en Israël, les illusions d’aujourd’hui sont la politique de demain et la réalité du lendemain.

Anshel Pfeffer
Traduction par E. T. pour ESSF.
https://www.europe-solidaire.org/spip.php?article71107

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Qu’y a-t-il derrière le conflit en cours entre Biden et Netanyahu ?

Bien que l’opération Déluge d’al-Aqsa ait changé le climat politique israélien au détriment de Netanyahu et du bloc qu’il a formé avec l’extrême droite sioniste à la fin de 2022, il exerce toujours le pouvoir et peut le conserver constitutionnellement jusqu’en 2026… (traduit de l’arabe).

S’il fallait une preuve supplémentaire des limites de la « démocratie représentative » traditionnelle, la scène politique israélienne en fournit une excellente illustration. Bien que l’opération Déluge d’al-Aqsa ait changé le climat politique israélien au détriment de Netanyahu et du bloc qu’il a formé avec l’extrême droite sioniste à la fin de 2022, il exerce toujours le pouvoir et peut le conserver constitutionnellement jusqu’en 2026. Netanyahu a réussi à absorber une partie de la colère populaire israélienne qui l’a tenu pour responsable de ne pas avoir prévenu l’attaque armée du 7 octobre, et cela en créant un petit « cabinet de guerre » avec la participation de l’un des deux principaux pôles de l’opposition sioniste. Cela lui a permis de se projeter comme homme soucieux de « l’unité nationale » sioniste face au peuple palestinien.

Outre la dimension politique de la manœuvre, Netanyahu a voulu impliquer ses opposants politiques dans la responsabilité de la gestion de l’offensive contre la bande de Gaza. Il l’a fait en impliquant deux hommes qui avaient assumé successivement le poste de chef d’état-major de l’armée israélienne entre 2011 et 2019, Benny Gantz et Gadi Eizenkot, tous deux membres du bloc d’opposition Unité nationale à la Knesset. Le cabinet de guerre a incarné le consensus sioniste vengeur qui a conduit à la destruction de Gaza et à l’extermination d’environ cinquante mille de ses habitants jusqu’à présent, avec l’aide des États-Unis.

Mais le consensus sioniste représenté par ce cabinet de guerre a pris fin lorsque la réoccupation de la bande de Gaza a été achevée et que la question de son sort politique est arrivée à l’ordre du jour. À ce stade, le cabinet de guerre s’est divisé sur la position à adopter au sujet du « règlement » poursuivi par Joe Biden et l’administration américaine qu’il dirige. Ce « règlement » consiste à combiner des fragments du territoire de la bande de Gaza et de la Cisjordanie en un « État palestinien » nominalement gouverné par une « Autorité palestinienne » légèrement modifiée. Pour cela, la bande de Gaza serait soumise à une supervision militaire israélienne et arabe (principalement égyptienne). Alors que l’opposition sioniste soutient ce « règlement », Netanyahu ne peut pas l’approuver ouvertement sans rompre l’alliance qu’il a conclue avec l’extrême droite et devenir ainsi dépendant de ce que ses adversaires politiques actuels pourraient décider à son sujet.

Le problème pour Netanyahu est que le rapport des forces est complètement différent entre les deux cas. Alors que la participation de ses alliés « néonazis » au gouvernement dépend de lui, car ils n’auraient pas pu rêver de cette participation sans le profond opportunisme de Netanyahu et sa volonté de tout faire pour rester au pouvoir (et éviter les procès), l’opposition sioniste peut espérer prendre le pouvoir sans lui par le biais d’élections législatives anticipées. avec bon espoir d’obtenir une majorité à la Knesset. En effet, depuis le Déluge d’al-Aqsa, les sondages d’opinion en Israël indiquent que l’opposition est plus populaire que la coalition actuellement au pouvoir.

La manœuvre de Netanyahu pour inclure ses rivaux dans le cabinet de guerre, ainsi que son image de défenseur obstiné des intérêts sionistes face à la pression américaine, ont réussi à changer quelque peu la direction de l’opinion publique. Deux sondages publiés il y a quelques jours ont montré une augmentation de la popularité de Netanyahu, accompagnée d’une baisse de la popularité de son rival Gantz par rapport au pic atteint après l’opération Déluge d’al-Aqsa et son entrée au cabinet de guerre au nom de l’unité nationale sioniste. C’est que Gantz a commencé à porter avec Netanyahu la responsabilité de l’échec de l’élimination de la résistance armée à l’intérieur de la bande de Gaza après huit mois d’agression frénétique, en l’absence d’une vision claire concernant « le jour d’après », comme on appelle maintenant le destin politique et sécuritaire de Gaza. Cette nouvelle tendance dans l’opinion publique israélienne a certainement été un facteur clé dans la décision de Gantz de mettre fin à sa participation au cabinet de guerre.

Cependant, les sondages indiquent toujours une possible défaite de l’alliance actuelle entre le Likoud, le parti de Netanyahu, et les « néonazis » face aux blocs d’opposition. Alors que l’un des deux sondages récents indique que l’opposition pourrait remporter la majorité des sièges à la Knesset (61 sur 120), l’autre indique qu’elle aurait besoin de trois sièges pour atteindre cet objectif. Ces sièges pourraient être fournis par le bloc arabe islamique dirigé par Mansour Abbas, qui n’a cessé d’exprimer sa volonté de continuer à participer au jeu politique sioniste, ou par l’un des groupes sionistes affiliés à la coalition au pouvoir actuelle, ou tout autre petit bloc de la Knesset.

Par conséquent, Netanyahu ne prendra pas le risque de rompre son alliance avec l’extrême droite sioniste et faire face à la possibilité d’une bataille électorale anticipée, à moins qu’il n’obtienne des gains et des garanties, notamment en ce qui concerne ses démêlés judiciaires. Il peut rester au pouvoir avec ses alliés malgré les sondages confirmant qu’ils sont devenus minoritaires dans le pays, en dépit du fait que la période actuelle est l’une des plus graves que l’État sioniste ait traversées jusqu’à présent au cours de sa brève histoire. Il est clair aussi que Netanyahu mise sur la possibilité que Donald Trump remporte les élections présidentielles américaines qui auront lieu début novembre.

Tout cela est une source de grand embarras pour Biden, qui souhaite parvenir au « règlement » qu’il recherche avant les élections. C’est pourquoi l’administration américaine a invité Yoav Galant – ministre de la défense dans le gouvernement sioniste actuel, et rival de Netanyahu au sein du parti Likoud lui-même – à se rendre à Washington dans les prochains jours, avant que Netanyahu ne vienne prononcer un quatrième discours devant le Congrès américain le 24 juillet (ce qui, soit dit en passant, est un privilège qu’aucun autre chef d’État étranger n’a reçu dans l’histoire des États-Unis). Il ne fait pas de doute que l’administration Biden explore des moyens de faire pression sur Netanyahu par l’intermédiaire de Gallant, y compris la possibilité que ce dernier rompe avec Netanyahu en compagnie d’un nombre de membres du Likoud à la Knesset qui suffirait pour renverser le gouvernement en place et forcer de nouvelles élections.

Gilbert Achcar
Traduction de ma tribune hebdomadaire dans le quotidien de langue arabe, Al-Quds al-Arabi, basé à Londres. Cet article est paru le 18 juin en ligne et dans le numéro imprimé du 19 juin. Vous pouvez librement le reproduire en indiquant la source avec le lien correspondant. 
https://blogs.mediapart.fr/gilbert-achcar/blog/190624/qu-y-t-il-derriere-le-conflit-en-cours-entre-biden-et-netanyahu

Cosa c’è dietro il « conflitto » tra Biden e Netanyahu?
https://andream94.wordpress.com/2024/06/20/cosa-ce-dietro-il-conflitto-tra-biden-e-netanyahu/

¿Qué hay detrás del actual conflicto entre Biden y Netanyahu?
https://vientosur.info/que-hay-detras-del-actual-conflicto-entre-biden-y-netanyahu/

Auteur : entreleslignesentrelesmots

notes de lecture

Une réflexion sur « Quand l’Occident qualifie de « succès » le massacre de 270 Palestiniens (et autres textes) »

  1. Contre Eurosatory !
    Contre la complicité française !

    Le 31 mai 2024, le gouvernement français a signifié aux organisateurs du salon Eurosatory l’exclusion de 74 exposants israéliens soupçonnés de participer à des crimes de guerre.

    Le 6 juin, après s’être déclaré incompétent pour intervenir dans la conduite des relations internationales de la France, le tribunal de Bobigny avait accepté d’étendre l’exclusion initiale à tout représentant, courtier, intermédiaire, ou société écran des exposants israéliens. Le 18 juin, la Cour d’appel de Paris a annulé ces dispositions, arguant que si c’est ce qu’il avait voulu, « ces mesures auraient pu être prises par le gouvernement français ».

    Néanmoins, l’exclusion initiale prévaut, quoi qu’en dise le tribunal de commerce et les organisations pro-israéliennes, et les stands de ces entreprises restent vides au salon Eurosatory.

    Pour s’en assurer, nous appelons à un rassemblement :
    VENDREDI 21 JUIN À 12H, DEVANT LE SALON EUROSATORY
    au Parc des expositions de Villepinte (RER B)

    Cette bataille judiciaire est donc une demi victoire, qui s’ajoute à celle d’avoir mis en lumière ce commerce de la mort, d’avoir obtenu une couverture médiatique et une résonance diplomatique qui ne resteront pas sans impact sur les travailleurs de l’armement ainsi que sur le grand public.

    La Campagne BDS France qui, dès la première étape, avait apporté son soutien la coalition ayant porté l’assignation (ASER, AFPS, Stop Fuelling War, Al Haq), et soutenue par plusieurs collectifs et organisations, en appelle à votre solidarité pour les frais de justice :
    https://www.cotizup.com/justice-eurosatory

    Les associations requérantes et les collectifs qui les soutiennent veulent interpeller le président de la République et le ministère des armées sur les engagements internationaux de la France en matière de commerce des armes, et sur la complicité des entreprises d’armement françaises qui contribuent au génocide en cours. En effet, nous avons appris que Thalès vendait encore des composants électroniques pour équiper les drones armés israéliens en décembre 2023, soit en plein génocide [1].

    Un autre rapport révèle que depuis 4 ans, des institutions financières européennes ont accordé 36 milliards d’euros de prêts et de garanties, et détiennent 26 milliards d’euros d’actions et d’obligations dans des entreprises qui vendent des armes à Israël. La banque française BNP Paribas est de loin le principal bailleur de fonds des entreprises qui ont vendu des armes à Israël, avec 5,7 milliards d’euros de prêts et de garanties depuis 2021. Parmi les autres grands investisseurs identifiés par le rapport figurent les banques Crédit Agricole, Deutsche Bank, Barclays et UBS2.

    Plus généralement, la Campagne BDS France se réjouit du succès de la campagne Stop Arming Israel France, de son Contre Salon organisé à Montreuil3, de ses actions de sensibilisation auxquelles un grand nombre de personnes se joint, dont sept qui ont été arrêtées cette semaine parce qu’elles protestaient contre l’implication d’une autre entreprise française, Exxelia.

    Nous n’oublions pas qu’un génocide se poursuit sous nos yeux depuis 8 mois, et que la France participe à ce génocide en livrant des composants à l’armée génocidaire. Voilà aussi pourquoi la question palestinienne est si centrale en France, et pourquoi la campagne contre le commerce des armes est si essentielle…

    [1] https://disclose.ngo/fr/article/en-pleine-guerre-a-gaza-la-france-equipe-des-drones-armes-israeliens
    [2] https://www.etun-palestine.org/site/2024/06/20/report-the-companies-arming-israel-and-their-financiers/
    [3] https://www.agendamilitant.org/Anti-SATORY-la-semaine-du-desarmement.html
    [4] https://www.bdsfrance.org/contre-eurosatory-et-son-monde-contre-la-complicite-francaise/

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