Selon Javed Anand, les laïques doivent soutenir les droits des musulmans dans un monde où l’islamophobie est croissante ; mais ils devraient se garder, ce faisant, de renforcer la droite musulmane.
Pour donner du sens aux voix contradictoires qui s’élèvent dans la communauté des indiens laïques au sujet de la controverse autour du hidjab, nous ferions bien de nous souvenir de cette remarque, vieille d’une décennie et dans un autre contexte, faite par Akeel Bilgrami, philosophe indien du langage et de l’esprit vivant aux Etats Unis : Parfois qui parle est aussi important que ce qui est dit.
D’un côté, il y a une large majorité de laïques – organisations de femmes, féministes indépendantes, partis politiques – en compagnie de leaders religieux et politiques, ainsi que de femmes et d’hommes musulmans laïques, qui voient dans la tentative d’interdire le hijab à l’intérieur des salles de classes dans certains collèges pré-universitaires du Karnataka – sous gouvernement BJP – un nouvel essai des forces de l’Hindutva pour imposer aux minorités leur agenda majoritaire. En total soutien aux manifestantes musulmanes, ils croient défendre les droits constitutionnels des femmes musulmanes à la liberté religieuse, au droit à l’éducation, au droit à la liberté de choix. Et d’un autre côté, il y a les voix relativement moins nombreuses des femmes et d’hommes musulmans qui s’efforcent d’expliquer que tout ce que demande le Coran, aussi bien des hommes musulmans que des femmes musulmanes, c’est une tenue « modeste » et « décente ». Ni le hidjab ni la burqa totalement couvrante n’ont quelque chose à voir avec les principes de l’Islam. Parmi ces voix, citons Zeenat Shaukat Ali (érudite islamique, auteur de The Empowerment of Women in Islam – L‘autonomisation des femmes en islam), Ghazala Wahab (auteur de Born a Muslim : Some truths about Islam in India – Naitre musulman : quelques vérités sur l’islam en Inde), Zakia Soman (co-organisatrice, Bhartiya Muslim Mahila Andolan), Shabnam Hashmi (Anhad), et plusieurs membres de Musulmans Indiens Pour une Démocratie Laïque (IMSD). C’est un point de vue qu’ils partagent avec une foule d’érudits islamiques des temps modernes, savants internationalement reconnus, aussi bien femmes que hommes.
Un tribunal de grande instance au Karnataka (High Court) est sur le point de délibérer pour savoir si le hidjab fait partie des « pratiques essentielles de l’islam ». Mais voici la pierre d’achoppement : Il y a un seul Coran, mais ses interprétations sont nombreuses. Comme pour n’importe quelle autre religion, on trouve, en pratique, non pas un mais de nombreux islams. Continuer à lire … « Inde : Qu’est ce qui se joue avec cette question du hijab ? »