La coutume circule beaucoup avec les allées et venues

5Tado, Ali, Alo, Tiapi, Kassim et les autres…

Le regard et la vie de Tâdo mêlée à l’histoire de la Kanaky. Entre mémoire et colonisation, entre mémoire et lutte pour l’indépendance. L’histoire des migrations sur l’océan et les histoires du vingtième siècle. Les contes et les représentations, « Les applaudissements et les bravos fusent encore quand les mannequins et acteurs, débarrassés de leurs costumes viennent s’incliner devant leurs camarades, avant de balancer dans le feu ces oripeaux d’un autre âge et d’un autre monde. Ce monde d’un autre âge qui est en train de s’achever ». L’histoire ridicule enseignée à l’école « Nos ancêtres les Gaulois et le Y a bon Banania ont encore la dent blanche sous les tropiques, en particulier en Kanaky », la « coutume » et ses interprétations, la lutte de libération nationale, « Elle ouvre les yeux sur la nature des trois piliers. Si vous ne voulez pas ou ne pouvez pas vous en contenter, charge à vous de fixer la marge de vos manœuvres, si vous n’êtes pas en confrontation directe. Si vous êtes dans l’affrontement, assumez vos positions avec courage et détermination car le chemin est long, surtout pour vous, les femmes, qui commencez à peine à dépasser les barrières du pré carré politique des hommes ». Les contes et les imaginaires. Les identités ouvertes. Comme le disait Jean-Marie Tjibaou, cité par l’auteure : « Le retour à la tradition, c’est un mythe ; je m’efforce de le dire et de le répéter. C’est un mythe. Aucun peuple ne l’a jamais vécu. La recherche d’identité, le modèle, pour moi, il est devant soi, jamais en arrière. C’est une reformulation permanente. Et je dirai que notre lutte actuelle, c’est de pouvoir mettre le plus possible d’éléments appartenant à notre passé, à notre culture dans la construction du modèle et de société que nous voulons pour l’édification de la cité. Certains ont peut-être d’autres analyses, mais c’est ma façon personnel de voir. Notre identité, elles est devant nous ». Le monde océanien.

L’histoire aussi plus personnelle, de la lutte contre le Crabe, cette saloperie de maladie, ce cancer qui ronge.

Une « terre de parole », une « terre de partage », un territoire encore colonisé, « La nuit coloniale maintient son couvercle sur le peuple et le pays en lutte » et les espoirs de l’indépendance à construire. Un roman de l’éveil personnel et collectif, des difficultés, des amitiés, des amours, des un-e-s et des autres. Un livre à la fois remarquablement écrit et une illustration dynamique d’un positionnement à la fois anticolonialiste et féministe. Un livre profondément ancré dans le monde contemporain, du « Dégage » des tunisien-ne-s et des Égyptien-ne-s, aux « indigné-e-s, du scandale DSK et de la solidarité manifestée de femmes de ménage des grands-hôtels, du tueur fasciste suédois à la lutte « antiterroriste » mondialisée, de la mobilisation des Chemises rouges en Thaïlande, au retour des têtes maories au musée Te Papa de Wellington, etc. Un livre sur l’humanisme, les cultures et les identités, un roman du pacifique et des libertés.

« Dorez-vous longtemps au soleil
dans la paix du cœur et de l’être
et que cette histoire vous endorme
ou qu’elle vous réveille
trouvez-lui une suite
en prenant votre temps au soleil
Cîgadoo »

Pour en savoir plus, complément possible : Paul Neaouyine : L’indépendance au présent – Identité kanak et destin commun, Editions Syllepse 2006, Identité kanak(e) et destin commun

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Déwé Gorodé : Tâdo, Tâdo, wéé ! ou « No more baby »
Au vent des îles, Tahiti 2012, 354 pages, 23 euros

Didier Epsztajn

Auteur : entreleslignesentrelesmots

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