Feminist Dissent : Déclaration sur le génocide à Gaza (et autres textes)

  • La violence des colons se déchaîne en Cisjordanie
  • Mariam Barghouti : Les Palestiniens et le monde ne doivent pas perdre espoir
  • « L’art palestinien est une manière de se questionner politiquement ». Entretien avec l’artiste palestinienne Shuruq Harb, menée par Amélie David, correspondante du journal
  • Alors que l’Iran et Israël se font face, les Palestiniens en paieront-ils le prix ? Entretien avec Khaled Elgindy conduit par Ghousoon Bisharat
  • Gilbert Achcar : La prochaine attaque israélienne contre l’Iran
  • Feminist Dissent : Déclaration sur le génocide à Gaza
  • Les Artistes pour la Paix Gaza : « Anatomie d’un génocide » 7 avril 2024
  • Le Canada doit suspendre le commerce d’armes avec Israël
  • Voix juives indépendantes : Le Canada doit enquêter sur les organisations caritatives qui financent les crimes de guerre israéliens
  • Liens vers d’autres textes

La violence des colons se déchaîne en Cisjordanie

Sous la protection de l’armée ce week-end, des centaines de colons ont envahi plusieurs villages palestiniens et ont incendié des propriétés privées

Ce samedi 13 avril, suite à la disparition puis la mort de Binyamin Achimeir, un jeune Israélien de 14 ans, des colons israéliens ont encerclé et attaqué des villages de Cisjordanie occupée. Protégés par l’armée, ces colons ont attaqué les Palestiniens des villages qu’ils envahissaient et ont brûlé des maisons, véhicules et propriétés agricoles.

Selon l’organisation humanitaire Yesh Din et l’Agence de presse palestinienne Wafa, au moins 3 Palestiniens ont été tués par balles lors de ces attaques, dont deux ont pu être identifiés : Jihad Abou Alia, 26 ans, du village d’Al-Mughayyir ; et Omar Ahmed Abdel-Ghani Hamed, 17 ans, du village de Beitin. De nombreux blessés, principalement par balles, ont également été reportés par le Croissant-Rouge Palestinien.

Les colons s’en sont pris aux maison et terres agricoles des villages qu’ils attaquaient, déclenchant ainsi des confrontations avec les Palestiniens. Dans le village de Duma, des milices de colons armés, escortées par les forces d’occupation israéliennes, ont incendié les maisons, véhicules, récoltes et territoires agricoles des Palestiniens de la région. 

Dans le village d’Al-Mughayyir, au nord de Ramallah, une autre attaque de colons a blessé par balles au moins 18 palestiniens, alors que 50 maisons ont été incendiées. Les forces d’occupation israéliennes ont à nouveau protégé les colons lors de ces attaques, comme on peut le voir dans cette vidéo, lors de l’incendie d’un véhicule à Deir Dibwan.

Au total, une dizaine de villages palestiniens ont été assiégés au cours du week-end et attaqués par des centaines de colons. Le maire du village d’Al-Mughayyir, Amir Abou Alia, a déclaré à l’AFP que « Des dizaines de colons attaquent le village et brûlent tout ce qui leur tombe sous la main ». Les colons ont poursuivi leurs attaques tout le week-end, sous la protection des forces d’occupation israéliennes, dans plusieurs villages et villes au sud de Naplouse (Douma, Burin, Qaryout, Qasra et Beit Furik), ainsi qu’au nord et à l’est de Ramallah (Al-Mughayyir, Beitin, Deir Jarir, Silwad, Ein Sinya, Abu Falah, Burqa, Atara et Al-Mazraa Al-Gharbiyya).

La violence israélienne s’est également accrue en Cisjordanie depuis octobre dernier, tuant 464 Palestiniens dans le territoire occupé sur cette période et en blessant des milliers d’autres, selon OCHA-oPt. Comme le reporte l’Agence Média Palestine régulièrement lors de points sur la situation en Cisjordanie, les attaques de colons se sont accrues en Cisjordanie depuis le 7 octobre : 704 attaques de colons contre des Palestiniens ont été documentées (soit une moyenne quotidienne de 4 attaques).

Plus de 8 000 Palestiniens ont également été arrêtés durant cette période, selon le Club des prisonniers palestiniens (CPP).

Dimanche 14 avril au soir, des Palestiniens abattent une partie du mur de séparation – long de 708 kilomètres – isolant des milliers de Palestiniens du reste du territoire occupé.

La rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les territoires palestiniens occupés, Francesca Albanese, exige auprès de l’ONU le « déploiement d’une présence protectrice dans le Territoire palestinien occupé, avec les mandat explicite de prévenir et de repousser les attaques contre les civils. »

https://agencemediapalestine.fr/blog/2024/04/15/la-violence-des-colons-se-dechaine-en-cisjordanie/

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Les Palestiniens et le monde ne doivent pas perdre espoir

L’éreintement et les syndromes d’épuisement guettent celles et ceux qui se mobilisent contre le génocide que commet Israël à Gaza. C’est le résultat de cette « guerre d’usure » que mène Israël.

Lorsqu’au début du mois d’octobre, nous, les Palestiniens, avons exposé au monde ce qui était en train de se passer, nos témoignages et nos prévisions étaient perçus comme des exagérations

Nos avertissements concernant l’enthousiasme débordant et terrifiant d’Israël à faire usage d’une violence excessive n’ont pas été pris au sérieux. Pire, nos avertissements sur le fait qu’Israël s’apprêtait à commettre des massacres de masse contre les Palestiniens étaient qualifiés d’« antisémites ». 

Aujourd’hui, les statistiques officielles parlent de 33 000 Palestiniens tués à Gaza et en Cisjordanie par des frappes aériennes israéliennes avec des bombes made-in-USA, du pilonnage d’artillerie et des exécutions sommaires. Ce chiffre ne prend en compte ni les personnes « disparues » restées sous les décombres, ni celles assassinées en pleine rue ou dans leurs maisons par les soldats de l’occupation, ni celles enterrées sous le sable par leurs bulldozers. 

Et alors que Gaza est en première ligne face à l’immense violence d’Israël, les Palestiniens de Cisjordanie sont eux arrêtés par milliers, y compris les enfants, la plupart sans le moindre procès. Ils sont maintenus en détention dans des conditions indignes et effroyables, qui ont provoqué la mort d’au moins 13 prisonniers palestiniens ces 6 derniers mois. 

Quant aux Palestiniens citoyens d’Israël et aux Palestiniens de Jérusalem, ils vivent un calvaire sous les lois d’apartheid draconiennes d’Israël : contrôlés, détenus, torturés, ou attaqués par des groupes israéliens pour avoir simplement partagé une publication sur les réseaux sociaux ou avoir consulté ce qu’Israël appelle des « médias terroristes »

Si je devais décrire ces 26 dernières semaines, je dirais que j’ai juste essayé de tenir le coup d’heure en heure. Je me demandais en permanence : mais à quoi est-ce que cela sert donc d’écrire un article de plus sur l’implacable sadisme d’Israël ? 

Entre le moment où l’idée de cet article a germé et celui où j’ai trouvé la force de l’écrire, plus de 3 000 enfants, femmes et hommes palestiniens ont été tués. Le complexe médical Al-Shifa a été complètement détruit et les exécutions extrajudiciaires en Cisjordanie n’ont fait que s’intensifier. 

Propager un sentiment d’engourdissement, de paralysie parmi les Palestiniens est l’un des objectifs de la stratégie israélienne d’usure. Une guerre d’usure est une guerre qui vise à créer les conditions nécessaires à vider l’adversaire de son énergie, l’épuiser et l’affaiblir. Elle vise à réduire la capacité à riposter. 

L’objectif d’Israël est l’épuisement émotionnel, moral et mental de ceux qui résistent à son occupation et à sa colonisation : faire perdre à ces gens leur motivation et leur détermination à s’engager et à se mobiliser face à la répression brutale. 

Cette stratégie est également à l’œuvre en « temps de paix ». Dans la droite ligne des colonialistes européens et de leur logique de pacification, Israël a cherché à soumettre la population palestinienne en lui rendant la vie impossible à tous les niveaux. Tout en abreuvant le monde du récit fallacieux basé sur sa « légitime défense », Israël a tenté de créer un Palestinien moribond : pas nécessairement mort, mais toujours au bord du gouffre, constamment contraint de choisir entre la mort et le supplice. 

Je ne pense pas pouvoir un jour expliquer pleinement à quoi cela ressemble d’être un Palestinien – avec toutes les nuances de meurtrissures que nous portons. Et ce n’est pas parce que les mots me manquent, mais plutôt parce que j’ai pris conscience que si je parlais des atrocités subies, je ne pourrais pas être certaine que ceux qui m’écoutent supporteraient d’entendre toute la douleur qui caractérise l’expérience palestinienne. 

Ces 182 derniers jours, les Palestiniens ont été plongés dans des vagues de deuil profond, de douleur pénétrante et de peur paralysante d’une perte anticipée. Des frissons de terreur restent coincés dans notre colonne vertébrale, incapables de s’échapper, à l’instar de nous-mêmes. 

L’un des aspects les plus éprouvants de cette agression est d’avoir à gérer ce deuil. Tant de personnes que nous connaissons ont été tuées, arrêtées ou déplacées. Les Palestiniens ont souffert non seulement d’un déplacement physique, mais aussi d’un déplacement psychologique ; nos ancrages mentaux et émotionnels ont été déplacés. C’est une douleur insoutenable que de ne cesser d’être témoin des différentes façons dont les corps palestiniens peuvent être transformés en corps sans vie. 

Il n’est pas possible d’enterrer les corps tués, ni de pleurer collectivement nos pertes, non seulement matérielles mais aussi émotionnelles : les maisons détruites, les souvenirs détruits et l’espoir anéanti que nous avions rassemblé pour vivre. 

Le fait d’être exposé continuellement à la psychopathie inflexible d’Israël engendre un sentiment collectif d’épuisement, non seulement au sein de la population qui tente encore de survivre au massacre perpétré par Israël, mais aussi parmi ceux qui se mobilisent pour mettre un terme à un génocide encore en cours au moment où j’écris ces mots. 

L’épuisement est réel. Trop de personnes parmi nous sont trop épuisées pour dire quoi que ce soit, pour résister à la désillusion qui voudrait que nos voix ne comptent pas et qu’elles ne puissent rien atteindre. Alors que nous sommes livrés à ces émotions écrasantes et au désespoir, la guerre continue et l’ampleur des atrocités ne cesse de croître. 

Et tout cela ne vaut pas que pour nous, les Palestiniens en Palestine. Cela impacte ceux qui dans le monde se soulèvent contre le génocide. Israël répond à la résistance globalisée par toujours plus de massacres, comme le récent assassinat de travailleurs humanitaires internationaux, et par toujours plus de lobbying pour que ceux qui le critiquent soient punis. 

Les gouvernements refusant d’agir pour faire stopper le massacre, ceux qui se mobilisent contre le génocide sont victimes de stratégies de neutralisation à petit feu, relégués à l’incapacité d’agir, au désespoir et à la conviction que rien ne peut arrêter Israël. 

En mai 2021, alors que les Palestiniens étaient au cœur d’une des plus importantes révoltes des dernières décennies, qu’ils montraient une véritable unité de Gaza à la Cisjordanie et aux territoires de 48, ainsi que dans la diaspora, j’ai écrit un article pour The Guardian intitulé « Pourquoi les Palestiniens protestent-ils ? – Parce que nous voulons vivre. » 

Je l’ai écrit sur mon téléphone alors que j’étais prise en étau entre le gaz lacrymogène jeté par les soldats israéliens, que je fuyais, et les passages à tabac brutaux des forces de sécurité de l’Autorité Palestinienne, auxquels j’ai échappé de justesse.

Ces moments ont été des moments brutaux, terrifiants et déterminants. Dans l’article, je m’efforçais de saisir la stratégie du colonialisme : « C’est ce que le colonialisme fait : il étouffe chaque aspect de votre vie et finit par vous enterrer. »

Je n’essayais pas de décrire le profil d’un tueur, mais plutôt de capturer ce moment caractérisé par une attitude de défi et d’unité retrouvée entre les Palestiniens, du fleuve à la mer, et au sein de la diaspora.

« Il s’agit d’un processus stratégique et mûrement réfléchi, il est seulement entravé ou retardé, car les oppresseurs sont presque toujours attaqués et mis au défi par ceux qui sont sous leur joug. », écrivais-je alors.

En effet, au cours des dernières décennies, Israël n’a pas manqué d’être défié par les Palestiniens, qui n’ont eu de cesse de se révolter contre ses politiques de répression : d’une révolte à l’autre, de la non-violence à la diplomatie, puis à la résistance armée. La lutte du peuple palestinien s’est intensifiée au même titre que la conquête israélienne sur les terres, les ressources et les vies palestiniennes.

Pendant ces 6 derniers mois, Israël et ses soutiens ont cherché à effacer l’histoire et le contexte et à présenter le 7 octobre comme une attaque brutale et « injustifiée » contre Israël. La réalité, c’est que le 7 octobre, un peuple asphyxié par des décennies de colonialisme et d’oppression s’est servi de son dernier souffle pour refuser le choix impossible entre la mort et le supplice qui lui était imposé et ainsi interpeller le monde.

Peut-être que c’est précisément cela qui a réellement choqué Israël et ses alliés le 7 octobre. Ce qui a déclenché l’ire d’Israël, c’est que les Palestiniens respiraient encore après des décennies de pacification coloniale. 

Comprenez cela : ce qu’il y a entre notre éradication et notre survie, c’est vous, la communauté mondiale. Quand Israël a déchaîné sa force génocidaire contre nous, il a impliqué le reste du monde.

C’est l’engagement international qui rend possible le génocide perpétré par Israël. Israël utilise des armes fournies par des gouvernements étrangers. Ces mêmes gouvernements lui garantissent son impunité, empêchant qu’il rende des comptes pour ses crimes. 

Admettez cela : les Palestiniens ne sont pas encore enterrés, et si la destruction est massive, le nombre de survivants est aussi important. Des survivants qui ont des rêves à réaliser, qui doivent témoigner de miracles, et à qui il faut redonner foi en l’humanité.

Au milieu de toute cette destruction, il y a la vie, et les Palestiniens mènent un combat hors norme pour elle. 

Mariam Barghouti, le 6 avril 2024
Mariam Barghouti est une autrice palestinienne américaine basée à Ramallah.
Source : Al Jazeera
Traduction Caroline Riera-Darsalia pour l’Agence Média Palestine
https://agencemediapalestine.fr/blog/2024/04/09/les-palestiniens-et-le-monde-ne-doivent-pas-perdre-espoir/

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«L’art palestinien est une manière de se questionner politiquement»

Entretien avec l’artiste palestinienne Shuruq Harb, menée par Amélie David, correspondante du journal

Shuruq Harb est une artiste, réalisatrice et écrivaine palestinienne, actuellement installée à Ramallah en Cisjordanie. Pour elle, l’art est une forme de résistance, qui prend ses racines dans l’oppression que subit la population palestinienne. Cette résistance se révèle à travers de multiples initiatives, comme celle de la Fondation Sakiya, à laquelle elle a participé récemment. L’artiste revient sur cette expérience et son impact sur son travail.

Journal des Alternatives : Les artistes palestinien.nes sont engagé.es, c’est peu de le dire. À travers leur art, il est question de résistance et il y a toujours l’idée de délivrer un message, de se faire entendre. Dans votre cas, pourquoi avoir décidé d’incorporer des thèmes et des pratiques écologiques à votre art pour parler de votre combat ?
Shuruq Harb : Je ne pense pas qu’il faille voir l’art comme une entité à part entière. Quand on regarde la manière dont la Fondation Sakiya se décrit, on parle d’agriculture, d’écologie, d’architecture… Il y a déjà tout ce mélange. Je pense que nous vivons dans un monde où, professionnellement, nous sommes déjà très séparé.es selon nos disciplines artistique, éducative, architecturale, etc. Je pense que nous devons avoir une approche plus holistique.

Nous sommes relié.es à la terre, au paysage, à la végétation, à cette écologie. C’est un savoir transmis de génération en génération. Ce n’est pas quelque chose que l’on apprend dans les livres… Quand nous n’avons pas accès à la terre, nous en sommes séparé.es… Des espaces comme Sakiya insistent pour que les artistes utilisent des matériaux naturels comme la boue. De cette manière, cela peut aider à être plus créatif, à être connecté à la terre, à être dans le moment présent.

Depuis longtemps, le rôle des artistes palestinien.nes est d’aller à la rencontre des autres
C’est une manière de mettre au défi ce modèle néolibéral qui a fait accélérer nos vies. Cela permet de penser aux ressources dans un sens différent. Et donc, je n’aime pas penser à l’art comme une seule discipline séparée de l’agriculture par exemple. Depuis longtemps, le rôle des artistes palestinien.nes est d’aller à la rencontre des autres, d’avoir des conversations, car les solutions viennent souvent d’une pluridisciplinarité et des échanges avec les autres. À la fin, c’est une question de communauté et non d’une discipline seule.

JDA : Justement, parlez-nous de votre résidence à Sakiya et de votre rapport à la Fondation. Quand et comment avez-vous commencé à travailler avec Sakiya ?
Shuruq Harb : Ma première résidence à Sakiya s’est déroulée en 2021. Je suis restée sur le site dans une montagne près de Ramallah. J’étais très excitée de connaître les apprentissages de celles et ceux qui ont fondé Sakiya, sur la manière de vivre et sur la rénovation du bâtiment de la Fondation suivant des techniques anciennes. Pendant que j’étais là-bas, ce qui m’a fortement frappée, c’est cette ironie d’être sur une montagne qui en fait a été préservée par défaut, en raison de son statut politique.

JDA : C’est-à-dire ?
S.H :
 Cette résidence m’a aidée à prendre conscience du statut si particulier d’un territoire palestinien régi par des règles militaires israéliennes, tout en étant un peu dépendant de l’Autorité palestinienne… un entre-deux nébuleux. Il y avait une profonde sérénité qui se dégageait. Le fait d’être en contact avec le paysage et les animaux est très intime dans un sens…

Mais en même temps, c’est un site qui est en danger en raison des colons qui sont tout proches, qui attaquent sans cesse et qui essaient de s’emparer de ces terres. J’ai vraiment été inspirée par ce sentiment et c’est ainsi que j’ai commencé à réfléchir et à développer un film de 14 minutes intitulé En présence de l’absence. Ce court-métrage est centré sur la lecture d’une des pierres qui se trouve autour du site parce que c’est assez unique. Un site où l’archéologie se mêle à l’écologie et à l’agriculture. Et cette pierre nous aide à déchiffrer toutes ces couches de culture.

JDA : En quoi cet endroit a été important pour vous en tant qu’artiste et l’est pour le monde artistique palestinien ?
S.H. : D’abord, Sakiya est un projet artistique en lui-même, car il s’agit d’un site incroyable, mais menacé comme tous les endroits où il y a l’occupation. Celle-ci existe pour prendre, extraire, autant de terre que possible, pour empêcher toute continuation urbaine et sociale et pour interrompre la vie palestinienne. C’est l’un des seuls sites qui n’est ni dans un village ni dans une ville. L’acte de créer un tel site est important politiquement et artistiquement.

La population palestinienne vit souvent dans des villes suffocantes. Sakiya est un endroit très agréable, car il est respirable. C’est un des seuls espaces naturels qui nous reste. Je crois qu’il est important pour nous de penser l’archéologie et l’écologie ensemble. L’art palestinien est une manière de se questionner politiquement et Sakiya, en ce sens, résiste à l’occupation.

C’est un endroit où il est possible à la fois de voir la nature et l’occupation. Cela vous force vraiment à penser à l’art, à la politique, à la nature et à l’écologie et aux décisions qui sont prises.

JDA : Comment mettez-vous tout ceci dans votre art ? La politique, l’écologie, la résistance à l’occupation… Comment cela s’insère-t-il dans votre travail artistique ?
S.H. : C’est une question difficile à répondre… Mais je crois que cela vient surtout des sujets sur lesquels je choisis de travailler. Le film sur lequel je suis en train de travailler avec Nadi Abusaada parle de la vallée du Jourdain, un espace qui est lui aussi menacé, car les gens là-bas n’ont plus accès à l’eau ni à la terre. Nous souhaitons mettre en avant cet aspect et le documenter.

Je travaille actuellement sur un long métrage documentaire intitulé «Al Mashrou»» sur la Société de développement arabe (ADS) à Jéricho en Palestine. Il explore les répercussions durables de ce projet transformateur des années 1940 et ses idées prospectives sur l’avenir de la Palestine. À travers cette documentation et cette communication, nous souhaitons participer à cet effort de résistance. Ainsi, notre but est de pouvoir résister à l’aliénation. Il est important de rappeler qu’il n’est pas vraiment possible de séparer la politique de l’écologie.

À propos de Sakiya
La Fondation Sakiya est une académie artistique dédiée à la production et au partage de connaissances expérimentales. Sakiya allie les traditions agraires locales à l’art contemporain et aux pratiques écologiques. L’organisation est installée sur une montagne près de Ramallah, en Cisjordanie, et offre un programme de partage de connaissances entre agriculteurs. trices, artisans et des entrepreneur.es, ainsi que des artistes et des personnes qui font de la recherche localement ou qui visitent le site. Au cœur des programmes de Sakiya se trouve la production alimentaire, des expositions, des publications et des ateliers de formation qui explorent les intersections entre l’art, la science et l’agriculture dans un modèle durable et reproductible.

https://alter.quebec/lart-palestinien-est-une-maniere-de-se-questionner-politiquement-shuruq-harb/

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Alors que l’Iran et Israël se font face,
les Palestiniens en paieront-ils le prix ?
Entretien avec Khaled Elgindy conduit par Ghousoon Bisharat

Deux jours plus tard [après la nuit du samedi 13 au dimanche 14 avril], le monde essaie toujours de comprendre l’attaque spectaculaire de l’Iran contre Israël. De concert avec ses partenaires régionaux, le Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) a lancé plus de 300 drones et missiles dans la nuit du 13 avril, ce qui constitue la première fois qu’Israël ou l’Iran prenait pour cible l’autre Etat sur son propre sol.

Bien que sans précédent, l’attaque iranienne n’était en rien inattendue, puisqu’elle faisait suite à la frappe aérienne israélienne sur le consulat iranien à Damas [1] deux semaines plus tôt, qui avait tué sept officiers du Corps des gardiens de la révolution islamique et deux civils. La grande majorité des divers types de projectiles, dont certains ont mis plusieurs heures à arriver, ont été interceptés par Israël, aidé par les armées des Etats-Unis, du Royaume-Uni, de la France et de la Jordanie, ainsi que par les renseignements fournis par plusieurs pays du Golfe. Seuls quelques missiles [9 selon les services de renseignement des Etats-Unis] ont réussi à échapper aux défenses israéliennes, dont l’un a grièvement blessé une fillette bédouine de 7 ans dans un village non reconnu du Naqab/Néguev, et un autre a causé des dommages mineurs à la base aérienne de Nevatim.

Pour mieux comprendre ces événements, +972 s’est entretenu avec Khaled Elgindy, directeur du programme Israël-Palestine à l’Institut du Moyen-Orient, basé à Washington, et auteur de Blind Spot: American and the Palestinians, from Balfour to Trump (Brookings Institution Press, 2019).

Tout en expliquant le « message » que l’Iran cherchait à envoyer avec son attaque anticipée, Khaled Elgindy a également fait part de ses doutes quant au fait qu’Israël tiendrait compte des pressions exercées par les Etats-Unis pour éviter de lourdes représailles. Il a également noté que les régimes arabes pourraient essayer de « détourner » leur propre implication pour tenter de sauver la face auprès de leurs opinions publiques en colère. Mais il a également insisté sur le fait que les Palestiniens restent au cœur de cette conflagration – et qu’ils en paient toujours le prix le plus lourd [2].

« Il existe une réelle possibilité qu’en échange d’une désescalade entre Israël et l’Iran, les Etats-Unis accordent à Israël une plus grande liberté d’action à Gaza, en particulier en ce qui concerne Rafah », a averti Khaled Elgindy, faisant référence à une invasion terrestre prévue de la ville la plus méridionale de la bande de Gaza.

Aux yeux de l’administration Biden, a poursuivi Khaled Elgindy, « tant que le prix en est payé principalement par les Palestiniens, c’est acceptable. Dès lors que les coûts/effets dépassent Gaza et les Palestiniens, la situation devient plus dangereuse. » Mais ce raisonnement, a-t-il ajouté, ne peut éluder le fait que la perspective d’une guerre régionale totale « devient plus probable chaque jour qui passe sans cessez-le-feu [à Gaza] ». (L’entretien a été édité pour plus de clarté.)

Nous venons d’assister à une escalade spectaculaire dans ce qui est essentiellement une « guerre froide » datant de plusieurs décennies entre Israël et l’Iran. Pourquoi l’Iran a-t-il décidé de frapper directement Israël ?
C’est la question que tout le monde se pose. L’élément déclencheur immédiat, bien sûr, a été l’attaque israélienne contre le consulat iranien à Damas le 1er avril, qui a tué deux généraux iraniens. Tout le monde a compris qu’il y aurait une réponse iranienne – Téhéran a été très clair à ce sujet. La question était de savoir quand et comment.

Les gens ont été surpris qu’il s’agisse d’une attaque directe sur le territoire israélien, ce qui est sans précédent. L’ampleur était également surprenante : au départ, nous avons vu quelques dizaines de drones, puis des missiles de croisière et d’autres missiles balistiques, ce qui dépassait de loin ce à quoi beaucoup s’attendaient.

Pourquoi l’Iran a-t-il choisi une attaque directe, et d’une telle ampleur, alors qu’il savait que la plupart de ses engins seraient interceptés ? J’ai l’impression qu’il essaie d’exercer un effet dissuasif, d’envoyer un message selon lequel une attaque comme celle du consulat à Damas, ou toute escalade future de la part d’Israël, entraînerait une réponse majeure. Les Iraniens ont été très clairs en disant : c’est tout, après cela, l’affaire est close.

Le problème des escalades destinées à dissuader est qu’elles ont souvent l’effet inverse : l’autre partie se sent obligée de riposter à son tour, et c’est alors la guerre totale. Je pense que les Etats-Unis tentent d’empêcher ce scénario et au moins de convaincre les Israéliens de ne pas répondre directement sur le territoire iranien, car cela déclencherait une réponse encore plus importante de la part de l’Iran. C’est à Israël de décider s’il veut surenchérir, tout en sachant qu’il provoquera cette menace.

Qu’est-ce que le choix des armes et des cibles par l’Iran nous apprend sur les objectifs de son attaque ?
L’Iran voulait démontrer sa capacité et sa volonté d’utiliser des missiles balistiques et de croisière. Il a ciblé de nombreuses zones en Israël pour montrer ce qu’il peut faire, mais je pense que l’attaque a été conçue pour ne pas faire beaucoup de victimes du côté israélien. Mais ce ne sera peut-être pas le cas la prochaine fois.

Comment interpréter le fait que les deux camps revendiquent la victoire ?
L’interprétation la plus évidente qui en découlerait est qu’aucune des deux parties ne veut poursuivre l’escalade, qu’elles sont satisfaites du résultat. Ils essaient de signaler à leurs opinions publiques respectives qu’ils ont obtenu ce qu’ils voulaient. Mais la situation est tellement imprévisible et il y a des extrémistes des deux côtés.

Le régime iranien, et en particulier le Corps des gardiens de la révolution islamique, est très militant. Du côté israélien, vous avez une coalition gouvernementale extrémiste et un premier ministre désespéré qui, depuis longtemps, souhaite étendre la guerre et entraîner les Etats-Unis dans son conflit avec l’Iran. Et maintenant, c’est en quelque sorte fait : les Etats-Unis ont un pied dans la porte. Je n’exclurais donc pas la possibilité, indépendamment de ce que prétendent les deux parties, d’une nouvelle escalade, d’autant plus que la guerre de Gaza ne se déroule pas comme le souhaite le gouvernement israélien.

Certains analystes estiment qu’Israël a appris qu’il ne pouvait pas faire face seul à une telle menace. Etes-vous d’accord ?
Nous savions déjà, après le 7 octobre, que l’idée qu’Israël puisse se défendre seul était un mythe. Même avec les armes, les renseignements et les systèmes de défense antimissile les plus sophistiqués, ainsi que tous les milliards de dollars que les Etats-Unis ont injectés en Israël, ce pays n’a pas pu prévenir ou même détecter cette attaque. Juste après l’attaque du 7 octobre, les Etats-Unis ont immédiatement envoyé des cuirassés en Méditerranée orientale, soulignant ainsi à quel point Israël avait besoin de soutien. Et cela reste vrai [3].

Il ne s’agit donc pas seulement d’avoir les armes les plus sophistiquées. Ce dont vous avez besoin, c’est d’amis et d’alliés prêts à intervenir et à vous aider lorsque vous en avez besoin. Et cela ne se fera que par le biais d’un processus politique et diplomatique plus étendu.

Comment l’attaque iranienne et l’implication de la Jordanie et d’autres Etats arabes dans la défense d’Israël seront-elles perçues dans le monde arabe, notamment à la lumière de la passivité et de l’inaction des gouvernements arabes face à la guerre d’Israël à Gaza ?
Dans le monde arabe, nous savons que les gens sont en colère contre Israël, les Etats-Unis et l’Occident pour leur hypocrisie flagrante en ce qui concerne la façon dont le droit international et les droits de l’homme ont complètement disparu au cours des six derniers mois. Toutefois, selon les pays, il y a des limites à ce que le public peut exprimer. En Jordanie [les Palestiniens constituent plus de 60% de la population du pays], des manifestations sont régulièrement organisées pour protester contre ce qui se passe à Gaza ; en Egypte, les gens ne peuvent pas protester sous peine d’être emprisonnés.

En fin de compte, la répression est une méthode très efficace pour maintenir le calme à l’intérieur du pays. Pour combien de temps ? Je n’en sais rien. Mais je ne pense pas que cette attaque iranienne, ou le rôle que les Jordaniens et d’autres comme les Saoudiens ont joué pour la contrecarrer, va faire pencher la balance après six mois de dévastation et de génocide plausible, et faire soudainement fuser l’opinion publique. Ils ont déjà absorbé le choc et le traumatisme de Gaza, ainsi que le fait que leurs régimes sont complices du maintien de cet effroyable statu quo. Ce ne sera pas différent.

Je pense que dans le cas de la Jordanie, les autorités pourront dire que l’attaque a violé l’espace aérien jordanien et qu’elles devaient réagir, quelles que soient les personnes impliquées. C’est peut-être une façon pour elles de rendre la situation plus digeste au niveau national. Quant aux Saoudiens, il est évident qu’ils ne font pas preuve des sentiments les plus tendres à l’égard du régime iranien. Les habitants de l’Arabie saoudite comprennent la menace que représente l’Iran, et je pense donc que le gouvernement pourrait présenter un argumentaire similaire.

Dans les deux cas, le discours sera différent de ce qui se dit ici à Washington et peut-être en Israël, à savoir que « les amis arabes d’Israël » ont pris le relais et ont soutenu Israël. Ce n’est pas l’image que les Jordaniens et les Saoudiens vont donner de la situation, mais ils peuvent en donner une autre, à savoir qu’il y a une menace iranienne dans la région.

Quels sont les facteurs qui détermineront la réponse d’Israël ?
Il existe des factions concurrentes au sein d’Israël. Il y a l’aile kahaniste [qui renvoie à l’idéologie du rabbin Meir Kahane considérée à l’époque – dans les années 1990 – comme d’ordre terroriste, avec son expression partisane, le Kach] extrémiste de la coalition. Il y a Netanyahou lui-même, qui a besoin de rester au pouvoir [étant donné les inculpations qui pèsent sur lui], et une guerre régionale plus large pourrait servir cet objectif si elle peut être maîtrisée. Il y a l’establishment militaire, qui pourrait fixer les limites de la réponse d’Israël. Et il y a l’opinion publique, et la question de savoir dans quelle mesure celle-ci exige une riposte plus importante. Un autre facteur sera les Etats-Unis, qui exerceront une influence considérable sur la ligne de conduite d’Israël au cours des prochains jours et des prochaines semaines. Israël pourrait choisir de ne pas répondre immédiatement, mais plutôt à une date ultérieure.

Que va penser l’administration Biden maintenant qu’elle est devenue un participant plus actif dans la guerre, malgré la contrariété bien documentée de Biden sur la façon dont Israël se comporte à Gaza ?
J’imagine qu’il s’agit principalement d’éviter que la situation ne dégénère en guerre ouverte entre Israël et l’Iran. C’est le scénario cauchemardesque que les Etats-Unis tentent d’éviter depuis six mois, ainsi que le scénario d’un front beaucoup plus important qui s’ouvrirait au nord avec le Hezbollah.

Ces deux scénarios sont aujourd’hui beaucoup plus probables qu’ils ne l’étaient il y a 48 heures. L’administration Biden devra donc s’efforcer de conclure un accord de cessez-le-feu dans les plus brefs délais. En attendant, Biden tente de convaincre Israël de ne pas répondre directement, du moins en visant le territoire iranien.

Joe Biden pourrait-il exercer une pression plus forte afin d’empêcher une réponse agressive de la part d’Israël, par exemple en utilisant l’aide militaire comme levier ?
L’argument selon lequel le soutien militaire des Etats-Unis à Israël doit être soumis à des conditions ou à un effet de levier a pris du poids à Washington, en particulier chez les démocrates de gauche. Cette approche a toutefois été mis à mal après l’attaque de l’Iran. Les gens disent maintenant : « Ce n’est pas le moment, Israël a besoin de toute l’aide qu’il peut obtenir ». Dès lors, je pense que cette aide soumise à conditions est encore moins probable aujourd’hui qu’avant le 13 avril. Mais pour l’administration Biden, et pour le président Biden personnellement, il n’a jamais été question de refuser des armes. Pour eux, les armes destinées à Israël sont sacro-saintes et intouchables, et ce d’autant plus après l’attaque de l’Iran.

Au lieu de cela, ce sera comme tous les « messages » que les Etats-Unis ont essayé de transmettre à Israël: les Israéliens le considéreront comme une recommandation, mais au bout du compte ils feront ce qu’ils veulent faire, et le gouvernement américain s’adaptera en conséquence.

C’est ce que nous avons constaté dès le début. L’administration états-unienne a tenté de dissuader le gouvernement israélien d’entreprendre une invasion terrestre. Elle a essayé de le convaincre de laisser entrer davantage d’aide humanitaire. Elle a essayé de l’amener à mieux cibler les attaques contre le Hamas plutôt que contre les civils et les infrastructures civiles. A chaque étape, les « recommandations » ont été ignorées.

Il n’y a aucune raison de penser que les Etats-Unis seront plus fermes cette fois-ci. La façon dont les Etats-Unis ont abordé la question a consisté à dire : « Nous préférerions que vous ne le fassiez pas, mais ce n’est pas grave si vous le faites. » Je pense que cette fois-ci ce ne sera pas différent.

Des missiles ont été tirés depuis l’Iran, l’Irak, la Syrie, le Yémen et le Liban. De l’autre côté, la Jordanie a aidé à les abattre [la force aérienne française est intervenue, la France ayant des bases en Jordanie et la Jordanie a fermé son espace aérien], tandis que l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis auraient partagé avec Israël des renseignements sur l’attaqueQu’est-ce que tout cela signifie pour la stabilité de la région dans son ensemble ?
Il existe un risque réel de guerre régionale majeure et totale, et cette éventualité devient de plus en plus probable chaque jour qui passe sans qu’un cessez-le-feu soit instauré. Tout cela était prévisible. Tout le monde a compris que plus l’opération [d’Israël à Gaza] durerait, plus les acteurs de la région s’impliqueraient. Et nous sommes aujourd’hui au seuil d’une déflagration régionale.

Le sang-froid l’emportera-t-il et permettra-t-il aux choses de se calmer et d’évoluer vers un cessez-le-feu ? Ou bien les gens feront-ils un mauvais calcul et décideront-ils qu’une nouvelle escalade est justifiée, déclenchant ainsi une sorte de réaction en chaîne ? Tout ce que nous savons, c’est que la région devient plus instable chaque jour où il n’y a pas de cessez-le-feu.

Quel sera l’impact de cette escalade sur la guerre à Gaza et sur le front nord avec le Hezbollah au Liban ?
C’est la grande crainte. Je pense qu’il existe une réelle possibilité qu’en échange d’une désescalade d’Israël avec l’Iran, les Etats-Unis accordent à Israël une plus grande liberté d’action à Gaza, en particulier en ce qui concerne Rafah. Nous savons que Benyamin Netanyahou et son cabinet de guerre ont revendiqué avec impatience « l’autorisation » d’intervenir à Rafah et d’y faire ce qu’ils ont fait dans la ville de Gaza et à Khan Younès. Ils veulent reproduire ce type de destruction. Les Etats-Unis et la communauté internationale leur ont dit qu’il s’agissait d’une ligne rouge. Cette ligne rouge pourrait maintenant être effacée si c’était le seul moyen pour les Etats-Unis de convaincre Israël de désamorcer l’escalade avec l’Iran.

C’est une possibilité envisageable parce que le calcul de l’administration Biden était essentiellement que c’est acceptable, tant que prix [de la guerre] est payé principalement par les Palestiniens. Dès que les coûts/effets dépassent Gaza et les Palestiniens   un front avec le Hezbollah, l’Iran, la Syrie ou d’autres acteurs – la situation devient plus préoccupante. Mais ils n’ont pas vraiment de problème avec le fait que les conséquences soient supportés par les Palestiniens.

Quant au front nord [avec le Hezbollah], tout dépend de la réaction d’Israël. Je pense qu’à l’heure actuelle, les Iraniens ayant indiqué qu’ils en avaient fini avec cette attaque et qu’ils ne cherchaient pas d’autre escalade, le Hezbollah s’y conformera bien sûr – il n’agira pas contre les intérêts iraniens. Si Israël surenchérit, alors oui, il est possible que le Hezbollah soit entraîné dans une guerre plus large et dans l’élargissement de ce front.

Comment l’Egypte et le Qatar, les deux principaux intermédiaires arabes qui tentent de négocier un cessez-le-feu à Gaza, verront-ils cette escalade ?
Je pense que cela crée une urgence beaucoup plus grande de la part de toutes les parties impliquées dans les négociations – y compris les Etats-Unis, mais surtout les Qataris et les Egyptiens qui sont impliqués plus directement – pour parvenir à un accord de cessez-le-feu dès que possible, et pour intensifier leurs efforts. J’espère que c’est le message qui a été reçu: cette situation pourrait s’aggraver à tout moment, et nous devons donc désespérément y mettre fin.

[1] Le statut des ambassades et consulats est régi le traité international de Vienne adopté en avril 1961 et entré en vigueur en 1964. L’art. 22 indique que le territoire d’une ambassade est inviolable.
Le gouvernement israélien, outre le fait d’avoir négligé les très nombreuses résolutions du Conseil de sécurité (par exemple sur l’occupation et la colonisation), ne recule pas lorsqu’il décide de viser des membres haut placés des Gardiens de la révolution – dans le consulat iranien à Damas où se trouvaient deux généraux – qui figurent dans sa « liste d’objectifs ». Leur  «neutralisation » n’est évidemment jamais revendiquée publiquement.
Ces exécutions et leur emplacement (consulat) mettaient en question la crédibilité du régime des mollahs face à sa propre base qu’il avait mobilisée.(Réd.)

[2] Le 15 avril, selon Al Jazeera, des médecins palestiniens ont découvert dans le voisinage de l’hôpital Al-Shifa une fosse commune, creusée par les forces militaires israéliennes, dans laquelle se trouvaient neuf corps de patients – ils portaient des bandages et des cathéters – tués lors de la dernière attaque contre ce complexe hospitalier. L’Orient Today du 15 avril indique qu’une fosse commune similaire a été découverte à Beit Lahia (Gaza nord) avec 20 membres d’une même famille. Ces découvertes macabres, illustrant une pratique génocidaire, traduisent photographiquement la réalité du nombre de morts depuis le 7 octobre, évalué par le ministère de la Santé du Hamas : soit 33 797 et 76 465 blessés. Des chiffres qui sont certainement sous-évalués.
Selon 
The Guardian du 15 avril, « à Gaza, où la quasi-totalité de la population civile est déplacée et affamée après plus de six mois de guerre, ce changement d’attention [de Gaza au conflit Iran-Israël] a été durement ressenti. “Les pays et les peuples avaient de la sympathie pour nous, mais elle s’est déplacée vers Israël”, a déclaré Bashir Alyan, un ancien employé de l’Autorité palestinienne âgé de 52 ans, qui vit désormais sous une tente à Rafah avec ses cinq enfants. “Israël est devenu la victime du jour au lendemain. Les pressions internationales exercées sur Israël pour qu’il apporte davantage d’aide et mette fin à l’agression contre Gaza appartiennent désormais au passé. Les problèmes de l’Iran ne sont pas les nôtres. Il ne poursuit que ses propres intérêts.” » (Réd.)
[3] Le président Joe Biden, le 13 avril, déclarait : « Grâce à ces déploiements et aux compétences extraordinaires de nos militaires, nous avons aidé Israël à abattre la quasi-totalité des drones et des missiles qui approchaient. » Ken Klippenstein et Daniel Boguslaw, dans The Intercept du 14 avril 2024, soulignent afin de donner la dimension d’une facette de la présence militaire des Etats-Unis : « Dans le cadre de ce réseau, des batteries de missiles sol-air Patriot à longue portée et Terminal High Altitude Area Defense ont été déployées en Irak, au Koweït, aux Emirats arabes unis, au Qatar, en Arabie saoudite, en Jordanie et sur la base secrète Site 512 en Israël. Ces moyens, ainsi que les avions américains basés au Koweït, en Jordanie, aux Emirats arabes unis, au Qatar et en Arabie saoudite, sont reliés les uns aux autres afin de communiquer et de coopérer dans le but de créer un dôme au-dessus d’Israël (et de ses propres bases régionales). Le Royaume-Uni est également étroitement lié au réseau de guerre régional, tandis que d’autres pays, comme Bahreïn, ont acheté des missiles Patriot pour faire partie du réseau. » (Réd.)

Ghousoon Bisharat est la rédactrice en chef de +972 Magazine, depuis septembre 2023.
Entretien publié sur le site israélien 
+972 le 15 avril 2024 ; traduction rédaction A l’Encontre
http://alencontre.org/ameriques/americnord/usa/alors-que-liran-et-israel-se-font-face-les-palestiniens-en-paieront-ils-le-prix.html

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La prochaine attaque israélienne contre l’Iran

Il ne fait aucun doute qu’Israël répondra au lancement par l’Iran de trois cent vingt drones, missiles de croisière et missiles balistiques sur son territoire par une attaque majeure contre l’Iran, et ce pour plusieurs raisons. (Traduit de l’arabe.)

Il ne fait aucun doute qu’Israël répondra au lancement par l’Iran de trois cent vingt drones, missiles de croisière et missiles balistiques sur son territoire par une attaque majeure contre l’Iran, et ce pour plusieurs raisons. La première est que l’État sioniste a délibérément intensifié son attaque contre la « République islamique », en bombardant le consulat iranien adjacent à l’ambassade iranienne à Damas. Le monde entier a vu dans cette attaque, à juste titre, une dangereuse escalade de la guerre de basse intensité qu’Israël mène depuis quelques années contre l’Iran, surtout depuis que ce dernier a commencé à étendre son propre réseau militaire sur le territoire de la Syrie dans le contexte de la guerre qui y a éclaté il y a plus de dix ans. Israël se rend sans doute compte qu’il ne peut pas poursuivre ses attaques contre des cibles iraniennes, et encore moins les intensifier, sans que Téhéran ne soit contraint de réagir.

Le fait est que le leader de « l’axe de la résistance », comme l’Iran aime se décrire, a été très embarrassé ces dernières années par son incapacité à traduire ses menaces répétées en actions à la hauteur de ses paroles. Le coup le plus dangereux qu’il a subi avant l’attaque de son consulat a été l’assassinat par les forces américaines du commandant de la force Qods du Corps des Gardiens de la Révolution islamique, Qassem Soleimani, au tout début de l’année 2020 près de l’aéroport de Bagdad. La réponse iranienne fut terne : elle consista à lancer douze missiles sur les forces américaines depuis la base aérienne d’Ain al-Asad dans le gouvernorat irakien d’Anbar, après avoir averti de l’attaque de sorte qu’aucun soldat américain ne fut blessé (hormis les victimes de commotions cérébrales). Donald Trump a ainsi pu se passer de riposte, car il était évident que l’assassinat de Soleimani était plus grave que la réaction iranienne, ce qui était clairement le résultat attendu par Téhéran.

Tout indique que l’intention de l’Iran lors de sa récente attaque contre l’État sioniste était similaire : se sauver la face en ripostant, mais en limitant l’efficacité de la réponse afin qu’elle ne conduise pas à une contre-attaque. Ainsi, l’Iran a lancé 170drones et 30 missiles de croisière depuis son territoire, soit sur une distance de 1 500 kilomètres, sachant qu’il faudrait quelques heures à ces engins pour franchir cette distance, de sorte qu’Israël pouvait se préparer à leur arrivée en en abattant un grand nombre avant même qu’ils n’entrent dans son espace aérien, d’autant qu’il bénéficie de l’aide d’alliés, États-Unis en tête. Téhéran affirme même avoir informé Washington du moment de l’attaque, ce que Washington nie, ses sources affirmant qu’ils ont eu connaissance du moment de l’attaque à l’avance grâce aux renseignements (il n’est pas clair s’il s’agit des renseignements américains ou israéliens).

Quoi qu’il en soit, le résultat est qu’aucun des engins cités n’a explosé sur le territoire de l’État sioniste. Pire encore, sur les 120 missiles balistiques lancés par Téhéran, seuls quatre ont touché Israël ! Ainsi, l’État sioniste a pu se targuer d’avoir abattu « 99% » de ce que l’Iran avait lancé contre lui. S’il est vrai que l’intention de l’Iran était d’atténuer dans une certaine mesure l’effet de son attaque, l’ampleur de l’échec a certainement dépassé ce que Téhéran attendait, de sorte que l’effet dissuasif de l’attaque a finalement été très limité, voire contre-productif en encourageant Israël à aller de l’avant et intensifier la confrontation. En frappant le territoire de l’État sioniste, l’Iran est ainsi tombé dans un piège tendu par celui-ci en lui permettant de lancer une contre-attaque ouverte sur le sol iranien. Si Téhéran s’était contenté d’une réponse proportionnée à l’attaque de son consulat, en attaquant par exemple une ambassade israélienne à Bahreïn ou aux Émirats arabes unis, sa réponse aurait paru légitime et n’aurait pas donné à Israël un droit à l’escalade aux yeux du monde.

Ce n’est un secret pour personne qu’Israël prépare depuis des années une frappe sur le territoire iranien, visant à détruire les installations nucléaires de son ennemi juré. Cette frappe est devenue très urgente aux yeux d’Israël, car Téhéran a considérablement intensifié son enrichissement d’uranium depuis que Trump a répudié en 2018 l’accord nucléaire conclu avec l’Iran par son prédécesseur Barack Obama en 2015. On estime aujourd’hui que Téhéran possède désormais suffisamment d’uranium enrichi avec l’Iran, ainsi que les capacités technologiques, pour fabriquer pas moins de trois bombes nucléaires en quelques jours. Cela place Israël dans un état d’alerte élevé, car la perte de son monopole régional de l’armement nucléaire constituerait un grave revers stratégique. Pire encore, cela attiserait ses craintes d’anéantissement en tant que pays de petite surface, confronté à des ennemis qui souhaitent sa destruction, et dont l’idéologie repose sur une exploitation intensive de la mémoire du génocide nazi des Juifs d’Europe. Cela renforce l’hypothèse selon laquelle l’attaque contre le consulat était une provocation délibérée dans le cadre d’une escalade visant à créer une opportunité pour l’État sioniste de frapper à l’intérieur du territoire iranien, en particulier contre le potentiel nucléaire iranien.

Seule la position américaine pose problème, car Israël ne peut pas risquer une confrontation totale avec son ennemi iranien sans la garantie de protection fournie par son parrain américain. Israël a la capacité de frapper l’Iran en profondeur, en utilisant ses avions « furtifs » F-35, qui échappent à la détection radar. Il possède près de 40 de ces avions, qui peuvent parcourir à pleine charge plus de 2200 kilomètres, et une distance plus longue après avoir largué leur charge à mi-chemin. Cependant, ils auraient probablement besoin d’un ravitaillement en vol au retour d’une frappe en Iran. Cela nécessite l’aide des États-Unis, ou l’autorisation d’utiliser l’espace aérien d’un des alliés arabes de l’État sioniste situés géographiquement entre lui et l’Iran, puisque le processus de ravitaillement ne peut échapper à la surveillance.

La couverture américaine reste nécessaire pour Israël dans tous les cas, et elle pourrait sembler indisponible vu que Washington a mis en garde à plusieurs reprises contre une escalade israélienne qui pourrait déclencher une guerre dans l’ensemble du Moyen-Orient. La crainte des États-Unis n’est certainement pas motivée par un souci de paix, mais est plutôt la crainte de voir une fermeture du détroit d’Ormuz et une forte hausse des prix du pétrole conduire à une nouvelle crise de l’économie mondiale. Pour cette même raison, Washington n’est pas disposé à intensifier les sanctions contre l’Iran au point d’imposer une interdiction totale de ses exportations de pétrole. Mais d’un autre côté, Washington partage l’inquiétude d’Israël quant à la possibilité que l’Iran acquière des armes nucléaires, et les administrations successives à la Maison Blanche ont répété que cette question constituait, à leurs yeux, une ligne rouge qui nécessiterait leur intervention.

Il est donc possible de douter de la sincérité des appels à la retenue de Joe Biden, sachant qu’il est allé plus loin que son prédécesseur Trump en soutenant l’État sioniste jusqu’à participer pleinement à la guerre génocidaire que ce dernier a menée et mène encore contre Gaza. Biden a appelé à la patience et à la désescalade tout en confirmant en revanche que les États-Unis, même s’ils ne participeront pas à une frappe israélienne sur le territoire iranien, resteront déterminés à protéger leur allié régional, ce qui est exactement ce dont ce dernier a besoin afin de lancer son attaque. Israël est conscient que l’administration américaine ne peut pas prendre le risque de participer à une attaque dont l’issue est incertaine et dont l’échec pourrait se répercuter sur elle et entraîner la défaite de Joe Biden aux élections présidentielles à l’automne prochain. La conclusion de tout ce qui précède est que la logique stratégique incite Téhéran à accélérer son acquisition de l’arme nucléaire et à le faire savoir une fois que ce sera fait, car c’est le moyen de dissuasion le plus efficace que l’Iran puisse acquérir.

Traduction de ma tribune hebdomadaire dans le quotidien de langue arabe, Al-Quds al-Arabi, basé à Londres. Cet article est paru le 16 avril en ligne et dans le numéro imprimé du 17 avril. Vous pouvez librement le reproduire en indiquant la source avec le lien correspondant.
Gilbert Achcar
https://blogs.mediapart.fr/gilbert-achcar/blog/170424/la-prochaine-attaque-israelienne-contre-l-iran

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Déclaration sur le génocide à Gaza

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Feminist Dissent tient à remercier l’artiste palestinienne Malak Mattar de nous avoir autorisés à utiliser l’image de sa peinture Thawra/Révolution. Mattar est une artiste de 22 ans originaire de Gaza.

Note : Depuis que nous avons écrit cette déclaration, un nouveau cycle de violence s’est ouvert au Moyen-Orient, déclenché par l’attaque israélienne contre le consulat iranien en Syrie et par l’attaque massive de drones et de missiles iraniens contre Israël, qui a été abattue avec l’aide des forces britanniques et américaines. Où cela se terminera-t-il ?

Le dimanche 7 avril 2024 a marqué exactement six mois depuis qu’Israël a déclenché sa guerre brutale contre le peuple palestinien à Gaza, une guerre qui ne semble pas près de s’arrêter.

À Feminist Dissent, nous avons du mal à trouver les mots pour décrire la douleur et la rage que nous ressentons face à la cruauté et à l’injustice qui se sont manifestées depuis le 7 octobre 2023. Ce jour-là, le Hamas et ses associés ont attaqué, torturé et assassiné de nombreux et nombreuses civils israéliens et ressortissant·es étranger·es, y compris des femmes et des enfants – 1200 personnes ont été tuées et 253 prises en otage, dont seulement 112 ont été libérées ou sauvées et 12 corps ont été retrouvés. Parmi les personnes agressées et tuées figuraient des militant·es pacifistes, dont certains·e étaient elleux-mêmes des survivant·es·de l’Holocauste, qui s’étaient engagé·es depuis longtemps à vivre au service de l’humanisme, de la compassion et de la réconciliation entre les deux peuples. Le Hamas ne faisait pas de distinction entre la population civile et l’État israélien.

Israël ne l’a pas fait non plus lorsqu’il a entamé sa campagne de vengeance – ostensiblement contre le Hamas – qui s’est avérée être une guerre brutale et totale contre la population de Gaza qui continue d’être diabolisée, déshumanisée, disloquée et tuée en masse. Au cours des six derniers mois, 33 494 Palestiniens·ne sont mort·es, dont plus de 13 000 enfants et 8 400 femmes. Huit mille autres personnes sont portées disparues. Ces chiffres ne tiennent pas compte des blessé·es et des mort·es en Cisjordanie.

Il est évident qu’il ne s’agit pas d’une guerre symétrique ou d’une guerre sans contexte. Si le Hamas et l’État israélien représentent tous deux des forces fondamentalistes et antidémocratiques de terreur et de répression qui se nourrissent l’une de l’autre, ils le font dans une dynamique profondément inégale dans laquelle Israël est la force dominante, en raison de sa puissance militaire et du soutien occidental. Depuis des années, Gaza est pratiquement une prison à ciel ouvert et Israël a longtemps cru que sa politique de division et de domination des différentes factions palestiniennes lui permettrait de continuer à dominer les Palestinien·nes sans être inquiété. Il aspire à une « normalisation » avec d’autres pays du Moyen-Orient tout en ignorant la question palestinienne. L’attaque du Hamas montre les limites de ces politiques, en particulier dans un Israël néolibéralisé et religieux qui a abandonné la plupart de ses citoyen·nes au profit d’intérêts économiques spécifiques et surtout d’intérêts religieux et nationalistes.

La relation entre Israélien·nes et Palestinien·nes doit être comprise à travers une histoire de colonialisme de peuplement, d’occupation et d’apartheid racialisé, alimentée par le projet sioniste de peuplement et, de plus en plus, par la politique juive de droite et fondamentaliste. La tragédie de cette guerre est que l’attaque du Hamas a renforcé l’angoisse existentielle des Israélien nes et ajouté la soif de vengeance à la déshumanisation croissante de « l’autre », qui s’est accrue dans les politiques d’occupation israéliennes. En conséquence, l’objectif de la guerre visant à « en finir avec le Hamas » – une organisation qu’Israël a cultivée pendant des années en tant que pouvoir politique intra-palestinien s’opposant à l’OLP laïque puis plus progressiste – est devenu dans la pratique une guerre visant à l’anéantissement total de la Palestine. En bloquant l’aide humanitaire et en détruisant l’infrastructure juridique, sociale, culturelle, religieuse et économique palestinienne nécessaire à la vie, Israël est passé du domicide à des politiques génocidaires permanentes qui utilisent la famine comme arme contre la population de Gaza. La campagne militaire d’Israël, pilotée par l’intelligence artificielle, lui a permis d’étendre la guerre dans toutes les directions pour englober toutes les parties de la société palestinienne, y compris les journalistes, les éducateurs et les éducatrices, les travailleurs et les travailleuses de la santé et de l’aide humanitaire, les personnes âgées et les malades. Les mort·es, les déplacements et la dévastation généralisés qui ont suivi ont conduit les Nations unies et de nombreuses agences humanitaires à mettre en garde contre le « danger imminent de famine », qui est en fait déjà une réalité pour un nombre croissant d’habitant·es de Gaza, en particulier dans le nord.

Les signes avant-coureurs d’un génocide imminent étaient là depuis le début. Suite au tollé international, en janvier 2024, l’Afrique du Sud a réussi à pousser la Cour internationale de justice à statuer provisoirement qu’Israël est engagé dans des actes plausibles de génocide et à appeler à un cessez-le-feu immédiat en conformité avec les obligations d’Israël en vertu de la Convention sur le génocide. Le rejet éhonté de la décision par Israël témoigne d’un stupéfiant sentiment d’impunité rendu possible par le soutien du Royaume-Uni et d’autres puissances occidentales. L’encouragement, le soutien militaire et financier d’Israël par les États-Unis, l’Allemagne, le Royaume-Uni et d’autres pays constituent un nouveau fiasco dans notre ordre mondial d’après-guerre fondé sur des règles. Il s’agit d’une démonstration flagrante de complicité opportuniste et de la dégradation d’un leadership mondial qui a atteint des niveaux dangereux de faillite juridique, morale et politique. C’est précisément cette collusion qui a conduit d’anciens juges et avocat·es de la Cour suprême du Royaume-Uni à prendre la mesure sans précédent de publier une lettre avertissant que le Royaume-Uni risque lui-même d’enfreindre gravement le droit humanitaire international par le biais de politiques telles que son commerce d’armes avec Israël.

Les violences sexuelles et les viols commis par le Hamas à l’encontre des femmes israéliennes constituent une dimension supplémentaire de la guerre. En ce qui concerne le 7 octobre 2023, des preuves crédibles montrent qu’il s’agit d’une attaque calculée contre des femmes israéliennes dont les corps ont été violés, mutilés et utilisés comme armes de guerre. Nous dénonçons ces actes de brutalité et de dépravation dans les termes les plus forts possibles et soutenons les enquêtes indépendantes sur ces événements en tant que crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Bien que les violences sexuelles n’aient pas atteint l’ampleur des guerres de Bosnie ou du Rwanda, il est clair que le Hamas avait l’intention de se venger en humiliant et en dégradant les femmes israéliennes.

Mais les actes de viol et de mutilation du Hamas proviennent de la même source idéologique qui se manifeste sur le corps des femmes palestiniennes. À l’instar de tous les mouvements fondamentalistes religieux, le Hamas a fait reculer les droits des femmes à Gaza en imposant des normes et des lois discriminatoires de la charia qui considèrent les femmes comme inférieures et justifient les restrictions de leurs mouvements, leur oppression et d’autres formes de violence à leur encontre. Par exemple, le nombre de femmes palestiniennes agressées ou tuées, y compris dans des crimes dits d’honneur, par des hommes violents a augmenté d’année en année à Gaza et dans d’autres territoires palestiniens.

Ce n’est là qu’une des nombreuses raisons pour lesquelles le Hamas ne symbolise pas une lutte héroïque pour la libération de la Palestine, comme l’ont prétendu de nombreux membres de la gauche. Il s’agit d’un groupe islamiste militant qui a été créé à partir des Frères musulmans fondamentalistes par l’État israélien à Gaza pour semer la division et affaiblir la lutte des Palestinien·nes pour la liberté. Il ne se préoccupe pas plus des droits humains des femmes que l’État israélien, qui n’a pas hésité à instrumentaliser le viol et la violence sexuelle des femmes israéliennes pour justifier le massacre des Palestinien·nes. Nous ne devons pas oublier qu’Israël a lui aussi une longue et sordide histoire d’utilisation de la violence sexuelle contre les femmes, voire les hommes et les garçons palestiniens, comme arme de torture. Dans le même temps, il apaise également les forces fondamentalistes juives et ultra-orthodoxes qui exigent un plus grand contrôle patriarcal des femmes au sein de la société israélienne.

Le recours au viol et à la violence contre les femmes dans n’importe quel contexte doit être condamné, mais il en va de même pour l’assujettissement du peuple palestinien par Israël, qui dépend non seulement d’une violence et d’une surveillance aveugles, mais aussi d’un génocide en soi.

Il est difficile d’avoir de l’espoir en ces temps très sombres. Mais nous ferions bien de nous rappeler qu’en Israël, la résistance au mépris de Netanyahou pour la vie des otages et de leurs familles et à sa politique belliciste se développe, même si c’est pour des raisons politiques différentes. Si l’existence d’Israël en tant qu’État ethno-nationaliste et d’apartheid n’est pas encore sérieusement menacée, sa prétention douteuse à la démocratie et à la recherche de la paix s’effiloche rapidement.

Alors que la plupart des hommes politiques continuent d’excuser ou de défendre les actions d’Israël, en dehors d’Israël, la résistance de tous les secteurs de la société civile prend de l’ampleur. Guidés par les notions de liberté, d’État de droit et de justice sociale, de plus en plus de personnes réclament non seulement la fin de la guerre ou même de l’occupation post-1967, mais aussi la transformation de la Palestine/Israël en un État où tous les résident·es, quelle que soit leur origine ethnique, nationale, leur sexe ou leur classe sociale, peuvent jouir de droits humains et civils individuels et collectifs égaux. Pour celles d’entre nous qui se considèrent comme des féministes laïques, antiracistes, anti-fondamentalistes et socialistes, la lutte pour la survie de notre humanité et des valeurs fondamentales qui devraient la sous-tendre est devenue une lutte politique urgente.

https://feministdissent.org/blog-posts/statement-on-the-genocide-in-gaza/
Traduit avec DeepL.com (version gratuite)

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« Anatomie d’un génocide » 7 avril 2024

La semaine dernière, la rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les territoires palestiniens occupés, Francesca Albanese, a publié un rapport intitulé « Anatomie d’un génocide », car il existe des « motifs raisonnables de croire » que le seuil de perpétration d’un crime de génocide a été atteint.

Wikipédia décrit ainsi madame Albanese : née en 1977, elle est nommée le 1er mai 2022 rapporteur spécial des Nations unies sur les territoires palestiniens, pour un mandat de trois ans. Dans son premier rapport, elle recommande que les États membres de l’ONU élaborent « un plan pour mettre fin à l’occupation coloniale israélienne et au régime d’apartheid ». Elle critique l’inaction sur cette question, décrivant les États-Unis comme « subjugués par le lobby juif » et l’Europe par un « sentiment de culpabilité à l’égard de l’Holocauste », arguant que tous deux « condamnent les opprimés » dans le conflit. Pendant la guerre Hamas-Tsahal, Francesca Albanese appelle à un cessez-le-feu immédiat, avertissant que « les Palestiniens courent le grave danger d’un nettoyage ethnique de masse, que la communauté internationale doit « prévenir et protéger les populations des crimes d’atrocité », et que « la responsabilité des crimes internationaux commis par les forces d’occupation israéliennes et le Hamas doit également être immédiatement recherchée ». 

Titulaire d’une licence en droit avec mention de l’Université de Pise et d’un master en droits de l’homme de l’université SOAS de Londres, elle termine son doctorat en droit international des réfugiés à la faculté de droit de l’université d’Amsterdam. Chercheuse affiliée à l’Institut pour l’étude des migrations internationales de l’université de Georgetown, conseillère principale sur les migrations et les déplacements forcés auprès de l’organisation à but non lucratif Arab Renaissance for Democracy and Development (ARDD) et chercheuse à l’Institut international d’études sociales de l’université Érasme de Rotterdam, elle rédige en 2020, avec Lex Takkenberg, l’ouvrage Palestinian Refugees in International Law. Francesca Albanese a travaillé pendant une décennie en tant qu’experte en droits de l’homme pour l’Organisation des Nations unies (ONU).

Journaliste, musicien, chef d’orchestre et écrivain juif, Jonathan Ofir a guidé notre lecture du rapport que les médias occidentaux camouflent, comme tout ce qui provient de l’ONU, ce que nous dénonçons sans relâche. Il est à noter que la rapporteuse condamne les crimes commis par le Hamas le 7 octobre en Israël, mais ils ont été commis en dehors de la zone géographique couverte par son mandat, comme le sont aussi la Cisjordanie et Jérusalem Est.

« Après cinq mois d’opérations militaires, Israël a détruit Gaza. Plus de 30 000 Palestiniens ont été tués, dont plus de 13 000 enfants. Plus de 12 000 personnes sont présumées mortes et 71 000 blessées, dont beaucoup ont subi des mutilations qui ont changé leur vie. Soixante-dix pour cent des zones résidentielles ont été détruites. Quatre-vingts pour cent de l’ensemble de la population a été déplacée de force. Des milliers de familles ont perdu des êtres chers ou ont été anéanties. Nombre d’entre eux n’ont pas pu enterrer et faire le deuil de leurs proches, contraints de laisser leurs corps en décomposition dans les maisons, dans la rue ou sous les décombres. Des milliers de personnes ont été arrêtées et systématiquement soumises à des traitements inhumains et dégradants. Le traumatisme collectif incalculable sera vécu pour les générations à venir. »

Albanese décrit les trois aspects essentiels du crime de génocide commis par Israël : le meurtre de membres d’un groupe spécifique de personnes, l’atteinte à leur intégrité physique ou mentale et la destruction volontaire de leurs conditions de vie. Le rapport comporte également une section consacrée à l’intention, qui recense une partie des innombrables déclarations génocidaires des dirigeants israéliens. Constituant presque la moitié du rapport (points 55-92, sur 97 points), se trouve une section consacrée au « camouflage humanitaire : déformer les lois de la guerre pour dissimuler l’intention génocidaire ». Cette section est subdivisée en cinq thèmes centraux :

1-Les boucliers humains et la logique du génocide.
2-Transformer l’ensemble de la bande de Gaza en « objectif militaire ».
3-Les tueries aveugles qualifiées de « dommages collatéraux ».
4-Les évacuations et les zones de sécurité.
5-La protection médicale.

Albanese démontre comment les trois principes centraux du droit international humanitaire – distinction, proportionnalité et précaution – ont été détournés par Israël dans le but de fournir un voile juridique à des actes illégaux et arbitraires. « Les attaques indiscriminées, qui ne distinguent pas les cibles militaires des personnes et des objets protégés, ne peuvent jamais être proportionnées et sont toujours illégales. Depuis le 7 octobre, les Palestiniens ont été « décivilisés » en utilisant des concepts du droit humanitaire international tels que les boucliers humains, les dommages collatéraux, les zones de sécurité, les évacuations et la protection médicale d’une manière si arbitraire et permissive qu’elle a vidé ces concepts de leur contenu normatif, subverti leur objectif de protection et érodé finalement la distinction entre les civils et les combattants dans les actions israéliennes à Gaza. (…) Les hauts responsables politiques et militaires d’Israël ont présenté systématiquement les civils comme des agents du Hamas, des « complices » ou des boucliers humains qui protègent le Hamas. Le droit international ne permet pas d’affirmer de manière générale qu’une force adverse utilise l’ensemble de la population comme boucliers humains en bloc. Cette accusation est donc un simple prétexte pour justifier le meurtre de civils sous le couvert d’une prétendue légalité, des meurtres perpétrés à une telle échelle que l’intention génocidaire ne peut faire de doute. »

Nettoyage ethnique des civils, déclarés « dommages collatéraux ».
Le droit international stipule que les attaques doivent être « strictement limitées » à des cibles qui « doivent offrir un avantage militaire certain ». Mais, note Albanese, «  Israël a détourné cette règle pour ‘militariser’ les objets civils et ce qui les entoure, justifiant ainsi leur destruction aveugle ». Ainsi, « la population civile de Gaza et les infrastructures sont considérées comme des obstacles situés au milieu, devant ou au-dessus des cibles […et] Israël considère tout objet qui aurait été ou pourrait être utilisé militairement comme une cible légitime, de sorte que des quartiers entiers peuvent être rasés ou démolis sous une apparence de légalité ».

Israël cherche à dissimuler le ciblage à grande échelle des civils en les qualifiant de « dommages collatéraux ». « L’ordre d’évacuation massive du 13 octobre – lorsque 1,1 million de Palestiniens ont reçu l’ordre d’évacuer le nord de Gaza en 24 heures vers des ‘zones de sécurité’ désignées par Israël dans le sud – […], au lieu d’accroître la sécurité des civils, l’ampleur même des évacuations au milieu d’une campagne de bombardements intense et le système de zones de sécurité communiqué de manière désordonnée, ainsi que les coupures de communication prolongées, ont accru les niveaux de panique, les déplacements forcés et les tueries de masse. Lorsque les habitants du nord ont été évacués vers le sud, Israël a illégalement classé les habitants du nord de la bande de Gaza qui étaient restés (y compris les malades et les blessés) comme « boucliers humains » et « complices du terrorisme », transformant ainsi des centaines de milliers de civils en cibles militaires.

Et les zones de sécurité n’étaient pas sûres non plus : « L’effacement des protections civiles dans la zone évacuée a été combiné à un ciblage aveugle des personnes évacuées et des habitants des zones désignées comme sûres… Sur les quelque 500 bombes de 2 000 livres larguées par Israël au cours des six premières semaines d’hostilités, 42% ont été déployées dans les zones désignées comme sûres dans les régions méridionales ». « En d’autres termes », résume Albanese, les « zones de sécurité » ont été « délibérément transformées en zones de massacres ».

Il s’agit d’un outil de nettoyage ethnique : « Le schéma des meurtres de civils qui ont été évacués vers le sud, associé aux déclarations de certains Israéliens de haut rang affirmant leur intention de déplacer de force les Palestiniens hors de Gaza et de les remplacer par des colons israéliens, permet de déduire raisonnablement que les ordres d’évacuation et les zones de sécurité ont été utilisés comme des outils génocidaires pour parvenir à un nettoyage ethnique. »

« Les médias ont contesté les allégations d’Israël selon lesquelles le Hamas utilisait les hôpitaux comme boucliers, affirmant qu’il n’y avait aucune preuve que les pièces reliées à l’hôpital avaient été utilisées par le Hamas ; les bâtiments de l’hôpital (contrairement aux images 3D de l’armée israélienne) n’étaient pas reliés au réseau de tunnels. Que les accusations d’Israël concernant la protection de l’hôpital d’Al-Shifa soient vraies ou non – ce qui reste à prouver -, les civils dans les hôpitaux auraient dû être protégés et ne pas être soumis à un siège et à une attaque militaire ».

L’Organisation mondiale de la santé avait signalé à la mi-novembre qu’une « catastrophe de santé publique » se développait à Gaza, 26 des 35 hôpitaux n’étant plus opérationnels en raison des bombardements et du siège d’Israël. Deuxièmement, Israël savait que son opération militaire faisait un nombre important de blessés. Les traumatismes physiques constituent la principale cause de surmortalité à Gaza. Il était prévisible que la suspension forcée des services du plus grand hôpital de Gaza porterait gravement atteinte aux chances de survie des blessés, des malades chroniques et des nouveau-nés en couveuse. Par conséquent, en prenant pour cible l’hôpital Al-Shifa, Israël a sciemment condamné des milliers de malades et de personnes déplacées à des souffrances et à une mort qui auraient pu être évitées ».

Conclusions et recommandations du rapport
1- Constats : « La nature et l’ampleur écrasantes de l’assaut israélien sur Gaza et les conditions de vie destructrices qu’il a infligées révèlent une intention de détruire physiquement les Palestiniens en tant que groupe. Israël a cherché à dissimuler sa conduite génocidaire des hostilités, en utilisant le droit humanitaire international pour couvrir ses crimes. En détournant les règles coutumières du droit international humanitaire, notamment la distinction, la proportionnalité et les précautions, Israël a de facto traité tout un groupe comme ‘terroriste’ ou ‘soutenant le terrorisme’, transformant ainsi tout et tout le monde en cible ou en dommage collatéral, donc éliminable ou destructible ».
2- Historique : «  
Le génocide perpétré par Israël contre les Palestiniens de Gaza est une escalade d’un processus d’effacement colonial d’un peuple autochtone qui remonte à loin. Depuis plus de sept décennies, Israël étouffe le peuple palestinien en tant que groupe – démographiquement, culturellement, économiquement et politiquement – en le déplaçant, en l’expropriant et en contrôlant ses terres et ses ressources. La Nakba en cours doit être arrêtée et réparée une fois pour toutes. C’est un impératif que l’on doit aux victimes de cette tragédie qui aurait pu être évitée, ainsi qu’aux générations futures de ce pays ».

3- Les deux derniers points (96-97) du rapport portent sur ce que la communauté 
internationale peut et même doit faire, pour éviter ce génocide. « La rapporteuse exhorte les États membres à faire respecter l’interdiction du génocide conformément à leurs obligations auxquelles ils ne peuvent se soustraire. Israël et les États qui se sont rendus complices de ce que l’on peut raisonnablement considérer comme un génocide doivent rendre des comptes et indemniser le peuple palestinien à la hauteur de la destruction, de la mort et du préjudice infligés ».

Les moyens à disposition : les Artistes pour la Paix en ont appliqué les principaux en alertant la ministre des Affaires étrangères du Canada, Mélanie Joly :

– Mettre en œuvre immédiatement un embargo sur les armes à destination d’Israël, ainsi que d’autres mesures économiques et politiques nécessaires pour garantir un cessez-le-feu immédiat et durable, y compris des sanctions.
– Soutenir la plainte de l’Afrique du Sud auprès de la CIJ qui accuse Israël de génocide.
– Garantir une « enquête approfondie, indépendante et transparente » sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, y compris des missions d’enquête internationales, en saisissant la Cour pénale internationale et en appliquant la compétence universelle.
– Qu’Israël et les autres États complices du génocide s’engagent à ne pas récidiver et à payer l’intégralité du coût de la reconstruction de Gaza.
– S’attaquer aux causes profondes par l’intermédiaire des Nations unies, notamment en reconstituant le Comité spécial des Nations Unies contre l’apartheid.
– À court terme, déployer « 
une présence internationale protectrice pour limiter la violence régulièrement utilisée contre les Palestiniens dans le territoire palestinien occupé ».
– Garantir l’UNRWA, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens qui a fait l’objet d’une campagne de propagande israélienne visant à empêcher son financement.

Enfin, Albanese appelle le Haut-Commissariat aux droits de l’homme à « intensifier ses efforts pour mettre fin aux atrocités actuelles à Gaza, notamment en promouvant et en appliquant avec précision le droit international, en particulier la Convention sur le génocide, dans le contexte de l’ensemble du territoire palestinien occupé ».

Les Artistes pour la Paix – P.J. 
http://www.artistespourlapaix.org/gaza-anatomie-dun-genocide-7-avril-2024/
https://www.pressegauche.org/Gaza-Anatomie-d-un-genocide-7-avril-2024

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Le Canada doit suspendre le commerce d’armes avec Israël

Alors que les bombardements israéliens, qui ont déjà entraîné un nombre alarmant de morts civiles, se poursuivent dans la bande de Gaza, l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC), le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP), et le Syndicat national des employées et employés généraux du secteur public (SNEGSP) demandent au gouvernement canadien de suspendre immédiatement le commerce d’armes et d’équipement militaire avec Israël.

Plus de 30 000 Palestiniennes et Palestiniens ont été tués à la suite des bombardements dans la bande de Gaza effectués par Israël en réponse à l’attaque du Hamas du 7 octobre dernier. Rappelons que lors de cette attaque, environ 1 200 personnes, dont une majorité de civils innocents, ont été tuées et plus de 200 personnes, dont des enfants, ont été prises en otage. On estime que 100 personnes sont toujours en captivité, et leurs familles ainsi que leurs communautés en souffrent. Un cessez-le-feu s’impose de toute urgence afin de permettre aux otages israéliens de retourner à la maison en toute sécurité et de mettre fin à la dévastation et aux morts à Gaza.

La majorité des Palestiniennes et Palestiniens tués par des frappes aériennes israéliennes à Gaza sont des civils. Constat alarmant : environ le tiers sont des enfants. Des dizaines de milliers de Palestiniennes et de Palestiniens ont été blessés et environ deux millions de personnes ont été déplacées. De plus en plus d’information circule sur la pénurie d’aide humanitaire et sur les problèmes de famine et de santé qui touchent la population. On rapporte également de troublantes attaques contre des civils et des infrastructures, dont des établissements de soins de santé. Maintenant, l’armée israélienne menace de mener une offensive terrestre à Rafah. Pourtant, c’est vers Rafah qu’on a dirigé plus d’un million de Palestiniennes et de Palestiniens fuyant les frappes aériennes israéliennes dans le nord de la bande de Gaza.

Le Canada exporte de l’équipement militaire en Israël, entre autres via les États-Unis. Ce faisant, il risque de se rendre complice de la violence et des violations des droits de la personne qu’Israël commet à Gaza. Le Canada importe également de l’équipement militaire d’Israël, ce qui, selon des groupes antiguerre, soutient l’industrie et les opérations militaires d’Israël.

En plus des appels urgents pour un cessez-le-feu permanent et une aide humanitaire, de plus en plus de syndicats, de membres de la société civile, d’organisations humanitaires et de dirigeant(e)s élu(e)s de partout dans le monde appellent à un embargo sur la vente d’armes à Israël afin d’aider à mettre fin à la terrible violence dans la bande de Gaza.

D’autres pays, dont la Belgique, l’Italie, l’Espagne et les Pays-Bas, ont suspendu les transferts d’armes vers Israël. Les experts des droits de la personne des Nations Unies (en anglais seulement) ont sonné l’alarme, avertissant que l’envoi à Israël d’armes, de munitions et de pièces qui seraient utilisées dans la bande de Gaza constitue probablement une violation du droit humanitaire international. En vertu de traités internationaux, des pays – dont le Canada – ont l’obligation légale de s’abstenir d’envoyer des armes, des munitions ou des pièces si on croit qu’elles seront utilisées pour violer le droit international. Les gouvernements doivent également rejeter les demandes de permis d’exportation d’armes qui pourraient être utilisées pour commettre des actes de violence à l’égard de femmes et d’enfants.

La récente décision de la Cour internationale de Justice (CIJ), qui a confirmé un risque plausible de génocide dans la bande de Gaza et ordonné à Israël de prévenir des actes de génocide, amplifie l’importance et l’urgence de respecter nos obligations. En tant que signataire de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, le Canada doit se conformer à la décision de la CIJ et prendre toutes les mesures possibles pour prévenir un génocide dans un autre pays.

Des données récentes obtenues par The Maple (en anglais seulement) concluaient que le gouvernement canadien avait approuvé des exportations militaires vers Israël d’une valeur de 28,5 millions de dollars entre octobre et décembre 2023.

Au mois de mars, à la suite de la motion non contraignante présentée à la Chambre des communes, le gouvernement canadien s’est engagé à cesser d’approuver les demandes de permis d’exportation d’armes vers Israël. Il s’agit d’une première étape importante vers un embargo complet sur les armes.

Nous exhortons le gouvernement canadien à suspendre immédiatement le commerce d’armes et d’équipement militaire avec Israël, conformément aux obligations légales du Canada. Le Canada doit imposer un embargo sur les armes afin d’aider à mettre fin aux horreurs qui se produisent à Gaza.

En outre, nous réitérons nos appels pour que le gouvernement canadien :

soutienne activement un cessez-le-feu immédiat et permanent ;
• demande le retour sécuritaire des civils gardés en otage par le Hamas ;
• exhorte fortement le gouvernement d’Israël à se conformer à la décision de la CIJ afin de prévenir des actes de génocide à Gaza, et à empêcher et punir toute incitation directe et publique à commettre un génocide ;
• assure la distribution sécuritaire de l’aide humanitaire à Gaza, et rétablisse notamment son financement de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) ;
• demande la fin de l’occupation du territoire palestinien comme étape cruciale pour une paix juste et durable dans la région.

Nous espérons que ces mesures aideront à soutenir des solutions politiques à long terme afin d’assurer la paix et la sécurité pour les peuples de Palestine et d’Israël, ainsi que pour tous les gens de la région.

https://lautjournal.info/20240410/le-canada-doit-suspendre-le-commerce-darmes-avec-israel

https://www.pressegauche.org/Le-Canada-doit-suspendre-le-commerce-d-armes-avec-Israel

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Le Canada doit enquêter sur les organisations caritatives qui financent les crimes de guerre israéliens

Saviez-vous que vos impôts subventionnent
des crimes de guerre israéliens ?

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Je vous invite à signer dès maintenant la pétition parlementaire et à exiger de la ministre qu’elle mette fin sans délai à la pratique consistant à utiliser le système de bienfaisance canadien pour financer des crimes de guerre israéliens.

Cher/chère lecteur ou lectrice,
Au cours des cinq dernières années, plus d’un milliard de dollars ont été transférés en Israël par des organismes de bienfaisance enregistrés au Canada. Bien qu’une grande partie de ces fonds soit effectivement destinée à des activités de bienfaisance légitimes, des centaines de milliers de dollars sont acheminés de manière à soutenir certaines des organisations israéliennes les plus odieuses, dont quelques-unes sont directement complices du génocide en cours.

Un organisme de bienfaisance en particulier, la Mizrachi Organization of Canada, transfère des « dons de charité » à des organisations israéliennes impliquées dans des activités telles que le blocage de convois d’aide humanitaire en route vers Gaza et le nettoyage ethnique de la population palestinienne de Jérusalem-Est et de Cisjordanie.

Et tout cela est subventionné avec l’argent de vos impôts.

Signez dès maintenant la pétition parlementaire : mettons fin aux subventions des crimes d’Israël !

Les organismes de bienfaisance sont censés œuvrer à l’avancement du bien commun ou au bénéfice du grand public. C’est du moins ce que l’on nous affirme, et c’est dans cet esprit que nous les subventionnons collectivement par un mécanisme de crédits d’impôt.

L’Agence du revenu du Canada (ARC) a le mandat de garantir que ces fonds servent bel et bien à des activités de bienfaisance légitimes et que les organismes bénéficiaires ne contreviennent pas aux règles de l’ARC ni aux lois canadiennes ou aux principes du droit international.

Pour être tout à fait clair, les propres lignes directrices de l’ARC interdisent que des dons de charité soient transférés à une armée étrangère ou soient destinés à soutenir des activités jugées contraires aux principes de la politique étrangère du Canada, comme les colonies israéliennes illégales.

Pourtant, comme nous l’avons constaté dans le cadre de nos efforts auprès de l’ARC pour faire révoquer le statut d’organisme de bienfaisance du Jewish National Fund (JNF) of Canada, le gouvernement choisit souvent de fermer les yeux sur de telles violations : une forte pression populaire est nécessaire pour le forcer à prendre des mesures conséquentes.

Signez la pétition dès maintenant !

Au cours des dernières années, un certain nombre de plaintes ont été transmises, en collaboration avec nos partenaires du Mouvement pour une Paix Juste (JPA), à la ministre du Revenu national et à l’ARC au sujet des dons de charité qui servent à soutenir des activités israéliennes illégales. Plusieurs de ces plaintes concernent un organisme de « bienfaisance » connu sous le nom de Mizrachi Organization of Canada, qui semble être le principal fournisseur de reçus d’impôt au Canada pour le mouvement sioniste religieux extrémiste en Israël.

C’est pourquoi aujourd’hui, VJI et JPA, en collaboration avec le criminologue Miles Howe, ont envoyé une lettre à la ministre du Revenu national, Madame Marie-Claude Bibeau, pour lui demander de révoquer le statut d’organisme de bienfaisance de Mizrachi Canada.

La liste des organisations que soutient Mizrachi Canada est tout simplement scandaleuse.

L’une d’elles, Im Tirtzu, se vante de participer au blocage des camions transportant de l’aide humanitaire à Gaza en pleine famine. Une autre, Women in Green, encourage ses sympathisant·es à donner des drapeaux israéliens pour que les soldats de Tsahal les plantent à Gaza. Sans parler des généreuses sommes transférées à l’organisation de colons extrémistes, Regavim, cofondée par le ministre d’extrême droite du cabinet israélien, Bezalel Smotrich, et la Duvdevan Foundation, qui soutient une unité clandestine de l’armée israélienne tristement célèbre pour ses assassinats de Palestinien·nes.

Je vous invite à signer dès maintenant la pétition parlementaire et à exiger de la ministre qu’elle mette fin sans délai à la pratique consistant à utiliser le système de bienfaisance canadien pour financer des crimes de guerre israéliens.

Lisez et relayez notre lettre ouverte à la ministre

Je vous remercie d’avance de l’attention que vous portez à cette question importante,
Corey
Corey Balsam (il/lui)
Coordinateur national
corey@ijvcanada.org
Faire un don à VJI ou devenir membre
Voix juives indépendantes
https://www.pressegauche.org/Le-Canadat-doit-enqueter-sur-les-organisations-caritatives-qui-financent-lese

*-* 

Un sondage révèle qu’un français sur trois estime qu’Israël commet un génocide à l’encontre des Palestiniens de Gaza
https://agencemediapalestine.fr/blog/2024/04/16/un-sondage-revele-quun-francais-sur-trois-estime-quisrael-commet-un-genocide-a-lencontre-des-palestiniens-de-gaza/
L’armée israélienne ouvre le feu sur des milliers de personnes qui tentent de rentrer chez elles dans le nord de Gaza
https://agencemediapalestine.fr/blog/2024/04/16/larmee-israelienne-ouvre-le-feu-sur-des-milliers-de-personnes-qui-tentent-de-rentrer-chez-elles-dans-le-nord-de-gaza/
Gaza : 33 797 Palestiniens tués par Israël, dont au moins 14 500 enfants
https://agencemediapalestine.fr/blog/2024/04/16/gaza-plus-de-21-600-palestiniens-tues-par-israel/

Auteur : entreleslignesentrelesmots

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