Les charbons crépitaient dans le feu. Les flammes vacillantes émettaient une lueur tiède

1Un pan de l’histoire des maoris, de la colonisation en Nouvelle-Zélande, dans un roman épique et musical. Witi Ihimaera alterne deux récits, celle du récitant-écrivain et celle de d’Erenora, cette femme de Parihaka qui refuse de plier et d’abandonner celui qu’elle aime, disparu-emprisonné par les Pakeha, ces blancs colonisateurs.

L’auteur déploie sa narration, remodelant des mythes littéraires et musicaux, Eleonore et Florestan du Fidelio de Ludwig van Beethoven, l’homme au masque de fer, mokomokoi

Taranaki. « Naturellement, Taranaki est bien plus qu’une montagne. C’est un tipuna, un ancêtre, né dans un passé mythique. A l’époque où les montagnes étaient capables de se déplacer, Taranaki avait essuyé une déception amoureuse avec Pihanga, un autre volcan, et s’était éloigné à l’ouest pour s’en remettre ; le fleuve Whanganui coule aujourd’hui dans le profond canal creusé par le trajet du Taranaki ».

Contrairement aux inventions européennes, les colonisateurs durent affronter souvent à des rebellions armées. Et les futurs colonisés surent déployer une science militaire qui leur permit de vaincre momentanément l’envahisseur. Ici le génie militaire fut Titokowaru.

« Erenora avait senti l’ombre de l’étranger sur la lumière de son chemin ». Erenora et Horitana. « Et maintenant, laisse-moi natter et tisser les brins de chanvre de notre désir pour unir nos cœurs et resserrer le tukutuku pour que jamais il ne puisse se briser ».

Quête de l’autre aimé, révolte et insoumission contre l’injustice, des femmes et des hommes vivent sans renoncer. Récit et humour, comme cette narration de la saga des clotures ;

Une histoire, des histoires. « C’est le problème avec l’histoire. On croit qu’il n’y a qu’une seule version, mais la plupart du temps, il en existe trois, quatre ou plus emmêlées et noués comme les brins d’une corde ».

Violence, autodéfense, viols, déportations…

Erenora devient Eruera et prends le chemin avec ses sœurs. Retrouver les maris. Trois sœurs sur les routes. Plein sud, toujours plein sud.

Le rédacteur interroge son écriture, sa relation avec les personnages. « Est-ce que je dois traiter Erenora et son récit comme si elle était simplement une personne qui traversait l’histoire ? Comme si l’histoire même était un livre ? C’est impossible ! L’histoire est un paysage vivant et Erenora a existé pour de vrai ».

Une histoire aussi du bout du monde. Rocco, Marzelline, la langue allemande, le phare, la grotte…

Un récit enrichi d’autres récits. Surgissement des temps anciens, des rencontres…

Ouvrez cet ouvrage et vous plongerez dans un univers littéraire d’aventures. Romantisme et politique. Un auteur nous/vous entraîne au pays de la femme de Parihaka. Un livre difficile à lâcher. Une puissante écriture, un univers romanesque émouvant. Et une femme…

Witi Ihimaera : La femme de PARIHAKA

Traduit de l’anglais (Nouvelle-Zélande) par Mireille Vignol

Au vent des îles, Editions – Tahiti 2014, 400 pages, 23 euros

Didier Epsztajn

Auteur : entreleslignesentrelesmots

notes de lecture

Une réflexion sur « Les charbons crépitaient dans le feu. Les flammes vacillantes émettaient une lueur tiède »

  1. C’est effectivement un très beau livre. Je l’ai lu en deux jours tellement le style littéraire est travaillé mais simple, esthétique mais juste ce qu’il faut. L’histoire de cet amour frustré par des combats politiques, la spoliation des terres par ordre gouvernemental, l’histoire de la Nouvelle-Zélande au travers la plume d’un maori qu’on ne lâche plus! Il a également écrit Pai et Bulibasha, roi des gitans. Décidément, on retrouve son style raffiné et son chant d’amour pour sa terre natale. Vraiment, chaque fois, je découvre un peu plus la Nouvelle-Zélande. Un plaisir!
    A lire d’urgence.

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