[39] Solidarité avec la résistance des ukrainien·nes. Retrait immédiat et sans condition des troupes russes [39] 

  • Serhhiy Guz : Le Parlement ukrainien s’apprête à adopter un code de travail qui « retournerait les travailleurs et les travailleuses au XIXe siècle »
  • Pour aider l’Ukraine, il faut annuler sa dette extérieure. Entretien avec Alexander Kravchuk
  • Ukraine – Une campagne de financement pour imprimer des milliers de livres
  • Au milieu de la guerre, les travailleurs de plateforme en Ukraine exigent des salaires décents
  • Les services de sécurité ukrainiens s’intéressent aux syndicalistes
  • Russie : liberté pour Kirill Ukraintsev, responsable du syndicat des livreurs !
  • [Rencontre] Retour d’Ukraine. Témoigner et agir Avec Jean Vogel et Daria Suborova
  • Jean Vogel : Pouvoir russe : une plate-forme idéologique intégralement réactionnaire
  • Con la resistencia del pueblo ucraniano. Por su victoria contra la agresión
  • Avec la résistance du peuple ukrainien pour sa victoire contre l’agression
  • Разом із рухом опору українського народу. За його перемогу проти агресії
  • Biélorussie : « la journée a commencé par des perquisitions au siège du syndicat »
  • L’organisation syndicale indépendante biélorusse de Naftan expulsée de ses locaux
  • Rencontre avec les organisations et collectifs ukrainiens à Lviv
  • Le syndicat PCS s’affilie à la campagne de solidarité avec l’Ukraine
  • Déclaration du Mouvement des objecteurs de conscience de Russie
  • Michel Goya : Point de situation des opérations en Ukraine 28 mai 2022 – La bataille du Donbass 2
  • Liens avec autres textes

Le Parlement ukrainien s’apprête à adopter un code de travail qui « retournerait les travailleurs et les travailleuses au XIXe siècle »

« Avec une seule lettre, notre employeur nous a renvoyé.e.s, et notre négociation s’est transformée en monologue », explique Anton Gorb, représentant syndical du plus grand service postal privé d’Ukraine. « Nous n’allons pas céder. Nous tentons de regagner quelque chose. Mais notre rapport avec l’employeur ne peut plus être rétablie », déclare Gorb.

En mars de cette année, le parlement ukrainien a adopté une législation qui restreint considérablement la capacité des syndicats à représenter leurs membres, introduisant la « suspension d’emploi ». Cela signifie que l’employé.e n’est pas licencié.e, mais son emploi et son salaire sont suspendus. La loi accorde aux employeur.e.s le droit unilatéral de suspendre les conventions collectives.
Cela, raconte Gorb, s’est passé à Nova Pochta, autrefois un fleuron des bonnes relations de travail entre les syndicats ukrainiens et la direction.
Mais au-delà de cette mesure temporaire, un groupe de député.e.s et de responsables ukrainien.ne.s visent désormais à « libéraliser » et à « désoviétiser » davantage la législation du travail. Un projet de loi prévoit que les salarié.e.s de petites et de moyennes entreprises – jusqu’à 250 employés – seraient, en effet, retiré.e.s de la législation du travail en vigueur et couvertes par des contrats individuels, négociés avec leur employeur. Il s’agit de plus de 70% de la main-d’œuvre en Ukraine.
Dans un contexte qui éveille le soupçon que le gouvernement se sert de l’invasion pour faire passer une déréglementation radicale du droit du travail, souhaitée depuis longtemps par le patronat et le régime, un expert a averti que l’introduction du droit civil dans les relations de travail risque d’ouvrir une « boîte de Pandore » pour les travailleuses et les travailleurs.

Sous pression 
« On avait l’un des meilleurs employeurs de l’Ukraine et une bonne convention collective, » dit Gorb. « Mais maintenant, les employeur.e.s ont tourné le dos au dialogue social. Nous pensions au début que c’était en réaction à la guerre. Mais il s’est avéré que le patronat et le gouvernement attendaient depuis longtemps l’adoption de cette loi. »
Le syndicat indépendant de New Post est l’une des plus importantes des syndicats indépendants en Ukraine (la grande majorité des syndicats étant dominés par la direction des entreprises). Avant l’invasion, le syndicat comptait plus de 11 500 membres (sur environ 30 000 employé.e.s), et sa première convention collective avait été signée en 2016.
Mais en avril, dans le cadre de la suspension en temps de guerre de certains droits du travail – qualifiés à l’époque de « temporaires », la direction de New Post a révoqué 30 éléments de la convention collective.
La plupart de ces éléments concernent la coordination des conditions de travail avec les syndicats, mais également certains droits comme la fourniture d’uniformes aux travailleurs et aux travailleuses, la disponibilité d’une trousse de premiers secours sur le lieu de travail, les horaires de travail, et autres.
Dans une interview récentes, le directeur des opérations de l’entreprise, Yevhen Tafiytchouk, a déclaré que les postes de 1 500 employé.e.s ont été « suspendus », en vertu de la législation en temps de guerre. Cela signifie qu’ils et elles n’ont pas été licencié.e.s, mais qu’ils et elles ne travaillent pas, ou ne sont pas payés.
Cela, explique Tafiytchouk, était dû à une forte réduction du volume de fret dans les premiers jours de la guerre et à la fermeture et au bombardement de certaines de ses succursales. Certains membres du personnel, pour lesquels il n’y avait pas de travail à ce moment-là, ont vu leur salaire réduit. « C’est une procédure officielle, et nous avons payé tous les salaires conformément à la loi, » a-t-il déclaré.
La situation est semblable ailleurs. Début mai, le syndicat des métallurgistes et des mineurs a écrit à la direction de l’usine ArcelorMittal à Kryvyi Rih, la plus grande aciérie du pays, affirmant qu’en avril, la direction avait suspendu certaines parties de la convention collective concernant l’activité syndicale, la protection et les bénéfices sociales des employé.e.s.
Afin d’informer les gens, Sotsialn’yi rukh (Movement social), une organisation civique ukrainienne, a créé une « liste noire d’employeur.e.s », qui inclut les entreprises qui ont suspendu unilatéralement toute, ou une partie de, la convention collective, ou qui ont considérablement modifié les conditions de travail, en violation du code de travail. Près de vingt entreprises figurent sur la liste, dont la centrale nucléaire de Tchernobyl, la compagnie nationale des chemins de fer, le port d’Odessa, et le métro de Kiev.
Mais maintenant, les parlementaires ont décidé d’aller encore plus loin. Ils et elles cherchent à adopter une réforme plus radicale de la législation du travail, qui s’étendrait bien au-delà du temps de guerre.

Désoviétisation’ = néoliberalisation
Le nouveau projet de Code de travail, le projet de loi 5371, a été initialement enregistré en avril 2021. Mais la semaine dernière, le parlement ukrainien l’a soutenu formellement pour la première fois, ouvrant la voie à son adoption officielle.
Officiellement, le projet de loi a été déposé par Halyna Tretyakova, chef de la commission parlementaire de la politique sociale, et aussi d’un certain nombre d’autres député.e.s du parti au pouvoir, le Serviteur du peuple, le parti du président Zelensky. Le projet a été élaboré par une ONG ukrainienne, le « Bureau des solutions simples et des résultats », qui a été mis en place par l’ancien président géorgien Mikheil Saakashvili, en collaboration avec des associations d’employeurs ukrainiens et un programme de l’USAID, organisme du gouvernement américain qui « promeut la démocratie » depuis longtemps en Ukraine.
Les auteurs du projet de loi affirment que les relations de travail en Ukraine sont toujours régies par « le Code du travail obsolète, adopté en 1971 et développé dans les conditions de l’économie soviétique dirigée par l’État ». La nouvelle loi pourrait affecter jusqu’à 70% de la main-d’œuvre ukrainienne.
Les promoteurs et promotrices de la loi maintiennent que les petites et les moyennes entreprises ukrainiennes ne disposent pas d’une législation satisfaisante pour leur développement. Les « méthodes obsolètes et économiquement inadéquates de réglementation étatique des relations de travail en Ukraine » ont un impact sur les secteurs privé et public du pays. »
Pour résoudre ce problème, le projet de loi introduira des contrats individuels pour les individus travaillant dans des petites et moyennes entreprises et donnera aux employeur.e.s ukrainien.ne.s le droit de licencier des employé.e.s sans justification. Il prévoit également une « réduction du fardeau bureaucratique sur les relations de travail et sur les entreprises. »
Ces mesures, selon les partisans du projet de loi, devraient « désoviétiser » le droit du travail en Ukraine. Ils et elles qualifient cette libéralisation de « mise en place d’un régime le plus souple et le plus libre ».
« Ces innovations sont bénéfiques pour les deux parties. Car la réglementation contractuelle peut être plus souple que la législation, » déclare la députée Hanna Litchmane, membre de la commission parlementaire sur le développement économique. « Par exemple, si l’employeur.e veut inclure certaines options et avantages supplémentaires pour un.e employé.e., ces éléments des relations de travail sont encore plus fiables que de simples convention collectives. »

C’est l’esclavage 
Cependant, les syndicats indépendants ukrainiens évaluent le projet de loi de manière tout à fait différente.
Vitaliy Doudine, expert en droit du travail et représentant de l’organisation Sotsial’nyi rukh (Mouvement social), affirme que le projet de loi est « l’instrument le plus radical pour détruire le modèle de dit « partenariat social ».
Selon lui, la partie la plus destructrice de la nouvelle législation est l’introduction du droit civil ukrainien dans les relations de travail. Le droit civil ukrainien est basé sur l’idée que les deux parties sont égales, alors que la relation entre employeur.e. et employé.e ne l’est pas, puisque – l’employeur.e est toujours dans une position plus avantageuse. « C’est un retour au XIXe siècle. En introduisant le droit civil dans les relations de travail, on ouvrira une boîte de Pandore ».
George Sandul, avocat de l’organisme public Initiatives du travail, souligne lui aussi qu’un.e salarié.e. a toujours moins d’influence qu’un.e employeur.e. Il observe que nombreuses conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT) concernent justement cette question. Le principal problème du projet de loi est l’introduction de contrats individuels dans les petites et moyennes entreprises.
« Ce régime permet d’introduire littéralement n’importe quoi dans le contrat de travail d’un.e employé.e, faisant fi du Code de travail ukrainien – par exemple, des motifs additionnels de licenciement, des responsabilités, même une semaine de 100 heures », explique Sandul.
« En plus, c’est le contrat individuel de travail qui devient la base de régulation de toutes les relations dans l’entreprise. Cela neutralise le rôle des conventions collectives et relègue les syndicats au second plan. »
La commission parlementaire sur l’intégration à l’UE a déjà déclaré que la législation proposée « affaiblit le niveau de protection du travail, réduit la portée des droits du travail et des garanties sociales des employé.e.s, par rapport à la législation actuelle, » contredisant ainsi les obligations de l’Ukraine en vertu de son accord d’association avec le UE. Le projet de loi a également été vivement critiqué par l’OIT.
« Si ce projet de loi est adopté en deuxième lecture, alors les travailleurs et les travailleuses n’auront plus aucune protection contre les actions arbitraires en cas de licenciement, » a déclaré un ancien ministre de la politique sociale, Andriy Reva.

Le parti au pouvoir du président Zelensky avance 
Pendant plus d’un an, le projet de loi proposé n’a pas trouvé de soutien suffisant parmi les législateurs et législatrices.
Mais la situation a changé en mai, lorsque des votes de soutien ont été fournis par le parti politique « Confiance », ainsi que par d’ancien.ne.s membres du parti pro-russe, « Plateforme d’opposition/Pour la vie », qui a été interdit par le gouvernement ce mois-ci. Il est possible que la répression contre ce dernier parti – qui comprend une proposition visant à priver ses député.e.s de leurs mandats – a rendu certains députés plus disposés à s’adapter aux modifications proposées.
Le parlement est maintenant pressé de préparer une deuxième lecture dans le cadre d’une soi-disant « procédure accélérée », alors qu’il y a suffisamment de voix pour l’approuver. La question clé est de savoir si les syndicats ukrainiens, dans l’environnement militaire actuel, seront en mesure de bloquer ce projet de loi ou d’obtenir des changements significatifs avant la deuxième lecture.
Sandul dit que si les syndicats ukrainiens et internationaux ont mené une campagne contre le projet de loi l’année dernière, l’invasion de la Russie signifie qu’il ne peut y avoir de protestations, et donc « les campagnes d’information sont désormais un levier d’influence sur la situation. » Le 18 mai, le Bureau de représentation conjoint des syndicats ukrainiens a adressé une lettre ouverte aux député.e.s ukrainien.ne.s, les appelant à ne pas voter pour le projet de loi 5371 en deuxième lecture.
Pendant ce temps, Doudine considère que la nouvelle candidature de l’Ukraine à l’UE pourrait devenir un « atout » pour les syndicats. « Désormais, les droits de la personne, y compris les droits du travail, seront contrôlés par l’UE. Par conséquent, les syndicats, qui ont moralement raison dans cette situation – leurs membres sont également en guerre – peuvent exiger un moratoire sur de telles réformes en temps de guerre dans l’esprit de l’intégration européenne », dit-il.

Serhiy Guz, le 20 mai 2022
www.opendemocracy.net/en/odr/ukraines-new-labour-law-wartime/

https://www.pressegauche.org/Le-Parlement-ukrainien-s-apprete-a-adopter-un-code-de-travail-qui-retournerait

En complément possible :
Déclaration de la KVPU : Ukraine : nouvelle loi du travail inacceptable
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2022/05/22/37-solidarite-avec-la-resistance-des-ukrainien·nes-retrait-immediat-et-sans-condition-des-troupes-russes-37/

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Pour aider l’Ukraine, il faut annuler sa dette extérieure. Entretien avec Alexander Kravchuk

David Broder : Certains médias occidentaux parlent des Ukrainiens comme de « gens de classe moyenne comme nous », parfois en opposition avec les victimes de la guerre dans d’autres parties du monde. Pouvez-vous nous donner une idée de ce qu’était le niveau de vie des gens ordinaires avant même le mois dernier ?

Alexander Kravchuk : Ce qu’ils disent n’est pas vrai. L’Ukraine était la partie nord du Sud global et le pays le plus pauvre d’Europe, se battant pour cette place avec la Moldavie. Je fournis ci-dessous quelques données comparatives sur notre développement économique.

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Ainsi, en termes de revenu national par habitant, l’Ukraine est loin derrière l’Union européenne, et encore plus derrière les États-Unis. Les dernières données indiquent la pauvreté de notre peuple, avec des salaires moyens inférieurs à cinq cents euros par mois :

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Après le début de la guerre à l’Est, la crise économique de 2014 et la perte des marchés, les revenus des gens se sont à peine rétablis ces dernières années. Mais même ce niveau était encore trop bas. Les raisons en étaient les suivantes :
– 
L’extraction de richesses vers des sociétés offshore, souvent formées dans les anciennes industries soviétiques suite aux privatisations.
– Une concentration sur les exportations de matières premières (céréales, métaux, industrie chimique).
– Une mauvaise politique d’endettement. Les prêts du FMI ont été accordés à des conditions qui exigeaient que même les derniers vestiges de l’État-providence soient réduits. Les paiements au titre du seul service de la dette publique sont devenus l’un des principaux postes de dépenses du budget de l’État (8,5% du total en 2021).
Le manque de soutien aux produits ukrainiens de haute technologie, notamment en raison des accords commerciaux inéquitables avec les partenaires étrangers (y compris l’accord d’association avec l’UE).

La guerre qui a débuté en 2014 a bloqué le flux d’investissements, et n’a fait qu’aggraver la situation. Depuis lors, nous avons également été limités en termes de participation politique. Les protestations socio-économiques ont été marginalisées et n’étaient pas « à leur place » pendant la guerre.

En conséquence, au lieu de se battre pour un meilleur avenir en Ukraine, les Ukrainiens sont partis en masse à l’étranger. Ainsi, selon l’ONU, en 2020, l’Ukraine se classait au huitième rang mondial en termes de migrations de la main-d’œuvre. Ces dernières années, des millions d’Ukrainien-nes sont déjà parti-es vers les États membres de l’Est de l’UE (par exemple, la Pologne et la République tchèque). Là, ils ont remplacé la main-d’œuvre qui a quitté ces pays à la recherche d’une vie meilleure en Allemagne, en Grande-Bretagne et dans d’autres pays du centre. Avec cette guerre, l’UE prévoit l’arrivée de cinq millions de personnes supplémentaires en provenance d’Ukraine – une main-d’œuvre plus qualifiée à intégrer dans la société européenne.

DB : Au cours des huit dernières années, le FMI et la Banque mondiale ont prêté des sommes plus importantes à l’Ukraine. Y avait-il des « conditions » ? Si Volodymyr Zelensky sollicite à nouveau des prêts étrangers, quelle résonance la demande d’allègement de la dette a-t-elle dans la société ukrainienne ?
AK : Le FMI et d’autres institutions financières ont été les moteurs des « réformes du marché » en Ukraine. Nous avons écrit à ce sujet dans notre projet Mécanismes alternatifs pour le développement socio-économique de l’Ukraine.
En 2015, j’ai écrit un article pour cette brochure, concernant l’origine de la dépendance à la dette et son impact négatif sur l’Ukraine.
La dernière « victoire » dans ce domaine a été les changements sur le marché de l’énergie. En Ukraine, le prix du gaz a été multiplié par dix sous la pression du FMI depuis 2014. En novembre 2021, le gouvernement ukrainien s’est mis d’accord avec le FMI sur la dérégulation finale et la vente du gaz produit en Ukraine, à des prix de change élevés. Il pourrait multiplier les tarifs par trois ou cinq pendant la guerre.

Vous pouvez voir ici une traduction anglaise rapide de ma dernière infographie :

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Nous avons réussi à promouvoir l’idée de réviser la politique de la dette dans la société ukrainienne au sens large. La proposition a été reprise par différents acteurs, y compris par les forces nationalistes. Néanmoins, la pression extérieure était trop forte, et le nouveau gouvernement de Zelensky était trop faible pour oser la briser. Après tout, dans ce cas, il fallait une politique économique forte et la restauration d’une souveraineté à part entière.

DB : Dans votre pétition, vous écrivez que « les emprunts chaotiques et la conditionnalité antisociale de la dette étaient le résultat d’une oligarchisation totale : peu désireux de lutter contre les riches, les dirigeants de l’État ne cessaient de s’endetter davantage. » Pouvez-vous expliquer cela – et la dette élevée oblige-t-elle l’État à s’appuyer sur des intérêts oligarchiques-privés pour les projets d’infrastructure ?
AK : Ce lien entre le poids de la dette et le recours à des intérêts privés est plutôt indirect, mais il reste important. L’argument selon lequel l’Ukraine a un État excessif et hypertrophié est développé depuis longtemps maintenant. Cependant, la part du revenu national qui est distribuée par le biais de la fiscalité et du budget en Ukraine est bien inférieure à celle des pays européens développés.
Par conséquent, dans des conditions où la plupart des entreprises publiques sont privatisées, l’Ukraine ne dispose pas des ressources et des capacités nécessaires pour développer des projets d’infrastructure. Les capitaux privés en Ukraine se concentrent soit sur les industries des matières premières, soit sur le secteur financier. Cette tendance sera encore plus marquée après la guerre, car les capitaux privés seront effrayés par l’instabilité dans la région.

DB : De nombreux pays occidentaux promettent et fournissent déjà une aide humanitaire à l’Ukraine. Quelle est l’importance spécifique de l’annulation de la dette, d’abord pour lutter contre la guerre, et pour permettre aux Ukrainiens de maîtriser leur propre avenir ?
AK : Tôt ou tard, la guerre prendra fin et l’Ukraine se retrouvera non seulement avec des infrastructures bombardées, mais aussi avec une dette publique importante.
L’option de restructuration de la dette qui a eu lieu la dernière fois ne convient pas à l’économie ukrainienne et est plutôt plus intéressante pour les créanciers eux-mêmes. En 2015, une partie des paiements aux prêteurs commerciaux a été reportée de trois ans et 20% du principal (soit, du montant initial de l’emprunt) a été annulé. Mais quel a été le prix à payer pour cela ? L’Ukraine a été obligée de payer aux créanciers 15% de l’augmentation de son PIB au-delà de 3%, et 40% de chaque pourcentage d’augmentation de son PIB au-delà de 4%. Nous pouvions à peine assurer le service de notre dette, même avant la guerre. Les conditions du prêt devraient être réexaminées en toute transparence.

DB : Quel genre de mécanismes, selon vous, permettrait de satisfaire cette demande ? Que pensez-vous du précédent de l’annulation de la dette ouest-allemande en 1953 ?
AK : Je ne peux pas suggérer immédiatement un mécanisme de révision de la dette – en particulier parce que j’écris ceci sous le bruit des bombardements.
Mais je suis convaincu que nous pouvons utiliser, par exemple, le travail du Comité pour l’abolition de la dette illégitime, comme cela s’est produit en Équateur en 2008, lorsque 70% de la dette souveraine a été déclarée illégale et que les fonds libérés ont été utilisés pour le développement économique et le bien-être.
Aujourd’hui, il est difficile de penser à ce que pourrait être une vie paisible pour l’Ukraine. Mais nous devons travailler à la construction d’une société indépendante et socialement juste. C’est pourquoi le joug de la dette devrait être relégué aux oubliettes de l’histoire, tout comme l’armée d’envahisseurs russes.

Entretien publié le 16 mars 2022 par Jacobin.
https://www.contretemps.eu/ukraine-annuler-dette-exterieure-entretien-kravchuk/

En complément possible :
Pourquoi la dette est-elle injuste ?
Pourquoi annuler la dette de l’Ukraine ? Éric Toussaint interviewé par Sushovan Dhar
https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/04/23/32-solidarite-avec-la-resistance-des-ukrainien·nes-retrait-immediat-et-sans-condition-des-troupes-russes-32/
Des personnes du monde entier demandent au Fmi d’annuler la dette injuste de l’Ukraine
https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/04/02/24-solidarite-avec-la-resistance-des-ukrainien·nes-retrait-immediat-et-sans-condition-des-troupes-russes-24/

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Ukraine – Une campagne de financement pour imprimer des milliers de livres

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La majeure partie des imprimeries ukrainiennes se trouvent dans la ville bombardée de Kharkiv et ont été détruites.
Lors de la foire du livre de Bologne, l’Institut ukrainien du livre (UBI), soutenu par la Fédération des éditeurs européens (FEP), a fait appel à la générosité du monde du livre.
L’objectif est de lancer une campagne de financement participatif pour imprimer des milliers de livres pour les enfants.
Peter Kraus vom Cleff, président de la FEP et Ricardo Franco Levi, vice-président et président de l’Association des éditeurs italiens, ont déclaré : « en cette période terrible de l’invasion russe de l’Ukraine, nos amis et collègues de l’UBI nous ont demandé de les aider à collecter de l’argent afin de continuer à imprimer des livres ukrainiens et de les distribuer aux enfants. Il est clair qu’il est de notre devoir d’aider nos collègues éditeurs en Ukraine et de permettre aux enfants ukrainiens d’avoir accès aux livres. Il est important que le monde du livre fasse preuve de solidarité. Si vous le pouvez, faites un don ».
Les fonds collectés seront gérés par l’UIB, chargée de choisir les titres et de coordonner avec les relais locaux l’impression et la distribution des livres aux enfants. La FEP est le garant de cette opération.
Pour donner :
https://gogetfunding.com/crowdfunding-campaign-to-support-printing-of-ukrainian-childrens-books/

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Au milieu de la guerre, les travailleurs de plateforme en Ukraine exigent des salaires décents

Les livreurs de la plateforme en Ukraine, dont beaucoup ont été déplacés de chez eux, réclament des salaires décents alors qu’ils continuent à travailler au milieu de la guerre.
Le 12 mai, des livreurs de Lviv se sont rendus au siège de Bolt Food pour faire part de leurs suggestions et chercher un dialogue ouvert avec l’entreprise. Les participants se sont habillés de manière à dissimuler leur identité car, selon eux, l’entreprise a déjà puni des travailleurs par le passé en les excluant de l’application par des « robots-firmes » et des « robots-suspensions ».
De nombreux livreurs de Lviv ont fui les villes touchées par la guerre en Ukraine. Dans plusieurs cas, ils sont sans abri ou sont les seuls soutiens de famille restants.
Dans une vidéo produite par Ukraine’s Labor Initiatives, les travailleurs décrivent leur situation.

« Je suis de Mykolaiv », dit un travailleur. « Maman et papa ont perdu leur emploi là-bas. Je n’ai pas d’endroit pour vivre ici et je n’ai même pas assez d’argent pour manger. Bolt … a dit qu’il soutiendrait des conditions favorables. Tant pour eux-mêmes que pour les coursiers. Mais ils n’ont tout simplement prévenu personne, supprimé le salaire minimum, baissé tous les ratios. »
« Comment sont censés vivre les déplacés internes, demande-t-il, qui n’ont pas de logement, pas de travail [et] n’ont rien à manger ? »

Un autre travailleur décrit la détérioration des salaires. « Ils ont supprimé le paiement minimum pour les livraisons. Et les ratios ont été réduits de près de la moitié. Ici, un collègue a calculé que cela, approximativement, donnera une réduction des salaires de 52 pour cent. »
Les travailleurs ont déclaré que l’entreprise n’a pas expliqué les raisons de ces changements. Pendant ce temps, les travailleurs qui dépendent des voitures et des motos et qui doivent garder leur véhicule alimenté en carburant pour pouvoir travailler sont confrontés à la hausse des prix de l’essence.
« Le carburant fait partie de mes dépenses », a déclaré un travailleur. « Maintenant, je ne sais pas si je peux même le payer ».
Les revendications de ces travailleurs montrent clairement que les entreprises basées sur des plateformes abusent des droits des travailleurs dans des environnements extrêmes en utilisant la technologie que les entreprises ont mise en place pour maximiser les profits.

Les sociétés de livraison ne sont « pas réglementées correctement », a déclaré un livreur. « Chaque service agit comme il le souhaite. Certaines plateformes emploient des personnes en tant qu’« entrepreneurs privés », d’autres leur disent simplement « Vous êtes branché sur la plateforme » et vous devriez en être reconnaissant. À cause de cela, de nombreux problèmes se posent.
« Et si, après tout cela, poursuit-il, des syndicats se forment, ce sera formidable. Les gens devraient disposer d’un instrument pour résoudre les problèmes. Aussi étrange que cela puisse paraître, cela pourrait même valoir leur vie. »
https://www.solidaritycenter.org/amid-war-platform-workers-in-ukraine-demand-decent-wages/
Traduit avec http://www.DeepL.com/Translator (version gratuite)

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Les services de sécurité ukrainiens s’intéressent aux syndicalistes

Lyudmyla Shandyha, responsable du Syndicat libre des cheminots d’Ukraine pour les travailleurs des transports (KVPU) de la région de Khmelnytsky, a reçu une lettre du bureau du service de sécurité (SBU) de de la région de Khmelnytsky.
Dans ce document, le premier chef adjoint du département V. Grechanyuk demande au responsable du syndicat de fournir des informations (nom, prénom et postes occupés) des membres du Syndicat libre des cheminots d’Ukraine de Khmelnytsky , se référant au paragraphe 5 partie 2 de l’art. 7 de la loi ukrainienne « sur les activités de contre-espionnage ». Après avoir consulté le secrétaire du Syndicat libre des cheminots d’Ukraine, Volodymyr Kozelsky et consulté le service juridique de la Confédération des syndicats libres d’Ukraine, Lyudmyla Shandyha a rappelé au responsable du SBU dans sa réponse que sa demande viole la Constitution de l’Ukraine. Compte tenu de tout cela, Lyudmyla Shandyha a répondu à juste titre qu’il considérait qu’il était impossible de fournir de telles informations sur les membres des syndicats.
Comme d’autres organisations syndicales locales, régionales et de branche peuvent connaitre une situation similaire, nous fournissons les commentaires du département juridique de la Confédération des syndicats libres d’Ukraine sur ce sujet

Publié par KVPU, 24 mai 2022
Traduction Patrick Le Tréhondat
http://www.laboursolidarity.org/Les-services-de-securite

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Russie : liberté pour Kirill Ukraintsev, responsable du syndicat des livreurs !

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Kirill Ukraintsev est en prison, avec un procès prévu le 25 juin au cours duquel il risque 5 ans de prison.
Pourquoi ? Pour avoir organisé des rassemblements revendicatifs de livreurs moscovites travaillant pour Delivery Club. Depuis la création du syndicat en 2020, ceux-ci ont mené de nombreuses actions sur les salaires, les conditions de travail, les contrats de travail.
Comme la KTR en Russie par exemple, les organisations membres du Réseau syndical international de solidarité et de luttes exigent la libération de Kirill Ukraintsev et l’abandon de toute poursuite.
En Russie comme ailleurs, les livreurs doivent pouvoir défendre leurs droits !
http://www.laboursolidarity.org/Russie-liberte-pour-Kirill

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[Rencontre] Retour d’Ukraine. Témoigner et agir Avec Jean Vogel et Daria Suborova

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Jean Vogel a pu se rendre en Ukraine du 2 au 8 mai, avec la délégation du Réseau européen de solidarité Ukraine dont il fait partie. Il sera l’invité de l’UPJB le vendredi 3 juin à 20:15 avec Daria Suborova (à confirmer).
« Nous étions 26, venus  de dix pays européens.
Notre séjour avait été remarquablement organisé par Sotsialnyi Rukh (Mouvement social) une jeune organisation de gauche ukrainienne, se réclamant d’un socialisme démocratique.
De nombreuses rencontres ont permis de faire le point sur
 la situation en Ukraine et la résistance populaire. Notre délégation a rencontré représentants des syndicats de la santé, des transports ferroviaires, des mineurs, de la fonction publique, des travailleurs des centrales nucléaires, etc.
Nous avons également rencontré de nombreuses 
militantes d’organisations de femmes ou féministes, de solidarité avec les réfugiés et les migrants, des militants du mouvement environnemental, de l’organisation autonome de défense des droits Rrom et d’un collectif Queer.
Tous sont profondément engagés dans la résistance à l’agression de l’impérialisme russe mais luttent aussi pour la défense des droits sociaux et des libertés démocratiques et l’autonomie des mouvements sociaux en Ukraine même.
Quels sont les enjeux de ces combats ? Comment agir ici pour les soutenir 
Jean Vogel est professeur à l’ULB, membre du Réseau européen de solidarité avec l’Ukraine qui a participé à la délégation du réseau en Ukraine fera un compte rendu des rencontres avec des militant·e·s de la gauche ukrainienne et de leurs attentes pour la solidarité

https://upjb.be/events/rencontre-retour-dukraine-temoigner-et-agir-avec-jean-vogel-et-daria-suborova/

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Pouvoir russe : une plate-forme idéologique intégralement réactionnaire

Nicolaï Platonovitch Patrouchev est le secrétaire du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie. Il fait partie du premier cercle entourant Poutine. Parfois mentionné comme son « idéologue », on en parle aussi comme d’un éventuel successeur.
Dans un long entretien publié le 26 avril dans Rossiyskaya Gazeta, le journal semi-officiel publié par le gouvernement russe, il a développé sa vision du contexte et des enjeux de la guerre contre l’Ukraine [1].

Au début du mois de mars, dans un texte rédigé pour accompagner les premiers pas d’un mouvement de solidarité en Belgique, je rétorquais à ceux qui affirmaient voir dans « l’opération spéciale » de Poutine une réponse défensive contre l’extension à l’Est de l’OTAN, l’encerclement et les préparatifs d’agression contre la Russie : « En ce début 2022, la Russie n’était militairement menacée ni par l’OTAN, ni, bien évidemment, par l’Ukraine. La crise internationale puis la guerre ont été déclenchées par Poutine à froid, aux moments qu’il a choisis. Pourquoi maintenant ? … Poutine a voulu profiter du recul global des Américains, de la priorité qu’ils accordent à l’affrontement avec la Chine, de leur récente déroute en Afghanistan et de leurs tensions avec l’UE pour négocier quelque chose comme un « nouveau Yalta » – s’accorder avec eux sur des sphères d’influence stabilisées … Poutine ne reproche pas à l’OTAN d’être une structure impérialiste, il lui reproche d’entraver sa volonté de reconstituer une sphère d’influence impérialiste russe digne de ce nom (la sienne se limite pour l’instant à la Biélorussie de Loukachenko et à la Syrie de Bachar el-Assad) » [2].

Que dit le texte publié dans la Rossiyskaya Gazeta à ce sujet ? Patrouchev est limpide : l’action russe représente une réponse à l’hégémonie américaine en déclin : « Les élites américaines se souviennent de la manière dont les États-Unis ont réussi à devenir une superpuissance après deux guerres mondiales, mais aujourd’hui, elles ne veulent pas accepter que l’empire mondial américain est à l’agonie. C’est la réalité dans laquelle il est nécessaire de vivre et de construire la ligne de comportement optimale ». C’est une réponse qui n’est pas seulement d’ordre stratégique, elle est totale : « A cet égard, la Russie a choisi la voie de la protection totale de sa souveraineté, de la défense ferme des intérêts nationaux, de l’identité culturelle et spirituelle, des valeurs traditionnelles et de la mémoire historique ». La posture n’est pas défensive mais offensive. La Russie est la première puissance à avoir osé se dresser, s’affirmer et briser le cadre du vieil ordre mondial américano-centré : « Les États-Unis font tout pour que les autres centres du monde multipolaire n’osent même pas lever la tête, et notre pays a non seulement osé, mais a déclaré publiquement qu’il ne jouerait pas selon les règles imposées. »

Pour préserver leur omnipotence, les Etats-Unis cherchent à anéantir la Russie et à cette fin ils ont eu recours à l’Ukraine : « Dans le but de supprimer la Russie, les Américains, par l’intermédiaire de leurs protégés à Kiev, ont décidé de créer un antipode de notre pays, choisissant cyniquement l’Ukraine pour cela, essayant de diviser essentiellement une seule nation. N’ayant pas réussi à trouver une base positive pour attirer les Ukrainiens à ses côtés, bien avant le coup d’État de 2014, Washington a inculqué aux Ukrainiens l’exclusivité de leur nation et la haine de tout ce qui est russe » L’Ukraine n’existe pas en tant que nation particulière, elle est devenue l’Anti-Russie et elle représente le nazisme d’aujourd’hui, derrière lequel on trouve les Occidentaux, exactement de la même façon où ce sont les Américains (et non les grands capitalistes allemands) qui tiraient les ficelles du nazisme des années 30 et 40 : « Dans les années 30, l’Occident non seulement n’a pas nié, mais a activement contribué à la formation et au renforcement du pouvoir du fascisme en Allemagne. Les grandes entreprises se sont particulièrement distinguées. C’est plus tard, après la guerre, que les historiens occidentaux ont créé le mythe des industriels allemands qui auraient apporté la principale contribution à la création de l’économie de guerre d’Hitler. Certaines entreprises américaines ont collaboré avec les nazis jusqu’en 1943, c’est-à-dire même jusqu’au tournant décisif de la guerre… Aujourd’hui, l’histoire se répète. L’Occident continue d’apporter le soutien le plus actif aux néo-nazis ukrainiens, en continuant d’alimenter l’Ukraine en armes ».

Le principal point commun entre le nazisme du passé et le néo-nazisme d’aujourd’hui est sa volonté de réaliser un génocide du peuple russe : « Il fut un temps où le fascisme hitlérien rêvait de détruire toute la population russe, et aujourd’hui ses adeptes, selon les préceptes d’Hitler, tentent de manière blasphématoire de le faire avec les mains des Slaves ».

L’Ukraine d’aujourd’hui n’existe que par l’effet de la terreur néo-nazie : « S’il y a quelque chose qui unit les peuples vivant en Ukraine aujourd’hui, c’est uniquement la peur des atrocités des bataillons nationalistes ». Elle est donc inévitablement vouée à la fragmentation et à la disparition en tant qu’Etat : « le résultat de la politique de l’Occident et du régime de Kiev qu’il contrôle ne peut être que la désintégration de l’Ukraine en plusieurs États ».

Avec la guerre ukrainienne les Etats-Unis ont obtenu un second résultat, l’Europe s’est entièrement alignée sur eux, l’Amérique est « libérée de sa principale crainte géopolitique – l’union politique et économique de la Russie et de l’Europe ». Contrairement au passé, les Européens n’ont plus la moindre velléité d’indépendance, ils se sont totalement soumis, « ils sont heureux de faire un pas dans la direction de l’abîme que les États-Unis ont creusé pour eux. En ce sens, beaucoup de choses ont changé depuis la guerre froide. A l’époque, les Européens résistaient à Washington avec plus de confiance… À cette époque, le mur était à Berlin, et l’élite européenne actuelle a un mur dans la tête ».

Dans les conditions où il n’existe qu’un seul bloc occidental homogène sous la direction de Washington, le renversement du vieil ordre mondial entrepris par la Russie ne peut avoir qu’une seule conséquence pour les Européens. Cinq millions d’Ukrainiens ont déjà migré en Europe, ils seront bientôt dix millions. Ils apportent avec eux leur parasitisme (« la plupart des Ukrainiens qui sont venus en Occident pensent que les Européens devraient les soutenir et subvenir à leurs besoins, et lorsqu’ils sont obligés de travailler, ils commencent à se rebeller »), leurs réseaux criminels (qui tenteront de « mettre sous contrôle les groupes criminels locaux »), la vente d’enfants orphelins, le trafic d’organes humains destinés à des patients européens, la covid, l’hépatite virale, la tuberculose, la rubéole et la rougeole, contre lesquelles ils ne sont pas vaccinés et, last but not least, des « dizaines de milliers de radicaux ukrainiens formés et expérimentés au combat qui ont déjà trouvé un langage commun avec les fans européens d’Hitler ». Mais ce n’est pas tout. Les sanctions anti-russes vont provoquer une crise alimentaire mondiale : « des dizaines de millions de personnes en Afrique ou au Moyen-Orient seront au bord de la famine à cause de l’Occident. Pour survivre, ils se précipiteront vers l’Europe ».

Conclusion plus que probable, selon Patrouchev, l’Europe va sans doute disparaître : « Je ne suis pas sûr que l’Europe survivra à la crise. Les institutions politiques, les associations supranationales, l’économie, la culture et les traditions risquent de faire partie du passé ». On admirera comment ce diagnostic sinistre combine harmonieusement la thématique d’extrême-droite du Grand Remplacement (avec toute la gamme des maux attribués aux migrants) et la mise en garde ordinairement de gauche sur la menace néo-nazie. C’est le seul point sur lequel les migrants ukrainiens diffèrent de ceux venus d’Afrique ou du Moyen Orient, le nazisme remplace l’islamisme. Patrouchev est bien dans la lignée d’une vieille tradition de la propagande impériale de la Russie depuis la Révolution française, qui juxtaposait des thèmes ultra-réactionnaires et progressistes, en entretenant ses soutiens aux deux extrêmes du spectre politique en Occident. A l’époque, un auteur « russophobe », Karl Marx, avait d’ailleurs exposé à plusieurs reprises ce procédé.

Mais il ne s’agit que d’un procédé. Ni la filiation, ni les valeurs dont se revendique Patrouchev n’ont rien de progressiste. Le conflit entre la Russie et l’Europe porte d’abord sur les valeurs, nous dit-il. Lesquelles ? « Nos valeurs spirituelles et morales nous permettent de rester nous-mêmes, d’être honnêtes avec nos ancêtres, de préserver l’individu, la société et l’État. Les Européens, par exemple, ont fait un choix différent. Ils ont adopté des valeurs dites libérales, alors qu’il s’agit en réalité de néolibéralisme. Il promeut la priorité du privé sur le public, l’individualisme qui supprime l’amour de la patrie, et le dépérissement progressif de l’État ». Cela reste très vague même si l’on voit que le néolibéralisme n’a pas ici la signification qu’on lui donne couramment en soulignant au premier chef la généralisation de la logique du marché dans toutes les sphères de l’existence. Mais, ajoute-t-il, il y a des leçons que les Européens n’ont toujours pas apprises. C’est un passage clé de cet entretien : « N’oubliez pas que tous les bouleversements historiques commencent par la diffusion d’idées populaires mais potentiellement destructrices. Pensez à la Révolution française. De ses slogans mal interprétés a émergé la tyrannie de Napoléon, qui a noyé la moitié de l’Europe dans le sang, mais s’est cassé les dents sur la Russie. Qu’a fait notre pays ? Démembré la France, brûlé Paris ? Non, l’empereur Alexandre Ier a restauré le statut d’État français et, en 1815, a initié la création de la Sainte-Alliance en Europe. L’Alliance visait à respecter l’intégrité territoriale des États, à supprimer les mouvements nationalistes et à assurer à l’Europe quarante ans d’existence pacifique ».

Les « idées populaires mais potentiellement destructrices » qui sont à l’origine de cette sinistre Révolution française sont bien évidemment celles de droits de l’homme et de souveraineté du peuple. Que la tyrannie de Napoléon y trouve ses racines plutôt que d’en représenter la négation (les droits de l’homme) ou la perversion (la souveraineté du peuple), voilà une thèse classique de la tradition contre-révolutionnaire qu’aucun démocrate, ni aucun libéral n’a jamais reprise à son compte. Et la célébration de la Sainte Alliance de 1815 et du rôle de la Russie tsariste dans son établissement et dans l’étouffement par la force de toutes les aspirations libérales et nationales en Europe au cours des décennies qui suivirent ne fait que confirmer l’inscription de l’idéologue poutinien dans cette tradition.

La guerre que la Russie doit mener contre l’héritage des Lumières et de la Révolution n’est donc pas seulement d’ordre politique. Elle concerne les valeurs, la culture, l’éducation : « Détruire notre éducation en imposant des modèles d’enseignement dits progressistes est une tâche aussi stratégique pour les Occidentaux que, par exemple, de rapprocher l’OTAN de nos frontières. En fait, il n’y a rien de progressiste. Aux États-Unis, par exemple, de nombreuses personnes disent déjà qu’il faut chanter et danser en cours de mathématiques, car la résolution de problèmes et d’équations opprime et discrimine quelqu’un. Nous n’avons pas besoin d’un tel « progrès ». La situation actuelle prouve la nécessité de défendre les valeurs spirituelles et morales traditionnelles russes, de réformer le système d’éducation et d’instruction avec le retour des avantages historiquement justifiés de l’école nationale ».

La crise mondiale ouverte par la guerre d’Ukraine implique une réorientation complète de la position russe dans le système des relations internationales et du modèle économique du pays.

La position de la Russie dans l’économie mondiale va changer : « Aujourd’hui, la Russie se réoriente du marché européen vers les marchés africains, asiatiques et latino-américains ». Mais lorsqu’il s’agit de concrétiser ce tournant, un nom manque, un nom qui n’apparaît d’ailleurs pas une seule fois dans tout cet entretien : la Chine. Patrouchev parle de l’ASEAN (Sud-Est Asiatique), d’un ensemble désormais dépourvu de substance comme les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) ou de Organisation de Coopération de Shanghai, jamais du rapport à la Chine en tant que tel. Dans cette « amitié sans limite » la Russie a plus besoin de la Chine que la Chine de la Russie et sa dépendance de cette dernière ne peut que s’accroître de plus en plus. A l’intérieur, sans remettre en cause « l’économie de marché et à la participation aux chaînes de production mondiales », il s’agit de s’orienter vers plus de protectionnisme et de substitutions aux importations, à travers des formes de réindustrialisation réalisées sous la férule de l’État.

Les propos de Patrouchev éclairent une nouvelle fois la nature de la Russie de Poutine qu’une fraction de la gauche continue à considérer comme une « puissance anti-hégémonique ». Son antagonisme envers « l’Occident » relève idéologiquement d’une version grand-russe du « choc des civilisations », à travers le rejet des valeurs libérales et démocratiques, le culte de l’autorité, de la tradition et de la puissance, l’exaltation du nationalisme et du militarisme. Elle donc totalement réactionnaire.

[1] https://rg.ru/2022/04/26/patrushev-zapad-sozdal-imperiiu-lzhi-predpolagaiushchuiu-unichtozhenie- 
Traduction anglaise :
https://www.stalkerzone.org/patrushev-the-west-has-created-an-empire-of-lies-presupposing-the-destruction-of-russia/

[2] ESSF (article 61622), Analyse (Belgique) : Solidarité avec la résistance du peuple ukrainien : http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article61622

Jean Vogel

De l’auteur :
Je reviens d’Ukraine
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2022/05/22/37-solidarite-avec-la-resistance-des-ukrainien·nes-retrait-immediat-et-sans-condition-des-troupes-russes-37/
Belgique : Peut-on être solidaire sans écouter la société ukrainienne ?
https://entreleslignesentrelesmots.blog/2022/03/26/solidarite-avec-la-resistance-des-ukrainien·nes-retrait-immediat-et-sans-condition-des-troupes-russes-20/

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Con la resistencia del pueblo ucraniano
Por su victoria contra la agresión

Como en la época de la lucha de liberación del pueblo vietnamita, siempre hemos estado del lado de los pueblos oprimidos o agredidos, ya fueran los agresores Estados Unidos (y sus aliados de la OTAN) o la URSS (y sus aliados del Pacto de Varsovia).
Somos conscientes de que, atravesando diferentes océanos y continentes, la lucha por la liberación nacional y social de los pueblos es única y global.
Nunca hemos aceptado ni aceptamos ahora que ninguna potencia o bloque militar pueda impedir que un pueblo decida su propio futuro, contrariando el derecho de los pueblos a su libre determinación nacional.
Por estas razones estamos junto a la resistencia del pueblo ucraniano contra la agresión del imperialismo ruso y su intento de reconstruir el antiguo imperio zarista, convertido en soviético.
Al igual que con otras luchas de liberación nacional, nuestra solidaridad con el pueblo de Ucrania es incondicional e independiente de cualquier juicio sobre su dirección política, ya que corresponde únicamente a los ucranianos y ucranianas decidir el futuro de su país.
Del mismo modo, depende únicamente del pueblo de Ucrania decidir si continúa la guerra por la independencia nacional y los términos de la paz con el agresor.
La efectiva resistencia ucraniana a la invasión de la superpotencia rusa demuestra sin duda la fuerza del factor moral y cuál es la voluntad del pueblo, frente a esas teorías para-racistas que hacen de los ucranianos un juguete en manos de la OTAN. En este sentido podemos decir en cambio que el pueblo ucraniano ya ha ganado moral y políticamente. Por otro lado, la victoria militar que obviamente apoyamos será más difícil.

La guerra querida por el régimen semidictatorial de Putin:
– es una agresión contra la vida de los ciudadanos ucranianos y contra la independencia del pueblo ucraniano;
– es una agresión contra ciudadanos-soldados rusos de todas las nacionalidades, enviados al matadero y sacrificados para fortalecer el régimen político interno y el capitalismo ruso;
– es una amenaza del imperialismo y del nacionalismo gran ruso para todas las repúblicas postsoviéticas;
– es una incitación a las demás potencias imperiales a realizar intervenciones militares en el mundo;
– ya ha tenido el efecto de fortalecer y ampliar la OTAN, aumentando el gasto militar;
– es una incitación a la proliferación de armas nucleares, ya que Ucrania había cedido voluntariamente ojivas estratégicas y tácticas a Rusia, y los portaaviones que la convertían en la tercera potencia nuclear del mundo. A cambio, en 1994 Rusia se comprometió a respetar la integridad y soberanía de Ucrania. Fue el primer estado en el mundo (después de Sudáfrica) en implementar un desarme nuclear unilateral.
Que el régimen semidictatorial nacionalista ruso, partidario de muchas organizaciones de la derecha europea, pretenda “desnazificar” Ucrania es un insulto a las víctimas del Holocausto, al antifascismo, al sacrificio de los propios pueblos soviéticos en la guerra contra el Tercer Reich.
No se puede decir que esta es una guerra entre imperialismos, porque Ucrania no es un país imperialista sino que está penetrado tanto por por el capital ruso como por el occidental.
La paz no puede entenderse como un acuerdo entre potencias imperialistas que divide esferas de influencia por encima de los pueblos.
No podemos decir simplemente “alto a la guerra”, sino que debemos luchar por la retirada de las tropas invasoras o su derrota militar.
¡No se puede decir que el pueblo de Ucrania « resista! » sin reconocer el derecho a procurarse las armas adecuadas para su legítima defensa, dónde y cómo pueda.
No puede haber equidistancia entre la resistencia de un pueblo y el agresor.
Por eso pedimos la máxima solidaridad ideal y material con la resistencia del pueblo ucraniano contra la invasión imperialista de Putin. Pedimos solidaridad con aquellos en Rusia que se oponen a la guerra arriesgándose a pasar muchos años en prisión y con aquellos soldados rusos que se niegan a seguir luchando contra sus hermanos ucranianos.
Además de las iniciativas locales de solidaridad con el pueblo de Ucrania, proponemos llegar a un Día mundial de solidaridad con la Resistencia Ucraniana, como ya lo fue para la lucha de liberación en Vietnam y contra la agresión imperialista en Irak.
Sobre la base de nuestra Declaración, nos adherimos a la iniciativa de la Red Europea de Solidaridad con Ucrania y contra la guerra (ENSU).
Primeras firmas
(Argentina) Horacio Tarcus, Beatriz Sarlo, Vera Carnovale, Laura Fernández Cordero, Martín Baña, Alejandro Gallian, Maristella Svampa, Pablo Stefanoni
(Ecuador) Marc Saint-Upery
(France) Michel Antony, Michael Löwy, Richard Neuville
(Holland) Jan Lust
(Italia) Antonella Marazzi, Roberto Massari, Michele Nobile, Giorgio Amico, Andrea Furlan, Laris Massari
(México) Rafael Mondragón
(Perú) Hugo Blanco
(Polska) Zbigniew M. Kowalewski, Katarzyna Bielińska, Stefan Zgliczyński
(Uruguay) Gerardo Garay, Gerardo Caetano

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Avec la résistance du peuple ukrainien pour sa victoire contre l’agression

Comme à l’époque de la lutte de libération du peuple vietnamien, nous avons toujours été du côté des peuples opprimés et agressés, qu’ils le soient par les États-Unis (et leurs alliés de l’OTAN) ou par l’URSS (et ses alliés du Pacte de Varsovie).
Nous sommes conscients que, traversant les divers océans et continents,
la lutte de libération nationale et sociale des peuples est unique et mondiale.
Nous n’avons jamais accepté, et nous n’accepterons jamais que n’importe quelle puissance, ou que n’importe quel bloc militaire, puisse empêcher un peuple de décider de son propre futur, en opposition avec le droit des peuples à leur autodétermination nationale.
Pour ces motifs,
nous sommes au côté de la Résistance du peuple ukrainien contre l’agression de l’impérialisme russe et sa tentative de reconstruire l’Empire tsariste, puis soviétique
.
Comme pour les autres luttes de libération nationale, notre solidarité avec le peuple de l’Ukraine
est inconditionnelle et indépendante de tout jugement sur sa direction politique, parce qu’il revient uniquement à l’Ukraine et aux ukrainiens de dédider du futur de leur pays.
Il incombe également au peuple de l’Ukraine de décider de continuer la guerre pour l’indépendance nationale et de spécifier les termes de la paix avec l’agresseur.
L’efficace Résistance ukrainienne face à l’invasion de la superpuissance russe démontre sans aucun doute la force du facteur moral, et dans quelle direction va la volonté du peuple, en démenti à ces théories quasiment racistes qui font des ukrainiens un simple jouet aux mains de l’OTAN. En ce sens nous pouvons au contraire dire que le peuple ukrainien a déjà vaincu moralement et politiquement. La victoire militaire, qu’évidemment nous soutenons, sera, elle, plus difficile à obtenir.
La guerre voulue par le régime semi-dictatorial de Putin :

  • Est une agression contre les vies des citoyens ukrainiens et contre l’indépendance du peuple ukrainien ;
  • Est une agression contre les citoyens-soldats russes de toute nationalité, envoyés à l’abattoir et pour écraser les ukrainiens, à la seule fin de renforcer le régime politique intérieur et le capitalisme russes ;
  • Est une menace de l’impérialisme et du nationalisme grand-russe pour toutes les Républiques post-soviétiques ;
  • Est une incitation aux autres puissances impériales à réaliser des interventions militaires dans le monde ;
  • A déjà eu pour effet de renforcer et d’étendre l’OTAN, et de multiplier les dépenses militaires ;
  • Est une incitation à la prolifération de l’arme nucléaire, alors que l’Ukraine avait volontairement cédé à la Russie les têtes nucléaires stratégiques et tactiques, ainsi que les porteurs, qui en faisaient la troisième puissance nucléaire mondiale. En échange, en 1994, la Russie s’était engagée à respecter l’intégrité et la souveraineté de l’Ukraine. Celle-ci est le premier État au monde (après l’Afrique du Sud) à avoir réalisé le désarmement nucléaire unilatéralement.

Lorsque le régime semi-dictatorial nationaliste russe, soutien de nombreuses organisations de la droite européenne, fait croire qu’il veut « dénazifier » l’Ukraine, c’est une insulte aux victimes de l’holocauste, à l’antifascisme, et également aux sacrifices des peuples soviétiques dans la guerre contre le Troisième Reich.
On ne peut pas dire que cette guerre est une guerre entre impérialismes, parce que l’Ukraine n’est pas un pays impérialiste, mais est au contraire pénétré par le capital russe et occidental.
On ne peut pas présenter la paix comme un accord entre puissances impérialistes qui se répartiraient des sphères d’influence au détriment des peuples.
On ne peut pas se contenter de dire simplement « arrêtez la guerre ! », mais on doit lutter pour le retrait des troupes d’invasion ou pour leur déroute militaire.
On ne peut pas dire au peuple d’Ukraine « résistez ! » sans lui reconnaître le droit de se procurer les armes adéquates pour son autodéfense, où et comme il peut.
Il ne peut y avoir équidistance entre la Résistance d’un peuple et l’agresseur.

Pour cela nous demandons la maximale solidarité, idéale et matérielle, avec la Résistance du peuple ukrainien contre l’invasion impérialiste de Putin. Nous demandons la solidarité envers ceux qui en Russie s’opposent à la guerre en risquant beaucoup d’années de prison et à ces soldats russes qui refusent de continuer à combattre leurs frères ukrainiens.

En plus des initiatives locales de solidarité avec le peuple d’Ukraine, nous proposons qu’on promulgue une journée mondiale de solidarité avec la Résistance ukrainienne, comme cela s’est produit pour la lutte de libération du Vietnam et contre l’agression impérialiste de l’Irak.

Sur la base de notre Déclaration, nous adhérons à l’initiative du Réseau Européen de Solidarité avec l’Ukraine – European Network in Solidarity with Ukraine (ENSU)
(
https://ukraine-solidarity.eu)

Premières signatures
(Argentina) Horacio Tarcus, Beatriz Sarlo, Vera Carnovale, Laura Fernández Cordero, Martín Baña, Alejandro Gallian, Maristella Svampa, Pablo Stefanoni, Pablo Alabarces, Carlos Altamirano, Carlos Penelas, Mariano Schuster, Abel Gilbert, Alejandro Katz, Horacio Ricardo Silva, Karina Jannello
(
Brasil) Maria Elisa Cevasco
(
Cuba) Julio César Guanche
(
Ecuador) Marc Saint-Upery
(
España) Jaime Pastor
(
France) Michel Antony, Michael Löwy, Richard Neuville, Dardo Scavino, Jean Puyade, Christian Mahieux
(
Italia) Antonella Marazzi, Roberto Massari, Michele Nobile, Riccardo Bellofiore, Giorgio Amico, Andrea Furlan, Laris Massari, Giovanna Vertova
(
México) Rafael Mondragón
(
Nederland) Jan Lust
(
Perú) Hugo Blanco, José-Carlos Mariátegui (nieto)
(
Polska) Zbigniew M. Kowalewski, Katarzyna Bielińska, Stefan Zgliczyński, Michał Siermiński, Szymon Martys, Paweł Szelegieniec, Artur Maroń, Jacek Drozda
(
Uruguay) Gerardo Garay, Gerardo Caetano

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Разом із рухом опору українського народу
За його перемогу проти агресії

Як у часи в’єтнамської народо-визвольної боротьби, ми завжди були на боці пригноблених і загарблених народів чи то Сполученими Штатами (та іх союзниками по НАТО), чи то СРСР та їх союзниками по Варшавському договору.
Ми усвідомлюємо, що, не зважаючи на відстань між материками та країнами, боротьба народів за своє національне та соціальне визволення є глобальною та спільною справою.
Ми ніколи не визнавали і ніколи не погодимося  з тим, що якась сила чи  військовий блок може заборонити народу вирішувати своє власне майбутнє, завадити його праву на своє національне самовизначення.
Саме тому ми стоїмо зараз на боці супротиву українського народу агресії російського імперіалізму та його спробі відбудувати чи то царську, чи то радянську імперію.
Наша солідарність з народом України, як і з іншими національно-визвольними рухами, є беззастережною і незалежною від будь-яких суджень щодо іх політичного спрямування, оскільки вирішувати майбутнє власної держави – це справа виключно України та украінців .
Так само тільки сам народ України має право обирати чи продовжувати йому війну за національну незалежність, чи домовлятися про умови миру з агресором.
Еффективність українського опору у боротьбі проти вторгнення російської супердержави, безумовно, свідчить про незламний дух українців та заперечує квазі-расистські теорії, згідно яких українці є лише маріонетками у руках НАТО. 
Навпаки, ми можемо стверджувати, що народ України вже здобув як моральну, так і політичну перемогу.
Але хоч ми і підтримуємо Україну в її перемозі на полі бою, її буде важко отримати.
Війна розв’язана диктаторським режимом Путіна:

  • Це агресія проти життя громадян Украіни та проти незалежності усього українського народу;
  •  Це агресія проти російських солдат будь-якої національності, яких відправляють на заклання, щоб знищити українців та лише з єдиною метою – зміцнення внутрішнього режиму Росії та російського капіталізму;
  • Це загроза великоросійського імперіалізму для усіх пост-радянських республік;
  • Це стимул для усіх іншіх імперських держав для здійснення інтервенцій по всьому світу;
  • Це породжує ефект розширення та посилення НАТО та збільшення військових витрат;
  • Це стало підбурюванням до розповсюдження ядерної зброї в той час, коли Украіна добровільно  передала Росії стратегічні та тактичні ядерні боєголовки, а також іх носії, які могли б дозболити ій стати третьою ядерною державою у світі. У 1994 році в обмін на це Росія пообіцяла поважати цілісність та суверинитет України. Таким чином, це перша держава у світі (після Південно-Африканськоі республіки), яка провела повне ядерне роззброєння в односторонньому порядку. 

Коли російський націоналістичний напівдиктаторський режим, який підтримує багато європейських правих організацій, робить вигляд, що треба «денацифіцирувати» Україну – це є глибокою образою для жертв Голокосту, антифашизму, а також для жертв радянського народу у війні проти Третього рейху.
Ми не можемо стверджувати, що це війна між двома імперіалізмами, тому що Украіна – це не імперіалістична держава, навпаки, вона просякнута російським та західними капіталами.
Ми не можемо представляти мирну угоду як домовленість між двома імперіалістичними державами за розподілення сфер впливу.
Ми не можемо задовольнитися гаслом: «Зупинить війну!», тому що ми повинні боротися за виведення загарбницьких військ та за іх військовий розгром.
Ми не можемо закликати український народ борітіся, якщо ми не визнаємо за ним права на отримання відповідноі зброі для самооборони. Неприпустимо прирівнювати опір народу та агрессію загарбника.
Задля цього ми просимо максимальної солідарності, матеріальної та моральної підтримки в боротьбі українського народу проти загарбницьких дій Путіна. Ми закликаємо до солідарності з тими, хто в Росії протистоїть війні, ризикуючи багаторічними ув’язненнями, з тими російськими солдатами, які відмовляються продовжувати воювати проти їх українських братів.
Окрім місцевих ініціатив солідарності з народом України, ми пропонуємо оголосити Всесвітній день солідарності з українським Опором, як це сталося у боротьбі за визволення В‘єтнаму та проти імперіалістичної агресії Іраку.

Згідно нашої Декларації ми приєднуємося до ініціативи Європейської мережі солідарності з Україною (ENSU). (https://ukraine-solidarity.eu)

Перші підписи
(Argentina) Horacio Tarcus, Beatriz Sarlo, Vera Carnovale, Laura Fernández Cordero, Martín Baña, Alejandro Gallian, Maristella Svampa, Pablo Stefanoni, Pablo Alabarces, Carlos Altamirano, Carlos Penelas, Mariano Schuster, Abel Gilbert, Alejandro Katz, Horacio Ricardo Silva, Karina Jannello, Adrián Gorelik, Hugo Vezzetti
(Brasil) Maria Elisa Cevasco, Vanessa Oliveira
(Cuba) Julio César Guanche
(Ecuador) Marc Saint-Upery
(España) Jaime Pastor
(France) Michel Antony, Michael Löwy, Richard Neuville, Dardo Scavino, Jean Puyade, Christian Mahieux, Patrick Silberstein, Robi Morder, Mariana Sanchez, Hélène Roux, Elisa Moros, Catharine Samary, Pierre Pelan, Patrick Le Trehondat, Sylvain Silberstein, Romain Descottes, Francis Sitel, Armand Creus, Jean-Paul Bruckert, Eva Roussel, Irène Paillard, Stefan Bekier
(India [Bhārat]) Jairus Banaji, Rohini Hensman
(Italia) Antonella Marazzi, Roberto Massari, Michele Nobile, Riccardo Bellofiore, Oreste Scalzone, Laris Massari, Giorgio Amico, Andrea Furlan, Giovanna Vertova, Liben Massari, Dario Giansanti, Cinzia Nachira, Anna Della Ragione, Walter Baldo C., Andrea Coveri, Marco Noris
(México) Rafael Mondragón
(Nederland) Jan Lust
(Perú) Hugo Blanco, José-Carlos Mariátegui (nieto)
(Polska) Zbigniew M. Kowalewski, Katarzyna Bielińska, Stefan Zgliczyński, Michał Siermiński, Szymon Martys, Paweł Szelegieniec, Artur Maroń, Jacek Drozda
(Suisse-Schweiz-Svizzera) Stefanie Prezioso, Jean Batou
(Ukraïna [Україна]) Hanna Perekhoda
(Uruguay) Gerardo Garay, Gerardo Caetano

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Biélorussie : « la journée a commencé par des perquisitions au siège du syndicat »

Tôt ce matin [25 mai], la police (ou d’autres organes) a fait une descente au siège du syndicat indépendant biélorusse, situé au 13-A de la rue Bogomolova. À l’heure actuelle, les téléphones portables et autres appareils des employés du bureau du syndicat ont été saisis par les autorités de l’État. Les employés ont signé des documents de non-divulgation [de l’opération].
Le KGB (vraisemblablement du département de Minsk du KGB) s’est présenté au bureau d’Aliaksandr Mishuk, président du BITU de l’entreprise JSC Belaruskali, au 5 Korzha Str. et ce en présence de plusieurs témoins ; des membres du syndicat n’ont pas été autorisés à entrer dans le bureau du président. Le président Mishuk a été emmené par les autorités de l’État, sans autre information. Une perquisition a été effectuée à son domicile. Selon nos informations, les autres représentants du BITU dans les branches de l’entreprise Belaruskali (ateliers auxiliaires et usines) ne sont pas vus refuser l’accès à leur lieu de travail.
Les bureaux syndicaux du BITU des 2e et 1ere unités de production de Belaruskali ont été perquisitionnés. Le président du BITU de la 1 ere unité de production de Belaruskali, Pavel Razumouski, a été convoqué à un interrogatoire par le KGB.
Les militants syndicaux supposent que des perquisitions auront lieu dans tous les bureaux du BITU de l’entreprise Belaruskali.
Le bureau du procureur a partiellement reçu en temps voulu les informations demandées au BITU (le bureau syndical n’a pas fourni les listes de ses membres, se référant à la loi sur la protection des données personnelles).
Nous vous rappelons que les organisations syndicales du BITU à Salihorsk sont les seules structures actives restantes du syndicat.
Il s’agit de : l’organisation régionale du BITU à Salihorsk ; l’organisation du BITU à la JSC Belaruskali ; et l’organisation du BITU à Remmontazhstroy (filiale de Belaruskali).
Nous vous rappelons également que le président du syndicat indépendant biélorusse Maksim Pazniakou purge sa peine en prison : il a été condamné à 15 jours d’arrêts administratifs après avoir été arrêté le 17 mai à Novopolock.

Le Syndicat indépendant biélorusse – (Syndicat indépendant biélorusse des mineurs, des travailleurs de la chimie, des raffineries de pétrole, de l’énergie, des transports, de la construction et autres travailleurs – BITU) a été fondé le 6 octobre 1991 sous le nom de Syndicat indépendant des mineurs de Biélorussie. Le 3 juin 1993 il a été rebaptisé Syndicat indépendant biélorusse en raison de l’adhésion d’autres organisations non liées à l’exploitation minière. Aujourd’hui, le BITU est le plus important syndicat indépendant du mouvement ouvrier en Biélorussie. Malgré toutes les difficultés, l’organisation réunit aujourd’hui plus de 5 000 travailleurs dans diverses industries. Le BITU est co-fondateur et affilié au Congrès biélorusse des syndicats démocratiques (BKDP).

Publié par le Syndicat indépendant de Biélorussie, 25 mai 2022
Traduction Patrick Le Tréhondat
http://www.laboursolidarity.org/Bielorussie-la-journee-a-commence

L’organisation syndicale indépendante biélorusse de Naftan expulsée de ses locaux

La section syndicale du Syndicat indépendant biélorusse de Naftan à Novopolotsk a été expulsée de ses locaux. Auparavant, l’enregistrement de l’organisation avait été annulé.
Les représentants du syndicat disent qu’ils prévoyaient de faire appel de cette décision devant le tribunal, ils n’allaient donc pas quitter les lieux. Il y a deux semaines, Olga Britikova, présidente du syndicat indépendant de Naftan, a été libérée après 75 jours d’arrestation.
Récemment, il y a eu une véritable chasse aux syndicats indépendants de la part des forces de sécurité. Il y a un mois, leurs bureaux ont été perquisitionnés et des personnes ont été arrêtées.
Les défenseurs des droits humains ont reconnu les militants détenus comme des prisonniers politiques. Comme indiqué précédemment, le 25 mai, une perquisition a eu lieu dans le bureau du Syndicat indépendant biélorusse à Soligorsk. Le dirigeant syndical Aleksandr Mishuk a été arrêté et probablement emmené à Minsk.
Publié par le BDKP, 26 mai 2022
http://www.laboursolidarity.org/L-organisation-syndicale

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Rencontre avec les organisations et collectifs ukrainiens à Lviv

Livret-soutien-organisations-Ukraine

Quatre membres de notre comité se sont rendus à Lviv avec la délégation du Réseau Européen de solidarité avec l’Ukraine et contre la guerre. Le but de cette délégation, qui comprenait des représentants de multiples organisations et collectifs politiques venant de plus de 10 pays européens, était de rencontrer des syndicats, militant·e·s, associations et personnes de la société civile afin d’échanger et de faire valoir leur point de vue.

Plusieurs articles à ce sujet sont parus dans les médias, rapportant ces échanges et faisant le point sur la situation en Ukraine et la résistance populaire :
« Olivier Besancenot : “Une forme de paralysie politique travaille la gauche française sur la guerre en Ukraine” » (Mediapart, 11 mai 2022).
« Je reviens d’Ukraine » (Jean Vogel, Europe Solidaire Sans Frontières, 16 mai 2022)
« Solidarité avec la résistance ukrainienne » (L’Anticapitaliste, 18 mai 2022)
« Report: International conference of European Solidarity with Ukraine » (Ukraine Solidarity Campaign, 10 mai 2022)
« What socialists are doing in Ukraine » (entretien avec Denys Pilash, Workers’ Liberty, 17 mai 2022)
« How the left can help Ukraine » (Tom Harris, Workers’ Liberty, 17 mai 2022)
« Wer bezahlt den Krieg? » (Anna Jikhareva, WOZ, 12 mai 2022)
« Der Wunsch nach einer “Stunde null” » (Daniela Janser, WOZ, 11 mai 2022)
« Die Schaltzentrale des Widerstands » (Anna Jikhareva, WOZ, 12 mai 2022)
« Wenn Pazifismus zum Luxus wird » (Johannes Simon, Jungle World, 12 mai 2022)
« In the Grinder of Geopolitics » (Analyse & Kritik, 24 mai 2022) [version allemande]
« Keine Debatten-Charity » (Nelly Tügel, Analyse & Kritik, 17 mai 2022)

Étant convaincus que la solidarité internationale doit se constituer par en bas, nous organisons une collecte de fonds pour aider de manière concrète le peuple ukrainien en résistance. Pour une solidarité directe en étroite collaboration avec ces organisations civiles et humanitaires, vous pouvez faire un don sur le compte indiqué ci-dessous avec la mention « Humanitaire »:
IBAN : CH55 0076 7000 A554 4544 4 (Banque Cantonale Vaudoise, 1001 Lausanne)

Code BIC de la banque : BCVLCH2LXXX

Vous trouverez les contacts directs de ces collectifs dans la brochure à télécharger :

https://comite-ukraine.ch/rencontre-avec-les-organisations-et-collectifs-ukrainiens-a-lviv/

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Le syndicat PCS s’affilie à la campagne de solidarité avec l’Ukraine

La Conférence de l’Union des services publics et commerciaux a voté le 25 mai à l’unanimité en faveur de l’affiliation à la Campagne de solidarité avec l’Ukraine et du soutien aux syndicalistes dans ce pays déchiré par la guerre.
La Conférence a voté en faveur de la solidarité avec le peuple ukrainien et du soutien de sa lutte contre l’invasion russe.
En s’affiliant à l’USC, le syndicat soutiendra également le mouvement syndical en Ukraine.
En présentant la motion A37, Kulvinder de l’
Office of the Public Guardian a déclaré : « Pendant cette invasion brutale de l’Ukraine, il est important que nous tendions la main et établissions des liens avec les syndicats ukrainiens.
Les syndicats qui travaillaient encore pendant que Kiev était bombardée et qui assuraient le fonctionnement de la ville.
Il est important que nous partagions leur point de vue sur le droit à l’autodétermination.
Aucun travailleur ukrainien ne devrait voir ses droits et ses normes de travail exposés à ce que l’Occident, le FMI ou Poutine veulent pour lui. »

Chris Hickey, de la section nationale du PSg – DLUHC, a déclaré : « L’USC est absolument claire, comme la conférence l’a été hier, que la mission de guerre de la Russie est le refus de l’autodétermination du peuple d’Ukraine.
L’USC est tout aussi clair sur le fait que le devoir du mouvement syndical est d’assurer une solidarité distincte et de créer des liens avec les syndicats, d’exiger l’abolition de la dette ukrainienne, d’exiger une aide à la reconstruction de l’Ukraine, d’exiger l’ouverture de nos frontières aux réfugiés ukrainiens et le droit de l’Ukraine à recevoir des armes si elle en a besoin – et c’est le cas – pour résister à l’invasion russe. »
La motion demandait que le PCS s’affilie à l’USC sur une base nationale pour un coût de 150 £ par an, et qu’il encourage les branches à s’affilier et à faire des dons également.
L’USC a organisé avec succès une réunion en marge de la conférence, à laquelle ont participé Mark Serwotka, secrétaire général du PCS, Yuliya Yurchenko de Sotsialny Rukh, John McDonnell, député, et Christopher Ford de l’USC.

Le secrétaire général du PCS a précisé qu’il ne s’exprimait pas à titre personnel. « Je m’exprime au nom du PCS. Et dès le début, nous avons exprimé très clairement notre solidarité. » Le président du groupe parlementaire du PCS, le député John McDonnell, a expliqué pourquoi il a aidé à fonder USC en 2014 et a déclaré : « La guerre d’agression de la Russie est un crime de guerre. Nous sommes solidaires du peuple ukrainien, des Russes héroïques qui s’opposent à la guerre, et du mouvement ouvrier ukrainien. Yuliya Yurchenko, du mouvement socialiste démocratique ukrainien Sotsialniy Rukh, a parlé de la lutte de la gauche pour reconstruire l’Ukraine sur une base différente et plus égale après la guerre – et pour des demandes immédiates incluant l’annulation de la dette ukrainienne.

Un message de solidarité d’Olesia Briazgunova, secrétaire internationale de la Confédération des syndicats libres, a été lu en marge de la réunion :
Chers frères et sœurs,
Au nom des membres de la Confédération des syndicats libres d’Ukraine (KVPU), je tiens à exprimer ma gratitude à l’Union des services publics et commerciaux et à ses membres pour leur soutien et leur solidarité. Pendant que vous tenez cette conférence, les membres de la KVPU travaillent sous des missiles ou se cachent dans des sous-sols en raison des frappes aériennes des forces russes. Nos courageux travailleurs médicaux sauvent la vie de civils et de militaires. Nos travailleurs du transport assurent le transport de l’aide humanitaire et l’évacuation des personnes des zones de guerre. Actuellement, les membres du KVPU sont en première ligne car ils servent dans les forces armées ukrainiennes. Ces hommes et ces femmes ont quitté leur travail, leur maison et leur vie paisible et défendent maintenant leur patrie contre les occupants russes. Dans le même temps, la KVPU et ses organisations affiliées ont apporté leur aide aux civils, aux personnes déplacées et aux militaires. Nos dirigeants et nos membres se rendent dans les villes et villages touchés par la guerre pour apporter de l’aide et évacuer les personnes. Nous utilisons toutes nos ressources syndicales pour aider les gens et ramener la paix en Ukraine. Cependant, nous avons besoin de votre aide dans ce combat pour notre indépendance, notre liberté et notre vie. Nous avons besoin de votre aide pour ramener la paix en Ukraine et en Europe. L’Ukraine a besoin d’assistance, d’aide financière, humanitaire et militaire pour combattre le sombre régime russe, pour aider les gens et pour reconstruire les villes et l’économie détruites. Nous appelons à soutenir des sanctions fortes contre la Russie pour arrêter cette guerre horrible. Nous appelons toutes les sociétés démocratiques à s’unir et à agir pour que plus jamais il n’y ait d’atrocités, de destruction, de génocide et de guerre horrible. Nous croyons au pouvoir de la solidarité ! Nous croyons en la victoire de l’Ukraine !
Merci encore pour votre soutien et votre solidarité !

Lors de la conférence, un message de solidarité a été lu par Yurii Pizhuk, président du State Employees Union of Ukraine, le syndicat frère du PCS en Ukraine :
Cher Monsieur le Président du Congrès du PCS,
Chers syndicalistes du Royaume-Uni, nos amis et collègues.
Aujourd’hui, le compte à rebours de la société syndicale ukrainienne, comme dans toute l’Ukraine, commence le 24 février, date à laquelle nos vies ont changé.
La perfide invasion russe a emporté notre printemps, nos projets, notre travail pacifique. La guerre a emporté et emporte encore ce que notre pays a de plus précieux – la vie de nos citoyen nes.
Le niveau du mal apporté à notre pays, une personne normale est tout simplement impossible à imaginer ! Mais la terrible horde du Kremlin ne peut pas nous enlever notre amour pour notre patrie, notre foi, notre espoir, nos rêves et notre avenir.
Et si nous avons pu endurer ces mois difficiles, c’est aussi parce que nous nous sommes vraiment sentis partie intégrante d’une véritable famille de travail européenne, où il n’y a pas de douleur pour les autres, où nous nous préoccupons toutes et tous d’une seule chose et sommes d’un seul côté du front.
Pendant cette période, l’Ukraine et le Royaume-Uni sont passés de partenaires à amis et frères. Nous aimerions profiter de cette occasion pour vous exprimer notre gratitude à tous pour votre aide inestimable, votre soutien et vos actions décisives.
Nous avons compris le sens réel de la véritable solidarité syndicale. Vos actions de solidarité condamnant l’invasion russe en Ukraine et appelant à un cessez-le-feu immédiat et au retrait des troupes russes de toute l’Ukraine ont prouvé de manière convaincante la vérité des valeurs européennes fondamentales.
Il est très important pour nous que vous, en tant que membres du mouvement syndical, appeliez à une paix juste, et qu’en protestation contre l’invasion russe et en solidarité avec le peuple ukrainien, vous exprimiez, avec les syndicats ukrainiens, votre soutien à la manifestation du Syndicat sur l’Ukraine.
La vérité, la liberté, l’amitié, la loyauté et la paix gagnent toujours. Et nous n’abandonnerons pas. Bien sûr, avec votre aide, avec l’aide de la civilisation des grands pays. Avec le soutien du grand peuple du Royaume-Uni, pour lequel nous sommes immensément reconnaissants et dans lequel nous nous réjouissons.
Nous appelons tout le monde à se joindre à la défense de notre État maintenant et à la reconstruction de l’Ukraine après la guerre. Nous voulons également créer une coopération efficace avec le syndicat PCS afin de s’intégrer dans le mouvement syndical international, la mise en œuvre mutuellement bénéfique de projets communs pour le développement du mouvement syndical des jeunes, l’introduction de formes modernes et efficaces d’activités syndicales et l’échange de délégations.
Nous pourrons retourner à la vie pacifique et nous pourrons devenir des défenseurs fiables des droits du travail et des intérêts sociaux des travailleurs.
Nous avons notre terre natale, nous avons un peuple ukrainien travailleur, nous avons une jeunesse active et nous avons des amis syndicaux fiables.
Nous vivrons ensemble dans une famille européenne pacifique.
Mémoire éternelle à toutes celles et tous ceux qui ont donné leur vie pour notre liberté.
Mémoire éternelle de toutes celles et tous ceux qui ont donné leur vie pour la liberté du monde.
Yurii Pizhuk,
Président du Syndicat des employés
Syndicat des employés de l’Ukraine

https://ukrainesolidaritycampaign.org/2022/05/28/pcs-union-affiliates-to-ukrainian-solidarity-campaign/
Traduit avec http://www.DeepL.com/Translator (version gratuite)

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Déclaration du Mouvement des objecteurs de conscience de Russie

Déclaration à l’occasion de la journée mondiale pour l’objection de conscience, le 15 mai 2022.
Lorsque la guerre avec l’Ukraine a commencé, l’idée de refuser le service militaire en Russie est devenue d’autant plus pertinente. Avant la guerre, la plupart des recrues et les membres de leur famille n’associaient pas le service militaire en tant que conscrits à la guerre réelle. La conscription semblait être quelque chose comme un camp sportif avec quelques ajouts d’entraînement militaire.
Quelles que soient leurs opinions politiques, le sentiment, sain, de peur de participer à une guerre sur le territoire d’un pays étranger amène des personnes à rechercher les moyens d’effectuer un service civil alternatif et de faire respecter leur droit de ne pas servir dans l’armée.
Pour certains de ceux qui s’opposent au service militaire, la possibilité de spécifier dans leur demande qu’ils s’opposent à la guerre de la Russie en Ukraine est importante. C’est une façon légale d’exprimer son désaccord directement aux représentants des autorités de l’État, une question morale d’importance.

Depuis ces mois de guerre, nous avons assisté à un phénomène entièrement nouveau : des soldats professionnels refusent de participer à « l’opération spéciale* » et exigent la résiliation de leurs contrats. Nous tenons à exprimer particulièrement nos remerciements aux soldats et aux policiers qui ont eu le courage de refuser de tuer et de mourir dans un pays étranger, qui ont refusé de participer à « l’opération spéciale ».
Aujourd’hui, alors que beaucoup de gens craignent l’introduction d’une mobilisation [militaire] partielle ou totale en Russie, c’est précisément le droit à l’objection de conscience au service militaire qui leur offre un soutien.

Le Mouvement des objecteurs de conscience en Russie exprime sa solidarité avec tous ceux qui s’opposent à la guerre, avec tous ceux qui s’opposent à l’acte d’agression. Nous souhaitons et prions de toutes nos forces, pour que l’Ukraine survive à l’assaut et conserve son indépendance.

* « L’opération spéciale » est l’attaque en cours de la Russie contre l’Ukraine ; formellement, ce n’est pas une guerre, mais une « opération spéciale », elle est officiellement désignée ainsi en Russie.

Moscou, le 15 mai 2022.
Source :
Internationale des résistants à la guerre (IRG)
Traduction : Christian Mahieux

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Point de situation des opérations en Ukraine 28 mai 2022 – La bataille du Donbass 2

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Le front du Nord-Donbass attire plus que jamais l’attention et prend la tournure d’une bataille décisive qui absorbera les efforts dans les semaines à venir, peut-être jusqu’à la fin de l’été si les deux camps ont les ressources pour soutenir une telle intensité des combats jusque-là.
Rappelons que ce front est divisé en deux secteurs opérationnels séparés mais qui s’influencent mutuellement. À l’Ouest, on trouve le couple Sloviansk-Kramatorsk (SK) et à l’Est le couple Severodonetsk-Lysychansk (SL), les quatre grandes villes-objectifs des forces russes au sommet de deux grands axes urbanisés Nord-Sud qui rejoignent les deux républiques séparatistes. L’ensemble des deux secteurs représente un rectangle de 50 km de profondeur sur 100 de large, soit la superficie de la moitié d’un département français. Il est partagé au milieu par la rivière Siversk qui joint du Nord au Sud la ville du même nom au nœud routier de Bakhmut. Bakhmut commande à SL soit directement par la route T1302, soit indirectement et plus difficilement via Siversk. 

Face au secteur de Sloviansk, les forces russes sont désormais plus réduites après avoir été le secteur principal. Tout l’effort de la 201e DM, aidée à l’Est par la 90e DB a consisté à menacer d’encerclement la ville de Lyman et de contraindre la 95e brigade d’assaut aérien à se replier vers Sloviansk. Il est possible aussi que ce retrait oblige également la 57e brigade motorisée à se replier derrière la rivière Donets. À ce stade, ces deux brigades et la 81e d’assaut aérien face à Yzium, peuvent tenir assez bien les hauteurs au Nord de Sloviansk. La situation est beaucoup plus critique pour les Ukrainiens du côté Est. 

Les forces russes et le 2e corps d’armée, de la République populaire de Louhansk (LNR) pressent le secteur SL de tous les côtés. Au Nord, entre Ozerne et Lysychansk, trois brigades ukrainiennes – 79e d’assaut aérien, 128e de montagne et 58e motorisée – tiennent assez solidement les hauteurs sur 40 km face à la 90e division blindée (DB) et quatre ou cinq brigades russes (soit 8 à 10 groupements tactiques, GT) au-delà de la rivière Donets. La ville de Severodonetsk elle-même est abordée sur trois-quarts de sa périphérie par la 127e division d’infanterie motorisée (DM) renforcée d’un régiment LNR et du groupement tchétchène, soit de 5 à 8 GT face à deux brigades de Garde nationale, d’une brigade territoriale et du régiment Slavic. Là encore, les Ukrainiens tiennent, malgré la puissance de feu d’au moins une brigade d’artillerie russe, en plus des artilleries organiques des GT

Le groupement de forces russes le plus important – 7e division d’assaut aérien, brigades d’infanterie de marine de Baltique et du Pacifique, groupe Wagner et 150e DM, soit une dizaine de groupements tactiques (GT) – attaque depuis Popasna dans toutes les directions. Vers le Sud, il menace d’encerclement la 30e brigade mécanisée ukrainienne et l’obligera sans doute au repli. Au nord, en direction de SL, et en conjonction avec la poussée vers l’Ouest des forces LNR et de la 57e brigade russe, il menace d’encerclement la 17e brigade blindée dans la région d’Hirske-Toshkivka. Vers l’Ouest , il s’approche de Soledar, à quelques kilomètres de Bakhmut, sur le principal axe de ravitaillement de SL. La prise de Soledar, puis celle de Siversk depuis Ozerne au Nord, suffirait à couper Severodonetsk-Lysychansk de toute communication. Les neuf brigades et régiments ukrainiens, soit 1/6e environ de la force opérationnelle terrestre ukrainienne, se trouveraient ainsi prises au piège. 

Cette perspective place les forces ukrainiennes devant plusieurs options délicates.
La première serait de contre-attaquer afin de dégager la zone, et donc logiquement d’essayer de reprendre Popasna. Cela supposerait de disposer d’une masse de manœuvre de plusieurs brigades. Pour l’instant, seule la 4e brigade blindée semble disponible dans la région de Kramatorsk, mais il serait possible de transférer la 48e brigade d’assaut aérien en réserve à Poltava (on ne comprend pas très bien en fait pourquoi cela n’a pas déjà été fait) et peut-être une ou deux brigades blindées venues du Nord ou du Sud-Ouest.
Le problème est, et les Russes y ont déjà été largement confrontés, qu’il est difficile de manœuvrer classiquement dans une zone de feux denses dès lors que l’on n’est visible et repéré. Placée dans le contexte actuel, la contre-attaque allemande de février 1943 en direction de Kharkov avec deux corps blindés serait immédiatement repérée et frappée depuis le ciel depuis les avions d’attaque jusqu’aux missiles/roquettes antichars à tir plongeant, en passant par les missiles air-sol d’hélicoptères ou drones ou les obus précis de l’artillerie. Pour manœuvrer, il faut désormais être soit mobiles, dispersées et camouflées, soit au contraire très protégés sur de petits espaces. Pour avoir fonctionné « à l’ancienne » entre les deux, les colonnes blindées-mécanisées russes ont été corrodées et figées dans la bataille de Kiev. De la même façon que les Américains en Corée passant des colonnes motorisées aux tranchées de 1950 à 1951, les forces russes évoluent désormais à partir de lignes sécurisées et d’arrière protégées en avançant sous enveloppe d’artillerie, c’est-à-dire jamais au-delà de 20 kilomètres des batteries dans un style très « 1918 ». 
Si les forces ukrainiennes ont pu progresser sur des forces en repli dans la région de Kiev ou des forces en rideau au Nord de Kharkiv, elles butent sur les lignes fortifiées de la région de Kherson. Une attaque visible contre le point haut de Popasna sous l’enveloppe de frappes air et artillerie russes peut réussir mais ce sera un exercice long, difficile et sans aucune doute très couteux.

La deuxième option est de rester sur place et de défendre les positions pied à pied, en comptant sur la capacité de résistance en ville et l’usure des forces russes ou une diversion des moyens sur d’autres secteurs, à Kherson en particulier. Cette stratégie a bien fonctionné au Nord où les villes assiégées de Chernihiv et de Soumy ont finalement été dégagées après avoir contribué à entraver la manœuvre russe. Cela a échoué à Marioupol, alors que les forces ukrainiennes ont été incapables de forcer les Russes à quitter une zone Sud plus facilement défendable et contrôlable que le Nord. Si Marioupol a permis de fixer des forces russes importantes pendant deux mois et de leur infliger sans doute de fortes pertes, sa chute constitue néanmoins la plus grande défaite ukrainienne de la guerre avec plusieurs brigades complètes perdues. C’est donc un pari d’autant plus risqué que l’aide matérielle occidentale va forcément marquer le pas après l’épuisement des possibilités immédiates et que la formation de nouveaux bataillons à envoyer au combat, avant de former de nouvelles brigades, risque de prendre encore du temps.

La dernière option, sans doute la plus réaliste militairement mais aussi la plus difficile politiquement serait d’abandonner Severodonetsk et Lysychansk, désormais vidées de la grande majorité des habitants, et de replier toutes les brigades au-delà la rivière Siversk et de s’appuyer sur une nouvelle ligne de défense urbaine de Sloviansk à Kostiantynivka. Ce serait échanger de l’espace, largement vide, contre des forces et du temps. Ce serait cependant aussi une manœuvre très délicate à organiser sous la pression russe, mais possible.  

Les opérations militaires ne sont jamais linéaires. À des phases d’attente peuvent succéder brutalement des accélérations à la suite de succès soudains et parfois surprenants. Après quelques succès surprenants ukrainiens, en fait des coups profitant de failles russes, les Russes ont repris l’initiative. La bataille du Donbass est cependant loin d’être terminée, sans même parler des opérations militaires de cette guerre, ni même de cette guerre dans la longue durée. Il y aura d’autres surprises de part et d’autre.

Michel Goya

https://lavoiedelepee.blogspot.com/2022/05/point-de-situation-des-operations-en_28.html

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Liens avec d’autres textes

Qu’est-ce que le régiment Azov, ce bataillon ultra-nationaliste devenu symbole du martyre de Marioupol ?
https://theconversation.com/quest-ce-que-le-regiment-azov-ce-bataillon-ultra-nationaliste-devenu-symbole-du-martyre-de-marioupol-183602
Le premier procès de la guerre en Ukraine vu par une chroniqueuse judiciaire
Dans des circonstances normales, ce procès aurait pu durer plusieurs années. D’une célérité rare en Ukraine, le premier procès pour crime de guerre d’un militaire russe était placé sous le feu des projecteurs. Le jeune sergent, Vadim Shishimarin, qui a plaidé coupable du meurtre d’un civil, a été condamné hier à la prison à vie. La société ukrainienne et le système judiciaire ne semblaient pas préparés, explique Irina Salii de « Sudovyi Reporter » (The Judicial Reporter), une chroniqueuse judiciaire expérimentée.
https://www.justiceinfo.net/fr/92758-premier-proces-guerre-ukraine-par-chroniqueuse-judiciaire.html?
En immersion avec les combattants ultranationalistes ukrainiens – Partie 1
À la pointe des combats à Marioupol, à Irpin et dans le Donbass, les milices ultranationalistes ukrainiennes se sont imposées partout où les combats font rage, mais la question des opinions politiques de ces combattants déterminés revient comme un leitmotiv. Qualifiés de néo-nazis par la Russie, vus comme des défenseurs héroïques par une majorité de la population ukrainienne, ces milices nationalistes monopolisent l’attention sur les réseaux sociaux. Un ancien capitaine de l’armée française a enquêté en immersion chez Azov et DUK, à la découverte de l’idéologie des combattants les plus controversés d’Ukraine.
https://www.blast-info.fr/articles/2022/en-immersion-avec-les-combattants-ultranationalistes-ukrainiens-partie-1-sFpShBmeS8SdGDcgVHnVWA?
« Nous exigeons un retrait immédiat de nos troupes » : pour la première fois, des élus russes appellent à arrêter la guerre en Ukraine
https://www.nicematin.com/conflits/nous-exigeons-un-retrait-immediat-de-nos-troupes-pour-la-premiere-fois-des-elus-russes-appellent-a-arreter-la-guerre-en-ukraine-770130
Guerre en Ukraine : 115 militaires russes licenciés pour avoir refusé d’aller combattre
https://www.marianne.net/monde/europe/guerre-en-ukraine-115-militaires-russes-licencies-pour-avoir-refuser-daller-combattre

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Tous les textes précédemment publiés 
et
les liens sont maintenant regroupés sur la page :

https://entreleslignesentrelesmots.blog/retrait-immediat-et-sans-condition-des-troupes-russes-solidarite-avec-la-resistance-des-ukrainien·nes/

 

Auteur : entreleslignesentrelesmots

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