Les grutiers sont des travailleurs dépourvus de protection (Ukraine)

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« Les salaires des grutiers et des ouvriers du bâtiment sont très bas. Les ouvriers de cette industrie peuvent rarement gagner plus de 20 000 hryvnias par mois [482 euros]. Ce revenu ne garantit pas un niveau de vie normal aux travailleurs. Afin d’assurer des salaires décents et la sécurité des travailleurs, les travailleurs de l’industrie de la construction et leur syndicat ont lancé une campagne pour des salaires décents – 200 hryvnias/heure » déclarait le 18 juillet 2023, le syndicat du bâtiment (FPU). Le même mois, le syndicat des grutiers de la région de Lviv a fêté son quatrième anniversaire. Dans une interview accordée à Trudova Halychyna [1], Lubomyr, l’un des militants du syndicat, nous parle de l’histoire du syndicat, de ses réalisations et des défis auxquels sont confrontés les grutiers.

Racontez-nous comment et pourquoi le syndicat a été fondé ?
Vers 2016, nous avons soulevé la question de la création d’un syndicat. Bien que les grutiers le souhaitaient, nous n’étions pas compétents pour le mettre en place et ne connaissions pas la procédure. Cette idée a donc été mise de côté. Plus tard, alors que je travaillais sur une grue, j’ai rencontré Galina Petrovna [grutière et militante syndicale de Kyiv – ndlr]. Elle m’a mis en contact avec Artem [syndicaliste de gauche et membre du Mouvement social – ndlr]. Nous l’avons rencontré ainsi que Vasyl Andreyev [directeur adjoint du syndicat du batiment], qui venait de Kyiv, et quelques grutiers sont venus de chez nous. Artem et Vasyl nous ont aidés à créer le syndicat. Et le premier véritable pas vers sa fondation a été la chute d’une grue à Sykhiv [un accident qui a blessé un grutier – ndlr]. Nous avions déjà déposé les documents pour la création du syndicat à l’époque. Cela nous a encore plus rapprochés. Pourquoi avons-nous créé un syndicat ? Tout d’abord, pour bénéficier d’une protection, car les grutiers sont des travailleurs dépourvus de protection. Dans tous nos métiers, nous sommes parfois amenés à commettre des infractions. Si on refusait de le faire, on risquait de ne pas être payé. Et puis, lorsque nous faisions grève, nous risquions d’être licenciés. Nous avons fondé le syndicat pour protéger nos droits.

Quelles sont vos principales réalisations et réussites au cours des quatre dernières années ?
Si le syndicat avait des problèmes, nous envoyions une demande à Kyiv [à la direction nationale du syndicat]. Ils résolvaient le problème. Il y a eu des cas où des grutiers, tout en travaillant officiellement, ont perdu près d’un an d’ancienneté à cause des mensonges d’employeurs qui n’avaient pas soumis les documents de leurs employés aux bons endroits. À leur demande, nous avons envoyé une plainte à Kyiv, après quoi les problèmes ont été résolus très rapidement. Parfois, l’affaire a même été portée devant le bureau du procureur, mais nous avons eu le dessus. Le syndicat fonctionne également de manière efficace lorsque quelqu’un a besoin d’aide.

Lorsque l’un d’entre nous avait besoin d’aide, nous récoltions de l’argent pour cette personne. Je parle de problèmes graves et urgents : par exemple, si la maison d’une personne a brûlé ou si elle a besoin d’une opération chirurgicale coûteuse. C’est devenu une tradition. Plus tard, nous avons commencé à faire des collectes régulières pour aider nos collègues qui servent dans l’armée. Pour l’équipement, les traitements médicaux et tout ce dont ils ont besoin. En outre, nous collectons de l’argent également pour les grutiers qui ne sont pas membres du syndicat. Nous ne séparons pas les syndicalistes du reste de nos collègues. Nous utilisons simplement des méthodes différentes pour atteindre un objectif commun.

En ce moment, de nombreux grutiers du syndicat ont été enrôlés dans l’armée. Nous profitons de ce moment pour faire augmenter les salaires. Pour ce faire, nous préparons une pétition après en avoir discuté entre nous et avec le comité syndical. Aujourd’hui, lorsqu’un employeur recherche des grutiers, tous les candidats me sont adressés. Ma tâche consiste à les informer que le tarif actuel est de 180 hryvnias par heure, pas moins. Pour avertir les gens que le salaire ne peut être abaissé à Lviv, nous utilisons les plateformes internet de Lviv, Kyiv et Ivano-Frankivsk.

Dites-nous comment vous travaillez avec les employeurs. Comment leur faites-vous comprendre que les salaires doivent être exactement ce qu’ils sont ?
Le syndicat ne peut pas influencer directement les employeurs, mais nous écrivons des lettres de recommandation pour leur demander d’envisager une révision des salaires. Le dernier mot revient au patron. Actuellement, nous n’utilisons pas ces droits car nous avons une autre possibilité de faire pression sur l’employeur : il n’y a pas d’autres grutiers ici, et une grue ne peut pas fonctionner sans grutier. Les employeurs n’ont donc pas d’autre choix que de s’adresser à nous. Pour notre part, nous avons tout organisé pour que les problèmes soient résolus par l’intermédiaire d’une seule personne – moi. Ils viennent me voir, je leur dis le montant du salaire et ils se demandent s’ils peuvent se le permettre. S’ils ne le peuvent pas, et qu’ils proposent, par exemple, de payer un salaire horaire de 150 Hryvnias [3,70 euros] par heure au lieu de 180 [4,44 euros], eh bien, qu’ils cherchent quelqu’un! Ils ne trouvent personne, parce qu’il n’y a personne. Ils ont alors un temps d’arrêt de travail de 3 jours à une semaine. Les équipes qui y travaillent se retrouvent sans travail et sans revenu. Se trouvant dans une situation désespérée, les employeurs acceptent nos conditions.

En d’autres termes, nous abordons maintenant la question des augmentations de salaire sans passer par la procédure syndicale. Le syndicat travaille dans le cadre légal : si une personne ne reçoit pas son salaire, est mise à la porte ou est licenciée sans aucun motif légal, le syndicat rédige des lettres d’avertissement, puis l’affaire est portée devant le tribunal ou le bureau du procureur. La procédure est longue. Mais pour augmenter les salaires, nous devons agir rapidement, et non attendre.

Kyiv veut d’une autre manière, par l’intermédiaire du syndicat pour faire augmenter les salaires. Cela prend beaucoup de temps et il n’est pas acquis que l’employeur réponde au syndicat, et encore moins que le salaire soit augmenté.

Toutefois, si vous le mettez devant le fait accompli, la situation sera la même que dans le cas du non-paiement des factures de services publics, l’électricité est coupée. Nous avons été prévenus que le tarif de l’électricité avait augmenté depuis le 1er juin [une augmentation des tarifs en juin 2023 – ndlr] et personne n’a demandé si nous pouvions payer. Si vous ne pouvez pas, vous n’avez qu’à débrancher les prises et ne pas payer. Nous avons fait la même chose: si vous voulez, embauchez des travailleurs à notre tarif ou travaillez sans grutier.

Vous avez dit que le syndicat travaille dans un cadre légal. Aujourd’hui, pendant la guerre, la législation du travail a subi de nombreuses modifications qui compliquent encore le travail des syndicats et des employés. En particulier, les contrats « zéro heure » et les restrictions sur les inspections du travail. Comment cela affecte-t-il votre travail ?
Tout d’abord, l’impact est important car nos collègues sont appelés sous les drapeaux et il n’est pas toujours possible de les remplacer. Nous devons donc les aider par la suite. J’ai fait appel à plusieurs reprises à la Fédération des syndicats d’Ukraine, et plus particulièrement à Andreev. J’avais besoin d’aide pour nos grutiers qui n’étaient pas syndicalistes. Il m’a répondu. Il s’agissait d’une aide matérielle, de petites choses comme des tourniquets, des lunettes, des gants. J’ai reçu tout cela gratuitement et je l’ai transmis aux grutiers eux-mêmes.

Quels changements devraient être apportés à la législation ou au pays dans son ensemble pour vous permettre de mieux travailler ?
Les conditions de travail. Tout d’abord, parce que nous avons beaucoup de grues obsolètes. Celles-ci auraient dû être mises au rebut depuis longtemps. De nombreuses grues sont encore en service, mais leur durée de vie a déjà expiré. Nous le savons parce que lorsqu’un grutier monte sur une grue, il doit vérifier la structure métallique, les dispositifs de sécurité, les mécanismes, etc. En d’autres termes, vérifier si les grues peuvent être utilisées, même si l’on estime qu’elles ne sont pas dans l’état où elles devraient l’être dans l’idéal.

La personne qui vient manœuvrer la grue souhaite également un salaire décent. Il ou elle ne travaillera pas pour la même somme d’argent qu’un assistant. S’il y a beaucoup de gens dans le pays – et il y en a beaucoup qui se dissimulent – qui ne paient pas de charges sociales, nous devons changer les choses. Cependant, ni nous, ni même le syndicat ne pouvons résoudre ce problème. Tout ce que nous pouvons faire, c’est influer sur une partie seulement du problème – pour que nous soyons mieux payés. Mais en général, c’est à l’appareil d’État de décider comment faire en sorte que tout le monde se sente bien.

Nous devons également résoudre le problème des violations des règles formelles. Bien sûr, nous devons les enfreindre parce que nous devons faire notre travail. Par exemple, nous devons travailler avec des personnes qui ne sont pas formées. En même temps, nous veillons à ce que les grues soient au moins bien entretenues et à ce que des registres de construction soient tenus. C’est très important non seulement pour le grutier, mais aussi pour tout le personnel. Il faut également leur expliquer comment travailler correctement, comment utiliser la radio, afin que le grutier puisse comprendre les instructions (il peut penser une chose et en dire une autre lorsque le grutier travaille sur une commande spécifique). Il est d’ores et déjà nécessaire de mettre en place des cours minimaux afin que les personnes qui n’ont pas de permis de grutier soient mieux préparées à l’utilisation de la grue et puissent en maîtriser le fonctionnement.

Comment pensez-vous que la question de la sécurité sur le site devrait être abordée ? Devrait-il y avoir une sorte d’inspection pour traiter cette question ?
Oui, il devrait y avoir une inspection. Nous avons actuellement de nombreuses violations. Par exemple, nous travaillons dans le vent. La vitesse autorisée pour le fonctionnement d’une grue est de 12,5 m/s, et de 9 m/s. Certaines grues peuvent fonctionner dans des conditions de vent allant jusqu’à 15 m/s, mais cela ne signifie pas qu’elles ont le droit de soulever une cargaison munie d’une voile (la vitesse autorisée est la même pour tout le monde). Il arrive que ces normes ne soient pas du tout respectées et que les grues fonctionnent par temps de tempête.

Un jour, nous avons eu un accident mortel à Sykhiv. Nous leur avons demandé de rétablir le mécanisme par lequel les entreprises sont informées de l’imminence d’un orage, afin que personne ne travaille pendant cette période. Mais tous les cas de violation doivent être documentés par un organisme habilité. Ce n’est pas le grutier qui doit être puni, mais la direction peu scrupuleuse qui exige de travailler dans de telles conditions météorologiques.

Nous pourrions également mettre en place une ligne d’assistance téléphonique pour la sécurité au travail. Supposons que j’aille remplacer quelqu’un et que je constate que la grue est en mauvais état. Je peux appeler la ligne d’assistance et déposer une plainte, en expliquant ce qui ne va pas. De son côté, l’entreprise devrait répondre dans un délai de trois jours, par exemple. Cela s’appelait autrefois Kotlonadzor [le département de surveillance des chaudières et des structures de levage de la surveillance minière d’État, qui contrôle le respect des règles d’installation et d’exploitation sûre des chaudières à vapeur sous pression et des structures de levage – ndlr]. Actuellement, il n’y a pas d’organismes qui effectuent de tels audits. Aujourd’hui, tout fonctionne ainsi : vous payez, c’est installé et ça marche. Et c’est tout !

Pendant la guerre, beaucoup de gens ont perdu leur maison, et nous rêvons tous de la reconstruire après. Il est clair que nous aurons besoin de grutiers pour reconstruire. Quelle est la situation actuelle de la formation des grutiers ?
Il existe deux établissements d’enseignement à Lviv qui peuvent former des grutiers. Cependant, ils n’enseignent que la théorie, il n’y a pas de pratique. C’est très mauvais ! C’est là que j’ai amélioré mes compétences. Oui, tout est très intéressant et correct, mais il y a beaucoup d’informations inutiles. On parle à un futur grutier de la structure du moteur et de l’électrophysique. Je comprends que cela fait partie de son travail, mais il ne pourra pas le faire lui-même dans la pratique, il y a du personnel spécialement formé pour cela. Le grutier doit avoir des instructions pour travailler : quel type de charges il doit déplacer, comment la charge doit être élinguée (il ne l’élinguera pas lui-même, mais il doit comprendre si tout est fait correctement).

Malheureusement, les établissements d’enseignement n’offrent pas une bonne partie pratique, de sorte que les étudiants doivent chercher eux-mêmes des entreprises qui leur donneront l’occasion d’apprendre et d’acquérir de l’expérience. Certains étudiants se contentent d’acheter des certificats. L’un des grands inconvénients du système éducatif est qu’il n’y a pas de grue sur le territoire de l’université pour initier les étudiants. C’est comme lorsque vous passez votre permis de conduire : on vous enseigne d’abord la théorie, puis on vous fait pratiquer. Si vous étiez autorisé à conduire sur la route immédiatement après avoir appris la théorie, vous serez un conducteur dangereux. C’est la même chose ici. Vous pourriez signer des contrats avec des organisations privées ou publiques, par exemple avec un dépôt de métaux, où les grues sont plus petites et où le travail n’est pas aussi risqué que sur un chantier de construction. Mais cela n’existe pas, du moins à Lviv. Il convient de souligner que si vous engagez un soudeur inexpérimenté, ce qu’il soude peut être brisé s’il commet une erreur, et que si vous engagez un grutier inexpérimenté et qu’il cause des problèmes, cela peut coûter la vie à une personne.

Comment voyez-vous l’avenir de votre profession et de votre syndicat ? Pensez-vous que la situation va s’améliorer ? Espérez-vous que l’État s’implique davantage dans la défense de vos droits ? Ou allez-vous vous battre pour cela d’une manière ou d’une autre ?
Tout d’abord, comme nous tous, je souhaite que la guerre prenne fin. Deuxièmement, je veux que tous les grutiers soient ensemble, non seulement dans une région, mais aussi entre les régions. Je veux que les grutiers de Lviv et de Kyiv soient en bons termes, et je veux que nous nous rendions les uns chez les autres sur des lieux de travail où nos droits sont respectés et où il y a un tarif unique.

J’espère que le syndicat continuera à se développer. Il est nécessaire. Beaucoup de gens ne lui font pas confiance. Il y a peut-être eu des cas où le syndicat n’a rien fait. Oui, le syndicat ne peut pas directement augmenter votre salaire ou réparer votre grue. Certains grutiers syndiqués disent : « Ma grue est cassée et le syndicat ne fait rien ». Mais cette personne ne se rend pas compte que cette question ne s’applique pas à nous. S’il écrivait une déclaration au responsable du syndicat, ce dernier enverrait un rapport sur la grue dangereuse au service public du travail.

Parce que les grutiers oublient aussi beaucoup de choses, ferment les yeux sur certaines choses et, lorsque quelque chose se produit, ils cherchent un coupable. En fait, ce sont eux qui sont à blâmer, parce qu’ils montent sur des grues dangereuses, violent de nombreuses règles et ensuite exigent. Le président du syndicat ne peut pas être au courant de tous les problèmes, c’est pourquoi vous devez rédiger une demande. Allez au comité syndical, nous nous rencontrerons à mi-chemin.

En général, nous avons besoin de beaucoup de choses pour nous développer. Nous devons changer beaucoup de choses sur notre réalité. Il s’agit avant tout des grues. L’ancien système soviétique doit être éliminé, de sorte que les employeurs modernisent les vieux équipements, fournissent l’air conditionné et créent des conditions de travail confortables. Tout cela affecte la productivité. Le syndicat devrait émettre des lettres de recommandation sur ce qu’il faut fournir et sur la manière de le faire. Et laisser l’entreprise décider si elle en a la capacité ou non. S’il n’est pas possible d’installer l’air conditionné, il faut au moins installer une éolienne ou fournir de l’eau. S’il n’y a pas de solution unique, vous pouvez en trouver une autre.

Qu’est-ce qui vous préoccupe maintenant ?
Le plus important est le salaire. Avant le coronavirus, tous les salaires ont augmenté au printemps et à l’automne, avec une augmentation de 10 hryvnias. Puis est arrivé le Covid, la guerre, et tout s’est calmé. L’employeur s’est retrouvé dans une situation d’insolvabilité. Il n’avait plus les moyens, soi-disant. En même temps, pendant la même période, il a acheté de nouveaux équipements, des voitures, une grue, il a fait travailler des gens, il s’est augmenté lui-même, mais le salaire du grutier a été gelé. Et pour nous, les prix et l’inflation ont augmenté pendant cette période. Pendant la guerre, les prix des denrées alimentaires ont augmenté en moyenne de 70 à 100%. Personne n’a augmenté nos salaires de 100%, donc tant que nous n’aurons pas augmenté les salaires, nous ne rattraperons pas notre retard. Selon le contrat signé entre l’entrepreneur et le client, un devis est établi. Si le coût des barres d’armature double soudainement, il est évident qu’il sera révisé. En d’autres termes, ils connaissent la situation, mais on nous ment, à nous les travailleurs. Pourquoi ? Pour se faire plus facilement de l’argent sur notre dos. Qu’ils gagnent de l’argent, c’est certain, mais qu’ils nous donnent un salaire qui nous permette de faire nos courses. Nous ne nous battons pas pour un voyage à Chypre, mais pour pouvoir subvenir aux besoins de nos familles, payer les services publics et les traitements médicaux, et envoyer nos enfants à l’école.

Pensez-vous que les employeurs négocient entre eux pour éviter d’augmenter les tarifs ?
Oui, ils communiquent entre eux. Ils ont leur propre organisation où ils discutent de différentes questions, y compris de nos salaires.

Trudova Halychyna
[1] Trudova Halychyna (Travail en Galicie) est un média en ligne consacré aux questions sociales et syndicales dans cette région de l’Ukraine.
Traduction Patrick Le Trehondat, 4 aout 2023
https://laboursolidarity.org/fr/n/2778/les-grutiers-sont-des-travailleurs-depourvus-de-protection

Auteur : entreleslignesentrelesmots

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