La catastrophe humanitaire comme politique (et autres textes)

  • Halte aux massacres à Gaza et en Cisjordanie ! Cessez-le-feu total et permanent, protection du peuple palestinien !
  • B’Tselem : La catastrophe humanitaire comme politique
  • Amira Hass : « Cratères gigantesques, enfants morts, maisons effondrées : dans le sud de Gaza, il n’y a nulle part où fuir »
  • Texte de Breaking the Silence
  • Dana Mills : En ce jour de Hanoukka, nous devons choisir de défier les forces de la vengeance
  • AFPS : Prisonnières et prisonniers politiques palestinien·nes : l’urgence contre les crimes de guerre
  • Gilbert Achcar : Palestine : « Déluge d’Al-Aqsa et erreur d’appréciation »
  • Communiqué RAAR : solidarité avec la population civile de Gaza
  • Yorgos Mitralias : Pour que les horreurs du carnage de Gaza soient les derniers
  • Dr. Isabelle Defourny : Guerre à Gaza : lettre ouverte à Emmanuel Macron
  • Rocio Lopez : Réflexion sur les motivations patriarcales du Hamas et les illusions impérialistes d’Israël et des États-Unis
  • Dubravka Žarkov : La fin de l’humanisme
  • Maryam Abu Daqqa : Le voyage de retour en Palestine
  • Pour aider aux débats : Petite périodisation

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Halte aux massacres à Gaza et en Cisjordanie !
Cessez-le-feu total et permanent, protection du peuple palestinien !

Collectif national pour une Paix Juste et Durable
entre Palestiniens et Israéliens

Après 48 jours de bombardements qui ont visé l’ensemble de la population de la Bande de Gaza, et qui ont détruit plus de la moitié de ses bâtiments et de ses infrastructures, après 48 jours de siège inhumain qui a privé la population d’eau, de nourriture et de médicaments, la trêve fragile qui a commencé le 23 novembre s’est terminée le 1er décembre au matin.

Les bombardements, attaques militaires par voies terrestres, aériennes et maritimes ont immédiatement repris avec la même intensité qu’avant la trêve, l’armée israélienne visant maintenant le Sud, là où 1,8 million de personnes ont été obligées de se réfugier.

Nous saluons la libération d’otages civils israéliens et étrangers qui ont eu lieu pendant la trêve, une priorité que le gouvernement israélien a dû accepter sous la pression du mouvement des familles.

La libération des prisons israéliennes d’une centaine de femmes et de jeunes palestiniens est une bonne nouvelle pour eux-mêmes et leurs familles. Mais nous observons que depuis le 7 octobre, ce sont plus de 3000 nouveaux Palestiniens dont plus de 200 mineurs qui ont été emprisonnés par Israël, et que des arrestations massives, y compris de personnel médical, sont effectuées par l’armée israélienne à Gaza, dans des conditions qui restent inconnues. Et ce sont des milliers de prisonniers politiques palestiniens, jugés par des tribunaux d’occupation ou détenus sans jugement, qui restent emprisonnés par Israël dans des conditions inhumaines.

C’est une guerre atroce et criminelle qui a été entreprise par l’État d’Israël contre la population palestinienne de Gaza. Les 16 000 morts, les 40 000 blessés, les milliers de disparus, les familles anéanties, ce sont autant de vies, de personnalités, de visages dont il faut rappeler le souvenir. C’est une guerre qui vise à expulser la population palestinienne de Gaza. Personne ne peut encore évaluer la profondeur du traumatisme subi par les hommes, femmes, et enfants palestiniens de Gaza. Rien ne peut justifier une telle attaque contre toute une population et ses infrastructures vitales : cette guerre doit enfin s’arrêter pour de bon.

En Cisjordanie, la population palestinienne subit les attaques conjuguées de l’armée et des colons, qui ont fait plus de 240 morts depuis le 7 octobre. Plusieurs communautés ont été chassées de leurs terres, les cultures palestiniennes sont prises pour cible, nous dénonçons ce processus de nettoyage ethnique.

Nous demandons un cessez-le-feu total et permanent pour la Bande de Gaza, l’arrêt définitif des bombardements, des offensives terrestres et des déplacements forcés de populations, ainsi que la levée durable du blocus. Nous demandons aussi la protection de la population palestinienne de Cisjordanie y compris Jérusalem-Est.

Nous exigeons que la France et l’Union européenne s’engagent activement et sans ambiguïté pour le cessez-le-feu, y compris par des sanctions contre l’État d’Israël.

Une paix juste et durable ne sera possible que dans le cadre de la reconnaissance des droits du peuple palestinien, et notamment de son droit à l’autodétermination. Elle implique l’arrêt de la colonisation et la fin de l’occupation israélienne, ainsi que le respect de l’ensemble des résolutions de l’ONU.

Cessez-le feu total, immédiat et permanent !
Arrêt définitif des bombardements et
des déplacements forcés de la population !
Levée immédiate, complète et durable du blocus de Gaza !
Protection du peuple palestinien à Gaza et en Cisjordanie !

Nous appelons à manifester, se rassembler partout en France sur les bases de cet appel.

A Paris, nous appelons à un rassemblement samedi 9 décembre à 15h00 Place de la Sorbonne Paris.

Membres du Collectif National pour une Paix Juste et Durable entre Palestiniens et Israéliens signataires de l’appel
Agir Contre le Colonialisme Aujourd’hui (ACCA) – AFD International – AILES Femmes du Maroc – Américains contre la guerre (AAW) – Association des Travailleurs Maghrébins de France (ATMF) – Association des Tunisiens en France (ATF) – Association France Palestine Solidarité (AFPS) – Association pour la Taxation des Transactions financières et pour l’Action Citoyenne (ATTAC) – Association pour les Jumelages entre les camps de réfugiés Palestiniens et les villes Françaises (AJPF) – Association des Universitaires pour le Respect du Droit International en Palestine (AURDIP) – Cedetim / IPAM – Collectif des Musulmans de France (CMF) – Collectif Faty Koumba : Association des Libertés, Droits de l’Homme et non-violence – Collectif Judéo-Arabe et Citoyen pour la Palestine (CJACP) – Collectif Paix Palestine Israël (CPPI Saint-Denis) – Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche-Orient (CVPR PO) – Comité Justice et Paix en Palestine et au Proche-Orient du 5e arrt (CJPP5) – Confédération générale du Travail (CGT) – Droit-Solidarité – Ensemble! Mouvement pour une alternative de gauche écologiste et solidaire – Europe Ecologie les Verts (EELV) – Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives (FTCR) – Fédération Syndicale Unitaire (FSU) – Forum Palestine Citoyenneté – La Confédération paysanne – La Courneuve-Palestine – La France Insoumise (LFI) – le Mouvement de la Paix – les Femmes en noir (FEN) – Ligue Internationale des Femmes pour la Paix et la Liberté, section française de la Women’s International League for Peace and Freedom (WILPF) (LIFPL) – Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples (MRAP) – Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) – Organisation de Femmes Égalité – Parti Communiste des Ouvriers de France (PCOF) – Parti de Gauche (PG) – Participation et Spiritualité Musulmanes (PSM) –Sortir du colonialisme – Union des communistes libertaires (UCL) – Union des Travailleurs Immigrés Tunisiens (UTIT) – Union Juive Française pour la Paix (UJFP) -Union Nationale des Etudiants de France (UNEF) – Union Syndicale Lycéenne – Union syndicale Solidaires

Avec le soutien de
Agir pour le changement démocratique en Algérie (ACDA) – Assemblée Citoyenne des Originaires de Turquie (ACORT) – APPEL-ÉGALITE – Association démocratique des Tunisiens en France (ADTF) – Association des Marocains en France (AMF) – Comité pour le Respect des Libertés et des droits de l’homme en Tunisie (CRLDHT) – Gauche Démocratique et Sociale – Gauche écosocialiste – Le mouvement National lycéen – Le Mouvement des mères isolées – Pour une écologie populaire et sociale – Révolution Écologique pour le Vivant (REV)

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Gaza, où meurt notre humanité

Oui, humanisons les nombres : 17 000 mort·es à Gaza, c’est la même proportion de la population que 400 000 mort·es en France (un quart du nombre de morts en France entre 1914 et 1918) et 2,4 millions aux Etats-Unis.

50 000 blessé·es, c’est la même proportion qu’1,3 million en France et 8,5 millions aux Etats-Unis.

C. S.

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La catastrophe humanitaire comme politique

Il y a environ un mois, le 7 novembre 2023, le président israélien Herzog a nié l’existence d’une crise humanitaire dans la bande de Gaza, déclarant : « [L]es habitant·es de Gaza savent qu’il y a la guerre, mais il n’y a pas de crise humanitaire qui ne leur permette pas de survivre ». Ces déclarations étaient sans fondement à l’époque, et elles le sont certainement encore aujourd’hui.

La vie dans la bande de Gaza est actuellement un cauchemar inimaginable et les chances de survie de ses habitants s’amenuisent de jour en jour. La bande est presque entièrement fermée depuis deux mois et la crise humanitaire bat chaque jour des records. Les organisations humanitaires n’ont plus les moyens de faire face aux retombées et peinent à trouver les mots pour décrire le désastre et les dangers qu’il représente. Il n’y a pas assez de carburant, de nourriture, d’eau et de médicaments. Il n’y a pas d’hôpitaux capables de fournir des soins médicaux aux milliers de blessé·es des bombardements incessants d’Israël sur toute la bande de Gaza, qui ont déjà tué plus de 15 000 personnes, dont environ 6 000 bébés, enfants et adolescent·es et près de 4 000 femmes.

Voici à quoi ressemble la crise :
La bande de Gaza était en proie à une grave crise humanitaire avant même que la guerre n’éclate, depuis qu’Israël l’a fermée lorsque le Hamas a pris le pouvoir. L’économie de Gaza s’est rapidement effondrée. Avant la guerre, environ 80% des habitant·es dépendaient des organisations d’aide pour leur subsistance. Le taux de chômage est monté en flèche, atteignant environ 45% dans l’ensemble de la population et 60% chez les moins de 29 ans. Dans ces conditions, il n’est pas surprenant que la situation se soit rapidement détériorée pour devenir un véritable désastre.

La surpopulation : Au début de la guerre, l’armée israélienne a ordonné aux habitant·es du nord de Gaza de se déplacer vers le sud. Des centaines de milliers de personnes ont répondu à l’appel et, selon les estimations des Nations unies, environ 1,8 million de résident·es de la bande de Gaza – soit près de 80% de la population – ont été déplacés à l’intérieur du pays. Environ 1,1 million d’entre elles et eux sont enregistré·es dans les installations de l’UNRWA dans toute la bande de Gaza, principalement dans le sud.

Les conditions dans les abris de l’UNRWA sont insupportables : Les installations sont débordées et continuent d’accueillir des personnes bien au-delà de leur capacité. Selon les rapports, des centaines de personnes hébergées dans ces installations sont forcées de partager une seule salle de bain, une douche est une denrée rare, et l’eau, la nourriture, les couvertures et les matelas sont rares. En raison de la surpopulation, les femmes et les enfants restent à l’intérieur des bâtiments, tandis que les hommes sont à l’extérieur. D’autres personnes déplacées à l’intérieur du pays (PDI) s’abritent dans des écoles, des hôpitaux et d’autres bâtiments publics, tandis que d’autres encore sont hébergées chez des proches dans des conditions difficiles, des dizaines de personnes s’entassant dans une seule maison.

La situation s’est nettement détériorée depuis la reprise des combats après le cessez-le-feu, l’armée ayant ordonné à des centaines de milliers de personnes supplémentaires de quitter leur domicile alors qu’elle tente d’entasser de plus en plus d’habitant·es de Gaza dans un espace de plus en plus restreint, sans conditions de vie élémentaires. Selon l’OCHA, l’armée a ordonné l’évacuation d’une zone couvrant environ 20% de la ville de Khan Yunis, affectant plus de 150 000 personnes, dont certaines avaient été déplacées de leurs maisons dans le nord de la bande de Gaza vers cette zone. Des dizaines de milliers de personnes ont déjà été évacuées, mais les abris qu’elles ont rejoints n’ont pas la capacité de les accueillir et de leur fournir une aide de base.

Pénurie de carburant et d’électricité : Au début de la guerre, Israël a déclaré qu’il n’autoriserait pas l’entrée de carburant dans la bande de Gaza. À partir du 18 novembre 2023, Israël a autorisé l’entrée d’une quantité limitée de carburant par jour, uniquement pour les opérations humanitaires telles que les camions de distribution de nourriture, les générateurs des hôpitaux, les installations d’eau et d’égouts, et les installations de l’UNRWA. Pendant le cessez-le-feu, qui a duré une semaine, Israël a autorisé l’entrée de quatre camions-citernes par jour.

La pénurie de carburant paralyse les infrastructures de la bande de Gaza : Israël a interrompu la vente d’électricité à Gaza le 7 octobre 2023. Quelques jours plus tard, le 11 octobre 2023, la centrale électrique de Gaza s’est arrêtée après avoir manqué de carburant. Sans électricité ni carburant pour faire fonctionner les générateurs utilisés en cas de coupure de courant, les pompes à eau sont incapables de fonctionner, et les installations de dessalement et de traitement des eaux usées ne peuvent fonctionner que partiellement, voire pas du tout, ce qui accroît le risque d’une nouvelle contamination des sources d’eau.

Pénurie d’eau et de nourriture : Les habitant·es de Gaza souffraient d’une pénurie d’eau chronique avant même la guerre. La consommation quotidienne moyenne s’élevait à 85 litres par personne et par jour, alors que le minimum recommandé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est de 100 litres par personne et par jour.

La majeure partie de l’eau de Gaza provient de l’aquifère côtier, mais la quasi-totalité de l’eau qui y est pompée est contaminée par le surpompage, l’eau de mer et les infiltrations d’eaux usées. Cette eau ne peut être consommée ou utilisée pour le lavage sans purification. Trois installations de dessalement fournissent de l’eau à environ 300 000 personnes dans la bande de Gaza. Le reste de l’eau fournie à la population avant la guerre, soit moins d’un cinquième de l’approvisionnement en eau de la bande de Gaza, était acheté à Israël.

La pénurie d’eau s’est décuplée depuis le début de la guerre. Israël a interrompu l’approvisionnement en eau qu’il vend à Gaza le 9 octobre 2023. Elle a été renouvelée une semaine plus tard, le 15 octobre 2023, mais seulement dans certaines zones du sud. Néanmoins, sans électricité, les installations de pompage ont du mal à fonctionner, tout comme les installations de traitement de l’eau et des eaux usées. En l’absence d’eau potable, les habitant·es n’ont d’autre choix que de consommer l’eau des aquifères, qui n’est pas potable. La consommation d’eau non purifiée représente surtout un danger pour les femmes enceintes, les bébés et les personnes souffrant de maladies rénales.

La pénurie d’eau empêche également le maintien d’une hygiène de base. Cette situation, associée à une surpopulation extrême, crée un risque réel d’apparition de maladies infectieuses et d’épidémies, dont les organisations humanitaires signalent déjà les premiers signes.

Les agences des Nations unies font état d’une pénurie alimentaire extrême et d’une véritable famine parmi les habitants, en particulier dans le nord de la bande de Gaza. Les boulangeries ne fonctionnent pas en raison du manque de carburant, d’eau et de farine. Les capacités de production dans la bande de Gaza sont actuellement inexistantes. Les champs et les équipements agricoles ont été endommagés par les bombardements et sont inaccessibles. Les pêcheurs ne peuvent pas non plus travailler, Israël leur ayant interdit l’accès à la mer.

Effondrement des hôpitaux : Le système de santé de Gaza était au bord de l’effondrement avant même la guerre, ne pouvant fonctionner que partiellement et incapable de fournir aux habitant·es de nombreux traitements et services vitaux. La guerre l’a complètement effondré. Selon l’Organisation mondiale de la santé, 18 des 38 centres de soins médicaux qui fonctionnaient à Gaza avant la guerre sont toujours actifs, et trois d’entre eux ne fournissent que les premiers soins.

Les hôpitaux restants fonctionnent sur une base minimale : Avec un taux d’occupation deux, voire trois fois supérieur à leur capacité, et en l’absence de lits, les patient·es sont contraint·es de s’allonger sur le sol, alors même que les médecins les soignent. Le système de santé souffre d’une pénurie d’électricité, d’eau, de médicaments et de matériel médical de base. À cela s’ajoute une pénurie de professionnel·les de la santé, et les équipes médicales en poste sont au bord de l’effondrement. L’Organisation mondiale de la santé a averti que ces conditions augmentent le risque de maladies et d’épidémies.

L’OMS a également prévenu qu’en raison des bombardements incessants, du manque de carburant et de la destruction des routes, l’accès aux hôpitaux est presque impossible, et a souligné que tant que les combats se poursuivront dans le sud, de plus en plus de résident·es seront isolé·es et auront des difficultés à accéder aux hôpitaux, alors que le nombre de victimes augmente de jour en jour.

Qu’est-ce qu’Israël a autorisé à entrer dans la bande de Gaza depuis le début de la guerre ?
Lorsque la guerre a éclaté, Israël a fermé tous les points de passage vers la bande de Gaza et a empêché l’ouverture du point de passage de Rafah, à la frontière égyptienne. Il a commencé à autoriser l’entrée de l’aide humanitaire le 21 octobre 2023, à raison de 20 camions de nourriture, d’eau et de médicaments par jour, mais pas de carburant. Progressivement, le nombre de camions entrant a augmenté pour atteindre une centaine de camions par jour. Depuis le 18 novembre 2023, Israël autorise également l’entrée de deux camions-citernes par jour, uniquement pour des besoins humanitaires.

L’aide qui arrive n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan. Avant la guerre, environ 500 camions entraient chaque jour dans la bande de Gaza. Selon l’OCHA, du 21 octobre 2023 au 23 novembre 2023, avant le début du cessez-le-feu, au moins 1 723 camions de fournitures humanitaires – à l’exclusion du carburant – sont entrés dans la bande de Gaza par le point de passage de Rafah. Cette quantité d’aide est loin de couvrir les besoins de la population.

En outre, Israël ayant coupé le nord de la bande de Gaza du sud et en raison des frappes israéliennes en cours, les organisations humanitaires signalent qu’elles sont presque incapables de distribuer le peu d’aide qui leur parvient. Elles n’ont pu atteindre le nord de la bande de Gaza pour distribuer de la nourriture, de l’eau, du matériel médical et du carburant que pendant le cessez-le-feu. Ces derniers jours, avec la reprise des combats, les organisations humanitaires ont fait état de difficultés à atteindre également la zone de Khan Yunis, et la majeure partie de l’aide ne quitte jamais Rafah et n’atteint pas les personnes qui en ont le plus besoin.

Toute l’aide entrant dans la bande de Gaza est transportée uniquement par le passage de Rafah – un passage piéton qui n’est pas équipé pour le transport de marchandises – ce qui complique l’acheminement de l’aide et limite la quantité d’aide pouvant être acheminée. De ce fait, lorsqu’Israël a augmenté le nombre de camions autorisés à entrer pendant le cessez-le-feu, il a été impossible d’acheminer toute l’aide. Les organisations humanitaires et les pays occidentaux ont demandé à plusieurs reprises à Israël d’acheminer des fournitures par le point de passage de Kerem Shalom, un point de passage commercial désigné, où environ 60% des marchandises entrant dans la bande sont transportées en temps normal, ce qui permettrait d’acheminer beaucoup plus d’aide. Israël refuse.

La crise humanitaire n’est pas un effet secondaire. Il s’agit d’une politique
La crise humanitaire qui sévit actuellement dans la bande de Gaza n’est pas un effet secondaire de la guerre, mais le résultat direct de la politique mise en œuvre par Israël. Les responsables de cette politique considèrent qu’infliger une crise humanitaire à plus de deux millions de personnes est un moyen légitime de faire pression sur le Hamas.

Le ministre de l’énergie, Israël Katz, qui a signé un ordre d’arrêt de la fourniture d’électricité à la bande de Gaza dès le premier jour de la crise, le 7 octobre 2023, a clarifié la situation : « L’aide humanitaire à Gaza ? Aucun interrupteur électrique ne sera allumé, aucun robinet d’eau ne sera ouvert et aucun camion de carburant n’entrera tant que les personnes israéliennes enlevées ne seront pas rentrées chez elles. L’humanitarisme pour l’humanitarisme et personne ne peut nous prêcher la morale ».

Cet état d’esprit s’est clairement reflété dans les réactions à la décision prise le 17 novembre par le cabinet de guerre d’autoriser l’entrée de deux camions-citernes de carburant diesel – contenant environ 60 000 litres – afin que les agences d’aide puissent faire le strict minimum et que les systèmes d’approvisionnement en eau et d’évacuation des eaux usées puissent fonctionner. Cette décision a suscité de nombreuses déclarations de colère. Le ministre des finances, Bezalel Smotrich, a écrit au premier ministre que cette décision était inconcevable et « crachait au visage des soldats de Tsahal, des otages et de leurs familles, ainsi que des familles endeuillées ». Le ministre de la sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, a déclaré : « Tant que les otages ne recevront même pas la visite de la Croix-Rouge, il est absurde d’offrir des » »cadeaux humanitaires » à l’ennemi », tandis que le président de Yisrael Beitenu, Avigdor Lieberman, a déclaré : « Les proclamations selon lesquelles aucune goutte de carburant ne devait entrer à Gaza se sont transformées en dizaines de milliers de litres entrant unilatéralement sans aucun geste humanitaire à l’égard des Israélien·nes kidnappé·es ».

Les décideurs n’ont pas tardé à répondre que cette décision ne marquait pas un changement de politique et que la pression humanitaire sur les habitant·es de Gaza se poursuivrait. Le ministre Benny Gantz, membre du cabinet de guerre, a expliqué : « Il ne s’agit pas de changer de stratégie, mais d’apporter une réponse spécifique qui serve la poursuite des combats de Tsahal. Le Premier ministre Binyamin Netanyahou a également précisé qu’ « il s’agit d’une quantité minimale de carburant d’urgence pour faire fonctionner les pompes à eau et à eaux usées sans lesquelles nous pouvons nous attendre à une épidémie immédiate. Vous devez comprendre que les épidémies nuiront à la fois aux habitant·es de la bande de Gaza et aux soldats de Tsahal qui s’y trouvent. J’insiste sur ce point : Il ne s’agit pas d’un changement de politique, mais d’une réponse limitée et localisée visant à prévenir les épidémies ».

Le 19 novembre 2023, le général de division à la retraite Giora Eiland, qui a précédemment occupé les fonctions de chef de la division des opérations et de chef du Conseil national de sécurité, a publié une tribune dans Yedioth Aharonot intitulée « Ne nous laissons pas intimider par le monde ». M. Eiland n’occupe actuellement aucune fonction officielle et ne fait pas partie des décideurs politiques responsables de la stratégie menée actuellement dans la bande de Gaza, mais ses déclarations en sont le reflet fidèle.

Dans son article, M. Eiland affirme qu’il est impossible de distinguer le Hamas des habitant·es de la bande de Gaza et qu’Israël combat « l’État de Gaza » – toutes et tous citoyens confondus -, raison pour laquelle il ne doit pas « donner à l’autre partie une capacité qui prolonge sa vie ». Bien sûr, tout le monde à Gaza sera touché, mais, dit Eiland, « qui sont les femmes « pauvres » de Gaza ? Ce sont toutes des mères, des sœurs ou des épouses d’assassins du Hamas. D’une part, elles font partie de l’infrastructure qui soutient l’organisation et, d’autre part, si elles subissent une catastrophe humanitaire, on peut supposer que certains combattants du Hamas et des commandants de rang inférieur commenceront à comprendre que la guerre est futile et qu’il vaut mieux éviter de causer des dommages irréversibles à leurs familles ». M. Eiland reconnaît qu’une telle politique pourrait provoquer une catastrophe humanitaire et de graves épidémies, mais il estime que « même si c’est difficile, cela ne doit pas nous décourager. Après tout, de graves épidémies dans le sud de la bande de Gaza rapprocheront la victoire et réduiront le nombre de victimes parmi les soldats de Tsahal ». Eiland conclut : « Il ne s’agit pas de cruauté pour la cruauté, car nous ne soutenons pas la souffrance de l’autre côté comme une fin, mais comme un moyen… Nous ne devons pas, nous ne devons tout simplement pas, adopter le discours américain qui nous donne la ‘permission’ de ne combattre que les combattants du Hamas au lieu de faire ce qu’il faut – combattre le système adverse dans son intégralité, car c’est précisément l’effondrement des civils qui rapprochera la fin de la guerre ».

L’aide humanitaire n’est ni un « geste » ni une « monnaie d’échange »
Dès le début de la guerre, les responsables israéliens ont clairement indiqué que la bande de Gaza resterait fermée tant que les otages ne seraient pas rendu·es. Dans ces conditions, le refus d’autoriser l’entrée de l’aide humanitaire dans la bande punit les résident·es pour des actes qu’elles et ils n’ont pas commis et dans lesquels elles et ils ne sont pas impliqué·es. Il est également évident qu’elles et ils n’ont aucun moyen d’exercer une influence sur les responsables de ces actions pour qu’ils libèrent les otages. En tant que tel, le bouclage de la bande de Gaza constitue une punition collective illégale à l’encontre de ses plus de deux millions d’habitant·es. Cela reste vrai même si certains d’entre elles et d’entre eux soutiennent le Hamas, comme le prétendent les responsables israéliens.

En outre, fermer les points de passage et autoriser une aide minuscule qui ne peut en aucun cas répondre aux besoins des civil·es équivaut à affamer délibérément la population. Le droit international humanitaire interdit la famine délibérée comme méthode de guerre. Cette norme a acquis un statut coutumier, ce qui signifie qu’elle s’applique à tous les pays. La violation de cette interdiction constitue un crime de guerre en vertu du Statut de Rome.

L’entrée de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza n’est pas un geste demandé à Israël à l’égard de la population civile. C’est son devoir. Selon les règles du droit international humanitaire, lorsque la population civile n’a pas les moyens de survivre, les parties au conflit ont l’obligation positive de permettre le « passage rapide et sans entrave » des fournitures humanitaires, y compris la nourriture et les médicaments. L’aide doit être acheminée de manière cohérente, de sorte que les personnes puissent compter sur le fait qu’elles la recevront également le lendemain.

Cette règle, inscrite dans le protocole additionnel (I) aux conventions de Genève, stipule que l’obligation pour une partie au conflit de laisser entrer l’aide humanitaire s’applique même lorsque ce sont les civil·es de l’autre partie qui en ont besoin. Cette obligation s’adresse aux pays dont la situation géographique est telle que le passage de l’aide à travers leur territoire « est nécessaire, ou même simplement utile ». Le commentaire de cette règle précise qu’une partie au conflit ne peut pas refuser arbitrairement le passage de l’aide humanitaire, bien qu’il soit clair que chaque partie peut superviser l’envoi et même le fouiller. L’obligation de laisser entrer l’aide humanitaire est également une norme coutumière et s’applique donc à Israël.

Refuser l’entrée de l’aide humanitaire est un crime en vertu du statut de Rome de la Cour pénale internationale de La Haye, qui stipule que le fait d’affamer délibérément la population civile en tant que méthode de guerre, y compris en refusant délibérément l’aide humanitaire, est un crime de guerre.

Israël doit autoriser immédiatement l’entrée de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza
Lors d’une conférence de presse tenue dans la soirée du 5 décembre 2023, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a laissé entendre qu’une crise humanitaire dans la bande de Gaza constituerait un problème pour Israël, d’où la nécessité d’y remédier, en déclarant : « Toute panne, qu’il s’agisse d’une maladie ou d’un problème d’approvisionnement en eau, doit être évitée : « Toute défaillance, de la maladie à la contamination de l’eau, pourrait interrompre les combats ». Le ministre de la défense, M. Gallant, a ajouté : « Nous sommes tenus d’autoriser le minimum humanitaire pour permettre à la pression militaire de se poursuivre. »

Il s’agit d’une approche cynique, tordue et instrumentale de la vie de plus de deux millions de personnes qui sont obligées ces jours-ci de rassembler toutes les forces qui leur restent pour trouver de l’eau, de la nourriture et un abri pour elles-mêmes et leurs familles afin de survivre, pendant les incessantes frappes israéliennes. Pourtant, ces déclarations sont également stupéfiantes d’honnêteté : Le Premier ministre et le ministre de la Défense admettent, devant les caméras, qu’Israël fabrique délibérément une crise humanitaire dans la bande de Gaza. Si Israël le veut, la crise sera résolue. Sinon, elle se poursuivra. C’est l’aveu d’un crime de guerre.

Israël doit autoriser immédiatement l’entrée de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza, non seulement parce que c’est la bonne chose à faire d’un point de vue moral, mais aussi parce que c’est le devoir d’Israël en vertu du droit humanitaire international, qu’il s’est engagé à respecter. L’entrée de l’aide humanitaire ne peut être soumise à aucune condition, y compris la libération des otages, comme ce fut le cas pendant le cessez-le-feu, lorsqu’Israël a autorisé l’entrée d’un plus grand nombre de camions dans le cadre de l’accord de libération des otages conclu avec le Hamas. Il est clair que le Hamas doit libérer tous les otages immédiatement et sans condition. La prise d’otages est absolument interdite, quelles que soient les circonstances, et constitue également un crime de guerre.

Israël doit permettre à l’aide d’entrer librement à Gaza, dans des quantités correspondant aux besoins de la population. Cela implique d’ouvrir le point de passage de Kerem Shalom et d’autoriser le passage des fournitures afin de pouvoir répondre de manière plus appropriée aux besoins des habitant·Ês. Les quantités devraient être déterminées par les agences d’aide qui fournissent l’assistance et connaissent les besoins de la population, plutôt que par le gouvernement israélien, qui s’en tient à un « minimum humanitaire » arbitraire.

Israël a déjà eu recours à cette politique lorsqu’il a imposé le bouclage de Gaza en 2007 après la prise de pouvoir du Hamas. En octobre 2010, à la suite d’une requête présentée par l’ONG israélienne de défense des droits de l’homme Gisha dans le cadre de la liberté d’information, il est apparu que pendant des années, Israël avait appliqué une politique délibérément restrictive reposant sur des calculs complexes de l’apport calorique minimal dont les habitant·es de Gaza ont besoin pour survivre. Cette politique était illégale et cruelle à l’époque. C’est encore le cas aujourd’hui. Les crimes de guerre commis par le Hamas lors de son horrible attaque du 7 octobre, la détention illégale d’otages et les tirs de roquettes sur les Israélien·nes tout au long de la guerre ne peuvent servir de raisonnement ou de justification au refus de fournir de la nourriture, de l’eau, des médicaments et du carburant à plus de deux millions d’êtres humains.

Le 4 décembre 2023, lorsque le cessez-le-feu a pris fin, Lynn Hastings, coordinatrice humanitaire pour les territoires palestiniens occupés, a publié une déclaration dans laquelle elle affirmait ce qui suit : « [U]n scénario encore plus infernal est sur le point de se dérouler ». Le 6 décembre 2023, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a écrit au Conseil de sécurité qu’il « s’attend à ce que l’ordre public soit bientôt complètement rompu en raison des conditions désespérées, rendant impossible toute aide humanitaire, même limitée ». Il a ajouté que « la situation se détériore rapidement pour devenir une catastrophe aux conséquences potentiellement irréversibles pour les Palestinien·nes dans leur ensemble et pour la paix et la sécurité dans la région ».

Israël doit changer sa politique horrible, détaillée dans ce document, avant que ces prédictions ne se réalisent. La profonde violation de la dignité humaine qu’incarne cette politique, la perception des deux millions d’habitant·es de Gaza comme dépourvus d’humanité, de désirs et de besoins, comme de simples pions dans le jeu de la guerre, sont injustifiables et doivent cesser.

7 décembre 2023
https://www.btselem.org/gaza_strip/20231207_humanitarian_catastrophe_as_policy
Traduit avec DeepL.com (version gratuite)

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« Cratères gigantesques, enfants morts, maisons effondrées :
dans le sud de Gaza, il n’y a nulle part où fuir »

Les bombardements et les tirs d’artillerie incessants qui ont commencé vendredi matin 1er décembre, ainsi que les messages [tracts, indications aléatoires sur les téléphones d’une population en pleine déroute, décontenancée, dans nourriture et eau !] lancés par l’armée israélienne, ont poussé les habitants de Gaza vers le sud, à Rafah, à la frontière égyptienne. Ils se déplacent également un peu plus à l’ouest, vers le front de mer de Khan Younès, même si les habitants affirment que les navires de guerre israéliens bombardent la ville depuis la mer.

La chaîne d’information Al-Jazeera fournit un flux continu d’images témoignant de la destruction à Jabaliya – [y compris dans le camp de réfugiés se situant à 3 km au nord de la ville] qui a subi son deuxième bombardement en deux jours –, dans le quartier de réfugiés de Sheikh Radwan, dans le quartier de Chadjaya, dans la nouvelle ville de Hamad [1] au nord de Khan Younès et à Khan Younès même.

Il est difficile de recenser tous les endroits où des bombardements ont été constatés. Il est très probable, à l’heure où cet article est écrit, qu’un autre endroit ait été bombardé et produise bientôt de nouvelles images de cratères géants entourés de personnes qui n’en croient pas leurs yeux.

Nous verrons peut-être aussi des nuages de poussière s’élever d’où émerge soudain un enfant hurlant et saignant, des immeubles d’habitation qui se sont effondrés jusqu’à leurs fondations et des foules d’hommes en tongs et tee-shirts tentant de sauver [à mains nues] quelqu’un de l’amas de béton et de fer.

Il y a les blessés dispersés sur la route de Salah al-Din [longue de 45 km, elle relie le poste frontière de Rafah au sud à celui d’Erez au nord] après avoir été atteints par des tirs de chars; il y a les hôpitaux avec des blessés en train de saigner et des morts sur le sol; il y a des brancards chargés de petits corps, des lits avec des enfants mutilés qui pleurent ou sont en état de choc.

Le nombre de morts annoncé par le ministère de la Santé de Gaza, contrôlé par le Hamas, ne cesse d’augmenter. Les Israéliens ne les croient pas, mais ils ne regardent pas non plus Al-Jazeera ou d’autres chaînes d’information. En effet, regarder régulièrement ces reportages crée une sensation de proximité, de présence, et cela suscite un sentiment de stupeur face au carnage. Les descriptions écrites ou verbales ne peuvent être qu’un piètre substitut.

Ici et là, on entend parler d’affrontements entre les combattants du Hamas et les troupes de Tsahal. Mais les vantardises du Hamas sur quelques APC (véhicule de transport de troupes) israéliens touchés ou des tirs de roquettes sur le Gush Dan (Tel-Aviv) n’ont rien à voir avec les cratères au cœur des quartiers dont les habitants ont été tués et où les façades des immeubles ont été déchiquetées.

Les ordres d’évacuation arrivent par le biais de tracts largués par des avions de guerre, d’annonces enregistrées interrompant les émissions de radio et de messages délivrés par le porte-parole de Tsahal en arabe [Avichay Adraee] qui n’atteignent les gens que pendant les rares moments où il y a de l’Internet.

Vendredi 1er décembre, mon amie Nora m’a écrit que l’armée ordonnait aux habitants de Gaza d’évacuer vers le sud. Elle et son conjoint ont été contraints de quitter leur maison de Beit Hanoun pour le camp de réfugiés de Jabaliya. Les offensives terrestres et les bombardements les ont accompagnés jusqu’au camp. Le conjoint de Nora a préféré attendre un jour de plus avant de décider qu’ils allaient fuir vers l’ouest et le sud en passant par le front de mer. Le samedi 2 décembre, ils se sont ravisés et ont décidé de rester. Ils avaient entendu dire que des gens étaient tués le long de l’itinéraire qu’ils comptaient emprunter et que certaines zones étaient bombardées.

Lorsque Jabaliya a été bombardée samedi, Nora m’a écrit pour me dire qu’elle s’en était approchée et qu’« ils nous jettent des grenades fumigènes pour que nous partions – mais personne n’a l’intention de partir ». Personne ne les oblige à rester, mais prendre la route vers le sud les effraie plus que de rester dans le camp bombardé. Elle a envoyé une photo d’elle sur une charrette tirée par un âne, à la recherche de nourriture. Nora a également envoyé une photo de son fils aîné et de ses petits-enfants à Berlin. Ce dernier dit que sa fille s’est réfugiée à Deir al-Balah et qu’elle «le regrette déjà», principalement en raison de la foule innombrable qui s’entasse dans le bâtiment scolaire transformé en abri et de l’humiliation de vivre avec des milliers d’autres personnes sans salle de bains, sans électricité, sans eau courante et presque sans nourriture.

Je n’ai pas eu de nouvelles de Nora ni de sa fille depuis que Jabaliya a été bombardée une deuxième fois dimanche 3 décembre. Je préfère penser que c’est parce qu’il n’y a pas d’Internet.

Dimanche après-midi, Makhra a annoncé à une amie commune qu’elle quittait Khan Younès avec toute sa famille pour se rendre dans le sud. Makhra dirige un centre féministe dans la ville qui, au début de la guerre, abritait 600 personnes déplacées. Les livraisons nourriture consistaient en 50 rations par jour, à répartir entre elles.

Qu’adviendra-t-il de ces 600 personnes ? Seront-elles évacuées une seconde fois vers Rafah ? Le district de Rafah s’étend sur 63 kilomètres carrés. Avant la guerre, environ 280 000 personnes y vivaient. La densité moyenne de la population y était l’une des plus faibles de l’enclave, avec 4 182 personnes par kilomètre carré. Selon les Nations unies, vendredi dernier, le nombre de personnes déplacées vivant dans cette zone s’élevait à environ un million. Ce chiffre inclut probablement les habitants de Rafah qui ont fui l’est du pays ou dont les maisons ont été endommagées par les bombardements des habitations voisines.

« Maintenant, ceux qui ont fui la ville de Gaza pour Khan Younès viennent à Rafah, et il n’y a pas d’endroit pour les loger », a déclaré Maher, qui a été déplacé deux fois, d’abord de la ville de Gaza à la maison familiale. Ensuite, ils ont déménagé dans la maison de son frère dans un autre quartier après que la maison voisine a été bombardée. « Nous avons de la chance », dit-il, parce qu’ils vivent dans une maison privée et non dans un abri bondé.

Combien de personnes sont entassées dans le district de Rafah aujourd’hui ? Combien de personnes les dites Forces de défense israéliennes (FDI) pensent-elles pouvoir y entasser ? Peut-être 1 100 000 ? Ou 1 300 000 ? A un million, la densité de population est de 15 873 personnes par kilomètre carré; si elle passe à 1,3 million, elle atteindra 20 634. « Serrés comme des sardines », a écrit quelqu’un à un ami qui, depuis très longtemps, vit à Tel-Aviv. Mais des sardines sans eau ni nourriture!

Maher me confie : « Pour la première fois de ma vie, je me suis inscrit pour obtenir de la farine, et j’ai eu honte. » Il s’est également enregistré en tant que personne déplacée au centre de distribution de l’UNRWA afin de recevoir un colis alimentaire. Deux fois par semaine, les personnes inscrites sur la liste reçoivent un colis contenant deux boîtes de thon et deux boîtes de petits pois. Pendant que nous parlions, on entendait des détonations – des tirs de mortier venant de l’est.

On entendait aussi d’étranges coups de feu. Il se trouve que la police palestinienne (qui relève du Hamas) a été déployée dans les centres de distribution alimentaire parce que les gens se disputent la nourriture. Il n’y en a pas assez pour tout le monde. La police tente de maintenir un semblant d’ordre et de punir les propriétaires de magasins qui arnaquent les clients en imposant la fermeture de leurs boutiques pendant un jour ou deux.

Dimanche 3 décembre, Israël a bombardé une maison située à 500 mètres de Maher. Trois habitants ont été tués. Maher n’a pensé à m’en parler que lorsque je lui ai demandé. Vivre à 300 ou même 100 mètres d’une maison bombardée est aujourd’hui considéré comme sûr [2]. « Mais nous avons tous peur», ajoute-t-il. «Ne concluez pas de ma voix calme que je n’ai pas peur. »

[1] Selon TV5Monde : « C’était le dernier quartier flambant neuf de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza. Samedi, une partie de « la ville Hamad » est partie en fumée et les déplacés qui s’y étaient réfugiés n’ont eu que quelques minutes pour partir en courant. « Au moins, on s’en est sortis », raconte à l’AFP Nader Abou Warda, 26 ans, qui se demande comment il est encore en vie, après cinq raids aériens israéliens en moins de deux minutes sur cet ensemble de 3 000 logements financés par le Qatar et inaugurés en 2016. Six immeubles beiges et jaunes, des jardins ainsi qu’une mosquée se dressaient ici. Ne restent désormais qu’un immense nuage de fumée noire, le vrombissement entêtant des avions et les cris de gens à peine visibles tant la fumée et la poussière emplissent tout, qui hurlent « Au secours ! » ou « Ambulance ! » » (Réd.)
[2] Or, un communiqué de l’UNRWA sur X (ex-Twitter), en date du 6 décembre, note : « Une autre vague de déplacements a eu lieu à Gaza. La situation empire chaque minute. Il n’y a pas de lieu de sûr. Gaza tout entière est devenue l’un des endroits les plus dangereux au monde. Il n’y a nulle part où aller, les abris sont bondés (de personnes déplacées), y compris ceux de l’UNRWA » (Réd.)

Amira Hass
Article publié sur le site Haaretz, le 6 décembre 2023 ; traduction rédaction A l’Encontre)
http://alencontre.org/moyenorient/palestine/gaza-crateres-gigantesques-enfants-morts-maisons-effondrees-dans-le-sud-de-gaza-il-ny-a-nulle-part-ou-fuir.html

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Depuis le 7 octobre, les politiciens, les journalistes et les commentateurs/commentatrices israélien·nes ne cessent de répéter au public israélien qu’il n’y a pas d’innocent·es à Gaza. Elles et ils ignorent volontairement le fait que la population de Gaza s’élève à 2,3 millions d’habitant·es, dont 40% ont moins de 15 ans.

« Il n’y a pas d’innocent·es à Gaza » n’est pas seulement une affirmation inhumaine, c’est aussi une affirmation dangereuse. La seule façon de l’interpréter est d’en faire un blanc-seing pour justifier le massacre à grande échelle d’hommes, de femmes et d’enfants de Gaza dont le seul crime est de vivre de l’autre côté de la barrière.

« Ils ont voté pour le Hamas », répètent de nombreuses personnes en Israël et dans le monde, en se référant à des élections qui ont eu lieu il y a 18 ans. La plupart de celles et ceux qui vivent aujourd’hui à Gaza n’étaient même pas né·es à l’époque, y compris les plus de 6 000 enfants dont on estime qu’elles et ils ont été tué·es au cours des dernières semaines.

Il n’existe aucun moyen de mesurer l’impact de cette rhétorique sur les opérations des FDI, mais les chiffres sont terrifiants. Les autorités israéliennes affirment que 5 000 des 16 000 Palestinien·nes tué·es jusqu’à présent étaient des agents du Hamas. Même si c’est vrai, le nombre de civil·es tué·es pour chaque agent du Hamas est stupéfiant.

D’anciens soldats des FDI qui ont participé aux combats à Gaza lors de l’opération « Bordure protectrice » en 2014 ont témoigné avoir rencontré des civil·es innocent·es qui étaient restés dans les zones que les FDI avaient jugées « stériles » après les avoir averti·es d’évacuer.

Le massacre du 7 octobre est impensable. Plus de 1 200 mort·es, 240 otages. Presque chaque Israélien·ne connaît quelqu’un·e qui a été kidnappé·e, assassiné·e, violé·e. Pourtant, des affirmations méprisantes telles que « il n’y a pas d’innocent·es à Gaza » mettent sciemment en danger les 138 Israélien·nes toujours retenu·es en otage à Gaza.

Emily Hand et Hila Shoshani – deux enfants – ont été transportées de maison en maison sous les bombardements *israéliens*. Nous avons mis en danger et continuons de mettre en danger la vie des otages, tout comme celle d’innombrables enfants, femmes et personnes âgées palestinien·nes.

Les habitant·es de Gaza sont pris au piège entre le Hamas, qui opère au sein de la population civile et des infrastructures, et la réalité quotidienne de l’occupation et du siège israéliens qui ont transformé Gaza en une prison à ciel ouvert. Ce n’est pas une raison pour ignorer ou être indifférent à leur sort. Au contraire.

Celles et ceux qui disent « il n’y a pas d’innocents à Gaza » facilitent, consciemment ou non, les plans criminels de nettoyage ethnique par le biais de transferts forcés, ainsi que les massacres de civil·es innocent·es. Les mots prononcés par les décideurs politiques deviennent des politiques. En tant qu’Israélien·nes, nous ne devons pas rester silencieuses et silencieux.

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Avner Gvaryahu, directeur exécutif
Breaking the Silence
Traduit avec DeepL.com (version gratuite)

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En ce jour de Hanoukka,
nous devons choisir de défier les forces de la vengeance.

Cela fait 63 jours que les atrocités commises par le Hamas dans le sud d’Israël ont été perpétrées et qu’Israël a commencé son assaut cauchemardesque sur la bande de Gaza. Le 7 octobre, premier jour de la guerre, était également la fête juive de Simchat Torah, qui a lieu le dernier jour de la fête de Sukkot. Aujourd’hui, deux mois plus tard, nous entamons la prochaine fête juive : Hanoukka. Mais cette Hanoukka semble plus compliquée que toutes celles dont je me souviens.

Une semaine avant le début de la fête de Hanoukka, des soldats israéliens ont fait entrer à Gaza une énorme hanoukiah, un candélabre à neuf branches allumé par les juifs du monde entier pendant les huit jours de la fête. Le soldat qui tient la caméra sourit fièrement et annonce qu’il s’agit de « la première hanoukiah à Gaza », tandis que les autres soldats autour de lui applaudissent, les décombres des maisons et des bâtiments palestiniens étant visibles à l’arrière-plan. Le journal israélien de droite Israel Hayom a fièrement titré sur la hanoukiah : « Nous chasserons les ténèbres par la lumière ». Mais voir des soldats assembler une hanoukiah sur les ruines de Gaza, où l’armée a tué plus de 17 000 Palestinien·nes au cours des deux derniers mois, a été pour moi un moment de profonde obscurité.

Cette image m’a rappelé une photo de Hanoukka prise dans un lieu et à une époque très différents : une photo sur laquelle une hanoukiah est posée sur le rebord d’une fenêtre tandis qu’à l’arrière-plan, un drapeau à croix gammée est accroché à un bâtiment. Cette photo, prise en 1931 à Kiel, en Allemagne, illustre de manière saisissante la veille de l’ascension du nazisme. Cette hanoukiah a été allumée par le rabbin Akiva Posner et sa femme, Rachel – mon grand-oncle et ma grand-tante.

Le fait que cette photo fasse partie de mes propres archives familiales m’a toujours rendu fier. Comme toute photo, elle peut être lue de différentes manières. Pour moi, elle représente un héritage de défi, l’importance de célébrer sa judéité comme un acte subversif, et l’importance de s’accrocher au rituel même face à un grave danger. Elle symbolise le pouvoir de la résistance et le courage moral, qui sont au cœur du type de judéité que je cherche à incarner.

La hanoukkiah allumée à Kiel sur fond de croix gammée est à l’opposé de la hanoukkiah allumée sur les ruines de Gaza. Alors que la hanoukkiah de Kiel célèbre le défi face à l’oppression et le caractère sacré du rituel, la hanoukkiah de Gaza glorifie la mort et la destruction.

Cette mort et cette destruction ne sont pas un accident ou une conséquence involontaire de l’opération militaire israélienne à Gaza : Les responsables israéliens ont appelé à un transfert forcé permanent des Palestinien·nes de Gaza et, comme l’a montré notre récente enquête, l’armée est pleinement consciente des pertes civiles lorsqu’elle choisit ses cibles. Dans l’opinion publique israélienne également, les appels à « raser Gaza » sont de plus en plus légitimes, tandis que la punition collective infligée aux civil·es suscite de moins en moins d’inquiétude.

En moins d’un siècle, nous sommes passés de l’allumage de bougies sur fond de génocide des Juifs et des Juives à un monde dans lequel des Juifs et des Juives allument des bougies pour affirmer, légitimer et célébrer un génocide qu’elles et ils sont eux-mêmes en train de commettre.

Réfléchir aux actes courageux de résistance et de défi juifs tout au long de l’histoire, y compris ceux de ma propre famille allumant la hanoukiah sur fond de croix gammée, devrait nous pousser, au sein de la communauté juive, à réfléchir plus sérieusement à la manière dont nous pouvons utiliser notre foi, notre tradition et notre culture pour instaurer un monde plus juste. L’histoire juive est riche d’exemples de la manière dont nous nous sommes opposés au fascisme et avons résisté au racisme tout au long de l’histoire. Se tourner vers ces exemples en ces temps difficiles peut nous aider à lutter contre la haine, la peur et la vengeance généralisées qui sont actuellement si répandues dans la société israélienne.

S’inspirer de notre histoire ne signifie pas qu’il faille romancer les moments où les Juifs et les Juives ont subi d’horribles attaques et ont été confronté·es à de graves dangers, renforçant ainsi l’image d’un Juif ou d’une Juive qui souffre constamment et qui est un·e paria par disposition et par destin. Mais la violence et le racisme qui nous ont été infligés en tant que Juifs et Juives devraient nous rappeler constamment qu’il faut chérir l’humanité par-dessus tout et résister au racisme perpétré en notre nom.

Alors que je m’apprête à allumer ma propre hanoukiah, il me semble incroyable que la guerre fasse toujours rage, que l’armée israélienne poursuive ses attaques incontrôlées sur Gaza et que des otages israélien·nes soient toujours retenu·es en captivité. En ce jour de Hanoukka, que la hanoukiah de Kiel soit un appel à célébrer et à chérir la vie.

Inspirés par le défi qu’incarne la hanoukiah de ma famille, nous devons appeler à donner la priorité au retour de tous les otages, à mettre un terme à l’immense mortalité et aux souffrances infligées aux Palestinien·nes, et à parvenir à une résolution politique qui garantisse la protection de toutes les vies humaines entre le fleuve et la mer. Nous devons exiger que les génocides appartiennent au passé et nous efforcer d’apporter la lumière parmi nous en résistant au racisme et au fascisme – y compris lorsqu’ils émanent de ceux qui prétendent parler en notre nom.

Il y a toujours une autre façon de lire l’histoire et de la brosser à rebrousse-poil pour soutenir la valeur cruciale de l’humanisme. En cette période d’horreur en Israël-Palestine, la hanoukiah de ma grand-tante et de mon grand-oncle nous enseigne à ne pas avoir peur de la dissidence et à nous battre pour chasser les ténèbres et faire entrer la lumière.

Joyeux Hanoukka,

Dana Mills
+972 magazine, Lettre du 8 décembre 2023
Traduit avec DeepL.com (version gratuite)

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Prisonnières et prisonniers politiques palestinien·nes :
l’urgence contre les crimes de guerre

Israël bombarde Gaza et la soumet à un état de siège qui a mis sa population au bord de la famine, et au cœur d’une catastrophe sanitaire. Parallèlement, il poursuit son entreprise de colonisation et de nettoyage ethnique en Cisjordanie occupée.

Une entreprise qui s’appuie sur les attaques de l’armée israélienne, des colons, le bouclage de tout le territoire, les raids contre les camps de réfugiés, les déplacements forcés.

Mais, pas seulement.

Elle s’appuie également sur les arrestations et l’emprisonnement en masse d’hommes, de femmes et d’enfants. Pas une famille qui n’ait eu au moins un de ses membres emprisonné.

Depuis le 7 octobre, cela ne fait qu’empirer avec plus de 3 000 arrestations en Cisjordanie depuis cette date.

De très nombreux témoignages décrivent l’extrême violence lors des arrestations, les tortures lors des interrogatoires. Les familles des personnes arrêtées restent jusqu’à deux semaines sans nouvelles de leur mère, père, frère, sœur. Des parents pris en otage pour contraindre leur enfant à se rendre à l’armée d’occupation.

Les témoignages sur les conditions de détention sont effroyables. Les prisonnières et les prisonniers, y compris les enfants ne sont pas traités comme des êtres humains : surpeuplement, pas de chauffage, peu de nourriture (de mauvaise qualité), couchage à même le sol, mauvais traitements, coups, torture, nudité imposée y compris lors des transferts, humiliations. Les restrictions des conditions sanitaires sont un moyen de déshumaniser ces hommes, ces femmes et ces enfants : douches limitées en temps et en nombre, change des vêtements au compte-goutte, absence de soins qui confine à la négligence médicale, y compris lorsqu’il s’agit de blessures infligées lors de l’arrestation ou les « interrogatoires » et passages à tabac quotidiens. À cela s’ajoute la privation de visite des familles.

Ce traitement inhumain, revendiqué par Israël, touche plus de 7 000 prisonnier·es, dont plus de 200 enfants, plus de 2 000 sont en détention administrative (détenu·es pour des raisons « de sécurité » sans charge ni procès), et 2 300 en attente de procès. Seul, 1/3 des détenus a été jugé. Six prisonniers palestiniens sont morts dans les prisons israéliennes depuis le 7 octobre dont certains sous les coups.

Cette stratégie de harcèlement, d’enfermement massif, de création d’une insécurité permanente pour les Palestiniens, y compris les enfants, est un instrument de l’oppression organisée d’un peuple tout entier par la terreur. C’est une pièce maîtresse du colonialisme et de l’apartheid israéliens.

Ajoutons la situation des travailleurs palestiniens originaires de Gaza. Juste après le 7 octobre, plus de 4 000 d’entre eux qui étaient sur le territoire israélien ont été arrêtés et détenus dans l’opacité la plus totale et dans des conditions effroyables. La plupart d’entre eux ont été libérés.

Depuis son intrusion dans la bande de Gaza, Israël y procède à des arrestations de masse. Les images parvenues le 7 décembre montrent les méthodes innommables exercées par une armée de criminels qui foule au pied le droit international à chaque instant.

Tout cela est contraire au droit international, y compris aux droits de l’enfant, mais cela ne soulève aucune d’indignation, aucune dénonciation de la part de la communauté internationale.

Un silence complice de la communauté internationale et des médias qui conforte le régime israélien dans l’escalade des punitions qu’il inflige à la population palestinienne, dans l’objectif de briser la résistance du peuple palestinien.

Nous demandons que la Croix-Rouge Internationale puisse d’urgence visiter les lieux de détention des prisonniers palestiniens.

Ces arrestations de masse doivent cesser, les prisonnier·es politiques palestinien·nes doivent être libéré·es. C’est une question de droit. Faut-il le répéter ? Il ne pourra y avoir de paix sans justice.
Nous exhortons le gouvernement, le Président de la République, la communauté internationale à AGIR pour mettre fin à ces crimes.

Le Bureau national de l’AFPS,
Le 8 décembre 2023
https://www.france-palestine.org/Prisonnieres-et-prisonniers-politiques-palestinien-nes-l-urgence-contre-les

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Palestine : « Déluge d’Al-Aqsa et erreur d’appréciation »

Face à cette énorme catastrophe qui est en passe de parachever la Nakba de 1948 en y ajoutant une Nakba à Gaza… il y a lieu de se demander quel type de calcul a pu se faire dans l’esprit de ceux qui ont conçu l’opération « Déluge d’Al-Aqsa » et qui les a conduits à la lancer alors qu’il était facile d’en prédire les conséquences.

À la fin du deuxième mois depuis le début de la guerre génocidaire sioniste engagée contre la bande de Gaza, le nombre de victimes de cette agression a dépassé les 24 000, en incluant les morts attestées et les autres dont les corps sont encore sous les décombres, tandis que le nombre de blessés avoisine les 40 000, dont un fort pourcentage de blessés graves et d’invalides à vie. Au cours des sept semaines qui ont précédé la trêve d’une semaine, les bombardements démentiels effectués par les Forces d’occupation et d’extermination de la Palestine et de son peuple, fallacieusement appelées Forces de « défense » israéliennes, ont détruit plus de 100 000 bâtiments dans la bande de Gaza ; elles ont maintenant entamé la destruction de ce qui reste, déplaçant l’axe principal de leur agression du nord de la bande de Gaza vers le sud. Après cette énorme catastrophe qui est en train de compléter la Nakba de 1948 par une Nakba à Gaza encore plus violente et plus acharnée que toutes celles qui l’ont précédée, alors que les meurtres et les persécutions sionistes s’intensifient en Cisjordanie, il est nécessaire d’examiner quels calculs ont pu traverser l’esprit de ceux qui ont conçu l’opération « Déluge d’Al-Aqsa », les conduisant à la lancer alors qu’il était possible de prédire ce qu’il en résulterait.

Sur ce point, il y a deux hypothèses diamétralement opposées : soit ceux qui ont planifié l’opération savaient qu’elle aboutirait à une catastrophe, telle qu’elle s’est produite jusqu’à présent et qu’elle se poursuit encore, et cela n’avait pas d’importance pour eux ; soit ils ont fait une erreur d’appréciation. La seconde hypothèse est la plus proche de la réalité, et ce à deux titres principaux. Le premier est que les planificateurs de l’opération « Déluge d’Al-Aqsa » n’ont pas pris la pleine mesure du basculement complet de la société israélienne vers l’extrême droite, qui s’incarne dans un gouvernement rassemblant tout l’éventail de la droite fasciste sioniste, du Likoud au Parti national-religieux en passant par « Pouvoir juif ». En raison de l’interaction entre cette réalité politique et la gravité de l’opération du 7 octobre, qui a dépassé toutes les opérations militaires menées précédemment par la résistance palestinienne contre l’occupation, il était inévitable que la réaction israélienne excède à son tour tout ce que l’armée sioniste avait fait auparavant, et que l’extrême droite sioniste saisisse l’occasion de ce traumatisme pour commencer à mettre en œuvre son plan visant à réaliser le « Grand Israël » en éliminant ce qui reste de la Palestine et en anéantissant son peuple par l’extermination et le déplacement, en commençant par la bande de Gaza.

La deuxième erreur d’appréciation s’est manifestée dans la façon dont les désirs ont été pris pour des réalités dans l’attente de miracles divins, selon la logique religieuse qui caractérise le « Mouvement de la résistance islamique » (Hamas) et le courant politique auquel il appartient. Cela s’est traduit par la conviction que l’opération « Déluge d’Al-Aqsa » déclencherait une guerre généralisée contre l’État d’Israël à laquelle prendraient part tous les Palestiniens, où qu’ils se trouvent, ainsi que tous les Arabes et les Musulmans. L’expression la plus claire de cette illusion se trouve dans le message audio prononcé le matin de l’opération par Muhammad al-Deif, le commandant en chef des Brigades Izz ud-Din al-Qassam, la branche armée du Hamas. Ce que Deif a déclaré alors se passe de tout commentaire. Voici des extraits de ce qu’il a dit après avoir récapitulé les crimes commis par l’Etat sioniste :

« Nous avons décidé de mettre fin à tout cela, avec l’aide de Dieu, pour que l’ennemi comprenne que le temps où ils se réjouissaient sans avoir à rendre des comptes est terminé (…). Voici le jour où vous devez faire comprendre à cet ennemi criminel que son temps est révolu (…). Combattez, et les anges combattront avec vous en avant-garde, Dieu vous soutiendra avec la cavalerie des anges et accomplira la promesse qu’il vous a faite […]. À nos jeunes de Cisjordanie, à tout notre peuple, quelles que soient les organisations auxquelles vous appartenez, ce jour est le vôtre, celui où vous devez balayer cet occupant et ses colonies de toute notre terre de la rive occidentale du Jourdain et leur faire payer les crimes qu’ils ont perpétrés tout au long de ces longues et difficiles années … À notre peuple de Jérusalem, levez-vous pour défendre votre mosquée Al-Aqsa, pour expulser les forces d’occupation et les colons de votre Jérusalem, et pour démolir les murs de séparation. À notre peuple dans l’intérieur occupé, dans le Néguev, la Galilée et le Triangle, à Jaffa, Haïfa, Acre, Lydda et Ramallah, enflammez le sol sous les pieds des occupants usurpateurs, en tuant, en brûlant, en détruisant et en bloquant les routes ».

« À nos frères de la résistance islamique, au Liban, en Iran, au Yémen, en Irak et en Syrie, c’est le jour où votre résistance fusionne avec celle de vos frères en Palestine, afin que cet horrible occupant comprenne que le temps des exactions et des assassinats de savants et de chefs religieux est terminé, que le temps du pillage de vos richesses est terminé, que les bombardements quasi quotidiens en Syrie et en Irak sont terminés, que le temps de la division de la nation et de la dispersion de ses forces dans des conflits internes est terminé. Le temps est venu pour toutes les forces arabes et islamiques de s’unir pour balayer cette occupation de nos lieux saints et de notre terre ».

« Aujourd’hui, aujourd’hui, tous ceux qui ont un fusil doivent le sortir, car le moment est venu, et ceux qui n’ont pas de fusil doivent prendre leur couteau, leur hache, leur hachette, un cocktail Molotov, un camion, un bulldozer ou une voiture […]. C’est le jour de la grande révolte pour mettre fin à la dernière occupation et au dernier régime d’apartheid dans le monde. Ô hommes et femmes justes, les meilleurs connaisseurs du Livre de Dieu, ô vous les croyants qui jeûnent et se tiennent debout, s’agenouillent et se prosternent, rassemblez-vous dans vos mosquées et vos lieux de culte, revenez à Dieu et suppliez-le de nous accorder leur mort, de nous envoyer ses fidèles anges et de réaliser par notre entremise vos espoirs de pouvoir prier à Al-Aqsa, une fois qu’elle sera délivrée […]. »

La triste vérité est que nous avons aujourd’hui une situation dans laquelle notre meilleur espoir est que la résistance armée et la pression internationale parviennent à stopper l’agression et le génocide, et à empêcher l’État sioniste de s’emparer de la totalité de la bande de Gaza, ce qui serait alors le premier pas pour s’emparer du reste du territoire palestinien.

Gilbert Achcar, 5 décembre 2023
https://gilbert-achcar.net/aqsa-flood-miscalculation
Traduit pour ESSF par Pierre Vandevoorde avec l’aide de DeepLpro.
http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article68911

El diluvio Al-Aqsa y el error de cáculo de Hamas
https://vientosur.info/el-diluvio-al-aqsa-y-el-error-de-caculo-de-hamas/

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Communiqué RAAR : solidarité avec la population civile de Gaza

Solidarité avec la population civile de Gaza !
La rupture de la trêve à Gaza est une catastrophe pour sa population civile. Certes, la pause d’une semaine a un peu soulagé les Gazaouis. Mais la reprise des combats, notamment dans le Sud, où une grande partie des habitant.es de Gaza s’est déplacée sur injonction de l’armée israélienne, les replonge dans les drames de la guerre.

Le Réseau d’Actions contre l’Antisémitisme et tous les Racismes (RAAR) a dénoncé avec force l’agression du Hamas du 7 octobre, massacre de Juif/ves le plus important depuis 1945. Les révélations de plus en plus détaillées sur les féminicides et les viols ajoutent encore à l’horreur de ce qui s’est passé ces jours-là. Le Hamas, qui se félicite de ses méfaits du 7 octobre, ne peut à nos yeux contribuer positivement à une solution satisfaisante pour le peuple palestinien.

Mais la réponse israélienne équivaut à une catastrophe pour la population civile de Gaza, qui ne peut être tenue pour responsable des crimes du 7 octobre. L’opération menée par le gouvernement Netanyahou entraîne déjà de très nombreuses morts de civil.es, dont beaucoup d’enfants, et constitue de fait un massacre sans précédent à l’égard du peuple palestinien. Ces actes ne feront qu’accroître la haine et rendre plus difficile encore l’instauration d’une paix durable et juste dans la région.

Le RAAR participe déjà et continuera à participer aux mobilisations pour un cessez-le-feu et pour l’envoi d’une aide humanitaire massive à Gaza. Mais nous rejetons des mots d’ordre comme « Libération de la Palestine de la mer au Jourdain » ou « Israël casse-toi, la Palestine n’est pas à toi », qui ne respectent nullement le droit des Juif/ves à un État. Nous appelons les mouvements de solidarité avec Gaza à refuser ces slogans provocateurs et diviseurs. Nous demandons également que la libération de tou.tes les otages soit exigée dans ces manifestations de soutien, et qu’y règne une vigilance sans faille contre tous les actes et paroles antisémites, en nette augmentation en France depuis le 7 octobre.

N’oublions pas les crimes du Hamas quand nous dénonçons la colonisation en Cisjordanie et les massacres commis à Gaza par l’armée israélienne ! Et n’oublions pas les racismes, et notamment l’islamophobie, lorsque nous combattons l’antisémitisme !

Paris, le 5 décembre 2023
https://blogs.mediapart.fr/albert-herszkowicz/blog/071223/communique-raar-solidarite-avec-la-population-civile-de-gaza

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Pour que les horreurs du carnage de Gaza soient les derniers
Purger l’État d’Israël de ses fondements sionistes !

L’enfer sur terre ! Les semaines et les mois passent et le martyre des Palestiniens de Gaza, mais aussi de ceux de Cisjordanie, continue et atteint, jour après jour, de nouveaux sommets d’horreur ! Et ce d’autant plus infâme et intolérable que le massacre se déroule devant les yeux de tout le monde, en direct sur nos écrans de télé, jour et nuit, sans interruption. Et surtout, avec la complicité active (États-Unis, UE) ou passive (Chine, Russie, Inde) des « grands » de ce monde, qui se contentent de jouer aux spectateurs, tout en prédisant que le pire est à venir ! L’horreur mêlé d’insoutenable émotion, de rage, mais aussi du plus profond dégoût…

Dégoût pour nos dirigeants occidentaux qui, ne craignent pas le ridicule le plus macabre, quand ils n’arrêtent pas d’appeler Israël à… protéger les civils Palestiniens, au moment précis où ce même Israël ne fait que les exterminer méthodiquement ! Et comble de ce ridicule macabre, le gouvernement américain qui… félicite Israël, constatant que l’armée israélienne se conforme aux souhaits américains de protéger la vie des civils palestiniens pendant que les hécatombes des ces civils Palestiniens s’accumulent et dépassent tout précédent !

Dégoût aussi pour – presque tous – nos médias et leurs journalistes qui persistent à nous parler d’une certaine « guerre entre le Hamas et Israël », quand en réalité il n’y a qu’une guerre d’extermination bien planifiée menée par Israël contre le peuple palestinien sous prétexte d’opérations militaires visant à la liquidation du Hamas, dont le crime est exactement qu’il a offert à Israël ce prétexte avec ses actions terroristes du 7 Octobre. Ces médias et leurs journalistes qui passent sous un silence assourdissant le martyre des Palestiniens au point de ne rien dire même de leurs propres collègues, ces 72 journalistes ciblés en priorité et tués à Gaza par l’armée israélienne, depuis le début de cette barbarie. Ces médias et leurs journalistes qui ne ressentent pas le besoin de protester même par solidarité professionnelle, contre les autorités israéliennes qui menacent de représailles qui vont de l’asphyxie économique à la fermeture, les quelques médias qui osent rapporter les faits bruts et donner la parole aux victimes du génocide en cours. Ces médias que nous ressentons le devoir de nommer par leur nom, le quotidien israélien Haaretz, et les chaînes télé qui font honneur au journalisme, comme la britannique BBC, et encore plus l’américaine CNN, et surtout l’arabe Al Jazeera dont les journalistes payent avec leurs vies et leur sang et le sang de leurs familles, le fait qu’ils font ce que refuse de faire l’écrasante majorité de leurs collègues des médias occidentaux, médias français en tête : rapporter fidèlement ce qui se passe sur le terrain, en donnant la parole aux victimes mais aussi a leurs bourreaux.

Dégoût donc et répulsion pour ces mêmes médias, qui donnent de plus en plus l’impression d’être en mission commandée, et qui cachent habilement derrière des phrases prétendument « neutres » faisant état des « frappes » israéliennes, la réalité quotidienne qui consiste en ces véritables exercices de tir de l’armée israélienne contre les civils Palestiniens sans défense, terrorisés, ensanglantés, affamés, assoiffés, et déjà décimés, qui errent même à pied ou à dos d’âne (!) sous une avalanche d’obus, de missiles et de bombes de 900 kilos, du nord au sud, et du sud au nord de cette minuscule Bande de Gaza, au gré du sadisme de leurs bourreaux armés jusqu’aux dents. D’un sadisme qui n’est pas du tout gratuit, mais qui fait partie intégrante de l’arrogance suprémaciste qui caractérise non seulement les actuels dirigeants mais aussi leur État, et malheureusement même la majeure partie de la société israélienne !

Nous voici donc au cœur de l’interminable tragédie palestinienne : la nature ou plutôt la raison d’être coloniale de l’État israélien lequel, faute de constitution du pays, n’est autre que celle définie par ce qui est son projet fondateur, le projet sioniste. Un projet sioniste qui ne préconise et n’admet ni la cohabitation, ni encore moins la coexistence pacifique des peuples juif et palestinien dans un État qui doit être exclusivement juif, l’État hébreu (1). Vu sous l’angle de ce projet sioniste, tout devient plus claire et compréhensible. Comme par exemple le refus persistant des dirigeants israéliens de tenir compte des avertissements de leurs alliés occidentaux que trop massacrer les Palestiniens fait naître les terroristes de demain. Ici, il ne s’agit pas d’une prétendue incapacité des dirigeants israéliens de comprendre quel est leur vrai intérêt. En réalité, c’est exactement parce que les dirigeants israéliens savent très bien quel est leur intérêt, qu’ils font tout leur possible pour créer en toute conscience et entretenir en permanence la menace terroriste ! Et ils le font en humiliant, torturant, emprisonnant et en tuant les Palestiniens des leur plus jeune age, car ils savent très bien que quand on traite quelqu’un comme un animal, on le contraint de réagir comme un animal ! Car sans ennemi et psychose de la menace extérieure qui pousse la population apeurée a s’unir derrière ses chefs, « oubliant » leurs méfaits et ses propres problèmes, il serait impossible p.ex. à Netanyahou de se maintenir au pouvoir parce que c’est bien connu que, une fois les actuelles opérations militaires terminées, il sera jugé et condamné pour sa corruption, et ira probablement terminer ses jours en prison. Mais, attention : il ne s’agit pas seulement de Netanyahou mais de l’État d’Israël lui-même lequel, plus que tout autre, a un besoin vital de la menace extérieure permanente afin de maintenir sa population, ainsi que la Diaspora, unies autour de son projet sioniste.

De même, c’est seulement en l’examinant sous l’angle du projet colonial fondateur, qu’on comprend le pourquoi de l’actuelle fureur meurtrière et destructrice de l’armée israélienne à Gaza mais aussi en Cisjordanie. Encore une fois, on n’assiste pas du tout à des « erreurs » techniques et de jugement des chefs israéliens qui seraient prétendument aveuglés pas leur rage vindicative contre le Hamas et ses crimes. En réalité, le massacre méthodique et le nettoyage ethnique des Palestiniens qui a commencé avec la liquidation de ce qui est ce véritable ghetto de Gaza, se font en toute conscience car ils correspondent aux objectifs historiques du projet sioniste : la création, par l’extermination, l’expulsion et la soumission des indigènes, d’un État exclusivement juif sur l’ensemble des terres du Grand Israël !

La conclusion est évidente : un tel État est par nature monstrueux, inhumain et… irréformable. Monstrueux non seulement pour les indigènes qu’il opprime et détruit, mais aussi pour ses propres citoyens juifs auxquels il a promis la sécurité qui leur manquait cruellement et… qu’ils n’ont jamais trouvé en Israël. Et irréformable car sa logique interne a fait que ses illusions égalitaristes et démocratiques initiales soient progressivement remplacées par des glissements successifs vers une extrême droite de plus en plus raciste et antidémocratique, pour aboutir à l’actuelle extrême droite religieuse, pogromiste, obscurantiste et fascisante sinon fasciste, au discours fanatique et messianique d’un autre age.

Alors, la solution qui s’impose crève les yeux : il faut changer cet État de fond en comble, afin de le rendre au moins « normal », « comme les autres ». En somme, il faut le de-sionistiser. ce qui ouvrirait la voie au dépassement définitif de la   solution », d’ailleurs illusoire et irréalisable, « à deux états », par la création d’un État multiethnique où pourraient cohabiter pacifiquement partageant les mêmes droits, les populations juives et palestiniennes. Cependant, la réalisation d’un tel projet n’est pas du tout facile. Dans le premier de deux cas les plus illustres qui peuvent servir de guide, la dénazification de l’Allemagne à la fin de la 2e Guerre Mondiale, a été imposé par les puissances qui l’ont vaincu sur le champ de bataille. Dans le deuxième cas, celui de l’Apartheid sud-africain, la « purification » et la « normalisation » de l’État s’est faite de l’intérieur, à l’initiative de deux populations jusqu’alors ennemies. Sur la base de ces précédents, on peut déjà exclure l’application à Israël du modèle de la dénazification allemande parce qu’il présupposerait la défaite militaire d’Israël, ce qui conduirait très probablement à un terrible bain de sang de sa population juive.

Alors, reste la variante sud-africaine qui suppose que la dé-sionistisation d’Israël vienne de son intérieur, à l’initiative de ses propres citoyens. Cette perspective n’est pas seulement plus réalisable. Elle est aussi bien plus réaliste et effective car elle serait faite sans contrainte extérieure, et donc elle aurait toutes les chances de s’enraciner et de durer dans la conscience des premiers intéressés, ses propres citoyens. Ceci étant dit, l’état actuel de la société israélienne qui fait bloc autour de ses dirigeants et de son armée refusant de se soucier du sort des Palestiniens, ne signifie du tout qu’il n’y pas des Juifs déjà décidés d’entreprendre la tache historique et si lourde de conséquences de dé-sionistiser leur pays. Ils existent bel et bien tant dans la Diaspora qu’en Israël lui-même, au grand désarroi tant des sionistes que des antisémites qui, de commun accord, s’interdisent d’accepter l’existence des juifs qui ne sont pas sionistes. Ils existent et leur militantisme humaniste et internationaliste porte déjà des résultats qui se font sentir en Israël et de par le monde. Ce sont ces admirables jeunes Juifs et Juives des mouvements antisionistes et pacifistes comme If Not Now ou encore Jewish Voice for Peace, qui en l’espace de quelques ans, ont pu démultiplier leur influence au-delà de toute prévision, au point de pouvoir mobiliser ces deux derniers mois, des milliers d’autres juifs dans des manifestations et autres actions coup de poing pratiquement quotidiennes en solidarité avec les Palestiniens de Gaza, aux États-Unis et ailleurs. Ce sont aussi ces héroïques citoyens Israéliens comme Sasha Povolotsky et ses camarades, qui vivent jour et nuit chez les paysans Palestiniens du village Al Farisiya pour les protéger des bandes de colons Israéliens, et qui n’hésitent pas de se battre contre ces commandos fascistes et de verser leur sang à coté de leurs frères Palestiniens, comme il l’ont fait il y a encore quelques jours, le 4 décembre 2023 ! (2)

Oui, il faudrait sans doute qu’ils soient aujourd’hui plus nombreux, mais il faut se souvenir qu’ils étaient peut être moins nombreux qu’eux les militants sud-africains quand ils ont commencé à lutter contre l’apartheid, avec le succès qu’on connaît. Oui, on aimerait qu’ils soient plus nombreux mais… raison de plus pour les aider avec toutes nos forces, pour populariser leur combat et leurs idées, pour construire des mouvements de solidarité avec eux et avec ceux des Palestiniens qui mènent le même combat dans des conditions encore plus difficiles. D’ailleurs, comme le dit si bien le nom qu’ils ont choisi de donner à leur mouvement If Not Now, si ce n’est pas maintenant, alors quand ?

(1) Voir l’excellent texte de Gilbert Achcar « La dualité du projet sioniste » :
https://www.monde-diplomatique.fr/mav/157/ACHCAR/58306
(2) Haaretz, Left-wing Israeli Activists Attacked While Protecting Settler-targeted West Bank Village :
https://www.haaretz.com/israel-news/2023-12-04/ty-article/.premium/left-wing-israeli-activists-attacked-while-protecting-settler-targeted-west-bank-village/0000018c-35c4-d5f2-a5cc-77d471c10000

Yorgos Mitralias

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Guerre à Gaza : lettre ouverte à Emmanuel Macron

Entete web MAN

Monsieur le Président, 

Je vous écris aujourd’hui pour vous demander d’engager tous les efforts nécessaires pour obtenir un cessez-le-feu dans la bande de Gaza. Il faut exiger du gouvernement israélien qu’il mette fin aux attaques meurtrières contre les civils palestiniens et qu’il permette un accès aux biens de première nécessité et à l’aide humanitaire à la hauteur des besoins. 

Les six jours de trêve qui se sont achevés vendredi dernier ont représenté un premier signe d’humanité après des semaines de violence indescriptible. Cependant, cette courte trêve n’a nullement permis de fournir les soins et l’assistance dont la population a besoin en urgence. Et nous sommes atterrés de constater que, passé ce court sursis, le carnage a repris de plus belle.

Nous avons été profondément émus par les massacres et les atrocités commis par le Hamas le 7 octobre. Leur ampleur et leur barbarie sans précédent sont révoltantes. Nous partageons l’angoisse des familles des 137 otages encore retenus par le Hamas.

Une guerre totale est menée en retour à Gaza par Israël, sous les yeux du monde entier.

Malgré ses affirmations, Israël ne mène pas uniquement une guerre contre le Hamas. Elle s’abat sur l’ensemble de la bande de Gaza et sa population. Israël applique aujourd’hui une doctrine militaire fondée sur le caractère disproportionné des frappes et la non-distinction entre cibles militaires et civiles, et la revendique publiquement : dès les premiers jours de l’offensive, le porte-parole de l’armée israélienne reconnaissait que cette campagne de bombardements visait à « faire des dégâts et non à être précise ». Selon les autorités sanitaires locales, plus de 15 500 personnes ont été tuées, dont plus de 6 000 enfants. Cela représente plus d’un habitant de Gaza sur 200. Et des dizaines de milliers de personnes ont été blessées. 

Les hôpitaux du nord de Gaza ont été anéantis, l’un après l’autre. Certains sont devenus des morgues, voire des ruines. Alléguant que les hôpitaux auraient été détournés de leur fonction à des fins militaires, l’armée israélienne les a bombardés, encerclés et pris d’assaut, tuant des patients et du personnel médical. Le 29 novembre, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) avait recensé 203 attaques contre des structures de santé.

Quatre membres du personnel de MSF ont été tués depuis le début de la guerre. Les soignants qui ont pu continuer de travailler l’ont fait dans des conditions inimaginables. Par manque d’anti-douleurs, de nombreux blessés sont morts dans d’atroces souffrances. En raison des évacuations forcées ordonnées par les soldats israéliens, certains médecins ont dû abandonner des blessés ou malades après avoir été confrontés à un dilemme insoutenable : sauver leur vie ou celle de leurs patients. 

S’ajoutent à cela les effets du siège complet imposé dès le début de son offensive militaire par le gouvernement israélien, qui a coupé l’approvisionnement en nourriture, en carburant, en médicaments et l’aide humanitaire dont dépendaient déjà 80% des 2,3 millions de personnes dans l’enclave en raison du blocus en vigueur depuis 2007. Si la trêve a permis d’augmenter le nombre de camions acheminés chaque jour, la reprise des combats a entraîné à nouveau leur diminution et compromet les capacités de distribution au sein de l’enclave. La disponibilité de nourriture et d’eau à Gaza est aujourd’hui minime, et ceci alors que 1,8 million de personnes déplacées vers le sud, selon les Nations unies, sont entassées dans des abris précaires et surpeuplés et que l’hiver arrive. Le 16 novembre, la Directrice générale du Programme alimentaire mondial alertait ainsi que « les civils sont confrontés au risque immédiat de mourir de faim. »

MSF a récemment envoyé une équipe internationale d’urgence dans le sud de Gaza pour soutenir ses collègues palestiniens et renforcer les capacités de prise en charge dans les hôpitaux. Ces derniers jours, nos collègues sont témoins d’importants afflux de blessés après d’intenses bombardements, y compris à proximité des hôpitaux. De nombreux blessés souffrent de blessures complexes, de traumatismes multiples, de brûlures. Ils s’entassent dans des hôpitaux surchargés et débordés où le manque de place, d’hygiène et d’équipement rend impossible l’exercice de la médecine. Tous les jours, nos équipes essaient de soigner des patients qui devraient plutôt être évacués en urgence dans des hôpitaux spécialisés, à l’abri des bombardements.

Le nord de Gaza a été rayé de la carte. Pilonné, meurtri, privé de structures médicales fonctionnelles, il est devenu un lieu impropre à la vie, inhabitable.

Après avoir enjoint la population à se déplacer vers le sud, tout laisse à croire qu’Israël s’apprête à y appliquer la même politique de destruction méthodique observée dans le nord. Plus aucun endroit n’est sûr.

Comment, dès lors, traiter les milliers de blessés ? Comment assurer les soins dont ces personnes auront besoin pendant des semaines, voire des mois ? Comment soigner sur un champ de bataille, sur un champ de ruines ? 

Les attaques indiscriminées et continues doivent cesser maintenant. 

Les déplacements forcés doivent cesser maintenant. 

Les attaques contre les hôpitaux et le personnel médical doivent cesser maintenant.

Le siège de Gaza doit cesser maintenant. 

Un cessez-le-feu durable est le seul moyen d’arrêter le massacre de milliers de civils supplémentaires et de permettre l’acheminement ininterrompu de l’assistance humanitaire. MSF demande la mise en place d’observateurs indépendants pour vérifier et faciliter l’accès adéquat aux biens et aux services essentiels à Gaza. Nous demandons également la mise en place de possibilités d’évacuation médicale sécurisées et stables vers des pays tiers, comme l’Égypte, pour des milliers de personnes souffrant de blessures graves. 

Nous avons pris acte de votre appel à « redoubler d’efforts pour parvenir à un cessez-le-feu durable »Nous vous demandons de faire suivre ces intentions d’une mobilisation à la hauteur du rôle d’acteur diplomatique influent de la France, et d’exercer la pression nécessaire à convaincre l’État d’Israël que l’arrêt de mort qu’il a signé pour la population de Gaza est inhumain et injustifiable.

C’est au nom de notre humanité commune que nous vous demandons d’agir. 

« Nous avons fait ce que nous pouvions. Souvenez-vous de nous. » Ce sont les mots écrits par l’un des médecins urgentistes de MSF sur le tableau blanc d’un hôpital de Gaza, normalement utilisé pour planifier les interventions chirurgicales.

La France pourra-t-elle en dire autant lorsque les armes se tairont et que l’ampleur de la dévastation à Gaza se révélera ?

Dr. Isabelle Defourny, 
Présidente de MSF
.  
https://www.msf.fr/actualites/guerre-a-gaza-lettre-ouverte-a-emmanuel-macron

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Réflexion sur les motivations patriarcales du Hamas et
les illusions impérialistes d’Israël et des États-Unis

En réponse à la déclaration du Comité directeur de l’IMHO sur Gaza, « Le Moyen-Orient et le monde après le 7 »octobre et la guerre d’Israël contre la Palestine », qui a été publiée le 15 octobre (https://imhojournal.org/articles/the-middle-east-and-the-world-after-october-7-and-israels-war-on-palestine/), je pense avoir une réponse à une question qui a été posée :

« Mais nous devons aussi poser une autre question : Qu’est-ce que le Hamas a réellement accompli avec son incursion du 7 octobre, aussi dramatique soit-elle ? Le Hamas pensait-il pouvoir vaincre Israël en combattant dans les rues de Gaza avec ses 35 000 combattants disciplinés ? Ou pensait-il au final que ses combattants, parce qu’ils étaient « pieux », allaient l’emporter ? A-t-il même pris en compte dans son calcul les morts massives de Palestinien·nes qu’un régime comme celui de Netanyahou ne manquerait pas d’entraîner ?

1) Et si l’objectif n’était pas de gagner en soi ? Je pense que les membres du Hamas estiment peut-être qu’il est préférable de mourir en « martyrs » ou de mourir dans la résistance plutôt que de continuer à vivre sous l’occupation.

Après tout, ce sont des fondamentalistes religieux et peut-être que dans la version de l’islam à laquelle ils adhèrent, la vie après la mort leur semble bien meilleure que la vie émasculée qu’ils mènent sous l’occupation en tant que membres d’un peuple opprimé. La pensée nihiliste fondamentaliste semble plus attrayante lorsque vous vivez dans une prison à ciel ouvert.

2) Tout au long des bombardements de Gaza le mois dernier, j’ai parfois pensé que le Hamas n’était pas si différent d’un gang de rue. J’ai grandi dans ce que l’on appelle un « ghetto » à Los Angeles, un endroit où les minorités ethniques pauvres sont isolées de la société.

Nous avons tous été élevé·es dans le patriarcat, y compris les hommes pauvres et les hommes issus d’ethnies et de nations opprimées et colonisées. Dans le patriarcat, la plupart des hommes fondent leur masculinité sur leur statut. Les hommes blancs occidentaux de la classe moyenne ne sont pas moins patriarcaux que les hommes de la classe ouvrière ou les hommes de couleur, mais ils sont capables de maintenir leur statut d’une manière plus acceptable pour le courant dominant. Cela se traduit par des carrières, la détention de pouvoir et la présence d’une petite amie ou d’une femme, comme le promet le patriarcat. Alors pourquoi les gangs existent-ils ?

Lorsque les hommes ne peuvent pas avoir un bon emploi qui leur permette de se sentir comme un pourvoyeur, ils se tournent vers d’autres moyens pour « se sentir comme un homme ». Parfois, ils se tournent vers les gangs où ils trouvent des moyens illicites d’obtenir des richesses matérielles et recourent plus généralement à la violence pour affirmer leur masculinité dans le cadre du patriarcat. (Alors que la plupart des violences patriarcales sont commises dans l’ombre afin d’être balayées sous le tapis).

Pour en revenir au Hamas, il est émasculant de faire partie d’un peuple apatride soumis à un blocus et piégé dans un gigantesque camp de concentration. Il n’est donc pas surprenant que les hommes patriarcaux se tournent vers la violence pour affirmer leur masculinité et leur statut. Sans oublier que le taux de chômage à Gaza est depuis longtemps élevé en raison du blocus économique. 

3) Je voulais juste faire remarquer que le plan probable d’Israël d’occupation permanente de Gaza est une entreprise insensée. Je me souviens avoir entendu parler, lorsque j’étais enfant, de l’ère des attentats suicides en Israël à la fin des années 1990 et au début des années 2000. Cela s’est terminé lorsque je suis entré à l’université à la fin des années 2000. Si les FDI occupent définitivement Gaza, je pense qu’elles seront confrontées à des attentats suicides sans fin.

Le gouvernement israélien se fait des illusions en pensant qu’il sera en mesure d’imposer une occupation semblable à celle de la Cisjordanie. L’histoire y est très différente. Les Palestinien·nes de Cisjordanie n’ont pas connu le même niveau de mort et de privation que les habitants de Gaza. Les Palestinien·nes de Cisjordanie ont bénéficié d’un certain niveau d’autonomie et de circulation avec le reste du monde, alors que les habitant·es de Gaza vivent sous blocus depuis 18 ans ! Avant le déclenchement de cette guerre génocidaire, ils avaient déjà beaucoup moins d’espoir que leurs homologues palestinien·nes.

Dans leur guerre de vengeance sanguinaire, les dirigeants israéliens ne voient pas qu’ils devront faire face à beaucoup de vengeance à leur tour. L’armée israélienne a subi peu de pertes pendant de nombreuses années, mais ce ne sera plus le cas si elle occupe Gaza de manière permanente.

4) L’administration Biden semble complètement choquée par l’ampleur de la sympathie pour les Palestinien·nes et par l’écart entre la position du gouvernement et l’opinion publique. Je ne suis pas sûr que la Maison Blanche considère sérieusement que le vote des Arabes-Américains dans le Michigan est en danger à cause du soutien inconditionnel de M. Biden à Israël.

Il y a plus de 300 000 personnes d’origine moyen-orientale dans le Michigan, un État clé qui a voté pour Biden en 2020. Il y a plus d’arabophones à Détroit qu’à New York ! La position agressivement pro-israélienne de Biden pourrait lui coûter l’État et l’élection l’année prochaine. Plusieurs articles ont été publiés dans les grands médias américains à ce sujet :
https://www.npr.org/2023/11/17/1213668804/arab-americans-michigan-voters-biden-israel-hamas-palestinians

5) Apparemment, l’AIPAC prévoit de dépenser 100 millions de dollars pour tenter d’évincer l’escouade, les membres progressistes du Congrès, y compris les socialistes Alexandria Ocasio Cortez et Rashida Tlaib. De toute évidence, ce sont des milliardaires d’extrême droite qui financent cela en fin de compte parce qu’ils n’aiment pas les symboles que ces femmes représentent, des socialistes qui reviennent enfin dans les couloirs du Congrès après des décennies de mise à l’écart. Il est remarquable que tant d’argent soit ouvertement dépensé de cette manière.

Cela me rappelle l’interview, il y a quelques semaines, du président israélien demandant au premier ministre britannique de bien vouloir censurer la couverture de la BBC parce qu’il n’aimait pas la façon dont la BBC présentait la guerre. Les dirigeants israéliens d’extrême droite semblent avoir perdu tout sens de la réalité en ce qui concerne leur place dans le monde et leur pouvoir relatif.

6) À ce jour, 14 000 Palestinien·nes ont été tué·es à Gaza. Israël a effectué un raid sur l’hôpital Al Shifa, le plus grand hôpital de Gaza, et y a mis fin. Israël avait affirmé que le Hamas y avait installé son centre de commandement et, en quatre jours d’occupation de l’hôpital, il n’a fourni aucune preuve à l’appui de cette affirmation. Il ne reste plus qu’un seul hôpital dans le nord de la bande de Gaza. Qui a besoin de bombarder les hôpitaux quand on peut simplement les assiéger ? Les personnes qui meurent faute de soins médicaux ne sont pas prises en compte dans le décompte des morts de la guerre.

Un épisode de propagande particulièrement absurde a été mis en scène lorsqu’Israël a apporté des couveuses à l’hôpital. L’hôpital disposait déjà de couveuses, mais elles sont inutiles sans électricité, qu’Israël continue de bloquer.

Continuons à dire la vérité, camarades. Maintenons la pression.

Rocio Lopez
Rocio Lopez est une féministe socialiste qui a vécu en Amérique latine et au Japon. Elle écrit pour le Journal de l’Organisation Humaniste Marxiste Internationale et fait également partie du Réseau de Solidarité Transnationale.
https://imhojournal.org/articles/further-response-to-the-imho-statement-on
hamas-and-the-israeli-war-on-the-palestinians/

Traduit avec DeepL.com (version gratuite)
Communiqué par P. S.

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La fin de l’humanisme

Comment les violences du 7 octobre et leurs conséquences transforment la communauté internationale.

Depuis le 7 octobre, les écrans de télévision, les sites Internet et les journaux sont remplis de deux récits contradictoires. Il y a d’abord les images de la dévastation violente et du meurtre de civil·es juifs et juives israélien·nes dans des dizaines de kibboutzim bordant la bande de Gaza par l’aile militaire du Hamas, ainsi que le choc et le chagrin d’un pays qui a fait de la sécurité sa principale préoccupation publique, politique et militaire. Il y a ensuite les images de la destruction totale de Gaza sous les bombardements incessants des forces de défense israéliennes et l’horreur d’une nouvelle Nakba pour les personnes dont les parent·es et les grands-parent·es ont survécu à l’expulsion précédente.

Ces deux récits révèlent une profonde polarisation dans la compréhension des réalités locales, régionales et mondiales sur lesquelles ils sont construits, ainsi que sur les principaux acteurs impliqués dans la violence. Pourtant, au-delà des perceptions de ces réalités et de ces acteurs et actrices, une chose est claire.

Le 7 octobre est un moment politique déterminant, non seulement pour la Palestine, Israël et le Moyen-Orient, mais aussi pour la politique de justice et de responsabilité au sens large.

Terroristes, combattants de la liberté et armées morales
Un vieux dicton dit : « Votre combattant de la liberté est mon terroriste : Ton combattant de la liberté est mon terroriste. 

Mais les « terroristes » ne sont-ils pas ceux qui massacrent sans discernement des enfants, des personnes âgées et des civils non armés dans leurs maisons, et qui prennent des otages ? Les combattants de la liberté se battent avec des armes contre d’autres forces armées ou contre des politiciens qui utilisent les forces armées pour priver d’autres personnes de leur liberté. Les combattants de la liberté ne tuent pas des enfants, des jeunes lors de concerts en plein air ou des grands-mères. L’occupation israélienne de la Palestine, qui dure depuis des décennies, ne pourra jamais servir d’excuse à une telle boucherie. Seuls des lâches sans vergogne, sans honneur, sans dignité et sans conviction perpètrent de tels crimes, et seuls ceux qui n’ont ni honneur, ni dignité, ni conviction peuvent approuver, excuser ou justifier des actes aussi horribles.

Ces actes révèlent non seulement la haine du Hamas pour les Juifs et les Juives, mais aussi son mépris total pour la vie des Palestinien·nes. Les combattants avaient-ils des illusions, étaient-ils mal informés ou mal conseillés ? Ou bien un·e juif ou juive mort·e était-iel plus important pour eux qu’un·e Palestinien·ne vivant·e ? Ceux qui ont planifié le massacre de civil·es israélien·nes le 7 octobre devaient savoir que leurs actes serviraient de prétexte à une réaction massive, impitoyable et absolument mortelle de la part d’Israël.

Et la réaction d’Israël a en effet été une terrible série de crimes de guerre. Les forces israéliennes ont détruit des quartiers entiers en bombardant des hôpitaux, des ambulances, des écoles, des églises, des mosquées, des boulangeries, des stations d’épuration d’eau et des installations électriques. Elles ont massacré sans discrimination des enfants, des personnes âgées et des civil·es non armé·es dans leurs maisons, et déplacé des centaines de milliers de personnes, en leur disant d’aller vers le sud, puis en les bombardant en route ou à leur destination. Les Palestinien·nes de Gaza ont été privés d’eau, de nourriture, de médicaments et de carburant. L’armée la plus avancée technologiquement et la plus moderne du Moyen-Orient utilise une guerre de siège médiévale.

Pendant ce temps, les politiciens israéliens répètent que l’armée israélienne est l’une des plus morales au monde parce qu’elle informe ses futures victimes qu’elles seront des victimes, parce que l’armée israélienne détruit le Hamas et non Gaza, et parce que l’armée israélienne sauvera en fait les Gazaoui·es en les débarrassant du Hamas. Israël prétend que les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité perpétrés par les FDI contre Gaza et les Gazaoui·es sont en fait des actes d’autodéfense. Ces mensonges flagrants suggèrent qu’Israël pense soit qu’il s’adresse à un public mondial d’idiot·es, soit que son armée et ses dirigeants politiques sont si puissants qu’ils sont hors de portée de toute justice. Toute objection selon laquelle la réponse aux violences du 7 octobre viole tous les principes du droit international et constitue une « punition collective » – un euphémisme pour génocide –- est accueillie avec une indignation par les forces de défense israéliennes et le gouvernement israélien. Mais leurs actes sur le terrain montrent qu’un·e Palestinien·ne mort·e est pour eux plus important qu’un·e otage vivant·e.

Israël est en mesure d’agir de la sorte parce que rien ne l’en empêche. À l’intérieur d’Israël, aucune force politique ou vague d’opinion publique n’a freiné le recours à la force aveugle. Les appels de certaines familles d’otages, qui refusent ouvertement la vengeance, n’ont pas non plus empêché les dirigeants israéliens d’agir. En dehors d’Israël, aucun acteur international puissant – institutions, agences, lois – n’a eu d’impact. Au contraire, la grande majorité des dirigeants politiques occidentaux continuent de soutenir Israël dans sa politique génocidaire à Gaza, et les États-Unis continuent d’envoyer de l’argent et des armes au gouvernement israélien.

Tout ce que les politiciens européens et américains ont accusé la Russie de faire à l’Ukraine, Israël l’a fait à Gaza, et pire encore. Mais le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou n’a pas reçu de sanctions ou de condamnations, mais des accolades et tout ce qu’il voulait, même s’il est méprisé et délégitimé comme un criminel par un grand nombre de ses propres concitoyen·nes. Rares ont été les dirigeants politiques occidentaux qui se sont ouvertement élevés contre les justifications de la guerre par Netanyahou. Bien au contraire, la majorité de ces dirigeant·es assimilent à de l’antisémitisme toute critique de la politique d’apartheid israélienne à l’égard des Palestinien·nes. Ils ont criminalisé le mouvement pacifique Boycott, Désinvestissement, Sanction et censuré les manifestations pro-palestiniennes.

Aujourd’hui, ces mêmes dirigeants envisagent de remettre la terre détruite et le peuple dévasté de Gaza entre les mains du Fatah et de son despote octogénaire Mahmoud Abbas, méprisé et délégitimé par un grand nombre de ses propres concitoyens. Les États-Unis et l’Europe ont une longue tradition de construction de l’avenir des pays qui ne sont pas les leurs. Le monde arabe, qui craint les manifestations de masse dans ses rues et qui n’est pas sûr des avantages d’être dans les petits papiers d’Israël, des États-Unis et de l’Europe, commence à peine à se réveiller et à ne plus se préoccuper de la situation des Palestinien·nes pour la forme.

L’avenir de la justice
Si le monde était différent, la révolte populaire massive à travers le monde contre le carnage à Gaza entraînerait un changement radical des politiques locales, régionales et mondiales, ainsi qu’un changement des politicien·nes. Les dirigeant·es politiques et militaires d’Israël, des États-Unis et d’un certain nombre de pays européens seraient jugé·es par un tribunal international spécial pour avoir exécuté, aidé et/ou encouragé des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et des génocides. Les planificateurs et les auteurs des meurtres du 7 octobre commis par le Hamas se trouveraient juste derrière eux sur les bancs. Abbas et sa cohorte seraient jugés, en Palestine, pour haute trahison pour avoir collaboré avec Israël contre leur propre peuple.

Rien de tout cela ne serait une nouveauté. Après tout, certaines victimes de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de crimes de génocide ont bénéficié d’une certaine justice, même si celle-ci est partielle, sélective, incomplète et lente. Des chefs d’État, des chefs militaires, des seigneurs de la guerre et d’autres auteurs d’atrocités ont fait l’objet de procès internationaux pour des crimes commis en ex-Yougoslavie, au Rwanda, en Sierra Leone, au Cambodge, au Liban et au Timor oriental. De nombreux pays ont également mis en place des tribunaux nationaux, soit indépendants des instances internationales, soit en coopération avec elles. Des commissions de vérité (et de réconciliation) ont été créées à la place ou en plus des procès, de l’Argentine et du Guatemala à l’Afrique du Sud, au Rwanda et, plus récemment, à la Colombie. Chacune de ces instances a été confrontée à des controverses, à des oppositions et à des accusations de partialité, ainsi qu’à des difficultés logistiques et financières. Chacune d’entre elles a été dénoncée par de nombreuses victimes comme étant, au mieux, décevante.

Pourtant, aucun État occidental ni aucun·e de ses dirigeant·es politiques et militaires n’a jamais été confronté à la menace, même lointaine, d’être traduit devant la justice internationale pour les personnes auxquelles iels ont porté atteinte. Leurs victimes n’ont même pas eu l’occasion d’être déçues par les procédures et leurs résultats. Pour ne prendre qu’un exemple parmi tant d’autres, l’atroce bombardement de l’Irak aurait dû justifier l’enfermement d’hommes et de femmes qui bénéficient encore des avantages des pensions du gouvernement américain au lieu d’être emprisonnés en tant que criminels de guerre.

Il est donc peu probable qu’Israël et elles et ceux qui le soutiennent soient un jour jugé·es pour les effroyables traces de sang que leurs choix ont laissées. Tout au plus pourraient-iels subir des défaites électorales, même si cela est loin d’être garanti. Benjamin Netanyahu, par exemple, a été réélu à plusieurs reprises. Dans le même temps, les tribunaux israéliens jugeront probablement les membres du Hamas capturés qui ont perpétré l’horrible massacre du 7 octobre, ce que les citoyenƒnes israélien·nes considéreront comme une justice, même si elles et ils continuent à soutenir l’assaut sur Gaza.

En raison de la certitude de l’impunité pour Israël et ses allié·es, les idées, les idéaux et les mécanismes de la justice et de la responsabilité ont changé à jamais après le 7 octobre. Dans le sillage de la déclaration américaine de « guerre contre le terrorisme », tous les dictateurs du monde ont utilisé le prétexte du « terrorisme » pour freiner ou détruire tout mouvement en faveur de la liberté, de l’égalité et de la justice. De même, les hommes politiques qui, après le 7 octobre, verront que tuer et détruire n’entraîne aucune punition, poursuivront leurs plans meurtriers sans se soucier des répercussions internationales. Tant qu’Israël ne sera pas puni, personne ne sera considéré comme dûment punissable.

Entre-temps, des générations d’Israélien·nes et de Palestinien·nes ordinaires vivront dans l’amertume, voire la rage, face à ce qui leur est arrivé, s’accusant mutuellement, cherchant à se venger, justifiant la violence par la violence, et continuant à élire des dirigeant·es qui les échangeront contre de l’argent et du pouvoir. Peu d’espace sera accordé à celles et ceux qui, dans la région et au-delà, ont tenté au cours des dernières décennies de tisser des liens entre les ennemi·es présumé·es, de voir l’humanité dans l’autre et de comprendre l’imbrication de leurs destins collectifs. Partout dans le monde, une vieille leçon retrouvera toute sa pertinence et son urgence : le pouvoir est une loi en soi et tout ce qu’il faut pour l’impunité. La politique de la force et du droit enterrera la noble idée de l’humanité commune, et une nouvelle ère de pouvoir brut s’installera.

Dubravka Žarkov, 1 décembre 2023
Dubravka Žarkov a pris sa retraite en 2018 après avoir été professeure associée en genre, conflit et développement à l’Institut international d’études sociales de l’université Erasmus de Rotterdam, aux Pays-Bas, où elle enseignait les épistémologies féministes, les théories du conflit et les représentations de la guerre et de la violence dans les médias. Elle a notamment publié The Body of War : Media, Ethnicity and Gender in the Break-up of Yugoslavia (2007) et la collection Narratives of Justice In and Out of the Courtroom, Former Yugoslavia and Beyond (avec Marlies Glasius, 2014). Elle a été corédactrice du European Journal of Women’s Studies. Elle vit à Belgrade, en Serbie
https://fpif.org/the-end-of-humanism/
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Communiqué par P. S.

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Maryam Abu Daqqa : Le voyage de retour en Palestine

La militante féministe Maryam Abu Daqqa a été arrêtée en France en novembre 2023 pour avoir défendu la Palestine libre.

Maryam Abu Daqqa, l’une des pionnières du mouvement féministe en Palestine, a été l’une des premières femmes palestiniennes à être soumise à la captivité à l’âge de quinze ans. Elle porte toujours la cause de son peuple et le droit de récupérer les terres volées dès son plus jeune âge, bien qu’elle soit poursuivie par l’occupation sioniste et déplacée hors de Palestine. Cependant, elle a continué son combat.

Pour faire entendre la voix du peuple palestinien torturé par l’autorité occupante, elle a complété son doctorat en philosophie et rédigé de nombreux articles de recherche, notamment Les effets de la torture psychologique et physique à long terme sur les prisonnières libérées et l’impact psychologique et social sur les prisonnières. de la réalité de l’autobiographie et elle a écrit des livres comme « Libérées palestiniennes : prisonnières entre réalité et espoirs » et « Participation politique des femmes en Palestine » et elle a également participé à de nombreux séminaires dans les universités palestiniennes. Elle a également représenté les prisonniers hommes et femmes lors de nombreuses conférences internationales.

Elle a été invitée en France par des organisations féministes françaises pour donner des conférences sur les droits des femmes palestiniennes, et elle a souffert des effets de l’occupation sioniste.

Cependant, elle a été arrêtée après son arrivée en France parce qu’elle défendait la Palestine et condamnait l’agression israélienne sur Gaza, et aujourd’hui le Conseil d’État français a rendu la décision. C’est injuste pour elle, car la justice administrative française donne son feu vert pour l’expulser de France, annulant ainsi la décision du tribunal administratif de Paris, qui avait suspendu l’ordre d’expulsion du ministère de l’Intérieur.

Le Conseil d’État a déclaré dans son interprétation de la décision que « le ministre de l’Intérieur a le droit d’affirmer que le juge du tribunal administratif de Paris a commis une erreur en suspendant l’expulsion » de la militante féministe Maryam Abu Daqqa, l’accusant des accusations les plus odieuses de meurtre de civils en Israël et qu’elle menace la sécurité de l’État en sa présence en France. Elle a ensuite été libérée et expulsée vers l’Égypte.

En tant que Marche Mondiale des Femmes – MENA, nous défendons les droits des femmes partout sur la Terre et exigeons une position sérieuse contre de telles pratiques qui violent les lois sur les droits humains dans le monde, ainsi que le droit d’exprimer son opinion et le droit de se défendre.

Pour dénoncer la persécution des Palestiniens dans le monde, nous publions sur Capire un extrait d’un texte de Maryam, intitulé « Le voyage du retour », envoyé par elle à la MMF-MENA. « Le voyage de retour » est le seul texte qu’elle a avec elle en ce moment, parce que toutes ses recherches et tous ses livres se trouvent dans sa maison à Gaza. Sa maison a été bombardée et tous ses livres ont été brûlés. Les attaques de la force israélienne en Palestine détruisent des vies, des communautés, des mémoires et des savoirs locaux. Cela doit cesser immédiatement et définitivement, pour laisser place à une Palestine libre et souveraine.


Voyage de retour

On dit dans les romans que les rêves ne se réalisent pas, mais ils soulagent la douleur de l’amère réalité. Ils suppriment le sentiment d’impuissance et d’impossibilité et soulagent le rêveur de l’amère réalité à laquelle il souhaite échapper. Mais mon rêve était au-delà de l’impossible puisque j’ai été arrachée de ma chère patrie de Palestine aux mains des sionistes, 24 heures après avoir quitté l’abominable prison. Ma pensée n’a jamais quitté ma terre et pendant 30 ans elle a circulé dans nos rues, à travers mon école, à travers ma maison et mon quartier, parmi mes amis, mes compagnons et tout ce à quoi ils ont été exposés, dans les quartiers où l’occupant nous a persécuté.e.s dans notre jeunesse, dans les bras de ma mère et de mon père, parmi mes sœurs et frères, parmi mes beaux et durs souvenirs… Je serrais souvent les paupières pour tenter de me réveiller du cauchemar de l’aliénation dans la réalité de l’asile forcé qui m’emportait, que les montagnes ne pouvaient supporter. Comment pouvais-je, enfant, endurer un tel tourment et un voyage aussi cruel loin de ma famille, de ma patrie et de mes proches, errant dans un pays que je ne connaissais pas, avec de nouveaux liens familiaux et des amis qu’il fallait se faire ?

(…) Plusieurs fois, je me suis réveillée avec des larmes coulant de mes yeux… Et j’avais peur de me rendormir et de faire un autre cauchemar. Je sors rendre visite à des amis restés avec moi en exil ; je profite avec eux. Nous nous réconfortons, et par une merveilleuse nuit, je n’oublierai jamais ce que cela m’a apporté… À la fin d’une visite à la famille d’un ami (Saleh Abu Anza) qui habite en face de chez moi, à minuit, je rentrais chez moi et, devant la porte de mon appartement, j’ai entendu ma voisine Umm Ali (la mère d’Ali) – qui est issue d’une famille syrienne d’immigrants du Golan qui vivent, comme les Palestiniens, la crise d’aliénation, de refuge et d’autres choses, ainsi que ma famille – m’appeler d’une voix inquiète : « Maryam, as-tu reçu un appel de ta cousine de Jordanie ? Elle veut que tu l’appelles tout de suite. »

(…) La plus belle voix que j’ai entendue en 30 ans… En elle, une chanson merveilleuse, la chanson du retour à l’étreinte de la patrie bien-aimée… À l’étreinte de ma famille, à l’étreinte de ma mère opprimée par les tourments du temps, une voix qui m’a ramenée à des souvenirs d’enfance pleins de sons et de sens. Innocence, maturité et lutte. (…) à quoi cela ressemblera-t-il ? Vais-je récupérer le passé avec sa beauté et son innocence ? Mon cœur supportera-t-il ce terrible moment ? Ma langue sera-t-elle capable de prononcer le mot « mère » ? Quelle est la nouvelle réalité ? Comment vais-je continuer ma lutte dans cette nouvelle réalité ? Est-ce que notre peuple et notre famille me reconnaîtront ? Comment vont-ils me reconnaître ? Questions successives… Quand le soleil se lèvera-t-il ? Je veux crier et remplir le monde de ma voix… Je ne supporte pas ce silence, tout le monde doit savoir que je retournerai en Palestine. Les heures passaient comme si elles étaient des éternités immobiles et le visage de ma mère était devant moi et ne me quittait pas. Je sursautais comme quelqu’un qui sursaute devant des charbons ardents…

(…) Je suis arrivée à mon bureau, le bureau des femmes… J’ai trouvé deux compagnes qui m’attendaient à moi et à d’autres compagnes… Je leur ai crié : parlez, riez, soyez heureuses… Je retournerai en Palestine… Je ne sais pas ce que j’ai dit, car les mots étaient mélangés et ne laissaient aucune place pour une réponse… Et je bougeais avec ma voix pour chanter comme si j’étais seule… mes compagnes ont été surprises et j’ai senti une étrange tristesse sur leurs visages… Que dis-tu ? Oui, je vais enfin retourner en Palestine… J’ai un permis de visite… J’ai senti que je n’étais pas équilibrée dans la transmission du message et j’ai oublié qu’elles sont mes camarades, qu’elles ont formé ma famille et qu’il leur serait difficile, malgré la joie, de me perdre subitement et sans explications préalables… Je me suis arrêtée pendant un moment et après cela, la conversation a commencé à avoir lieu… Je leur ai expliqué mes idées et j’ai entamé mes communications avec les dirigeants pour les en informer…

(…) Je suis sortie le matin sur le Pont de Jordanie et il y avait avec moi deux compagnons de l’intérieur [de la Palestine], l’un de Gaza (Magda Al-Saqqa) et l’autre de Cisjordanie (Iman Assaf), et je leur ai demandé d’attendre avant d’y aller et de me montrer ma maison… Je ne savais plus où était ma maison. Nous avons pris le bus de passagers jusqu’au Pont de Jordanie… Malgré la foule, j’étais perdue dans mes pensées, des questions sans fin me traversaient la tête et des informations me sont parvenues que, ce jour-là, la police palestinienne contrôlerait le pont. Je me suis préparée à toutes les possibilités. Je n’ai pas la patience de supporter encore une minute d’attente… L’air de mon pays pénètre dans mon corps et je ne peux pas résister ; entre moi et mon rêve, il y a une fine ligne entre deux mots, et l’un de ces mots transformera ma vie en enfer et l’autre en paradis : « non, vous n’entrerez pas pour des raisons de sécurité » et l’autre « oui, entrez dans le pays ! »

(…) Il y a des voitures particulières pour Gaza et pour la Cisjordanie et tout le monde appelle les passagers et attend qu’ils partent. Je leur ai dit, tout d’abord, que je devais appeler ma sœur jumelle et compagne Leila Khaled, pour la rassurer que j’étais entrée dans le pays. Parce qu’elle était sûre que je reviendrais vers elle. (…) Ensuite, le chauffeur m’a demandé dans quelle direction je voulais aller et je lui ai dit que l’important était qu’il m’emmène à la vitesse de l’éclair dans mon village bien-aimé. Mais je voulais passer au bord de la mer et à côté de la prison de Saraya, pour me souvenir des sales jours de mon emprisonnement, et devant mon école (école Al-Awda), d’où sont sortis les premiers groupes de guérilla… Et puis à la maison, définitivement. Le chauffeur est le frère d’un camarade du Front populaire et il y avait des frères du Fatah avec nous, et il y a eu une longue et large discussion : sur Oslo, sur le retour et sur la situation générale. Mon regard parcourait chaque grain de sable piétiné par les roues de la voiture. J’avais l’habitude de garder le sable de Gaza dans une bouteille que j’emportais partout avec moi dans ma vie, comme si j’emportais la patrie avec moi.

(…) En quelques secondes, j’ai trouvé tout le village devant moi, comme si les gens étaient sortis des tombes le jour du Jugement dernier. Je ne connaissais personne. Je ne reconnaissais personne, comme si j’avais la tête qui tournait. L’obscurité totale s’est transformée en lumière. Chaque maison était éclairée… Une grande foule. Je veux surtout voir le visage de ma mère, j’ai dû leur dire. Je veux voir ma mère. Viens avec moi. À la maison. (…) Mes camarades ont organisé la fête du retour dans la ville de Khan Yunis, et ils ont lancé des invitations à tous leurs frères, amis, camarades, et au premier rang se trouvait la famille… Les hommes, les femmes et les jeunes portaient les plus belles pièces qu’ils possédaient. Des camarades sont venus de partout et se sont rassemblés sur le lieu de la célébration. (…) J’ai pris la parole à la fin du festival pour remercier mes compagnons et mon peuple pour cette merveilleuse hospitalité. Je leur ai transmis les salutations de leurs camarades et de leur peuple de la diaspora et exprimé leur empressement à retourner une fois de plus sur le giron de la patrie, pour réaffirmer notre lutte pour achever notre rêve de retour et de pays indépendant, avec Al-Quds Al-Sharif (Jérusalem) comme capitale, tandis que nous transformons notre pays en un pays démocratique dans lequel les femmes et les hommes sont des partenaires égaux dans la lutte et sa construction.

(…) Je suis accompagnée d’une préoccupation fondamentale qui est de servir les fils et les filles de mon peuple pour faire face à l’occupation. Cette question nécessite un rapprochement et une culture unitaire, construite sur la base du partage mutuel et du rejet de tout ce qui est négatif et diviseur. J’ai senti qu’il y avait une énorme fracture culturelle à cause des conditions étouffantes auxquelles notre courageux secteur était exposé et à cause des pratiques criminelles de l’occupation. Gaza est une grande prison. Sortir de cette situation est très compliqué et tout éviter est la ligne maîtresse de la situation. J’ai donc commencé mon périple vers la télévision, les séminaires publics et populaires et les rencontres permanentes avec les gens pour trouver un langage commun et parvenir à la vérité – parce que je veux que nous prenions le bon chemin ensemble, et non pas chacun de son côté. J’ai découvert que notre peuple est merveilleux et généreux sans frontières. Ma certitude constante que notre peuple est le peuple des miracles a été confirmée, et ce n’était qu’une courte période de diligence et de travail jusqu’à ce que je trouve un écho de ma voix dans le cœur et l’esprit de notre cher peuple. La voix de votre conscience est et restera au centre de ma fierté et de mon appréciation pour ce peuple héroïque, le peuple inébranlable qui fait des miracles. Ils méritent la vie et la liberté et ils méritent un leadership respectable pour pouvoir vivre en sécurité.

Langue originale : arabe
Traduit du français par Andréia Manfrin Alves
Édition par Helena Zelic
https://capiremov.org/fr/experiences/maryam-abu-daqqa-le-voyage-de-retour-en-palestine-2/

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MSB181817

En défense de la parole de Judith Butler : Non à la censure !
Oui au débat public sur le conflit israélo-palestinien !

Le Mouvement pour une Alternative Non Violente manifeste son désaccord avec la décision de la mairie de Paris d’interdire le 6 décembre 2023 une conférence sur l’antisémitisme où devait s’exprimer la philosophe américaine Judith Butler, au nom de l’association américaine Jewish Voice for Peace (la voix juive pour la paix). Cette association se bat pour une paix fondée sur l’égalité des droits au Proche-Orient. Elle est suivie sur internet par plus de 250 000 personnes.

Judith Butler est professeure à l’université de Berkeley. Elle est docteure honoris causa de l’université de Bordeaux III. Elle se définit comme « juive anti-sioniste ». Elle est d’abord connue pour ses travaux sur le genre mais aussi pour son ouvrage récent intitulé « La force de la non-violence ».

L’argument selon lequel on ne peut parler de politique dans un local municipal doit être remis en cause car il n’y a pas de démocratie sans possibilité d’exprimer ses idées et de débattre. D’autant que l’association Jewish Voice for Peace s’est déjà exprimée en 2018 dans une salle municipale du 2eme arrondissement de Paris.

La vigueur d’une démocratie se mesure notamment par l’ouverture de l’espace public au débat. Il est de la responsabilité des pouvoirs publics de faciliter et d’encourager le débat entre personnes qui ont des convictions différentes. Cet approfondissement du débat public aide à construire la cohésion de notre société. La fermeture du débat public nourrit les frustrations et les haines.

Le Mouvement pour une Alternative Non Violente rappelle que le débat est indispensable pour faire émerger un nouveau monde de paix. Il souhaite que la mairie de Paris trouve une nouvelle occasion pour que Judith Butler et Jewish Voice for Peace puissent exprimer leur point de vue.

Le Mouvement pour une Alternative Non Violente souhaite également que les commissions compétentes de l’Assemblée Nationale et du Sénat auditionnent les forces qui travaillent pour une solution politique au conflit qui depuis 75 ans déchire le Proche-Orient.

Contacts :
Denys Crolotte, porte-parole du MAN :
denys.crolotte@sfr.fr
Robert Simon, animateur du réseau international du MAN :
robertsimon75002@gmail.com

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Edwy Plenel : Gaza, où meurt notre humanité
Ce n’est pas seulement une humanité concrète, celle des vies irrémédiablement perdues, qui se meurt au Proche-Orient. C’est l’idée même d’une humanité commune que ruine la vengeance sans frein ni limites de l’État d’Israël contre la population palestinienne de Gaza en riposte au massacre commis par le Hamas.
http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article68910

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Pour aider aux débats : Petite périodisation

Empire ottoman
Grandes migrations de populations juives à partir de la « Zone de résidence » russe 
Première guerre mondiale
Déclaration de Balfour (2 novembre 1917)
Démantèlement de l’empire ottoman, mandat britannique – 1920 (Traité de Sèvres) 
Achats de terre (fonds juifs) aux propriétaires et expulsions des travailleurs et des travailleuses palestiniennes
Migrations de populations juives et politique de peuplement (sionisme politique) plus ou moins soutenue par des Etats colonialistes comme la Grande-Bretagne ou la France
Révolte arabe de 1936-1939 en Palestine mandataire contre l’occupation britannique et le développement des implantions juives
Deuxième guerre mondiale, extermination par les nazis des populations juives d’Europe (mais pas seulement)
Fermeture des frontières de bien des Etats y compris pour les rescapé·es
Afrique/Asie. Fin de la guerre, massacres coloniaux, guerres de libération nationale, révolutions anti-colonialistes
Plan de partage de la Palestine et Résolution 181 (29 novembre 1947) :
Adoption du plan de partage : la Palestine est divisée en deux Etats indépendants, l’un arabe, l’autre juif, et Jérusalem est placée sous administration des Nations unies »
1947/1948 : Yichouv, création de l’Etat d’Israel, Nakba
Rôle de l’URSS stalinienne dans la reconnaissance d’Israel et dans l’armement des milices juives
Actes de terrorisme contre la population palestinienne, expulsions, villages rasés, etc…
Refus par Israel d’appliquer les résolutions de l’ONU dont la Résolution 194 (11 décembre 1948) : « Les réfugiés qui le souhaitent doivent pouvoir « rentrer dans leurs foyers le plus tôt possible et vivre en paix avec leurs voisins » ; les autres doivent être indemnisés de leurs biens « à titre de compensation ». 
1952 Campagne antisémite organisée par le pouvoir soviétique
1956 intervention des forces armées britanniques, françaises et israéliennes contre l’Égypte et la nationalisation du canal de Suez. Positionnement de l’Urss et des USA contre cette intervention militaire
1967 : occupation de la Cisjordanie, colonisation de peuplement adossée à l’appareil d’Etat israélien 
Refus par Israel d’appliquer les résolutions de l’ONU dont 
* Résolution 237 (14 juin 1967) : Le Conseil de sécurité demande à Israël d’assurer « la sûreté, le bien-être et la sécurité des habitants des zones où des opérations militaires ont eu lieu » et de faciliter le retour des réfugiés.
* Résolution 242 (22 novembre 1967) : Le Conseil de sécurité condamne l’« acquisition de territoire par la guerre » et demande le « retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés ». Il affirme « l’inviolabilité territoriale et l’indépendance politique » de chaque Etat de la région.
* Résolution 252 (21 mai 1968) : Le Conseil de sécurité déclare « non valides » les mesures prises par Israël, y compris l’« expropriation de terres et de biens immobiliers », qui visent à « modifier le statut de Jérusalem », et demande à celui-ci de s’abstenir de prendre de telles mesures.
* Résolution 267 (3 juillet 1969). Le Conseil de sécurité censure « toutes les mesures prises [par Israël] pour modifier le statut de Jérusalem ».
* Résolution 446 (22 mars 1979). Le Conseil de sécurité exige l’arrêt des « pratiques israéliennes visant à établir des colonies de peuplement dans les territoires palestiniens et autres territoires arabes occupés depuis 1967 », déclare que ces pratiques « n’ont aucune validité en droit » et demande à Israël de respecter la convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre.
* Résolution 468 (8 mai 1980). Le Conseil de sécurité déclare « illégales » les expulsions à l’étranger de notables palestiniens de Hébron et de Halhoul par les autorités militaires israéliennes et demande à Israël de les annuler.
* Résolution 446 (22 mars 1979). Le Conseil de sécurité exige l’arrêt des « pratiques israéliennes visant à établir des colonies de peuplement dans les territoires palestiniens et autres territoires arabes occupés depuis 1967 », déclare que ces pratiques « n’ont aucune validité en droit » et demande à Israël de respecter la convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre.
Voir pour plus de détail : https://www.monde-diplomatique.fr/2009/02/A/16775

A cette petite périodisation, il conviendrait d’ajouter les activités de l’Etat d’Israel visant à favoriser les migrations des populations juives, en particulier des pays « arabes » y compris par de probables actes terroristes organisés par le Mossad.
Sans oublier un des effets de la disparition de l’URSS, la migration vers Israël de « juifs et juives » russes

D. E.

 

Auteur : entreleslignesentrelesmots

notes de lecture

2 réflexions sur « La catastrophe humanitaire comme politique (et autres textes) »

  1. Stop à l’inhumain. Halte aux massacres en Palestine (Gaza et Cisjordanie), cessez-le-feu immédiat et permanent. Libération des otages. Arrêt de la colonisation. Protection des populations civiles sous l’égide de l’ONU
    Communiqué LDH

    Triste anniversaire pour les 75 ans de la Déclaration universelle des droits de l’Homme (DUDH) adoptée par les Nations unies le 10 décembre 1948. En effet, cela fait plus de deux mois maintenant que le cycle de violences qui s’est enclenché sur les territoires d’Israël et de Palestine est une véritable négation de cette déclaration et de tous les droits qui lui sont attachés.

    Négation des droits par l’horreur des commandos du Hamas qui ont tué, dans des actes de terrorisme d’une violence inouïe, plus de 1 200 personnes et en ont enlevé plus de 200 autres détenues comme otages. Après quelques jours de trêve, 160 personnes sont encore détenues.

    Négation des droits par le gouvernement israélien qui, par ses bombardements méthodiques, l’utilisation d’armements sophistiqués, bénéficiant d’une aide logistique et opérationnelle des Etats-Unis, frappe indistinctement les populations civiles, organise la destruction systématique d’habitations, d’hôpitaux, d’écoles et de tout bâtiments pouvant abriter les populations civiles. Celles-ci payent le prix le plus fort : plus de 16 000 morts (majoritairement des enfants, des personnes âgées et/ou malades), des dizaines de milliers de blessés. D’ores et déjà plus de 1,5 million de personnes ont été contraintes au déplacement sur un territoire de plus en plus réduit.

    Une véritable catastrophe humanitaire est à l’œuvre aujourd’hui à Gaza. Avec le manque de nourriture, d’eau et de médicaments, il y a des risques graves de famine et d’épidémies pour une population civile épuisée et abandonnée face à une puissance militaire commandée par un gouvernement qui a fait de la vengeance son crédo et foule aux pieds le droit international humanitaire.

    En Cisjordanie et à Jérusalem-Est, la population palestinienne subit les attaques conjuguées de l’armée et des colons, qui ont fait plus de 250 morts depuis le 7 octobre. Ces violences mettent en péril toute possibilité de paix future.

    Il faut arrêter ce cycle infernal de tueries et de massacres, cette course à l’abîme. Les Etats-Unis peuvent et doivent faire pression pour en finir avec la surenchère meurtrière, et d’abord en stoppant toute aide militaire au gouvernement israélien actuel.

    La France et l’Union européenne doivent user de tous les moyens diplomatiques et politiques pour exiger du gouvernement israélien un cessez-le-feu immédiat et permanent et le retour au respect du droit.

    La France, comme elle le fait déjà en Ukraine, doit soutenir l’entrée urgente des enquêteurs de la Cour pénale internationale (CPI) à Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, afin de mettre fin à l’impunité et d’établir de manière impartiale les responsabilités des belligérants dans les crimes commis contre les populations civiles.

    L’ensemble des résolutions de l’ONU doivent être enfin appliquées et il doit être mis fin à la colonisation. C’est la seule route vers la paix et la sécurité pour toutes et tous.

    La LDH (Ligue des droits de l’Homme) appelle les citoyennes et citoyens, les sociétés civiles, en France et en Europe à faire pression sur leurs gouvernants pour construire la paix, pour le droit, pour la justice.

    C’est pourquoi la LDH appelle l’ensemble de celles et ceux qui se reconnaissent dans ces valeurs à se mobiliser partout en France, samedi 9 décembre 2023, lors des manifestations pour la paix et la justice et, à Paris, lors du rassemblement place de la Sorbonne de 14h30 à 17h.

    Paris le 8 décembre 2023
    https://www.ldh-france.org/stop-a-linhumain-halte-aux-massacres-en-palestine-gaza-et-cisjordanie-cessez-le-feu-immediat-et-permanent-liberation-des-otages-arret-de-la-colonisation-protection-des-populations-civi/

  2. Le spectre de la famine hante maintenant des milliers de familles déplacées

    Les derniers développements sur la situation dans la bande de Gaza. La situation dans la bande de Gaza est Idevenue désastreuse avec un manque de stocks alimentaires, de médicaments et de carburant, et les gens ont commencé à couper des arbres pour cuisiner ce qu’ils peuvent trouver sur les marchés. Il y a beaucoup d’appels des familles à l’UNRWA que leurs enfants meurent de faim et n’ont pas de nécessités pour la vie.

    Les vols se sont propagés dans les régions, et les gens ont attaqué les entrepôts de l’UNRWA il y a deux jours et saisi le stock de farine en raison de la faim extrême. Le spectre de la famine hante maintenant des milliers de familles déplacées, ainsi que les familles qui ont accueilli les déplacés.

    Il y a une propagation généralisée des maladies de la peau en raison du manque d’hygiène et du manque d’eau pour se baigner et boire, et la population ne peut plus suivre les prix fous imposés par les commerçants pour les quelques produits disponibles sur les marchés.

    En ce qui concerne les conditions de guerre, la nuit dernière a été très chaude dans toutes les régions, en particulier à l’ouest de Nuseirat et Madinat Al-Zahra, et personne ne pouvait dormir en raison de l’intensité des bombardements et des secousses des maisons comme si un tremblement de terre se déplaçait constamment, et il y avait des cris de femmes et d’enfants accompagnant le bruit des explosions par peur intense.

    L’occupation a également commencé à répéter le scénario qu’elle a mené dans le nord de Gaza et dans la ville de Gaza, qui consistait à bombarder les réfugiés qui se réfugiaient dans les murs des hôpitaux. Hier, l’occupation a bombardé des réfugiés abrités autour des murs de l’hôpital des martyrs d’Al-Aqsa dans la ville de Deir Al-Balah, ce qui a entraîné un certain nombre de martyrs et de blessés.

    Le nombre de morts au cours des dernières 24 heures était d’environ 350, selon les statistiques du ministère de la Santé et les familles qui fuient leurs maisons en raison de l’intensité des bombardements sont forcées de lever des drapeaux blancs pour quitter leurs zones en toute sécurité, mais les soldats de l’occupation séparent les femmes et les enfants des hommes et laissent les femmes passer pendant qu’ils emmènent les hommes pour les exécuter, et ainsi de suite…

    L’occupation et ses partisans ont violé toutes les conventions internationales et les valeurs humanitaires.

    Abu Amir, le 8 décembre 2023 au matin
    https://agencemediapalestine.fr/blog/2023/12/08/le-spectre-de-la-famine-hante-maintenant-des-milliers-de-familles-deplacees/

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