Contre la toxicité d’un système organisé de privilèges

Économie toxique« Nous nous sommes donné le défi d’examiner ces pratiques économiques, qui sont parfaitement courantes, sur lesquelles on a presque cessé de réfléchir tant elles font partie de notre paysage, mais qui demeurent fondamentalement nocives. Si elles persistent, c’est que des individus en tirent avantage. Seulement, ces avantages sont loin d’être partagés, et se transforment même en travers et en nuisance pour toutes les autres citoyennes. »

Dans leur introduction, Bernard Elie et Claude Vaillancourt présentent les dix thèmes qui seront traités dans le livre : L’enseignement d’une pensée unique en économie, La spéculation, son morcellement, ses conséquences, La création de la monnaie par les banques privées, Les paradis fiscaux, Le lobbyisme comme mode de gouvernement, L’exploitation sans limites des énergies fossiles, L’étalement urbain, La baisse de revenu des ménages, L’obsolescence programmée, La quête constante de la croissance.

Lire l’introduction, publiée avec l’aimable autorisation de M éditeur : Introduction à l’ouvrage : L’économie toxique, spéculation, paradis fiscaux, lobby, obsolescence programmée…

Sommaire :

Introduction, Bernard Élie et Claude Vaillancourt

La pensée unique dans l’enseignement de l’économie à l’université, Sylvie Morel

L’excroissance de l’économie financière à l’ère du capitalisme avancé, Eric Pineault

La création monétaire par les banques privées : un rôle trop important, Bernard Élie

Le recours aux paradis fiscaux, Claude Vaillancourt

Les lobbies au pouvoir, Alain Deneault

Énergies fossiles – extraire ou ne pas extraire ?, Dominique Bernier

L’étalement urbain/l’urbanisme déréglementé, Anne Latendresse

La montée des inégalités de revenus, Pierre Beaulne

Pour mieux comprendre l’obsolescence programmée, Union des consommateurs

Les mirages de la croissance, Yves-Marie Abraham

Conclusion, Bernard Élie et Claude Vaillancourt

Je ne citerai que certains éléments, sans aborder l’ensemble des thèmes traités.

Je souligne pour commencer un point, rarement traité, celui du caractère essentiellement privé de la création monétaire. Comme l’écrit Bernard Élie : « Les banques ont le privilège d’émettre de la monnaie en accordant des crédits à l’économie. Ces émissions monétaires sont des paris sur l’avenir, sur une production future ». L’auteur analyse « la contrainte de liquidité » et « la contrainte de crédit, le fameux « Trop grosses pour faire faillite ! (« Too big to fail ») ». Lire sur ce sujet l’indispensable livre d’Eric Toussaint : Bancocratie, Editions Aden – CADTM, Retirer la licence bancaire aux banques coupables de crimes, poursuivre en justice leurs dirigeants et grands actionnaires 

Les propositions de Bernard Élie rejoignent celles de cet auteur : limiter la dimension des établissements, les états ne doivent plus être assureurs tous risques des établissements financiers, principe de responsabilité des acteurs financiers et de leurs actionnaires, recloisonement du secteur…

Eric Pineault parle de l’excroissance de l’économie financière. Il indique, entre autres, « D’abord, ces banques ont la capacité d’organiser la nouvelle structure de la circulation financières sur une base mondiale et d’y introduire des instruments de plus en plus liquides et complexes. Ensuite, elles lient la circulation industrielle à la circulation financière, en arrimant la première aux dynamiques instables et spéculatives de la seconde. Elles concentrent un nombre de plus en plus petit d’organisations qui deviennent de plus en plus puissantes pour la formation de groupes bancaires mondiaux, qui proviennent à l’origine de banques et d’institutions nationales. Enfin ces banques ont la capacité de contrôler les régulations censées encadrer leurs pratiques, par le biais d’un travail incessant de lobbying et de chantage auprès des autorités nationales et internationales ».

J’ai notamment apprécié les articles sur les paradis fiscaux (dont la nécessité de s’attaquer au secret bancaire), sur les énergies fossiles (hydrocarbures conventionnels et non conventionnels), l’étalement urbain (processus de sub-urbanisation).

L’Union des consommateurs propose une analyse détaillée de l’obsolescence programmée. Les auteur-e-s parlent de « prêt-à-jeté », d’obsolescence (par incompatibilité, indirecte, par péremption, par notification, par défaut fonctionnel, subjective, écologique…). Elles et ils proposent une transformation du consommateur et de la consommatrice en consommacteur et consommactrice et avancent un programme de « réduire, récupérer, recycler, réparer et partager ».

Des auteur-e-s expliquent, avec un vocabulaire ordinaire, quelques éléments du fonctionnement de notre « l’économie toxique ». Si certains points me semblent très discutables, comme par exemple la charge contre l’école obligatoire, l’ensemble est cependant très bien argumenté. Un livre à mettre entre toutes les mains.

Des mêmes auteurs : Sortir de l’économie du désastre, austérité, inégalités, résistances, M éditeur 2012, L’État comme organe de propagation de réflexes marchands dans l’ensemble des sphères de la vie sociale

De Claude Vaillancourt : L’empire du libre échange, M éditeur 2014, Les accords de libre-échange constitutionalisent, en quelque sorte, le capitalisme

Bernard Elie et Claude Vaillancourt (coordinateurs) : L’économie toxique. 

spéculation, paradis fiscaux, lobby, obsolescence programmée…

M Éditeur, Saint-Joseph-du-Lac (Québec) 2014, 148 pages

Didier Epsztajn

Auteur : entreleslignesentrelesmots

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