L’impérialisme russe et ses monopoles

Il est largement admis que l’accélération de la rivalité entre les grandes puissances – les États- Unis, la Chine, l’Union européenne, la Russie et le Japon – est un élément clé de la politique mondiale et le restera dans un avenir prévisible. Il est donc urgent que les forces progressistes aient une vision claire du caractère des puissances impliquées, ce qui exige une analyse concrète des caractéristiques politiques, économiques et militaires de ces puissances qui aille au-delà d’une dénonciation de la politique intérieure et étrangère réactionnaire de leurs gouvernements respectifs [2]. Malheureusement, de larges secteurs de la gauche n’adoptent pas une position de principe d’opposition à toutes les puissances impérialistes [3] Dans le cas de la Chine, un certain nombre d’intellectuels « communistes » et de revues bien connues comme Monthly Review non seulement nient le caractère stalinien-capitaliste de son régime, mais le glorifient honteusement en le présentant comme une sorte de « socialisme [4] ». Alors que ces partisans sino-stalinophiles du régime Xi n’oseraient pas qualifier la Russie de Poutine en des termes aussi roses, ils continuent à affirmer qu’elle n’est pas une puissance impérialiste (et qu’elle est donc supposée être un moindre mal par rapport à ses rivaux occidentaux). Il s’agit d’une discussion qui présente non seulement un intérêt théorique, mais aussi une importance politique, comme l’a démontré l’incident de tir en mer Noire entre un destroyer de la marine britannique et les forces russes, en juin de l’année dernière.

Pour justifier ces affirmations, les défenseurs de ce point de vue font souvent référence à la faiblesse relative de l’économie russe par rapport aux États-Unis ou à l’Europe occidentale. Dans l’article qui suit, je ne traiterai pas de tous les aspects de l’impérialisme russe mais me concentrerai sur certaines caractéristiques de son économie [5]. À cette fin, je résume les conclusions d’une étude approfondie que j’ai publiée récemment [6].

Qu’est-ce qui rend une puissance impériale impérialiste ?
Du point de vue de la théorie marxiste de l’impérialisme, il est erroné de réduire l’analyse d’un État impérialiste au volume de ses exportations de capitaux. Certes, c’est un critère important mais loin d’être le seul. Historiquement, certains États impérialistes ont eu une économie forte ainsi qu’une armée puissante, tandis que d’autres puissances, plus arriérées, ont été caractérisées par les marxistes comme impérialistes malgré un montant relativement faible d’exportations de capitaux ou pas d’exportations nettes de capitaux du tout. La Russie d’avant 1917, l’Italie, l’Autriche-Hongrie et le Japon en sont des exemples [7].

Les théoriciens marxistes tels que Lénine étaient pleinement conscients de la faiblesse économique de la Russie tsariste. Mais ils ont abordé la question de l’impérialisme non pas d’une manière mécaniste et économiste, mais plutôt selon une méthode dialectique. Ainsi, Lénine écrivait en 1916 :

« Le dernier tiers du 19e siècle a vu le passage à la nouvelle ère impérialiste. Le capital financier jouit du monopole non pas d’une, mais de plusieurs, quoique très peu nombreuses, grandes puissances. (Au Japon et en Russie, le monopole de la puissance militaire, de vastes territoires ou de facilités spéciales pour dépouiller les nationalités minoritaires, la Chine, etc., complète en partie, et rem- place en partie, le monopole du capital financier moderne et actualisé.) [8] »

La théorie marxiste classique de l’impérialisme ne s’est jamais limitée à la question des exportations de capitaux ou au domaine économique en général. Le caractère impérialiste d’un État donné ne repose pas sur un seul critère (comme le volume des exportations de capitaux) mais plutôt sur la totalité de ses caractéristiques économiques, politiques et militaires. Ainsi, une définition scientifique d’un État impérialiste serait « un État capitaliste dont les monopoles et l’appareil d’État occupent une position dans l’ordre mondial où ils dominent avant tout les autres États et nations. Par conséquent, ils obtiennent des sur-profits et d’autres avantages économiques, politiques et/ou militaires d’une telle relation basée sur la surexploitation et l’oppression ».

Les monopoles nationaux dominent le marché russe
Contrairement à l’Allemagne ou au Japon, la Russie est une superpuissance militaire, mais pas dans le domaine économique. Elle est la deuxième plus grande puissance militaire, juste derrière les États-Unis. Son inventaire total d’ogives nucléaires est de 6255 (les États-Unis en ont 5550), et sa part des exportations mondiales d’armes est de 20% (seulement derrière les États-Unis, qui en ont 37%) [9].

Cependant, en termes de monopoles et d’exportation de capitaux, la Russie n’a pas une position aussi forte. Selon la dernière édition de la liste Forbes Global 2000, l’Allemagne compte six sociétés parmi les 100 premières, la France, quatre, la Grande-Bretagne, trois et la Russie, deux [10]. D’autres listes classent la Russie encore plus bas.

Néanmoins, le caractère impérialiste de la Russie peut être déduit non seulement de ses caractéristiques militaires mais aussi économiques. Le point de départ de l’analyse marxiste de l’impérialisme est la domination des monopoles. Divers gauchistes pro-russes qualifient cet état de « dépendant » ou « périphérique » et suggèrent que la Russie est soit dominée soit dépendante de monopoles étrangers (sociétés, banques, etc.). Or, c’est faux. L’économie de la Russie est principalement dominée par le capital monopolistique russe. Un livre récent arrive à la conclusion que « la proportion d’investissements dans les sociétés russes, étrangères et en joint-venture est restée la même au cours des cinq dernières années : 86,3%, 7,3% et 6,4%, respectivement [11] ».

C’est également le cas dans le secteur bancaire. En fait, la part des capitaux étrangers dans le secteur bancaire russe a diminué au cours de la dernière décennie, selon un autre ouvrage publié récemment :

En octobre 2018, 150 banques étrangères opé- raient en Russie, dont 63 banques sous contrôle étranger avec une participation étrangère de 100% ; 17 banques sous contrôle étranger avec une participation étrangère de 51 à 99%; et 70 banques étrangères avec une participation au capital inférieure à 50%. Le nombre de banques étrangères a régulière- ment diminué de 2014 à 2018, ce qui suggère que les investisseurs étrangers pourraient reconsidérer leurs plans d’investissement en Russie. Les banques sous contrôle étranger avec des parts étrangères de 51 à 99% et les banques étrangères avec une participation au capital de moins de 50% ont diminué de 63% et 54%, respectivement. La part des banques étrangères dans le capital social total du secteur bancaire russe est passée de 23% en 2014 à 13,44% en octobre 2018. Il convient de noter qu’environ 11 % des banques étrangères sont contrôlées de manière significative par des résidents russes [12].

En outre, la Russie n’a pas de dettes importantes envers les institutions impérialistes étrangères (contrairement à de nombreux pays semi-coloniaux). Sa dette publique ne représentait que 18% du produit intérieur brut (PIB) à la fin de 2020. Ses comptes courants sont régulièrement excédentaires, et ses réserves de devises internationales s’élevaient à 596 milliards de dollars à la fin de 2020 (ce qui en fait l’État possédant la cinquième plus grande réserve de devises étrangères au monde) [13].

Il convient de souligner que le capitalisme russe diffère du « modèle » occidental dans la mesure où l’État occupe une position cruciale. Un nombre considérable de ses monopoles représentent un mélange d’actions publiques et privées; le capitalisme d’État est donc une caractéristique essentielle de l’économie russe. Selon une étude récente du Fonds monétaire international (FMI), la part de l’État russe dans l’économie (calculée en tant que PIB) en 2016 se situait entre 30 et 35%. Le rapport poursuit : « Si l’on tient compte de la taille du secteur informel en termes de valeur ajoutée et d’emploi, la part de l’État russe augmente considérablement, pour atteindre près de 40% de l’activité du secteur formel et moins de 50% de l’emploi dans ce secteur [14]. »

Les exportations de capitaux de la Russie et les « allers-retours ».
Le volume des investissements directs étrangers (IDE) en Russie est important, même si les statistiques officielles posent plusieurs problèmes. Commençons par la liste des quinze premiers pays qui reçoivent des IDE russes par rapport aux nations d’où proviennent les IDE en Russie. Dans le tableau 13, nous voyons le stock de capital accumulé pour chacun des quinze premiers pays dans chaque catégorie en 2013 et 2018.

Comme le lecteur le reconnaîtra, cette liste com- prend un certain nombre de destinations bien connues en tant que paradis fiscaux offshore: Chypre, les îles Vierges britanniques, les Bahamas, les Bermudes, Jersey, etc. De même, les Pays-Bas sont également un paradis fiscal très apprécié des oligarques. Toutefois, cela ne signifie pas nécessairement que les IDE russes vers ces destinations sont simplement des fuites de capitaux. Comme le montre le tableau, il existe également un volume important d’IDE provenant de ces mêmes paradis fiscaux. Les économistes appellent cela le « round-tripping ». Les capitalistes russes « investissent » dans des destinations offshore étrangères et, à leur tour, investissent depuis ces destinations en Russie. Par conséquent, l’aller-retour conduit à une surestimation des IDE russes dans les deux sens. L’une des principales raisons pour lesquelles les multinationales russes « investissent » dans ces destinations offshore est de minimiser les impôts. En outre, les monopoles russes utilisent également ces destinations offshore pour leurs investissements étrangers dans des pays tiers. Par conséquent, une part non négligeable des « investissements étrangers » en Russie sont en fait des investissements russes (« retour au pays » dans des conditions fiscales plus favorables). En outre, les sociétés russes réalisent également des investissements étrangers dans d’autres pays à partir de ces centres offshore [15]. De toute évidence, ces complications rendent difficile l’estimation des véritables investissements étrangers russes et des investissements étrangers en Russie. Kari Liuhto […] arrive à la conclusion « qu’on pourrait probablement réduire le stock officiel d’IDE de la Russie de 40 à 50%, pour découvrir la véritable taille du stock d’IDE de la Russie [16] ».

Le régime de Poutine tente de réduire le montant des allers-retours de capitaux afin d’augmenter les recettes fiscales de l’État. Si les allers-retours existent toujours, ils semblent avoir été réduits [17].

L’énorme quantité d’investissements étrangers aller-retour en Russie a souvent été citée comme un exemple de la faiblesse du capital russe et comme une preuve de son caractère non impérialiste. Mais, comme je l’ai expliqué dans d’autres ouvrages, la Russie n’est pas le seul pays dont les capitaux affluent vers les centres financiers offshore. De nouvelles recherches confirment fortement cette évaluation. Une étude cite un rapport sur la finance offshore publié par The Economist, selon lequel le monde compte 50 à 60 paradis fiscaux, domiciliant plus de 2 millions de sociétés de papier, ainsi que des milliers de banques, de fonds et d’assureurs. Le rapport estime que plus de 30% des investissements directs étrangers mondiaux sont comptabilisés dans les paradis [18]. Une autre étude estime que la part de ces « IDE fantômes » a augmenté pour atteindre 40% de tous les IDE mondiaux [19] ! Ces « IDE fantômes » sont une caractéristique non seulement des économies faibles du « tiers-monde », mais aussi des États impérialistes où la plupart des capitaux ont leur siège [20].

Les multinationales de Russie
Traitons maintenant des principaux monopoles russes qui investissent à l’étranger. Le tableau 27 montre une liste publiée par la conférence des Nations unies sur le commerce et le développement où figurent les quinze plus grands monopoles non financiers russes classés en fonction de leurs actifs à l’étranger. Plusieurs faits notables ressortent de ce tableau. D’abord, nous voyons que les sociétés d’État jouent un rôle important, mais que les monopoles privés dominent (neuf sur quinze). Ensuite, le secteur du pétrole et du gaz et la métallurgie jouent un rôle de premier plan dans les investissements russes à l’étranger. Cependant, les monopoles russes jouent un rôle dans un large éventail de secteurs d’activité, tels que les machines, l’électricité, les produits chimiques, les denrées alimentaires, les télécommunications, les technologies de l’information, les transports, les banques et les médias [21].

La surexploitation par les monopoles russes
Comme les autres monopoles impérialistes, le capital russe investit à la fois dans les États impérialistes et dans les pays semi-coloniaux. Pour les raisons mentionnées ci-dessus (« aller-retour» ), il est difficile de se faire une idée précise des destinations des exportations de capitaux russes.

L’Institut de l’économie mondiale et des relations internationales – l’un des groupes de réflexion les plus prestigieux de Russie – a tenté d’identifier les principales destinations des exportations de capitaux russes. Il est arrivé à la conclusion suivante concernant les investissements étrangers dans les pays d’Eurasie en dehors de la Communauté semi-coloniale des États indépendants (CEI) : « [À] la fin de 2016, les principales destinations en Eurasie hors CEI étaient l’Italie, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, la Turquie, la Suisse, l’Irak et la Bulgarie. »

Cette base de données montre un stock mineur d’IDE russes à Chypre. De même, la présence réelle des IDE russes est beaucoup plus faible au Luxembourg, en Espagne, en Irlande, en Lettonie et aux Pays-Bas qu’officiellement enregistrée.

Les monopoles russes jouent également un rôle important dans les pays d’Eurasie, bien que plus dans certains que dans d’autres. Deux économistes russes fournissent l’évaluation suivante :

En 2014, les investissements directs étrangers russes dans l’Union économique eurasienne (EAEU [une version orientale de l’Union européenne dominée par la Russie]) s’élevaient à près de 15,4 milliards de dollars, ce qui équivaut à 4,0% du total des investissements directs étrangers russes. Ces deux chiffres ont presque doublé en deux ans (2012-2014) après la création de l’Union douanière entre la Russie, le Belarus et le Kazakhstan. Cette part modeste pour- rait être deux fois plus élevée, après avoir soustrait le chiffre d’affaires des IDE des chiffres totaux. … Le rôle des investissements russes varie selon les pays. Pour le Belarus, la Russie est le pays d’origine de 57 % du stock d’IDE entrant, tandis que Chypre et les territoires similaires sont responsables de moins de 15% de ce stock. Pour l’Arménie, l’IDE russe [est] également important (35% du stock total d’IDE entrants). Pour le Kazakhstan, la situation est inverse : les IDE d’origine russe ne représentent que 2,5% du stock total d’investissements étrangers. En revanche, la part des Pays-Bas est supérieure à 40%. De nombreuses entreprises russes sont enregistrées aux Pays-Bas ou s’arrangent [pour avoir des filiales dans ce pays] afin de mener des activités à l’étranger. De ce fait, révéler l’origine initiale des IDE néerlandais au Kazakhstan pourrait multiplier par plusieurs la part des IDE russes. Les investissements russes au Kirghizstan sont mineurs, tant en termes absolus que relatifs [23].

Les multinationales russes occupent une position dominante absolue en Ouzbékistan : 55,6% de tous les investissements étrangers proviennent de Russie, la Chine étant le deuxième investisseur (15%).

La surexploitation impérialiste via les migrations
Enfin, lorsque nous parlons de la surexploitation par la Russie des pays semi-coloniaux d’Eurasie, il est crucial de souligner également le rôle des migrations. Comme je l’ai expliqué ailleurs, celles-ci sont l’une des principales formes de surexploitation impérialiste des pays coloniaux et semi-coloniaux, car elles permettent un transfert de valeur substantiel des pays opprimés vers les pays oppresseurs [25].

La Russie impérialiste est l’un des pays qui profite de la surexploitation des migrants. En juin 2019, il y avait officiellement 10,13 millions d’étrangers en Russie [26]. La grande majorité de ces immigrants légaux (85%) proviennent des pays semi-coloniaux de la CEI en Asie centrale et en Europe de l’Est (tableau 3) [27].

Sur une population russe officielle de 146,7 millions d’habitants (2019), les migrants légaux constituent 6,9%. À ce chiffre, il faut ajouter un nombre inconnu de migrants vivant illégalement en Russie. Les estimations du nombre de migrants illégaux en Russie vont de 1,5 million à 15 millions. Plusieurs universitaires s’accordent sur le chiffre de 3 à 5 millions de migrants illégaux [28]. Si ce chiffre est exact, on peut supposer qu’environ 13 à 15 millions de migrants vivent actuellement en Russie (environ 9 à 10% de la population totale). À ces migrants légaux et illégaux, il faut ajouter un nombre inconnu de migrants provenant des colonies intérieures de la Russie. En tant qu’ancien empire, une minorité non négligeable de la population russe (environ 19%) est composée de non-Russes. Comme je l’ai souligné dans mon étude de 2014, ces minorités sont des peuples opprimés, qui vivent pour la plupart dans des conditions économiques et sociales pires que la population majoritaire. Par conséquent, beaucoup de ces minorités opprimées quittent leur lieu d’origine et s’installent dans les grandes villes – dominées par la population majoritaire russe – dans l’espoir d’y trouver un emploi.

Le tableau 4 [29] montre que les migrants (légaux) constituent une proportion non négligeable des employés dans les secteurs clés de l’économie russe. Comme dans d’autres pays impérialistes, les migrants en Russie sont surexploités en tant que main-d’œuvre bon marché. Une équipe de trois professeurs d’université russes calcule qu’«en règle générale, le salaire des migrants représente environ 70% du salaire des Russes [30] ». Ils estiment la contribution des migrants à la production de la Russie : « Sur la base du fait qu’en 2016, le PIB s’élevait à 86 044 milliards de roubles, [un] montant supplémentaire de 5 592,8 milliards de roubles a été reçu en raison de l’utilisation de la main-d’œuvre étrangère, ce qui représente 6,5% du PIB total de la Russie [31]. »
Ils citent également d’autres experts qui estiment la contribution des migrants à 7,56 % du PIB de la Russie.

Conclusions
La Russie est une puissance impérialiste. Cela ressort non seulement de ses caractéristiques politiques et militaires, mais aussi de son économie. Elle n’est ni dominée par des sociétés étrangères ni finacièrement dépendante d’institutions impérialistes étrangères. Il s’agit d’une économie relativement forte dominée par des monopoles nationaux, avec un faible niveau de dette extérieure et d’importantes réserves de change. Les capitalistes monopolistes russes – les « oligarques » – sont étroitement liés à l’appareil d’État, qui joue un rôle fort et régulateur.

L’exportation de capitaux de la Russie est dominée par ces monopoles. Ici aussi, les sociétés d’État jouent un rôle important, bien que la majorité de ces monopoles soient privés. Les investissements étrangers de la Russie sont dirigés vers les pays impérialistes ainsi que vers les pays semi-coloniaux. Naturellement, la Russie joue un rôle plus important dans les pays semi-coloniaux qui faisaient partie de l’URSS. Aujourd’hui, plusieurs de ces États sont membres de l’EAEU.

Ayant établi le caractère impérialiste de la Russie, il est à mon avis inadmissible pour les socialistes de se ranger du côté d’un tel État dans un conflit avec des rivaux de grande puissance. Soutenir la Russie dans tout conflit avec les États d’Europe occidentale, les États-Unis ou le Japon équivaut à du social-impérialisme, c’est-à-dire à servir une ou plusieurs puissances impérialistes masquées par des phrases socialistes. En revanche, les socialistes ont besoin d’une stratégie d’opposition aux grandes puissances de l’Est comme à celles de l’Ouest.

Michael Pröbsting [1] 
New Politics. Traduction Patrick Silberstein
Publié dans
Les Cahiers de l’antidote : Soutien à l’Ukraine résistante (Volume 7) :
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2022/05/24/les-cahiers-de-lantidote-soutien-a-lukraine-resistante-volume-7/

Télécharger gratuitement le livre de 104 pages : Liberté et démocratie pour les peuples d’Ukraine7
https://www.syllepse.net/syllepse_images/articles/liberte—et-de–mocratie-pour-les-peuples-dukraine7-.pdf

 

[1] Michael Pröbsting est autrichien et spécialiste de l’impérialisme. Il a notamment publié Michael Pröbsting, Anti-Imperialism in the Age of Great Power Rivalry : The Factors Behind the Accelerating Rivalry Between the U.S., China, Russia, EU and Japan, RCIT Books, 2019.
[2] Voir Michael Pröbsting, «Great Power Rivalry in the Early 21st Century», New Politics, n° 67, 2019.
[3] Voir le n° spécial de Monthly Review, «New Cold War on China», juillet-août 2021. Pour une critique de cette appréciation, voir Michael Pröbsting, «Servants of Two Masters: Stalinism and the New Cold War Between Imperialist Great Powers in East and West», 2021
[4] Pour une analyse marxiste du capitalisme chinois, voir Michael Pröbsting, «China’s Emergence as an Imperialist Power», New Politics, n° 57, 2014.
[5] Voir Michael Pröbsting, «Russia and China: Neither Capitalist nor Great Powers?», 2018; «The Catastrophic Failure of the Theory of “Catastrophism”», 2018; «Lenin’s Theory of Imperialism and the Rise of Russia as a Great Power », 2014 ; « Russia as a Great Imperialist Power : The Formation of Russian Monopoly Capital and Its Empire», 2014.
[6] Michael Pröbsting, » The Peculiar Features of Russian Imperialism : A Study of Russia’s Monopolies, Capital Export and Super-Exploitation in the Light of Marxist Theory», 2021
[7] J’ai développé ces exemples historiques dans «Anti-Imperialism in the Age of Great Power Rivalry».
[8] Lénine, « Imperialism and the Split in Socialism » (1916), dans Lénine, Collected Works, vol. 23.
[9] Voir See Stockholm International Peace Research Institute, «Armaments, Disarmament, and International Security, Summary», SIPRI Yearbook 2021, p. 15-17
[10] Andrea Murphy et col. «How the World’s Biggest Public Companies Endured the Pandemic », Forbes, 13 mai 2021.
[11] Veronika Chernova et col., «TNCs in Russia: Challenges and Opportunities», dans Bruno S. Sergi (dir.), Exploring the Future of Russia’s Economy and Markets : Towards Sustainable Economic Development, Bingley, Emerald Publishing, 2019, p. 188.
[12] Victor Gorshkov, «Fundamentals and Recent Trends in Russian Banking », dans Steven Rosefielded, Putin’s Russia : Economy, Defence and Foreign Policy, Singapour, World Scientific Publishing, 2021, p. 81.
[13] Anders Åslund et Maria Snegovaya, « The Impact of Western Sanctions on Russia and How They Can Be Made Even More Effective», The Atlantic Council, mai 2021; Anders Åslund, «The Russian Economy in Health, Oil, and Economic Crisis», mai 2020.
[14] Gabriel Di Bella et col., «The Russian State’s Size and Its Footprint: Have They Increased?», IMF Working Paper, 2 mars 2019; voir aussi «Congressional Research Service, Russia: Domestic Politics and Economy », septembre 2020 ; Alexander Abramov et col., « State- Owned Enterprises in the Russian Market: Ownership Structure and Their Role in the Economy,», Russian Journal of Economics, n° 3, 2017.
[15] Pour les tableaux cités par l’auteur, se reporter à https://newpol.org/ issue_post/russian-imperialism-and-its-monopolies.
[16] Maria Kotova, Russia’s 2021 Trade and Investment Turn to Asia, Saint- Petersbourg, Dezan Shira & Associates, 2021.
[17] Kari Liuhto, «Does Ownership Matter in an OFDI Decision of a Russian Firm? The Case of Russia’s Ten Largest Investors Abroad», dans Kari Liuhto et col. (dir.), The Russian Economy and Foreign Direct Investment, Londres, Routledge, 2017, p. 248-249.
[18] World Bank, « Russia’s Economy Loses Momentum Amidst COVID- 19 Resurgence; Awaits Relief from Vaccine», Russia Economic Report, n° 42, décembre 2019; voir aussi Maria Kotova, Russia’s 2021, op. cit.
[19] Daniel Haberly et Dariusz Wójcik, «Tax Havens and the Production of Offshore FDI: an Empirical Analysis», Journal of Economic Geography, n° 15, 2015.
[20] Kasper Brandt, «Illicit Financial Flows and the Global South. A Review of Methods and Evidence,» WIDER Working Paper 2020, décembre 2020.
[21] Haberly et Wójcik, p. 78.
[22] UNCTAD, World Investment Report 2019.
[23] Kari T. Liuhto et Saara S. Majuri, « Outward Foreign Direct Investment from Russia», Journal of East-West Business, n° 20, 2014.
[24] Elena Efimova et Vladimir Sherov-Ignatev, Russian Foreign Direct Investments in the Eurasian Economic Union, Londres, Taylor and Francis, 2016, p. 160-161.
[25] Pour mon analyse théorique des formes de surexploitation impé- rialiste, voir The Great Robbery of the South: Continuity and Changes in the Super-Exploitation of the Semi-Colonial World by Monopoly Capital. Consequences for the Marxist Theory of Imperialism, Vienne, RCIT, 2013.
[26] «Immigration to Russia», Wikipedia.
[27] N.Mkrtchyan et Y. Florinskaya, «Migration Growth: Abnormal Indices», Monitoring of the Economic Situation In Russia, Trends and Challenges of Socio-Economic Development, n° 12 (95), 2019.
[28] Yelena B. Yakovleva et col., «External Labor Migration in the Context of Marketing Research Evidence from Russia», Innovative Marketing, n° 15, 2019, p. 35.
[29] Ibid., p. 34
[30] Ibid., p. 33
[31]
Ibid., p. 35

Auteur : entreleslignesentrelesmots

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