Pourquoi la prostitution n’est pas du « travail sexuel » ?

Depuis les années 1970, un programme tactique et politique a été mis en place pour promouvoir le commerce sexuel mondial. Ce programme repose sur une redéfinition de la prostitution selon deux axes apparemment contradictoires : la promotion de la prostitution en tant que « travail normal » et la promotion des personnes prostituées en tant que minorité sexuelle. Bien que de puissants groupes d’intérêt aient dépensé beaucoup d’énergie et de moyens financiers pour faire basculer l’opinion publique sur ces deux points, la réalité est que ni l’un ni l’autre ne ses arguments ne sont vrais.
La prostitution n’est ni du sexe ni du travail.

Pourquoi la prostitution n’est pas du « sexe » ?
Le sexe est un échange mutuel de plaisir, qu’il ait lieu dans le cadre d’une relation amoureuse et engagée, d’une brève rencontre entre étrangers ou de tout ce qui se situe entre les deux. La sexualité est quelque chose que l’on partage dans un esprit de réciprocité. Ce n’est pas quelque chose de forcé, d’acheté, ou d’acquis par ruse, intimidation ou contrainte.

La pression, l’intimidation et la contrainte n’existent pas là où il y a la mutualité, mais elles se produisent tous les jours là où il y a ce qu’on appelle le « consentement ». C’est pourquoi le consentement n’est pas un bon indicateur d’une sexualité saine. C’est non le consentement mais la présence ou l’absence de mutualité qui est le facteur déterminant d’un échange sexuel psychologiquement et émotionnellement sain.

La mutualité est absente dans le contexte de la prostitution. Il n’y a pas de don et de réception sexuels qui constituent la réciprocité inhérente à un échange sexuel réellement et mutuellement consenti. Au lieu de cela, des personnes (généralement des femmes) non désireuses et non intéressées sexuellement se soumettent à des rapports sexuels non désirés exigés par d’autres personnes (presque toujours des hommes), tous les jours, généralement plusieurs fois par jour, et parce que ces rapports sexuels non désirés sont activement sollicités, ils sont définis comme étant consensuels. Le mot « consentement » crée donc une illusion ; il s’agit d’un outil linguistique qui présente à tort des violences sexuelles comme des relations sexuelles. Il est adopté par les féministes libérales et d’autres progressistes qui ne savent pas ou ne se soucient pas de savoir qu’ils approuvent des violences sexuelles commises à une échelle industrielle.

Nous devons maintenir fermement la distinction entre le sexe et la violence sexuelle, et la manière la plus claire de le faire est de maintenir fermement la distinction entre le consentement et la réciprocité. Le « consentement » existe dans la prostitution et dans de nombreuses autres violations des droits de la personne, si la capitulation par désespoir est tenue pour synonyme d’un consentement ; mais la mutualité n’existe pas dans le sexe prostitué, et le sexe prostitué est contraire à l’esprit de mutualité. La mutualité, en tant que concept, révèle donc la réalité de la nature involontaire de la prostitution. La prostitution ne constitue pas plus du sexe que le viol, car dans les deux cas, le sexe obéit à des facteurs dépourvus de réciprocité.

Nous devons maintenir fermement la distinction entre sexe et violence sexuelle, et la manière la plus claire de le faire est de maintenir fermement la distinction entre consentement et réciprocité. Le « consentement » peut exister dans la prostitution, mais pas la réciprocité.
Étant donné que la prostitution ne constitue pas un rapport sexuel mutuel, il est également absurde d’assigner aux personnes prostituées le statut de minorité sexuelle. Il s’agit toutefois d’une absurdité très bien calculée. C’est aussi une cruauté flagrante et indéfendable, compte tenu des décennies de recherche qui établissent une corrélation claire entre la prostitution et des violences sexuelles subies au cours de l’enfance.

Pourquoi la prostitution n’est pas un « travail » ?
Les termes « emploi » et « travail » ne s’appliquent pas à toutes les activités rémunérées. C’est ce que nous constatons et acceptons lorsque nous parlons des violations des droits de la personne dans d’autres domaines, par exemple dans le dossier des ateliers clandestins. Cependant, lorsque nous examinons la prostitution, nous constatons que, contrairement aux ateliers clandestins, ce ne sont pas les conditions du « travail » qui rendent l’emploi non viable, mais tous les aspects de ce qui y passe pour du travail et, au-delà, la structure même du cadre dans lequel il s’inscrit. La prostitution, en tant qu’institution, est violente en soi.

Des conditions de travail sécuritaires font partie intégrante de toute forme d’emploi, mais étant donné que l’essence même de la prostitution – et pas seulement ses conditions d’exercice ou les circonstances extérieures qui l’affectent, telles que la législation – est nuisible de multiples façons, la prostitution est une forme d’exploitation irrémédiable et n’est en aucun cas comparable à un travail réel.

La prostitution est une forme d’exploitation irrémédiable et n’est en rien comparable à un travail réel.
La prostitution ne fonctionne pas comme un emploi, si ce n’est sur le plan de la rémunération, et même dans ce cas, elle fonctionne très différemment. Une personne prostituée ne bénéficie d’aucune progression de carrière. C’est même tout le contraire. Plus une personne est expérimentée dans la prostitution, moins elle est valorisée et moins elle est payée.

Une personne qui a un emploi réel aura acquis un grand nombre de connaissances et d’expériences au cours des vingt dernières années et sera rémunérée en conséquence ; mais une personne prostituée aura également acquis un grand nombre de connaissances et d’expériences mais sera considérée comme presque sans valeur à cause de cela. Une personne qui a travaillé pendant trente ans sera à la tête de sa division ou de son organisation et s’apprête souvent à prendre sa retraite avec une pension confortable et sûre ; mais une personne qui a travaillé trente ans dans la prostitution sera considérée comme totalement sans valeur et se retrouvera sans ressources, incapable de se nourrir. La prostitution se distingue de toute autre forme d’emploi à tous les stades, y compris dans sa conclusion misérable.

La présentation de la prostitution comme un emploi normal et ordinaire s’aligne sur les convictions idéologiques des voix d’extrême gauche qui n’auront jamais à la vivre, et elle sert les intérêts des gangs de proxénètes et de trafiquants qui en profitent massivement, mais elle n’apporte absolument rien de valeur à la vie des personnes prises dans les systèmes de prostitution du monde entier.

Certains s’efforcent de présenter la prostitution comme une question de sexualité, afin qu’elle puisse être présentée comme une question de liberté sexuelle et qu’elle soit alignée sur les droits des minorités sexuelles. Ces mêmes personnes présenteront l’argument incongru selon lequel la prostitution ne devrait même pas porter son propre nom – elles prétendent qu’il s’agit d’un emploi valable et acceptable et qu’elle devrait être connue sous le nom de « travail du sexe ». En réalité, la prostitution n’est ni du sexe ni du travail, et encore moins les deux à la fois.

La prostitution n’est ni du sexe ni du travail, et encore moins les deux à la fois.
ACTION : Demandez à vos législateurs de s’opposer à la décriminalisation totale du commerce du sexe !
La présentation trompeuse de la prostitution en tant que « travail du sexe » a conduit à un soutien accru pour des politiques nuisibles qui décriminalisent le proxénétisme, l’achat de services sexuels et la tenue de maisons closes. De telles politiques nuiraient aux survivantes et élargiraient le marché de la prostitution. Aidez vos législateurs et législatrices à comprendre la véritable nature de la prostitution et exhortez-les à s’opposer à la décriminalisation totale du commerce du sexe !
Contactez vos élus locaux pour qu’ils s’opposent à la décriminalisation totale du commerce du sexe :
Opposons-nous à la décriminalisation totale de la prostitution et protégeons les survivantes du commerce du sexe, et NON à celle des proxénètes, tenanciers de maisons closes et acheteurs de sexe!

Rachel Moran, 11 aout 2023
Rachel Moran a signé aux Éditions LIBRE l’essai biographique L’enfer des passes.
National Center on Sexual Exploitation
Traduction : TRADFEM
Version originale de ce texte :
https://endsexualexploitation.org/articles/why-prostitution-is-not-sex-work/

De l’autrice :
L’enfer des passes, de Rachel Moran [compte rendu]
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2023/05/16/lenfer-des-passes-de-rachel-moran-compte-rendu/
Rachel Moran : La réalité de la prostitution n’est pas complexe. Elle est très simple
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2022/07/10/la-realite-de-la-prostitution-nest-pas-complexe-elle-est-tres-simple/
Sandrine Goldschmidt : Rachel Moran : « l’expression ‘travailleuse du sexe’ est une arme rhétorique pour normaliser la prostitution »
Sandrine Goldschmidt : L’Enfer des passes
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2021/12/16/lenfer-des-passes/

Auteur : entreleslignesentrelesmots

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