Le livre de Guillermo Almeyra débute par une présentation des modifications induites par la mondialisation (état, dette extérieure, chômage, nationalisme, religiosité, relations entre groupes sociaux). Les processus en Argentine sont donc mis en relation avec les formes actuelles d’organisation économiques, sociales et politiques.
Au centre de la démarche, des réflexions approfondies, sur l’autogestion, l’autonomie des mouvements sociaux, la construction des sujets et l’auto-organisation, permettent à l’auteur de nous présenter une histoire non linéaire, des pistes pour comprendre les succès, les carences des avancées sociales et politiques.
Les luttes en argentine sont confrontées avec les expériences équatorienne, bolivienne, zapatiste ou du MST du Brésil et aussi à d’autres expériences plus anciennes comme celles de l’Algérie de Ben Bella ou de la Pologne de Solidarnosc.
Des discutions sont ouvertes avec Holloway et le sous-commandant Marcos sur le pouvoir, avec Gramsci sur l’hégémonie.
Les acteurs et leurs modes d’organisation, (piqueteros, cartoneros, associations de voisins, femmes agricultrices, etc.) les émergences de nouvelles sociabilités sont scrutées sans cacher des tendances régressives qui peuvent s’y mêler (mysticisme, violence…).
L’auteur insiste particulièrement sur les expériences de remises en route d’usines : les ouvriers sans patrons « Occuper, résister, produire » et analyse la portée et les limites du mot d’ordre « Qu’ils s’en aillent tous ! ».
Une lecture stimulante mêlant histoire, analyses et réflexions dans la recherche d’une sortie émancipatrice à la catastrophe qui frappe le sous-continent.
Cette lecture peut être complétée par l’ouvrage de Hugo Moreno paru en 2005 « Le désastre argentin – Péronisme, politique et violence sociale (1930-2001) chez le même éditeur et par celui de François Chesnais et Jean Philippe Divès « Que se vayan todos ! – Le peuple d’Argentine se soulève » chez Nautilus (2002).
Guillermo ALMEYRA : Rébellions d’Argentine, Tiers état, luttes sociales et autogestion
Editions Syllepse, Paris 2006, 254 pages, 22 euros
Didier Epsztajn